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Poésie

Posts Tagged ‘renverse’

Un mot encore (Robert Momeux)

Posted by arbrealettres sur 21 juillet 2021



Un mot encore

Je t’aime.

Ce matin il n’y a plus de fleurs.
Le ciel s’est renversé.
Les statues sont mortes une seconde fois.
O destin !
Malheureux destin !

Il me reste tes mains que je ne puis baiser.
Je marche vers cet horizon qui bouge,
on dirait des rameurs.
Le vent qui s’est levé fait battre des coeurs
dans le frémissement des arbres.
Mais personne ne sait que je t’ai attendue.
Pourtant j’ai patienté si longtemps, les rues étaient très sombres.
Au couchant les peupliers devenaient roses
et mon enfance s’est toute entière
passée derrière ces meules de froid dures et noires.
C’est comme des vendanges qu’on n’oserait plus faire.
A présent, tu es là pour quelques instants encore.

Ensuite, ce sera à nouveau cette angoisse
qui pèse plus lourd que toutes les tristesses.
Des fenêtres s’allumeront encore
mais nous savons bien qu’il reste peu d’espoir.

Je t’aime.

Il me reste tes mains que je voudrais briser.
La vie ce serait d’être autre chose que ce fantôme malhabile.
Ces bulles légères qui éclatent sont des rêves qui n’ont pas su.
En avons-nous rencontré de ces errants splendides !
Des nappes de musique déferlent
et rien ne reste qu’une petite lampe qui clignote dans la brume.

Des enfants marchent dans les sentiers pleins d’ombre.
On sait bien qu’ils n’atteindront pas le but, pourtant une ardente nostalgie les mène.
Peut-être qu’ils iront où nous n’avons pas su aller.

(Robert Momeux)

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La petite fille (Bernard Montini)

Posted by arbrealettres sur 5 mars 2021



La petite fille,
au visage renversé sous la nappe pleine de nuit,
garde ses yeux intacts.
Dédicace de nos aurores.

(Bernard Montini)

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Tout tourne (Janine Tavernier)

Posted by arbrealettres sur 6 avril 2019



Mitsuo Shiraishi  MANEGE_ROUGE--2270_1 

Tout tourne
c’est la ronde qui tourne
sourire de femme
fauteuil rouge
tourne moulin moulin rouge
ta présence mille
ton absence une
Tourne mon présent renversé sur mon passé
comme un couvercle sur un plat vide
Le monde tourne
mon coeur tourne
Une étoile fixe
mon espoir

(Janine Tavernier)

Illustration: Mitsuo Shiraishi

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Qu’il serait bon que ma vie soit un char à boeufs (Fernando Pessoa)

Posted by arbrealettres sur 14 mars 2019



Qu’il serait bon que ma vie soit un char à boeufs
Qui vient en grinçant, de bon matin, de par la route.
Et vers l’endroit d’où il est venu s’en retourne plus tard
Presque à la brune de par la même route.
Oui, je n’aurais pas à avoir de l’espoir –
je n’aurais qu’à avoir des roues…
Ma vieillesse n’aurait rides ni cheveux blancs…
Et quand je ne servirais plus à rien,
on m’enlèverait les roues
Et je resterais renversé et cassé
au fond d’un ravin.

(Fernando Pessoa)

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Faut-il vraiment tant de danger (Rainer Maria Rilke)

Posted by arbrealettres sur 22 novembre 2018




    
Faut-il vraiment tant de danger
à nos objets obscurs ?
Le monde serait-il dérangé,
étant un peu plus sûr ?

Petit flacon renversé,
qui t’a donné cette mince base ?
De ton flottant malheur bercé,
l’air est en extase.

(Rainer Maria Rilke)

Recueil: Oeuvres 2 Poésie
Traduction: Jacques Legrand, Lorand Gaspar, Philippe Jaccottet, Armel Guerne, Maurice Betz
Editions: Seuil

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Bleu (Hadassa Tal)

Posted by arbrealettres sur 9 septembre 2018



    

Bleu
(Extraits)

Un colibri
enflamme
les ombres bleues en secret
ne siffle qu’une fois
et sombre
à la renverse
devant moi

*

Les langues du vent sont douces sur les joues de l’oiseau

*

Dans la verdure d’un cyprès
le soleil verse
ses rayons

Un colibri rame sur une feuille de géranium
minuscule comme
pour se poser
dans la paume
d’un
enfant

(Hadassa Tal)

 

Recueil: L’Ardeur ABC poétique du vivre plus
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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PROSTRÉS (José Ángel Valente)

Posted by arbrealettres sur 4 août 2018




PROSTRÉS pendant
qu’au-dessus le rayon non visible
S’enveloppe de ténèbres.

Troupeau aveugle
d’animaux obscurs
renversés dans la boue.

Qui viendra du haut
avec des fragments de vent
te donner nom ?

***

POSTRADOS mientras
arriba el rayo no visible
se envuelve en la tiniebla.

Manada ciega
de animales oscuros
volcados sobre el barro.

¿ Quién vendrá de lo alto
con fragmentos de viento
a darte nombres ?

(José Ángel Valente)

Illustration: Salvador Dali

 

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ET D’UN AUTOMNE ENCORE (René Guyomard)

Posted by arbrealettres sur 25 juillet 2018



ET D’UN AUTOMNE ENCORE

Nous avions oublié les ruines de l’automne
Les grands châteaux du soir emportés dans le ciel
Les chevaux dénoués l’écume flagellée
Et la bête mourant dans l’ornière luisante

Nous avions oublié sous ces mains de fougère
L’âcre odeur on ne sait d’hier ou de demain

Nous avions oublié sentinelle de brume
Sur les confins de terres vaines le chasseur
Qui va percer au coeur le dimanche immobile

Nous avions oublié les vitres sans chemin
Où brodent pour nos fronts la buée et le songe
Sur un sable plus blanc les barques renversées
Et le temps se parlant dans sa langue d’aïeul

Nous avions oublié cette flamme dernière
De l’arbre du regard de la mer et du jour
Et le doigt patient qui tisse maille à maille
Une cage de vide autour d’un oiseau mort.

(René Guyomard)

Illustration: ArbreaPhotos

 

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VOLUPTÉ (Pierre Louÿs)

Posted by arbrealettres sur 18 juillet 2018



Illustration: Philippe Zacharie
    
VOLUPTÉ

Sur une terrasse blanche, la nuit, ils nous laissèrent évanouies dans les roses.
La sueur chaude coulait comme des larmes, de nos aisselles sur nos seins.
Une volupté accablante empourprait nos têtes renversées.

Quatre colombes captives, baignées dans quatre parfums, voletèrent au-dessus de nous en silence.
De leurs ailes, sur les femmes nues, ruisselaient des gouttes de senteur. Je fus inondée d’essence d’iris.

Ô lassitude! je reposai ma joue sur le ventre d’une jeune fille qui s’enveloppa de fraîcheur avec ma chevelure humide.
L’odeur de sa peau safranée enivrait ma bouche ouverte. Elle ferma sa cuisse sur ma nuque.

Je dormis, mais un rêve épuisant m’éveilla : l’iynx, oiseau des désirs nocturnes, chantait éperdument au loin.
Je toussai avec un frisson. Un bras languissant comme une fleur s’élevait peu à peu vers la lune, dans l’air.

(Pierre Louÿs)

 

Recueil: Les chansons de Bilitis
Traduction:
Editions: Gallimard

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LE PAYS FROID (André Pieyre de Mandiargues)

Posted by arbrealettres sur 1 juillet 2018



 

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LE PAYS FROID

Parlez plus haut l’hiver nous assourdit
Les bruits des pas que l’on entendait hier
Au bord du lac gelé
Ne sonnent plus que dans le souvenir
Et notre vie devient une habitude triste
Derrière la paroi des vitres blanches.

La neige tombe depuis bien des semaines
Le charbon le café diminuent tous les jours
Chaque jour s’amoindrit
Le lendemain toujours est pire que la veille.

Notre mémoire même égare les réponses.

La faim le froid chassent les cerfs hors des bois
Jusque dans les rues du village
L’un s’est couché devant la croix
Bouche bée la tête à la renverse
Fauve image de notre amour.

Avez-vous entendu crier les loups le soir
Quand ils viennent rôder autour des étables ?
Sous la haute cheminée le feu languit
Le chien nous regarde avec tant d’indulgence
Avec tant de pitié
Que notre coeur se serre.

Nul ne balayera les marches de l’entrée.

L’hiver s’accroît comme un jeune géant
La neige tombe le givre s’épaissit
Et nous vieillissons à mesure.

Parlez bas il n’est plus besoin de nous entendre
Bientôt l’homme de pierre ouvrira le chemin.

(André Pieyre de Mandiargues)

Illustration: ArbreaPhotos
 

 

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