{Refrain:}
Donne du rhum à ton homme
Du miel et du tabac
Donne du rhum à ton homme et tu verras comme
Il t´aimera.
Y a des filles sur le port
Si belles et si gentilles
Tout sourire dehors
Sentant bon la vanille
Et ton homme n´est pas de bois
Il les regarde d´un œil tendre
Si tu veux le garder pour toi
Donne donne-lui sans attendre.
{au Refrain}
Il te donnera des bijoux
Des colliers qui scintillent
Qu´il ramène du Pérou
De Cuba des Antilles
Mais pour te donner de l´amour
Faut qu´il se repose du voyage
Avant de lui offrir à ton tour
Tous les trésors de ton corsage
{au Refrain}
Quelle nuit que cette nuit-là
On en parle dans la ville
Même on exagérera
Sa tendresse virile
Car pour l´heure il est fatigué
Il sombre dans la somnolence
Dès que tu l´auras réveillé
Si tu veux que ça recommence.
{au Refrain}
Quand il va repartir
Te laissant pauvre fille
Seule avec le souvenir
Et le collier de pacotille
Au moment de vous séparer
Pour des mois de longues semaines
Donne-lui bien sûr des baisers
Mais si tu veux qu´il te revienne
Mais si tu veux qu´il te revienne
{au Refrain}
Ôtez donc de mon visage ce drapeau : ça me chatouille !
Ensevelissez dedans mon chat ensevelissez-le là-bas
où se trouvait mon jardin chromatique.
Ôtez donc de ma poitrine cette couronne de fer-blanc :
ça bat la breloque !
Foutez-la sur le stock de statues en vrac
et donnez les rubans aux putains qu’elles s’en parent.
Dites des prières au téléphone mais coupez le fil,
ou bien enveloppez-les dans un mouchoir avec des miettes de pain
et jetez-les dans l’étang à ces crétins de poissons.
Que l’évêque reste chez lui et se soûle
Qu’on lui donne un barillet de rhum,
prêcher donne soif.
Et fichez-moi la paix avec vos monuments et vos huit reflets !
de ce beau marbre pavez une ruelle inhabitée
une ruelle pour oiseaux.
(Hans Magnus Enzensberger)
Recueil: Mausolée
Traduction: Maurice Regnaut et Roger Pillaudin
Editions: Gallimard
L’homme ressemble à un homme qui se lève tard
Contemple l’assiette sale de son dîner
Aussi les bouteilles vides
Toutes lampées dans les larges comment vas-tu d’une nuit
Un verre pourtant contenant encore
Un fond comme sinistre appât
Combien l’Homme ressemble à celui-là
Titubant parmi les arbres rouillés
Allant chercher un déjeuner de pois de sardines
Et de rhum éventé.
***
Eye-Opener
How like a man, is Man, who rises late
And gazes on his unwashed dinner plate
And gazes on the bottles, empty too,
All gulphed in last night’s loud long how-do-you-do,
—Although one glass yet holds a gruesome bait—
How like to Man is this man and his fate—
Still drunk and stumbling through the rusty trees
To breakfast on stale rum sardines and peas.
La rumba
remue sa musique épaisse
avec un bâton,
gingembre et cannelle…
Mauvais !
Mauvais car maintenant viendra le nègre mec
avec Fela.
Poivre de la hanche
croupe flexible et dorée
rumbera bonne
rumbera mauvaise.
Dans l’eau de ta robe de chambre
toutes mes angoisses naviguent :
rumbera mauvaise
rumbera bonne.
Désir ardent de naufrager
dans cette mer tiède et profonde :
fond
de la mer !
Ton pied tresse avec la musique
le noeud qui m’étreint le plus.
Ressac de toile blanche
sur ta chair couleur de blé.
Démence du bas-ventre,
haleine de bouche sèche ;
le rhum qui t’a émerveillée,
le mouchoir en guise de rênes :
je t’attraperai domptée,
te verrai bien assujettie
quand tu fuis comme maintenant
que vers ma tendresse tu viennes
rumbera
bonne
O vers ma tendresse que tu ailles,
rumbera
mauvaise !
L’attente ne sera pas longue,
rumbera
bonne,
ni éternelle la bacha
rumbera
mauvaise
elle te fera mal la hanche
rumbera
bonne
hanche dure et qui a sué,
rumbera
mauvaise…
Dernière
gorgée !
Va-t-en, cours, allons-nous en…
Allons !
Des Vénus en flammes de punch
Frottaient la biguine créole
Leur doux contact a fait dresser
— O Blomet Street — des auréoles
Sur nos espoirs à caresser.
Des sergents de la Coloniale,
Des Hollandais, volants ou non,
Mussieu Poulet crack des Antilles
Et la corolle fleurant bon
Quand la nuit s’offrit aux vanilles
Il tombait le beau temps des Iles
Sur les pentes du rhum glacé !
Enseigne : Aux vahinés tranquilles »
Puis la clarinette a lancé
Son chant au sommeil des Marquises.
Mais, insensible à ces mirages,
Derrière son zinc, le patron
Surveillait la consommation :
Quand on a patente et façade
Faut penser à la limonade.
Nous, on s’est cassé dans la nuit
Citant Arthur et le grand Charles.
Très loin un sourire a pâli :
Le tien, qui sait ? — toi dont je parle,
Sans te connaître, au ciel du lit.