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Posts Tagged ‘salaire’

LE PRESTIDIGITATEUR (Jean Tardieu)

Posted by arbrealettres sur 17 avril 2019




    
LE PRESTIDIGITATEUR

Je ne crois à rien à personne
sinon au petit magicien des bals d’enfants d’autrefois
le prestidigitateur miteux et blême
au visage ridé sous le fard.
Son haut-de-forme posé à l’envers sur un guéridon
il le recouvre d’un foulard rouge
et soudain
il le retire et voyez ce qu’il sort du chapeau :
un oeuf un lapin un drapeau
un oiseau ma vie et la vôtre et les
morts il les cache dans la coulisse
pour un piètre
SALAIRE.

(Jean Tardieu)

 

Recueil: L’accent grave et l’accent aigu
Traduction:
Editions: Gallimard

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L’OUVRAGE (Alexandre Pouchkine)

Posted by arbrealettres sur 19 décembre 2018




    
L’OUVRAGE

L’heure tant attendue est venue : terminé, l’ouvrage de tant d’années.
D’où vient alors cette étrange tristesse qui me tenaille en secret ?
Ou, l’exploit réalisé, serais-je comme l’ouvrier inutile
étranger à toute entreprise une fois le salaire reçu ?
Vais-je regretter ce travail, compagnon silencieux des nuits,
ami de l’Aurore aux doigts d’or et de pénates sacrées ?

***

(Alexandre Pouchkine)

 

Recueil: L’heure de la nuit Poèmes
Traduction: Christiane Pighetti
Editions: De la Différence

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Dans la nuit qui finit (Pierre Béarn)

Posted by arbrealettres sur 21 novembre 2018



Dans la nuit qui finit l’usine est une étoile
Mitez-vous ô mes moucherons !
Courons, ô ma raideur, sur les pavés bossus
avec la main sur la musette
pour empêcher la vinaigrette
de corrompre en flic-floc mon repas suspendu

Gueule du métro chaude où l’on plonge enfiévrés
Bus et tramways que l’on submerge
— Accours et cours ! l’usine héberge ! —
Camions de brume où l’on s’entasse en étrangers.
Cadrans de pointage au giron
l’usine vous attend au centre de sa toile.

La sirène en serpent furieux se raidissant
s’élance ! Hâtez-vous travailleurs !
elle sera sur les rumeurs
tête coupée bientôt jet de sang s’affaissant.

Au déboulé, garçon, pointe ton numéro
pour gagner ainsi le salaire
d’un morne jour utilitaire
métro, boulot, bistro, mégots, dodo, zéro.

(Pierre Béarn)

Illustration

 

 

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Manoeuvres (Valérie Rouzeau)

Posted by arbrealettres sur 29 avril 2018



 chomeurs [1280x768]

 

Manoeuvres

A l’étroit les trois huit
Virés salaires de rien
Micheline Michelin
Padradis pour demain

Allez toi va t’en vite
Virée ça l’air de rien
Micheline Michelin
On te remercie bien

(Valérie Rouzeau)

Découvert chez la boucheaoreilles ici

 

 

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Dans mon métier, mon art morose (Dylan Thomas)

Posted by arbrealettres sur 6 janvier 2018



Dans mon métier, mon art morose
exercé dans la nuit silencieuse
quand la lune seule fait rage
quand les amants sont étendus
avec toutes leurs douleurs dans les bras,
je travaille, à la lumière du chant,
non par ambition ou pour mon pain
ni pour le semblant, ni par commerce
de charmes sur des scènes d’ivoire
mais pour le salaire ordinaire
du profond secret de leurs coeurs.
Ni pour le prétentieux, ignorant
la lune qui fait rage, j’écris
sur ces pages mouillées d’embrun,
ni pour les morts trop hauts
avec leurs rossignols et leurs psaumes
mais pour les amants, leurs bras
enlaçant les chagrins du Temps,
qui n’accordent ni attention, ni salaire
ni éloge à mon métier, mon art morose.

***

In my craft or sullen art
Exercised in the still night
When only the moon rages
And the lovers lie abed
With all their griefs in their arms,
I labour by singing light
Not for ambition or bread
Or the strut and trade of charms
On the ivory stages
But for the common wages
Of their most secret heart.
Not for the proud man apart
From the raging moon I write
On these spindrift pages
Nor for the towering dead
With their nightingales and psalms
But for the lovers, their arms
Round the griefs of the ages,
Who pay no praise or wages
Nor heed my craft or art.

(Dylan Thomas)


 

 

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LE LOUP ET LA CIGOGNE (Jean de la Fontaine)

Posted by arbrealettres sur 9 août 2017



 

LE LOUP ET LA CIGOGNE

Les Loups mangent gloutonnement.
Un Loup donc étant de frairie
Se pressa, dit-on, tellement
Qu’il en pensa perdre la vie.
Un os lui demeura bien avant au gosier.
De bonheur pour ce Loup, qui ne pouvait crier,
Près de là passe une Cigogne.
Il lui fait signe, elle accourt.
Voilà l’Opératrice aussitôt en besogne.
Elle retira l’os ; puis pour un si bon tour
Elle demanda son salaire.
« Votre salaire ? dit le Loup :
Vous riez, ma bonne commère !
Quoi ? ce n’est pas encor beaucoup
D’avoir de mon gosier retiré votre cou ?
Allez, vous êtes une ingrate :
Ne tombez jamais sous ma patte. »

(Jean de la Fontaine)

Illustration: Marc Chagall

 

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LE CURÉ ET LE MORT (Jean de la Fontaine)

Posted by arbrealettres sur 9 août 2017



 

LE CURÉ ET LE MORT

Un mort s’en allait tristement
S’emparer de son dernier gîte ;
Un Curé s’en allait gaiement
Enterrer ce mort au plus vite.
Notre défunt était en carrosse porté,
Bien et dûment empaqueté,
Et vêtu d’une robe, hélas ! qu’on nomme bière,
Robe d’hiver, robe d’été,
Que les morts ne dépouillent guère.
Le Pasteur était à côté,
Et récitait à l’ordinaire
Maintes dévotes oraisons,
Et des psaumes et des leçons,
Et des versets et des répons :
« Monsieur le Mort, laissez-nous faire,
On vous en donnera de toutes les façons ;
Il ne s’agit que du salaire. »
Messire Jean Chouart couvait des yeux son mort,
Comme si l’on eût dû lui ravir ce trésor,
Et des regards semblait lui dire :
« Monsieur le Mort, j’aurai de vous
Tant en argent, et tant en cire,
Et tant en autres menus coûts. »
Il fondait là-dessus l’achat d’une feuillette
Du meilleur vin des environs ;
Certaine nièce assez propette
Et sa chambrière Pâquette
Devaient voir des cotillons.
Sur cette agréable pensée
Un heurt survient, adieu le char.
Voilà Messire Jean Chouart
Qui du choc de son mort a la tête cassée :
Le Paroissien en plomb entraîne son Pasteur ;
Notre Curé suit son Seigneur ;
Tous deux s’en vont de compagnie.

Proprement toute notre vie ;
Est le curé Chouart, qui sur son mort comptait,
Et la fable du Pot au lait.

(Jean de la Fontaine)

Illustration: Marc Chagall

 

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LA VIEILLE ET LES DEUX SERVANTES (Jean de la Fontaine)

Posted by arbrealettres sur 9 août 2017



 

LA VIEILLE ET LES DEUX SERVANTES

Il était une vieille ayant deux Chambrières.
Elles filaient si bien que les soeurs filandières
Ne faisaient que brouiller au prix de celles-ci.
La Vieille n’avait point de plus pressant souci
Que de distribuer aux Servantes leur tâche.
Dès que Téthis chassait Phébus aux crins dorés,
Tourets entraient en jeu, fuseaux étaient tirés ;
Deçà, delà, vous en aurez ;
Point de cesse, point de relâche.
Dès que l’Aurore, dis-je, en son char remontait,
Un misérable Coq à point nommé chantait.
Aussitôt notre Vieille encor plus misérable
S’affublait d’un jupon crasseux et détestable,
Allumait une lampe, et courait droit au lit
Où de tout leur pouvoir, de tout leur appétit,
Dormaient les deux pauvres Servantes.
L’une entr’ouvrait un oeil, l’autre étendait un bras ;
Et toutes deux, très malcontentes,
Disaient entre leurs dents : « Maudit Coq, tu mourras. »
Comme elles l’avaient dit, la bête fut grippée.
Le réveille-matin eut la gorge coupée.
Ce meurtre n’amenda nullement leur marché.
Notre couple au contraire à peine était couché
Que la Vieille, craignant de laisser passer l’heure,
Courait comme un Lutin par toute sa demeure.
C’est ainsi que le plus souvent,
Quand on pense sortir d’une mauvaise affaire,
On s’enfonce encor plus avant :
Témoin ce Couple et son salaire.
La Vieille, au lieu du Coq, les fit tomber par là
De Charybde en Scylla.

(Jean de la Fontaine)

Illustration: Marc Chagall

 

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Pendant que vous lisez ce poème (Tahar Ben Jelloun)

Posted by arbrealettres sur 5 août 2017



Illustration: Philippe Cognée
    
Pendant que vous lisez ce poème
Combien d’êtres rendent l’âme
Et combien voient le jour?
Combien de cris de joie
Combien de larmes et d’yeux fermés sur le silence?
Combien sont-ils à faire l’amour et d’autres rêvent de voyage
Combien attendent le coucher du soleil
Pour toucher un salaire misérable et acheter du riz ou du pain ?
Dites-vous que vous n’êtes pas seul
Et pourtant plus la population augmente
Plus l’angoisse repue ruisselle dans notre gorge
Car la solitude rôde et menace

(Tahar Ben Jelloun)

 

Recueil: Que la Blessure se ferme
Editions: Gallimard

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LE BAISER (François-Benoît Hoffmann)

Posted by arbrealettres sur 4 juillet 2017



 

 Illustration: Jean-Honoré Fragonard
    
LE BAISER

Sur le gazon, dans la prairie,
Lycas, au déclin d’un beau jour,
Demandait à sa douce amie
Le salaire de son amour.

Elle se tait : c’est faire entendre
Que son ami peut tout oser.
Lycas aimait d’amour bien tendre :
Il se contenta d’un baiser.

volupté, bonheur suprême !
Combien leurs cœurs furent émus !
Un baiser vaut mieux quand on aime
Que tout sitôt qu’on n’aime plus.

Couple charmant, dans ton délire.
Garde-toi bien de tout oser ;
Ce doux moment doit te suffire :
On est heureux par un baiser.

Mais plein du feu qui le dévore,
Lycas heureux et non content,
Se plaint, demande et veut encore.
Hélas ! nous en ferions autant.

De Chloris l’œil humide et tendre
Lui dit qu’il peut encore oser :
Mais cette fois ce qu’il sut prendre
Ne se nomme pas un baiser.

Depuis ce jour, j’entends la belle
Dire partout avec douleur,
Que son Lycas est infidèle,
Qu’il l’abandonne à son malheur.

Je plains l’ennui qui te dévore !
Mais, hélas ! pourquoi tout oser ?
Ton Lycas t’aimerait encore
S’il n’avait reçu qu’un baiser.

Et vous, si près d’une maîtresse
Vous sentez croître le désir,
Ah ! prolongez sa douce ivresse,
Sachez qu’attendre c’est jouir.

Malgré le feu qui vous dévore,
Gardez-vous bien de tout oser ;
Vous aimerez demain encore
Si vous n’obtenez qu’un baiser.

(François-Benoît Hoffmann)

 

Recueil: Poètes du Baiser
Editions: Société des Éditions LOUIS-MICHAUD

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