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Posts Tagged ‘s’attrister’

Je t’aime, ô mon amour ! ô toi qui me ressembles! (Georges Rodenbach)

Posted by arbrealettres sur 10 juin 2020



Je t’aime, ô mon amour ! ô toi qui me ressembles!
Pauvre coeur inquiet qu’aucun bonheur n’emplit,
Missel enluminé qui s’attriste d’un pli,
Forêt d’où sort la plainte éternelle des trembles !

Je t’aime, ô ma beauté, puisque ton sort est tel
Que tu rêves d’amour en sachant que je t’aime,
Toi qui, pareille à moi, te tourmentes toi-même
En sentant fugitif ce qu’on rêve immortel.

Toi pour qui le présent est une source en fuite
Où, parmi l’eau qui souffre, on se mire un moment,
Tu comprends que je pleure, inconsolablement,
Le passé triste et cher comme un pays qu’on quitte.

Je t’aime, ô mon amour ! ô mon ombre ! ô ma soeur !
Il semble – tant notre âme a la même chimère —
Que nous avons jadis aimé la même mère
Et du même baiser partagé la douceur !

Je t’aime, ô mon amour, parce que l’un et l’autre
L’infini nous sépare ainsi qu’un noir témoin,
Puisque, même enlacés, nous nous sentons si loin
Sans jamais pouvoir faire un seul coeur qui soit nôtre !

Car nous sommes pareils à des miroirs jumeaux
Où tout se mire et luit d’identique manière,
Mais l’ombre de la nuit absorbe la lumière
Et nous nous sentons loin dans l’exil des trumeaux.

O coeur semblable au mien — coeur profond qui m’évoques
Un ciel d’automne, un ciel maladif et changeant
Où fleurit, parmi les nuages voyageant,
Toute une floraison d’étoiles équivoques !

(Georges Rodenbach)

Illustration: Lauri Blank

 

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C’était un soir de féeries (Francis Vielé-Griffin)

Posted by arbrealettres sur 18 septembre 2019



 

Ettore Aldo Del Vigo -   (93)

C’était un soir de féeries,
De vapeurs enrubannées,
De mauve tendre aux prairies,
En la plus belle de tes années,

Et tu disais — écho de mon âme profonde, —
Sous l’auréole qui te sacre blonde
Et dans le froissement rythmique de soies :
« Tout est triste de joies ;
Quel deuil emplit le monde ?
Tout s’attriste de joies ».

Et je t’ai répondu, ce soir de féeries
Et de vapeurs enrubannées :
« C’est qu’en le lourd arôme estival des prairies,
Seconde à seconde,
S’effeuille la plus belle de tes années ;
Un deuil d’amour est sur le monde
De toutes les heures sonnées ».

(Francis Vielé-Griffin)

Illustration: Ettore Aldo Del Vigo

 

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Apparition (Stéphane Mallarmé)

Posted by arbrealettres sur 21 mai 2019



 

Bogdan Prystrom 3040

Apparition

La lune s’attristait. Des séraphins en pleurs
Rêvant, l’archet aux doigts, dans le calme des fleurs
Vaporeuses, tiraient de mourantes violes
De blancs sanglots glissant sur l’azur des corolles.
— C’était le jour béni de ton premier baiser.
Ma songerie aimant à me martyriser
S’enivrait savamment du parfum de tristesse
Que même sans regret et sans déboire laisse
La cueillaison d’un Rêve au coeur qui l’a cueilli.
J’errais donc, l’oeil rivé sur le pavé vieilli
Quand avec du soleil aux cheveux, dans la rue
Et dans le soir, tu m’es en riant apparue
Et j’ai cru voir la fée au chapeau de clarté
Qui jadis sur mes beaux sommeils d’enfant gâté
Passait, laissant toujours de ses mains mal fermées
Neiger de blancs bouquets d’étoiles parfumées.

(Stéphane Mallarmé)

Illustration: Bogdan Prystrom

 

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POÈME D’AUTOMNE (Liu Yuxi)

Posted by arbrealettres sur 19 octobre 2018



cigogne [800x600]

POÈME D’AUTOMNE

Depuis toujours à l’approche de l’automne
On s’attriste de la solitude
Pour moi, l’automne est plus radieux que le printemps
Une cigogne sillonne le ciel limpide
Au-dessus des nuages
Son lyrisme file jusqu’aux cieux émeraude

(Liu Yuxi)

Illustration

 

 

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La mémoire (Hubert Juin)

Posted by arbrealettres sur 30 juillet 2018



 

Jean ABabadie   le pain quotidien 80x80cm-800 [1280x768]

La mémoire convoque une contrée d’où la parole était absente.
Les gens paraissaient dans un vêtement de gestes.
[…]
Eux, ils passent le dos de la main sur leurs lèvres, après boire.
Ou bien, ils sont au cimetière, devant les tombeaux, debout, la tête découverte.
Le ciel est gris pommelé, c’est le Jour des Morts.

Maintenant ils rentrent les foins, et les chariots brinquebalent le long du chemin
et abandonnent des poignées d’herbe sèche aux griffes des grands arbres qui sont au bord.
Tu les revois, qui rient ou s’attristent, mais ils miment, ils ne parlent pas.

(Hubert Juin)

Illustration: Jean Ababadie 

 

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Tu es dans les sanglots (Max-Pol Fouchet)

Posted by arbrealettres sur 24 mai 2018



Fuyuko Matsui 000

Tu es dans les sanglots, tu es dans la prière
Les jours pour toi sont navires sur l’eau
L’amitié les ancres le pain les carènes
La musique les équipages les livres d’écume
Tu t’attristes pour moi qui ne sais que des mots.

(Max-Pol Fouchet)

Illustration: Fuyuko Matsui

 

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ENVOI (Guy Goffette)

Posted by arbrealettres sur 24 avril 2018




    
ENVOI

Cе qui manque sans cesse aux mortels,
ce trou dans l’air entre les choses

où le regard s’échappe, s’assombrit ou
s’attriste, voici qu’il prend soudain

la mesure de notre soif en entendant
prononcer à voix basse le mot

jardin, et tout s’éclaire désormais
comme si la fontaine en nous muette

depuis tant d’années avait retrouvé
sa source et coulait ronde et paisible

sur nos joues.

(Guy Goffette)

 

Recueil: L’adieu aux lisières
Traduction:
Editions: Gallimard

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Je trouve si naturel que l’on ne pense pas (Fernando Pessoa)

Posted by arbrealettres sur 3 février 2018




Illustration: ArbreaPhotos
    
Je trouve si naturel que l’on ne pense pas
que parfois je me mets à rire tout seul,
je ne sais trop de quoi, mais c’est de quelque chose
ayant rapport avec le fait qu’il y a des gens qui pensent…

Et mon mur, que peut-il bien penser de mon ombre ?
Je me le demande parfois, jusqu’à ce que je m’avise
que je me pose des questions…
Alors je me déplais et j’éprouve de la gêne
comme si je m’avisais de mon existence avec un pied gourd…

Qu’est-ce que ceci peut bien penser de cela ?
Rien ne pense rien.
La terre aurait-elle conscience des pierres et des plantes qu’elle porte ?
S’il en est ainsi, eh bien, soit !
Que m’importe, à moi ?
Si je pensais à ces choses,
je cesserais de voir les arbres et les plantes
et je cesserais de voir la Terre,
pour ne voir que mes propres pensées…
Je m’attristerais et je resterais dans le noir.
Mais ainsi, sans penser, je possède et la Terre et le Ciel.

(Fernando Pessoa)

Découvert ici: https://frogsblog7.wordpress.com/

 

Recueil: Le Gardeur de troupeaux et les autres poèmes d’Alberto Caeiro
Traduction: Armand Guibert
Editions: Gallimard

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Pu-sa-man (Li Bo)

Posted by arbrealettres sur 28 janvier 2018



Illustration   
    
Pu-sa-man

Ruban d’arbres, tissé de brumes diffuses
Ceinture de montagnes à l’émeraude nostalgie
Le soir pénètre le pavillon :
Quelqu’un s’attriste, là-haut

Vaine attente sur le perron
Les oiseaux se hâtent au retour
Est-il donc voie de retour pour les humains ?
Tant de kiosques le long des routes, de loin en loin

(Li Bo)

 

Recueil: L’Ecriture poétique chinoise
Traduction: François Cheng
Editions: du Seuil

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Ce qui manque sans cesse aux mortels (Guy Goffette)

Posted by arbrealettres sur 26 octobre 2017




Ce qui manque sans cesse aux mortels,
Ce trou dans l’air entre les choses
Où le regard s’échappe, s’assombrit ou
S’attriste, voici qu’il prend soudain
La mesure de notre soif en entendant
Prononcer à voix basse le mot
Jardin, et tout s’éclaire désormais
Comme si la fontaine en nous muette
Depuis tant d’années avait retrouvé
Sa source et voulait ronde et paisible
Sur nos joues.

(Guy Goffette)

Illustration: Evgeni Gordiets

 

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