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Poésie

Posts Tagged ‘sculpture’

Arabesques (Béatrice Bastiani-Helbig)

Posted by arbrealettres sur 20 août 2022



    
Arabesques

« Arabesques » : depuis toujours ce mot me plaît.
En peinture, sculpture, musique ou ballet,
Il évoque pour moi de gracieux mouvements
Et il me parle à l’oreille si doucement.

Selon que je me trouve au bord d’un lac en Chine
Ou bien au bord de la mer Méditerranée,
Moi, sur des cucurbitacées je les dessine
Ou sur des galets, et ce depuis des années.

Je laisse aller ma main, mon esprit rêvasser.
Dans un beau voyage intérieur à chaque fois
Il m’emmène très loin, au plus profond de moi,
Enfin pacifiée, unifiée, réconciliée.

Il arrive que certains viennent bavarder.
Mes dessins leur rappellent des contrées lointaines.
Mes amis pékinois m’ont souvent demandé
Si j’avais séjourné en terre tibétaine.

« Arabesque » : exotique et pourtant familier…
Car ce mot me ramène au temps de mon enfance.
Papa passait du Chopin et me disait : « Danse ! »
Et moi, bien sûr, je ne me faisais pas prier.

D’arabesques en sauts de biche, je rêvais
D’entrer à l’Opéra, d’y consacrer ma vie.
J’étais faite pour danser, et ne concevais
Aucun autre avenir, n’avais pas d’autre envie.

Le destin fut tout autre mais je danse encore.
J’aime la poésie, les beaux-arts, la musique
Et les langues, et le théâtre. Oui, je dévore
La vie, que, bien souvent, je trouve magnifique.

(Béatrice Bastiani-Helbig)

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UN DUO (Jacques Lacarrière)

Posted by arbrealettres sur 19 mars 2021



Illustration: Giorgio de Chirico
    
UN DUO
(Le duo)

Un couple de mannequins en bois utilisé dans les ateliers de sculpture :
habitants typiques du monde chiriquien.
Qu’attendre des amours d’un tel couple
si ce n’est un rituel d’insectes rigides, une pariade de robots ?

— Étant sans bras pour nous étreindre, rien ne pourra nous séparer.
— Étant sans sexe pour aimer, rien ne pourra nous désunir.
— Sans yeux et sans nez, mon visage. je suis une élégie de cire.
— Sans front; sans bouche, mon partage. je suis un brouillon de sourire.
— Mannequins au torse d’absence ?
— Simulacres que l’éther encense ?
— Appelants du plus grand silence ?
— Aubiers d’être enfantés du tremble ?

Le savez-vous qu’ainsi livrés à la rigidité dorienne des momies,
vous êtes entrelacés à l’énigme du monde?
Le savez-vous qu’en cette terrasse ensoleillée
s’ébauche en vous une théologie des automates ?

(Jacques Lacarrière)

 

Recueil: A l’orée du pays fertile
Traduction:
Editions: Seghers

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Natures mortes (Jean Follain)

Posted by arbrealettres sur 30 mai 2020



 

Le sel dans la cupule en buis
gardait le secret des cristaux
une sombre robe
et de soleil gorgée
conservait un suc léger
d’avoir frôlé les fleurs
une boucle d’or avait fait sur la jambe
ailleurs intacte
une sculpture infime,
l’orage grondait
chaque chose pourtant veillait et travaillait
pour sauver son éternité.

(Jean Follain)

 

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Un méandre de rivière (Jean-Baptiste Besnard)

Posted by arbrealettres sur 3 avril 2020



Un méandre de rivière
Sous un manteau d’ombre
Me renvoie l’image
Des amours perdues

Je m’exile dans ma propre ville
Sous la moisissure du ciel

J’entends de nouveau les musiques colorées
A chaque carrefour
Ou dans un parc troublé
Par un sentiment d’inquiétude
Hanté par des sculptures vivantes

Sous un ciel endommagé
Par l’insolence du soleil
La rue retentit
Et la rivière se blottit
Dans cette ville

A l’horizon la colline opulente
De l’Hautil domine la Seine
Dans la paix des brouillards
Ses pentes ruissellent de verdure
Et un loin de limpidité
Tremble sur un coteau de vigne bleue

J’écoute la musique de la ville.

CONFLANS 1981

(Jean-Baptiste Besnard)


Illustration

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L’OISEAU D’OR DE BRANCUSI (Mina Loy)

Posted by arbrealettres sur 5 avril 2019



Illustration: Constantin Brancusi   
    
L’OISEAU D’OR DE BRANCUSI

Et le jouet
devint l’archétype esthétique

Comme si la patience de quelque Dieu paysan
avait poli et poli
l’Alpha et l’Oméga
de la forme
à partir d’une masse de métal

Orientation dénudée
désempennée déplumée
dans la dynamique du vol
le rythme final
a élagué les extrémités
de crêtes et de serres

L’acte absolu
de l’art
accorda
à la chasteté de la sculpture
‒ nue comme l’arcade d’Osiris –
sein de la révélation

une courbe incandescente
léchée par les flammes chromatiques
dans les labyrinthes du jeu des reflets

L’hyperesthétisme
de ce gong de cuivre affiné
transperce l’air
comme

la lumière agressive
délivre
sa signification

L’immaculée
conception
de l’inaudible oiseau
jaillit
d’une superbe retenue

(Mina Loy)

 

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CREPUSCULE ANTIQUE (George Bacovia)

Posted by arbrealettres sur 1 avril 2019



CREPUSCULE ANTIQUE

Le jet d’eau, derrière le palais mort
Jaillit et grandit, et s’élève et pleure —
Et les gouttes dans le soir tombent, meurent,
En s’irisant de bleu, de sang et d’or.

Sur l’eau une file de cygnes blancs…
Le parc emprunte au lac son tendre rêve,
Le couchant pare les cygnes, sans trêve
Les irisant de bleu, d’or et de sang.

Les sculptures gisent là, tristement,
Rêvant dans leur blancheur et elles pleurent
Et le couchant les colore en cette heure
Les irisant de bleu, d’or et de sang.

(George Bacovia)

Illustration: Patricia Blondel

 

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Sors enfin du fond de ta grotte obscure (Juan Ramón Jiménez)

Posted by arbrealettres sur 16 mars 2019



 

Jia Lu

Sors enfin du fond de ta grotte obscure,
nue, ferme et blanche,
et serre-moi dans tes bras, fin de mon rêve !
Retiens-moi, en notre étreinte,
comme en une sculpture de pierre,
que rien, jamais, n’altère ou désunisse !

Donne-moi, debout, le repos ;
donne-moi le sommeil, debout ;
Donne-moi, debout et en paix, l’idée seule,
le sentiment seul,
l’éternelle foi en l’unique,
qu’en vain, j’attends, j’attends dans le multiple !

***

¡Ven ya del fondo de tu cueva oscura,
desnuda, firme y blanca,
y abrázate ya a mí, fin de mi sueño!
¡Reténme, en nuestro abrazo,
como en una escultura material,
que nada, nunca, altere ni desuna!

¡Dame, de pie, el reposo;
dame el sueño, de pie;
dame, de pie y en paz, la sola idea,
el solo sentimiento,
la eterna fe en lo solo,
que en lo tanto, y en vano, espero, espero!

(Juan Ramón Jiménez)

Illustration: Jia Lu

 

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Loin (Balbino)

Posted by arbrealettres sur 23 août 2018



 

Alain Bonnefoit Lydia-a-la-natte-litho-156-175-37x53cm-500

Loin

Parfois
il faut que je sois loin
pour
savoir
à quel point
j’aime ton sourire
ton ventre
et tes seins
qui sont
d’une sculpture.
Être loin
pour voir ces rues
qui grouillent
de ton absence.

(Balbino)

Illustration: Alain Bonnefoit

 

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Parabole (Herbert Zbigniew)

Posted by arbrealettres sur 2 août 2018



Illustration: René Baumer
    
Parabole

Le poète imite les voix des oiseaux
il étire son long cou
et sa pomme d’adam saillante
est comme un doigt maladroit sur l’aile de la mélodie

en chantant il croit vraiment
hâter le lever du soleil
la chaleur de son chant en dépend
et la pureté de ses aigus

le poète imite le sommeil des pierres
la tête dans les épaules
il est comme un fragment de sculpture
à la respiration rare et pénible

en dormant il croit que lui seul
percera le secret de l’existence
et que sans l’aide des théologiens
il happera l’éternité de sa bouche assoiffée

que serait le monde
s’il n’était plein
de l’incessant va-et-vient du poète
parmi les pierres et les oiseaux

(Herbert Zbigniew)

 

Recueil: Corde de lumières oeuvres poétiques complètes
Traduction: Brigitte Gautier
Editions: LE BRUIT DU TEMPS

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L’Arbre (Gabriel Cousin)

Posted by arbrealettres sur 14 juillet 2018



L’Arbre

Un arbre est mon voisin.
Là, devant moi,
il regarde par ma fenêtre.

Il frémit sous le vent comme des vagues
et les crêtes de ses feuilles
renvoient l’écume et la lumière.
Dans les tempêtes
passe le ressac des galets.

Debout comme un homme
Puissant comme la montagne
Vivant comme une bête
Sa sève circule avec mon sang.

Selon les saisons,
squelette noir,
sculpture de cuivre,
odorante fraîcheur verte,
douce peau bourgeonnante.

Et sous mes pieds
son invisible chevelure souterraine
se nourrissant de la terre.

Nous nous regardons
et respirons ensemble.

(Gabriel Cousin)

Illustration: Georgia O’Keefe

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