Sous la sérénité d’une fenêtre ouverte
un matin avec le froid
le coeur bat
inquiet de ne pouvoir tout contenir
un ciel avec nuages
une rumeur de vie violente
le roulement des mondes dans le loin
et des mains vers soi qui viennent
pour donner corps à la beauté
la concrète beauté
où toute peur un instant s’absout
être dans le pli d’un instant
où se joignent
le plein et l’abîme
comme au seuil d’une clarté
qui donne sur sa nuit forestière
la sensation
exubérante
d’une espérance
d’un appui idéal
entre deux néants
sous la sérénité d’une fenêtre ouverte
(Jean-Pierre Siméon)
Recueil: Là où dansent les Éphémères 108 poètes d’aujourd’hui
Traduction:
Editions: Le Castor Astral
Grande chamaillerie du pommier à l’osier,
du sureau au laurier. Une bagarre générale
entre les pies et les merles auxquels se joignent
les tourterelles. Les mésanges, les rouges-gorges,
les moineaux se sauvent, se cachent
dans le lierre du mur. Je n’en connaîtrai
jamais la cause. Elle doit être pourtant
de taille.
(Gérard Le Gouic)
Recueil: Plumes de poèmes
Traduction:
Editions: Rue du Monde
Lorsque j’entends le soir
le concerto pour clarinette de Mozart,
le temps de la souffrance et de l’ennui s’achève,
soudain je nage dans la lumière dorée de mes quinze ans,
l’ombre de la vieillesse un instant se déchire,
nos deux corps flexibles se joignent
dans le torrent de nos cheveux emportés par le vent:
c’est le ciel de la tendresse que leur plaisir éclaire,
l’angoisse de vivre est devenue légère comme l’air
(Claude Vigée)
Recueil: L’homme naît grâce au cri
Traduction:
Editions: POINTS
C’est la clarté qui palpe soudain le corps aveugle,
l’ouvre et le dissout. Et la langue prononce
l’écume et la danse lumineuse. Ce sont les flammes de la terre,
les gorges d’ombre, les veines vertes.
Toute la vie visible dans le silence qui respire,
et dans les allées les caresses traversées par les oiseaux.
Quel est celui qui dort parmi les fruits et les fleurs,
qui rit dans une demeure claire et scintillante
et se sent construit et dédoublé,
et rien d’autre que la volupté qui le soulève
dans la blancheur de l’espace où les éléments se joignent,
et où tout est le caprice d’un seul souffle clair ?
(António Ramos Rosa)
Recueil: Le cycle du cheval
Traduction: du portugais par Michel Chandeigne
Editions: Gallimard
Il y a trop de personnages dans cette toile,
mais c’est exprès.
Pour mieux cacher ces deux amants qui ne peuvent se joindre
et qui se parlent du regard.
Dans une foule, on est presque seul comme dans une forêt.
Et ces deux amoureux seront ensemble
dès que nous aurons tourné le dos.
Les maisons sont abandonnées
une patience inconnue remplit la journée
la nuit le temps
nous reconnaissons un ensemble de bruits discrets
mal situés
un moment où l’on ne parle pas
Le jeu infini peut se joindre à l’espace
où chaque silhouette est l’histoire qu’elle se donne
close unie
d’un texte entier
sans autre action que le premier regard posé
sur le sol et la page.
Mélancolie.
Les corps se joignent et se vident dans le néant en éjaculant.
Les spasmes explosent aux bords des précipices.
Des gouttes de lucidité suintent de ton corps
lorsque tu en sors.
Depuis toujours ces choses tournent
Et se rapprochent, puis s’écartent
En se crachant de la lumière,
De la poussière, du feu mort,
Et se rapprochent, puis s’écartent.
Depuis toujours ces choses tournent,
Tournent plus vite, puis moins vite,
Se cherchent, on dirait, s’évitent,
Se hâtent, mais vers nulle part,
Vont pour se joindre, mais s’évitent.
Depuis toujours en toute hâte
Ces choses vont vers nulle part.
On dirait parfois qu’une pâte
Se prépare. De grands fouets tournent.
Et puis la pâte se défait.
Le vent se glisse dans tes cheveux
Qui conservent leur ordonnance
Le temps coule entre tes doigts
Sans les dessécher
Nous sommes notre propre nourriture
Nos corps se cherchent
Et il suffit que nos mains se joignent
Pour partager la pluie et le soleil
Et découvrir le plaisir
Nous allons au pied des grands arbres
Voir s’agiter les feuillages
Et tandis que la nuit nous unit
Ta voix apprivoise mes rêves
Et l’ombre de ta bouche se fait chair.