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Poésie

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À l’ombre des pins et des cyprès (Pan Qi Yu)

Posted by arbrealettres sur 6 décembre 2022



Illustration: Shan Sa
    
À l’ombre des pins et des cyprès

La sagesse reçue des Anciens
M’accorda une vie humaine.
Elle m’invita, pauvre créature, jusqu’au palais
À tenir un humble rang dans le quartier des femmes.
J’ai joui de la grâce profuse du saint souverain,
Recueillant la faveur radieuse du soleil et de la lune.
Les rais brûlants de l’astre pourpre posés sur moi,
Je reçus la haute bénédiction dans le Pavillon de Zeng Shen.
Abandonnée à l’espoir de jours heureux,
Je délaçais mon souffle, éveillée comme endormie.
Mais les décrets du Ciel — qui pourra jamais les infléchir ?
Avant de les savoir, le soleil voilait sa lumière
Et me laissait déjà dans l’ombre du soir.
Je gardais la bonté du roi qui demeurait mon seul asile
Et mes fautes ne me conduisirent pas à l’exil.
J’ai servi l’impératrice douairière dans le palais d’orient
Et pris ma place parmi les suivantes de la Confiance éternelle.
J’aidais à laver les rideaux, à balayer le sol souillé
Et ma tâche se poursuit ainsi jusqu’au terme mortel.
Alors mes os trouveront repos au pied de la colline.
Et l’ombre vacillante des pins et des cyprès couvrira ma tombe.

(Pan Qi Yu)
(1er siècle avant J.-C.)

 

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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Les hommes dans la rue (Franz Hellens)

Posted by arbrealettres sur 16 novembre 2021



 

James Zwadlo  Pedestrians 5-  [1280x768]

Les hommes dans la rue, vue d’en haut par une fenêtre fermée,
tels qu’à l’écran d’un cinéma, marchant, gesticulant, aphones.
non pas silencieux, noirs, clairs ou gris; deux longs courants d’agitation humaine,
flanquant de chaque côté l’asphalte où se poursuit le croisement plus rapide des transports,
se frôlent, s’en roulent et se pénètrent sans se toucher, l’un à l’autre inutile,
comme si, chaque maison étant une planète, un astre obscur, pétrifié,
les habitants débarquaient dans la rue et poursuivaient
sans se connaître des buts distants et singuliers.

(Franz Hellens)

Illustration: James Zwadlo 

 

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Oui le travail qui se poursuit à l’intérieur de la forge (Charles Juliet)

Posted by arbrealettres sur 18 février 2021



Illustration:  Louis Toffoli
    
à Paco Ojeda

Oui
le travail qui se poursuit
à l’intérieur de la forge
ne doit jamais s’interrompre

entretenir le feu
lui fournir
ce qu’il lui faut
porter au rouge

pour assouplir
l’idée
faire éclater
la pierre des mots
pour obtenir
cette lave
où idées et mots
se rejoignent
se compénètrent

attente
ascèse
de la solitude

coulent les mots
qui s’agrègent
trouvent leur place
dans l’édifice

(Charles Juliet)

 

Recueil: Moisson
Traduction:
Editions: P.O.L.

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LES FEUILLES, CETTE MATINÉE (Francis Vielé-Griffin)

Posted by arbrealettres sur 7 juillet 2020



 

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LES FEUILLES, CETTE MATINÉE

Les feuilles, cette matinée,
Sont toutes satinées,
La pluie est tiède;
Les chants d’hier reviennent en refrains,
Ce gai matin,
Et, si j’oublie, ta voix me vient en aide;

Et, si même ta mémoire défaille,
Je reprends l’air qui mène, vaille que vaille,
Les mots qu’il laisse, au hasard, se poursuivre;
Que chantions-nous
Avec des mots si doux
Que même ainsi, sans suite, ils nous enivrent?

(Francis Vielé-Griffin)

 


 

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Il faut que tu écrives au centre de l’espace (Guillevic)

Posted by arbrealettres sur 22 avril 2020



Parce que tu es
Au centre de l’espace
Quand tu écris.

Le poème s’organise
Autour d’un centre.

Parce que le poème
Exige un centre,

Il faut que tu écrives
Au centre de l’espace.

C’est ton devoir de faire
Que les deux autres coïncident.

*

Le tremblement
Qui dans le poème agite
Les mots, les blancs entre les mots,

Qui agite aussi
Tout ce que le poème
Laisse voir ou deviner,
Même l’espace qu’il ouvre,

Ce tremblement
Est peut-être dû

Au fait que les deux centres
Se poursuivent pour s’épouser,

Craignent
De réussir,

(Guillevic)

Illustration: ArbreaPhotos

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Le Chant de triomphe de Trishancou (Sri Aurobindo)

Posted by arbrealettres sur 21 mars 2020



Trishancou 
    
Le Chant de triomphe de Trishancou

Je ne mourrai pas.
Bien que ce corps, quand l’esprit sera las
de son étroite demeure, doive nourrir les flammes,
ma maison brûlera, moi pas.

Abandonnant cette gaine
je découvrirai un vaste espace éthéré.
À la tombe avide échappera mon esprit,
trompant l’étreinte de la mort.

La Nuit retiendra
le soleil en ses profondeurs glacées ; le Temps aussi devra cesser ;
les astres qui peinent auront leur délivrance.
Je ne cesse pas, moi, je demeure.

Avant que les premières graines
fussent semées sur terre, j’étais déjà vieux,
et quand se refroidiront des planètes point encore nées
mon histoire se poursuivra.

Je suis la lumière
au coeur des étoiles, la force léonine et la joie des matins ;
je suis l’homme et la jeune fille et le petit garçon,
protéen, infini.

Je suis l’arbre
qui se dresse, solitaire, sur le bleu sans limite ;
je suis la rosée qui pleut en silence
et la mer illimitée.

Je tiens le ciel entre mes mains
et soutiens la terre exubérante.
À ma naissance j’étais l’éternel Penseur
et le demeurerai après ma mort.

(Sri Aurobindo)

 

Recueil: Poésie
Traduction: Français Cristof Alward-Pitoëff
Editions: Sri Aurobindo Ashram Trust

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L’été nocturne (Béatrice Douvre)

Posted by arbrealettres sur 20 avril 2018




    
L’été nocturne

Dans les herbages jaunes de cet été
Te souviens-tu, nocturne était notre tristesse
Cet été-là, au baiser de la boue
Au chant furieux mêlé au rien
A ces palais de feuilles tombées irrévélées

Et c’est là que ta voix se posait, tremblant
Sous mille fleurs conquises des arbres éternels

S’émeuvent autour de toi ces fleurs qu’on dit sans nom
Mais les fleurs ont un nom mais ta voix s’y absente
Ces fleuves labourés de barques qui s’achèvent
Perdues merveilleusement sur l’écume étagée

Des accords se poursuivent en leur exil noir
Sur ces eaux si amères où je parle en ton nom.

(Béatrice Douvre)

 

Recueil: Oeuvre poétique
Traduction:
Editions: Voix d’Encre

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Hölderlin (Julio Cortázar)

Posted by arbrealettres sur 12 février 2018




    
Hölderlin

Les nuages sont des créatures d’eau et d’herbe
Qui montent sans violence par les gradins
De la forêt prodigieuse et évitent, souples,
L’excès redoutable de l’espace
Et sa dure résistance imprévisible.
Une joie légère les lance
Comme des jupons, des anémones ou des geysers,
Ils se poursuivent plus hauts que la topaze
Inébranlable du temps.
Les saules au sol les répètent ;
Des cavalcades d’oiseaux délibèrent
Comme de profondes choses solitaires.

(Julio Cortázar)

 

Recueil: Crépuscule d’automne
Traduction: Silvia Baron Supervielle
Editions: José Corti

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Frais ô ruisseau du regard (Georges-Emmanuel Clancier)

Posted by arbrealettres sur 23 janvier 2018



    

Frais ô ruisseau du regard glissant sur nous
Où brille vive ablette un temps nouveau comme
Le premier rire de l’été vers les rives.
Qui dira si la vasque se nommait hasard
Moins rencontre dans le jeu que souterrain désir
Ou si par la nuit l’ordre était écrit.
Que longtemps se poursuive en nous secret l’accord
Et que luise au-delà un silence rêvé.

(Georges-Emmanuel Clancier)

 

Recueil: Le Poème Hanté
Traduction:
Editions: Gallimard

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Mon poème commence (Mathieu Bénézet)

Posted by arbrealettres sur 5 août 2017



Illustration: Andrzej Malinowski

    

Mon poème commence par le mot tête
se poursuit par le mot cou
maintenant deux fois le mot bras
puis le mot thorax
mon poème continue par le mot jambe
deux fois écrit
prend fin avec le mot pieds

le poème prend corps

(Mathieu Bénézet)

 

Recueil: … Et nous apprîmes
Editions: Flammarion

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