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Verte, si Verte, si verte l’herbe… (Anonyme)

Posted by arbrealettres sur 6 décembre 2022




Illustration: Shan Sa
    
Verte, si Verte, si verte l’herbe qui aborde la rivière
Amples, si amples se déploient les saules du jardin
Belle, si belle cette femme qui se tient en haut des marches
Claire et brillante, elle apparaît dans la fenêtre
Charmant, si charmant son visage poudré
Fines, si fines ses mains blanches qui se découvrent
Autrefois chanteuse, elle ornait la maison de musique
La voilà aujourd’hui à un petit qui délaisse son foyer
Comment se résoudre à voir encore son lit inoccupé ?

Le banquet remplit le jour d’échos hilares
Et les joies délicieuses épuisent encore nos mots.
Comment dire cette merveille que le luth accentue
Son chant m’amène au voisinage céleste
Le génie musical embrase l’écoute de ceux qui s’attardent
Et c’est d’un seul coeur que nous portons l’élan de nos souhaits
Mais la fête entamée garde encore une pensée silencieuse
Les jours des hommes tourbillonnent puis se dispersent
Si peu de temps pour jouir du beau séjour !
Pourquoi ne pas laisser ses ambitions galoper ?
Pour être ainsi le premier arrivé aux commandes du monde
Pourquoi rester pauvre et ignoré,
Enlisé dans les marais aigres du ressentiment !

La première lune d’hiver annonce les courants froids
Le vent du nord s’engouffre cruel et tranchant.
J’endure la peine et sais la nuit longue.
Les étoiles hiérarques s’égrènent dans la nuit claire
Au quinzième jour, la lune est pleine
Et au vingtième déjà ses ombres se brisent.
Un voyageur pâle me tend une lettre seule.
J’ai lu au premier vers « amour immortel »
J’ai lu au dernier vers « douleur infinie d’être encore
J’ai conservé cette lettre dans les plis de ma robe
Trois ans déjà sont passés mais les mots n’ont pas blanchi.
Je m’offre entière à cette unique ferveur
Et je tremble que jamais tu n’en voies la valeur.

(Anonyme)

Les dix-neuf poèmes anciens des Han (ler siècle ap. J.-C.)

 

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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L’HORLOGE (Georges Rodenbach)

Posted by arbrealettres sur 23 septembre 2022



L’HORLOGE

Au centre d’un pignon dans la cour taciturne,
Un cadran blasonnait la tristesse des murs
Et les Heures tombaient, à coups rythmés et sûrs,
Comme des gouttes d’eau qui tomberaient d’une urne.

Comme des gouttes d’eau, s’égrenant par instant
Sur un homme perdu dans une grotte obscure.
Pleurs du rocher qui font une humide piqûre
Et par une douleur marquent le cours du Temps.

Et toujours et toujours, au printemps, en automne,
A l’heure où tout s’éveille, à l’heure où tout se tait,
On entendait la voix du cadran qui chantait,
Inoubliablement plaintive et monotone.

Les sons tristes, épars, dans le silence noir
Semblaient répercutés au fond de cette cloche :
Appels de cor pleurant au loin sur une roche
Et bruits intermittents des forges dans le soir.

Et toujours et toujours dans la calme demeure
L’horloge diligente éparpillait son chant
Et les aiguilles d’or, se fuyant, se cherchant,
Semblaient s’ouvrir en croix surie tombeau de l’Heure !

Impassible cadran où tout le long du jour
Dans son arène vide allaient tourner nos rêves,
Cependant que la cloche en quelques notes brèves
Parlait de l’heure enfuie aux échos de la cour !

(Georges Rodenbach)

Illustration: Laetitia Méral

 

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CLAIR DE LUNE (Anonyme)

Posted by arbrealettres sur 3 décembre 2020




    
CLAIR DE LUNE

La lune bleuit le jardin et, dans l’ombre, Zeineh rêve.
Elle est accroupie tout au bord du ruisseau limpide,
un jasmin aux lèvres, l’âme resplendissante d’amour.
Chaque battement de son cœur scande le nom du bien-aimé
et la chanson de l’eau le lui répète.
Zeineh sourit ; la fleur de jasmin palpite.
L’heure s’écoule. Le jardin bleuit davantage.
La lune a quitté le palmier dentelé et glisse derrière la colline ;
un rossignol prélude ; ses notes énamourées s’égrènent une à une dans la nuit écouteuse.
Zeineh lève le visage et rit.
Mais la fleur de jasmin s’est échappée de ses lèvres.
Elle est recueillie par le ruisseau où ne se mire plus la lune.
Zeineh tressaille. Son regard cherche les pétales tombés au fil du courant.
Mais le courant a emporté la fleur de jasmin et, là-bas,
la grenouille mélancolique semble pleurer une joie évanouie.
La fleur de jasmin est loin ; elle parfume l’eau fuyante.
Dans le cœur de Zeineh plus rien, que le souvenir du parfum.

(Anonyme)

 

Recueil: Ghazels – Poemes persans
Traduction: Marguerite Ferté
Editions: http://www.ebooksgratuits.com

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Toi mon parcours (Bernard Manciet)

Posted by arbrealettres sur 6 juillet 2020



toi mon parcours parmi tours et tours
où tous ensemble les dieux s’inversent
en encensoir de fourmillement
là mon destin qui triste s’égrène

par-dessus les convives couronnes
volèrent et la fête des dieux
fit s’envoler flambeurs d’anémones
s’environnant de lierre et genêts

(Bernard Manciet)

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MORT, JE M’ÉGRÈNERAI EN TOI… (Pierre Minet)

Posted by arbrealettres sur 19 novembre 2018




Illustration: Lionel Valot
    
MORT, JE M’ÉGRÈNERAI EN TOI…
À Lilian

Mort, je m’égrènerai en toi
Et non pas seulement mon corps
Mais aussi mes bonnes mes mauvaises pensées
Tous les chemins que j’emprunterai revivront en Toi.
Je veillerai dans ta chair, pour l’émouvoir
Et ton esprit recevra le mien comme un vent —
Tu ne cesseras de m’écouter —
Enseveli en Toi, pour que Tu me chantes…

(Pierre Minet)

 

Recueil: Les poètes du Grand Jeu
Traduction:
Editions: Gallimard

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Peau d’âne (Claudine Helft)

Posted by arbrealettres sur 14 mai 2018



Illustration: Danny Quirk 
    
Peau d’âne

Peau d’âne, peau d’homme,
et l’indécente éternité qui se moque
de la lumière décrite
au bout du chemin, n’est-elle que chimère
ou ce sablier trompeur où s’égrène le temps ?

Voici que déjà les saisons nous meurtrissent
à vitesse moderée et que l’hiver revient ;
et voici les rides, sillons de nos printemps.
N’ est-il pas de secret bourgeon sur l’ arbre
vieilli ?

La chute des mots, crépuscule des dieux
le silence, à peine l’obscurité,
la mort est cette pluie qui tombe
simplement

et ne guérit plus.

(Claudine Helft)

 

Recueil: Une indécente éternité
Traduction:
Editions: De la Différence

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AVÈNEMENT (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 3 janvier 2018




    
AVÈNEMENT

Un souffle d’éternité
Investit nos paroles
Tandis que l’homme se hâte
De vivre et de mourir

Brève parade des saisons
Flux et reflux des ombres
Précarité du chant

Nos mots chancellent
Nos raisons s’égrènent
Nos sentiers s’épuisent
Nos rêves en sourdine
Récusent l’horizon

Nous cédons
Aux gouffres impassibles
En exil d’espérance
Nous rayons l’avenir

Pourtant
Ni corps Ni coeurs
N’ont dévoilé leurs arcanes

Un monde en germe
Nous invite
A d’autres semailles
D’autres labours
D’autres récits.

(Andrée Chedid)

 

Recueil: Par-delà les mots
Traduction:
Editions: Flammarion

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Que j’aime au fond des bois… (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 15 novembre 2017




    
Que j’aime au fond des bois…

Que j’aime au fond des bois la plainte souterraine,
Fuyant sous le gravier, d’une source captive!
L’anneau de fer verdit au pavé qui le rive
Parmi l’amas des glands, des cornes et des faînes.

Partout la mousse étend autour de la fontaine
Son velours moite; à peine, amoureuse et pensive,
Murmure obscurément, à travers la bourdaine
Et le houx, l’eau suintant aux glèbes de la rive.

Mon coeur est cette source en pleurs au fond des bois,
Qu’entoure le silence et voile le mystère,
Que nul rayon ne frôle, où nul oiseau ne boit;

Mais vers la sombre dalle approche et penche-toi,
Ecoute pour toi seul du flot crépusculaire
La chanson s’égrener comme un divin rosaire!

(Marie Dauguet)

 

 

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Tout près de là, dans l’univers (Lucie Albertini)

Posted by arbrealettres sur 19 juin 2017



Tout près de là,
Dans l’univers,

Ni toi, ni moi,
Ne sommes nés,

Et se peut-il
Que sur ce coin de terre,

Notre vie, par ma voix,
S’égrène au passé.

 

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SEREIN (Giuseppe Ungaretti)

Posted by arbrealettres sur 15 septembre 2016




SEREIN

L’été a tout brulé.

Mais que revienne un doigt d’ombre,
Le coquelicot retrouve son sang,
Et la voix qui s’égrène de la lune
Propage les roseaux.

Meurent la peur et la pitié.

(Giuseppe Ungaretti)

Illustration: Josette Mercier

 

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