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Il n’est pas rare que je me plonge dans un livre de haïkus (Thierry Cazals)

Posted by arbrealettres sur 28 février 2023



    

Il n’est pas rare que je me plonge dans un livre de haïkus
quand je traverse des événements rudes et âpres :
décès d’un proche, maladie, creux de la vague…

Se frotter à la beauté abrupte et sans apprêt du haïku
aide à affronter les épreuves de la vie,
ces moments où la réalité semble se dérober sous nos pas.

Dans ces instants-là,
tous les ornements de la littérature tape-à-l’oeil
sonnent creux et faux.

On a soif d’authenticité, de dénuement,
de simplicité radicale.

Ce n’est pas par de mièvres flonflons
que l’on soigne le vague à l’âme ou la mélancolie,
mais par le silence sec des déserts
et l’eau glacée des torrents.

(Thierry Cazals)

Recueil: L’effet haïku (Pascale Senk)
Editions: POINTS

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Viens avec tes mains dans mon dos (Milène Tournier)

Posted by arbrealettres sur 22 octobre 2022



    
Viens avec tes mains dans mon dos
Me remettre
Dans le sens du monde.

Viens
À l’extrême milieu
De mes deux mains.

J’irai allumer
Un feu de forêt
Dans tes cils.

Viens dans ma bouche comme
On arrive de loin dans la petite étable
Parce qu’on n’a pas trouvé ailleurs de place
Pour enterrer et soigner son mort.

Ta main, le ciel,
C’est simple
De mourir.

Brise
Un nuage en deux
Et mets-moi entre.

Plus je t’aimais et plus mon ombre allait
De mes sandales
À ton pays.

Il y a
Cent endroits sur un visage
Pour deux mains.

[…]

(Milène Tournier)

Recueil: Le désir en nous comme un défi au monde 84 Poètes d’aujourd’hui
Traduction:
Editions: Le Castor Astral

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Jean-Daniel (Charles-Ferdinand Ramuz)

Posted by arbrealettres sur 6 mars 2022



Illustration: Marfa Indoukaeva
    
Jean-Daniel

I

Ce jour-là, quand je t’ai vue,
j’étais comme quand on regarde le soleil;
j’avais un grand feu dans la tête,
je ne savais plus ce que je faisais,
j’allais tout de travers comme un qui a trop bu,
et mes mains tremblaient.

Je suis allé tout seul par le sentier des bois,
je croyais te voir marcher devant moi,
et je te parlais,
mais tu ne me répondais pas.

J’avais peur de te voir, j’avais peur de t’entendre,
j’avais peur du bruit de tes pieds dans l’herbe,
j’avais peur de ton rire dans les branches;
Et je me disais: «Tu es fou,
ah! si on te voyait, comme on se moquerait de toi! »
Ça ne servait à rien du tout.

Et, quand je suis rentré, c’était minuit passé,
mais je n’ai pas pu m’endormir.
Et le lendemain, en soignant mes bêtes,
je répétais ton nom, je disais: « Marianne… »
Les bêtes tournaient la tête pour entendre;
je me fâchais, je leur criais: « Ça vous regarde?
allons, tranquilles, eh! Comtesse, eh! la Rousse… »
et je les prenais par les cornes.

Ça a duré ainsi trois jours
et puis je n’ai plus eu la force.
Il a fallu que je la revoie.
Elle est venue, elle a passé,
elle n’a pas pris garde à moi.

II

Les amoureux, c’est pour les filles
comme un écureuil dans un arbre;
elles s’amusent à le voir grimper:
sitôt qu’il est loin, il est oublié.
Elles ne pensent qu’à des bagues,
à des chapeaux, à des colliers;
qu’est-ce que çа leur fait qu’on souffre?
sitôt qu’on est loin, on est oublié.

C’est des miroirs à alouettes,
ça brille à distance, mais, quand on est près,
ça n’est plus rien que des morceaux de verre.
Il faut être bien fou pour leur courir après.

Ces filles, c’est comme des poupées
faites avec des ficelles et du carton;
ça a des joues en porcelaine,
ça a le ventre plein de son.

Mais on a beau dire et beau faire,
on n’y peut rien:
quand on est pris, c’est qu’on l’est bien.

III

Je lui demandé pardon dans mes pensées
de l’avoir ainsi méprisée.
Je sais qu’elle est douce et qu’elle a bon coeur.

Je sais qu’elle ne me connaît pas
et qu’il serait bien étonnant
qu’elle eût fait attention à moi
puisqu’elle ne me connaît pas.

Seulement il est dur d’être seul quand on aime.
On est comme fou, on se met en colère,
on pleure, on rit, sans savoir pourquoi.
On n’est pas juste quelquefois,
tant on a mal au coeur qui aime.

Mon coeur a mal, et moi je suis
comme un oiseau qui s’est envolé
et qui ne peut plus se poser,
et qui se sent bien fatigué
loin de son nid.

IV

Elle vit avec sa mère qui est vieille.
Elle l’aide à tenir le ménage.
Elle lave la vaisselle,
elle fait le dîner et les savonnages,
elle travaille du matin au soir:
il n’y a pas beaucoup de filles
qui font comme elle leur devoir.

Quand elle coud, ses doigts vont vite
comme au jeu de pigeon vole,
sa tête se penche sous la lampe,
sous la lampe sa tête se penche,
elle est appliquée et vaillante.

Elle laisse passer les jours
sans regret du temps qui s’en va,
ayant bien employé ses heures.
Le temps s’en va, elle demeure;
et sa vie est comme un ruisseau
qui coule d’un cours bien régulier,
sous les frênes et les noisetiers,
avec les oiseaux qui viennent y boire
et l’ombre errante vers le soir
des arbres noirs sur le ciel rose.

Et les mois et les mois viendront:
quand sera-t-elle comme elle est,
bonne et gaie, à coudre et à faire la cuisine,
dans une maison qui serait à nous,
dans une maison qui serait notre maison?

V

Car, moi, je suis pauvre et sa mère est riche.
Elle a une ferme et des champs,
elle a de l’argent
tout plein son armoire.

Elle a des chevaux, des boeufs et des vaches,
deux domestiques toute l’année,
des ouvriers quand l’ouvrage est pressant;
sa grange est pleine, ses étames de même;
et elle veut un gendre qui soit riche comme elle.

Il faudrait sans doute qu’on vienne
et qu’on lui dise: «Donnez-moi
votre fille, j’ai du bien
autant que vous;
j’ai comme vous des prés, des vaches et des bois,
alors c’est à égalité, n’est-ce pas ? »
Mais qu’on aime sa fille, elle n’y pense même pas.

Elle aura pour gendre un coureur d’auberges,
une espèce de beau parleur
qui fait briller ses écus
pour qu’on sache qu’il a de quoi…
Et je n’ai que mon amour, moi.

Seulement aussi amenez-m’en un
qui travaille davantage,
qui boude moins à l’ouvrage,
qui se lève de plus grand matin.

Je dis que des bons bras, c’est de l’argent comptant;
et je porterais des montagnes,
si on me disait: C’est pour Marianne.

VI

Quand le jour est mort, une lampe brille.
C’est la lampe, la petite lampe
que tu as à ta fenêtre,
Marianne, par les temps noirs,
pour les pauvres gens qui sont sur les routes.

On n’a plus peur; on voit de loin la lampe, on dit:
« C’est la lampe de Marianne,
elle est à coudre dans sa chambre avec sa mère »;
et on va vers la lumière,
parce qu’on sait que la porte s’ouvrira.

C’est comme une étoile, celle
qui guidait les bergers dans la nuit de Noël
et ils ont été amenés par elle
dans l’étable chaude où était la crèche
entre le boeuf et l’âne.

Là où la lampe brille, là aussi il fait chaud.
Celui qui vient pousse la porte et dit bonsoir.
On ne voit pas ses yeux sous son grand chapeau.
Sa moustache est givrée, il se fait déjà tard,
et il tient à la main un gros bâton d’épine.

Moi, je suis comme un papillon de nuit
qui tourne autour de la lumière.
Je me glisse le long des murs comme un voleur
pour te voir par la fenêtre.

Je n’ose pas entrer; je n’ose pas heurter;
je regarde de loin
le linge que tu tiens.
Je reste ainsi longtemps sans bouger de mon coin,
les yeux tendus vers toi,
mais c’est mon coeur qui va pour moi.

Il va vers toi, il se tient bien tranquille;
il est dans l’ombre de tes rideaux
il est dans l’aiguille qui brille,
il est dans le fil que tu casses
de temps en temps entre tes dents.

A quoi songes-tu? Sais-tu que je suis là?
Quand je te vois rêver, je pense que c’est à moi;
je ris ensuite de ma sottise.
Mais j’attends quand même
et sans savoir quoi,
jusqu’à ce que ta lampe s’éteigne.

VII

Le dimanche matin, elle va à l’église.
Le clocher a l’air d’un peu se pencher
pour mieux voir les fleurs dans les prés
comme ferait une petite fille
qui cueille un bouquet en chantant;
et la cloche dans le clocher
sonne d’abord un long moment.

Les femmes passent deux par deux;
elles sont en noir par respect pour le bon Dieu,
elles ont leur psautier dans la main.

Les hommes attendent qu’elles soient entrées
devant le porche en causant du beau temps,
du prix du bétail, des travaux des champs;
et il y a tant d’oiseaux dans les haies
que les branches se balancent
comme quand il fait du vent.

Alors, elle aussi, elle vient, elle a des gants blancs,
une robe bleue, un chapeau de paille;
elle traverse la place,
elle entre, je ne la vois plus.

La cloche se tait, le sonneur descend,
ses gros souliers dans l’escalier
font un bruit comme quand on bat en grange;
les gens dans l’église attendent en silence;
le pasteur, avec sa robe noire,
son chapeau de soie et son rabat blanc,
approche d’un air grave dans l’ombre des arbres.
Et je me sens si seul que je voudrais pleurer…

Je serais sur le banc, assis à côté d’elle;
quand elle chanterait, j’écouterais sa voix
et elle pencherait la tête pour prier.

VIII

Comme tu es jolie sur le petit sentier,
où tu vas, portant ton panier
avec le pain et le café
pour les quatre-heures.
L’ombre des cerisiers glisse sur tes épaules,
il fait chaud, les gens se reposent,
assis dans l’herbe, tout en causant,
et, te voyant venir, ils disent:

« Voilà Marianne avec son panier. »
Ils sont contents, parce qu’ils ont faim,
ayant travaillé qu’ils n’en peuvent plus
et le foin qui sèche sent fort au soleil.

Ils te disent: «Vous avez fait
la paresseuse! »
Tu dis: « Mais non, il n’est pas quatre heures. »
Un des ouvriers regarde à sa montre,
il dit: « Que si! il est quatre heures et cinq! »
Et tout le monde
éclate de rire sans savoir pourquoi.

C’est peut-être que le café
est meilleur quand tu le verses.
Tu fais plaisir à regarder
avec ton gros jupon d’indienne;
tu fais plaisir avec cette façon que tu as
de sourire en tendant la miche
et d’avoir soin qu’on soit toujours servi.

IX

Elle est venue un soir pour la première fois.
Il faisait nuit, elle est venue sans bruit.
Je regardais partout, je ne voyais personne
et j’entendais mon coeur battre dans le silence.
Mais, quand je l’ai vue, j’ai eu presque peur
et j’aurais voulu me sauver.

Elle venait entre les saules,
elle allait lentement, est-ce qu’elle avait peur aussi ?
Ou bien est-ce que c’était de l’ombre ?

Je suis allé vers elle, je lui ai dit bonjour.
« Alors, comme ça, ça va bien? »
« Oui, merci. » Nous n’avons plus su que dire.
Il y avait un arbre, l’étang était tout près,
le vent a passé dans les roseaux
et j’ai senti sa main trembler.
« Écoute, est-ce qu’on fait un petit tour? »
« On nous verrait, non, j’aime mieux… »
« On pourrait s’asseoir. » « Ce n’est pas la peine. »
J’ai voulu parler, mais je n’ai pas pu
et elle était déjà partie.

X

Elle m’a dit: «J’ai bien senti
tout de suite
que tu serais mon bon ami
N’est-ce pas? la première fois
qu’on se voit,
on ne s’aime pas,
pour bien dire, encore,
mais çа vient tout tranquillement
avec le temps.
Parce que, tu sais, ma mère est bien bonne
et je l’aime bien aussi,
mais ce n’est pas tout dans la vie.
On peut travailler du matin au soir
et être bien sage, çа n’empêche pas
qu’on pense parfois à des choses.

On se dit: «Il y en a qui ont des enfants,
il y en a qui se sont fait
des trousseaux d’une beauté
qu’on ne peut pas s’imaginer,
et on rêve à se marier
quand même. »

Elle m’a dit: «Je t’aime tellement
qu’il me faudrait bien venir à cent ans
pour t’aimer jusqu’au bout
et que je ne sais pas si j’y arriverais. »
Elle m’a dit: «Et toi, est-ce que tu m’aimes autant? »
« Ah! lui ai-je dit, qu’est-ce que tu penses? »
Et je lui ai serré la main
tellement fort qu’elle a crié.

XI

J’ai été au soleil et je pensais à toi.
Tu es toujours avec moi,
comme avant, mais avec un sourire,
à présent que je sais que, moi aussi, je vais
à tes côtés dans ta pensée.

Des oiseaux tombaient des branches,
l’herbe était fleurie, les foins mûrissaient;
j’avais ma faux, j’ai fauché,
ma faux allait toute seule.

Je suis revenu chercher la charrette,
j’ai chargé mon herbe; la roue grinçait
comme quand tu chantes pour le plaisir
ou pour te tenir compagnie.

Et puis le soir venu, j’ai pensé : « Que fait-elle? »
Je m’étais assis sur un banc,
j’avais mis mes mains dans mes poches;
je fumais ma pipe, je te voyais venir;
et tu étais dans la fumée
comme un de ces anges avec des ailes bleues
qui sont dans les livres.

XII

Je ne sais pas pourquoi
d’autres fois je suis triste
et je n’ai de coeur à rien faire.
Il faudrait faucher, il faudrait semer,
mais je dis: «Tant pis!» qu’il pleuve ou qu’il grêle,
ça m’est bien égal.
C’est ainsi quelquefois sans raison,
à cause d’une manière qu’elle a eue de me parler,
à cause d’un air qu’elle a eu de me regarder,
à cause de son rire,
à cause de sa voix qui était changée et de ses yeux
qui se sont baissés devant les miens,
comme si elle me cachait quelque chose.

Et pourtant je suis heureux quand même.
Je l’accuse à tort parce que je l’aime.
C’est pour me faire mal, et puis je me repens.
J’ai honte de moi, je me dis: «Tout va bien»;
et le bonheur me revient
comme quand la lune sort
de derrière un gros nuage.

XIII

Si ta mère savait pourtant que nous nous aimons,
et que le soir je viens t’accompagner
jusque tout près de la maison,
si elle savait que nous nous fréquentons
et que, cette fois, c’est pour de bon,
que dirait-elle ?

Elle qui a un front ridé,
des mains noires toutes tremblantes,
elle qui ne se souvient plus
de sa jeunesse;
elle qui a oublié le temps où elle allait danser,
et qui ne sait plus ce que c’est
tout le bonheur qu’on a d’aimer,
ta mère, qu’est-ce qu’elle penserait?

Nous ne parlons pas de ces choses
pour ne pas gâter notre bonheur;
nous nous regardons seulement
pour nous redonner du courage.
Car nous ne faisons rien de mal,
n’est-ce pas? il est naturel
d’être amoureux comme nous sommes;
ils ont tous été comme nous.
Et je dis: «Vois-tu, il faudra s’aimer d’autant plus,
d’autant plus fort, d’autant plus doux;
alors peut-être que ta mère aura pitié,
et elle nous laissera nous aimer. »

XIV

Marianne a pleuré, il faisait du soleil,
la cuisine était rose.
Ses larmes coulaient sur ses joues.
Elle a pris son mouchoir, elle a pleuré dedans,
elle s’est assise, n’ayant plus de force.

«Est-ce que c’est vrai que tu l’aimes tant? »
Marianne n’a rien répondu.
«J’aurais voulu pour toi quelqu’un d’autre. »

Marianne a secoué la tête.
«J’ai la raison que tu n’as pas,
j’ai connu la vie, je suis vieille.
Il n’y a pas que l’amour,
l’amour est beau, mais l’amour passe,
tandis que l’argent, ça dure une vie
et qu’on en laisse à ses enfants.»

Marianne a pleuré si fort
qu’on l’entendait depuis dehors.

« Mais maintenant que je t’ai dit ce que je pensais,
je ne voudrais pas te faire de la peine.
Prends ton amoureux si tu l’aimes… »

Marianne a levé la tête
et elle a cessé de pleurer.
« Je crois que c’est un bon garçon,
il aura soin de la maison,
il ne boit pas, il est sérieux,
eh bien, puisque tu le veux,
mariez-vous et soyez heureux. »

Elle a embrassé sa mère sur le front,
elle l’a prise par le cou:
«Tu permettras que je te l’amène?…
Tu verras que j’avais raison. »

XV

Le jour de notre noce, j’y pense tout le temps,
il fera un soleil comme on n’a jamais vu;
il fera bon aller en char
à cause du vent frais qui vous souffle au visage,
quand la bonne jument va trottant sur la route
et qu’on claque du fouet pour qu’elle aille plus fort.
On lui donnera de l’avoine,
en veux-tu, en voilà;
on l’étrillera bien qu’elle ait l’air d’un cheval
comme ceux de la ville;
et trotte! et tu auras ton voile qui s’envole,

et tu souriras au travers
parce qu’il aura l’air
de faire signe aux arbres
comme quand on agite un mouchoir au départ.

On se regardera, on dira: « On s’en va,
on commence le grand voyage;
heureusement qu’il n’y a pas
des océans à traverser. »
Et quand nous serons arrivés,
la cloche sonnera, la porte s’ouvrira,
l’orgue se mettra à jouer;
tu diras oui, je dirai oui;
et nos voix trembleront un peu
et hésiteront à cause du monde
et parce qu’on n’aime à se dire ces choses
que tout doucement à l’oreille.

XVI

Notre maison est blanche, elle est sous les noyers,
ta mère tricote près de la fenêtre;
iI fait chaud, on va moissonner,
mais, comme les foins sont rentrés,
on a un moment pour se reposer.

Tu mets les verres sur la table pour le dîner.
Du rucher, je te vois passer dans la cuisine,
et ta chanson me vient parmi
le bourdonnement des abeilles.

Ta mère s’est levée, elle a mis son tricot
et ses aiguilles dans la corbeille;
elle a l’air heureux de vivre avec nous,
nous sommes heureux de vivre avec elle.

Ne sommes-nous pas heureux de nous aimer,
d’être ensemble, de travailler,
de voir mûrir les foins, les moissons se dorer,
et, plus tard, vers l’automne,
les arbres plus lourds du poids de leurs fruits
jusqu’à terre se pencher?

Tu vas dans la maison, faisant un petit bruit,
et, du matin au soir, c’est toi qui veilles à tout;
pendant que, moi, je vais faucher
et que les chars rentrent grinçants,
hauts et carrés,
comme des petites maisons roulantes.

VII

Un jour je te verrai venir un peu plus lasse
et lourde d’un fardeau que tu n’as pas connu,
tandis que s’épaissit ta taille,
marchant dans le jardin où les roses fleurissent
et je t’aimerai encore un peu plus.

Je songe que tu portes deux vies
et qu’il me faut donc t’aimer doublement
pour toi-même et puis pour celui
qui va naître de tes souffrances.

Je sens que j’ai grandi vers de nouveaux aspects
d’où le monde paraît avec des tristesses,
mais missi avec des joies accrues en nombre;

et, quand je sens ta main s’appuyer sur mon bras,
et l’ombre de ton front se poser sur ma joue,
il me semble avancer sûrement avec toi
vers la réalisation d’une promesse.

XVIII

L’enfant que nous aurons ne nous quittera pas.
Il grandira dans la campagne.
Il sera paysan comme nous.
Il portera la blouse comme son père a fait,
et, comme son père, il traira les vaches;
il fera les moissons, il fera les regains,
il fauchera les foins;
il étendra peu à peu son domaine;
et, lorsque nous serons trop vieux,
quand l’heure du repos sera pour nous venue,
il nous remplacera, maître de la maison.

Il aimera comme nous avons aimé;
les jeux de nos petits-enfants
entoureront notre vieillesse.

Ce sera une après-midi de beau temps;
je serai assis au soleil,
j’aurai joint les mains sur ma canne,
il fera clair sur la campagne;
et toi, utile encore avec tes vieilles mains,
tu iras et viendras, tout près, dans le jardin,
nous acheminant ainsi ensemble
vers l’autre repos, qui est sans fin.

Nos derniers jours seront paisibles,
nous aurons fait ce que nous devions faire;
il y a une tranquillité qui vient,
une grande paix descend sur la terre.

Nous nous parlerons du passé:
te souviens-tu du jour où tu avais pleuré,
te souviens-tu du jour de nos noces?
on avait sonné les deux cloches
qu’on voyait bouger en haut du clocher.

Te souviens-tu du temps des cerises
et on se faisait avec des boucles d’oreilles,
et du vieux prunier qu’on secouait
pour en faire tomber les prunes?

Le cadet des garçons arrive alors et dit:
«Grand’mère, la poule chante,
elle a fait l’oeuf. »
«Va voir dans la paille, mon ami.»
Et nous sourions de le voir qui court
tant qu’il peut, à travers la cour,
sur ses grosses jambes trop courtes.

(Charles-Ferdinand Ramuz)

Recueil: Le Petit Village
Traduction:
Editions: Héros-Limite

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Les serins et le chardonneret (Jean-Pierre Claris de Florian)

Posted by arbrealettres sur 18 décembre 2020




    
Les serins et le chardonneret

Un amateur d’oiseaux avait, en grand secret,
Parmi les œufs d’une serine
Glissé l’œuf d’un chardonneret.
La mère des serins, bien plus tendre que fine,
Ne s’en aperçut point, et couva comme sien
Cet œuf qui dans peu vint à bien.
Le petit étranger, sorti de sa coquille,
Des deux époux trompés reçoit les tendres soins,
Par eux traité ni plus ni moins
Que s’il était de la famille.
Couché dans le duvet, il dort le long du jour
À côté des serins dont il se croit le frère,
Reçoit la béquée à son tour,
Et repose la nuit sous l’aile de la mère.
Chaque oisillon grandit, et, devenant oiseau,
D’un brillant plumage s’habille ;
Le chardonneret seul ne devient point jonquille,
Et ne s’en croit pas moins des serins le plus beau.
Ses frères pensent tout de même :
Douce erreur qui toujours fait voir l’objet qu’on aime
Ressemblant à nous trait pour trait !
Jaloux de son bonheur, un vieux chardonneret
Vient lui dire : il est temps enfin de vous connaître ;
Ceux pour qui vous avez de si doux sentiments
Ne sont point du tout vos parents.
C’est d’un chardonneret que le sort vous fit naître.
Vous ne fûtes jamais serin : regardez-vous,
Vous avez le corps fauve et la tête écarlate,
Le bec… oui, dit l’oiseau, j’ai ce qu’il vous plaira,
Mais je n’ai point une âme ingrate,
Et mon cœur toujours chérira
Ceux qui soignèrent mon enfance.
Si mon plumage au leur ne ressemble pas bien,
J’en suis fâché, mais leur cœur et le mien
Ont une grande ressemblance.
Vous prétendez prouver que je ne leur suis rien,
Leurs soins me prouvent le contraire.
Rien n’est vrai comme ce qu’on sent.
Pour un oiseau reconnaissant
Un bienfaiteur est plus qu’un père.

(Jean-Pierre Claris de Florian)

 

Recueil: Fables
Traduction:
Editions:

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CHIEN (Antonio García Velasco)

Posted by arbrealettres sur 28 septembre 2020



    

Poem in Dutch, Spanish, English, French, Italian, German, Portuguese, Sicilian, Romanian, Polish, Greek, Chinese, Arab, Hindi, Japanese, Farsi, Bulgarian, Icelandic, Russian, Malay, Filipino, Hebrew, Tamil, Kurdish, Bangla, Irish

Poem of the Week Ithaca 646
« Dog » Antonio García Velasco, Spain

de “Fabulas de reencarnación”

– All translations are made in collaboration with Germain Droogenbroodt –

***

CHIEN

Soudain si gâté, caressé,
on veille à ma santé,
je suis vacciné.

Au plus petit symptôme
on me conduit chez le vétérinaire,
les gâteries augmentent encore,
les voix compatissantes
cherchent à me réconforter
et me soignent à la perfection.

Je n’ai d’autre choix
que de manifester ma joie,
heureux et reconnaissant,
fidélité canine.

Quand j’étais un pauvre chiot
je mendiais dans les rues
cherchant ma nourriture.

Traduction: Elisabeth Gerlache
Translation into French by Elisabeth Gerlache

***

HOND

Plots zo verwend, geaaid,
de gezondheid verzorgd,
de vaccins geplaatst.

Bij het kleinste symptoom
word ik naar een dierenarts gebracht,
de verwenning neemt nog toe,
de medelijdende stemmen
proberen mij op te beuren
en verzorgen mij uitstekend.
Ik heb geen andere keuze
dan vreugde te vertonen,
gelukkig en dankbaar,
hondentrouwheid.

Toen ik een arm jong was
bedelde ik in de straten
zoekend naar voedsel.
Translation into Dutch by Germain Droogenbroodt

***

PERRO

De pronto tan mimado, acariciado,
con la salud cuidada,
con las vacunas puestas.

Al síntoma menor
me llevan a consulta,
los mimos acrecientan,
las voces lastimeras
buscando mi consuelo
y un cuidado exquisito.

No tengo otro remedio
que mostrar alegría,
contento agradecido,
fidelidad perruna.

Cuando era un niño pobre
mendigaba en las calles
buscando mi comida.

Antonio García Velasco

***

DOG

Suddenly, so spoiled, caressed,
well cared for
with vaccines administered.

At the slightest symptom,
I’m being taken for a consultation.

The pampering yet increases
the pitiful voices
seeking my comfort
and exquisite care.

I have no other choice
but to show joy,
happy and grateful,
canine loyalty.

When I was a poor pup,
I begged in the streets
seeking for scraps.

Translation into English by Stanley Barkan

***

CANE

All’improvviso, viziato, riempito di carezze,
ben curato
vaccinato.

Al più lieve sintomo,
vengo portato per un consulto.

Le coccole aumentano ancora
le voci pietose
cercano il mio conforto
e la continua cura.

Non ho altra scelta
che mostrare gioia,
felicità e gratitudine,
lealtà canina.

Quando ero un povero cucciolo,
mendicavo nelle strade
cercando briciole.

Traduzione di Luca Benassi
Translation into Italian by Luca Benassi

***

HUND

Plötzlich so gehätschelt, gestreichelt,
um die Gesundheit besorgt,
mit Impfungen versehen.

Beim kleinsten Wehleid
werde ich zum Arzt gebracht,
nimmt das Verwöhnen zu,
die mitleidsvollen Stimmen
die mich zu trösten versuchen
und bestens zu pflegen.

Ich habe keine andere Wahl.
als Freude zu zeigen,
glücklich und dankbar,
Hundetreue.

Als ich ein armer Welpe war
bettelte ich auf den Straßen
auf der Suche nach Essen.

Übersetzung Wolfgang Klinck
Translation into German by Wolfgang Klinck

***

CÄO

Tão pronto tão mimado e acariciado,
com a saúde cuidada,
com as vacinas já feitas.

Ao mais ínfimo sintoma
me levam para a consulta,
os mimos vão aumentando,
com as vozes lastimosas
buscando me consolar
com cuidados demasiados.

Não terei outro remédio
que demonstrar alegria,
feliz e agradecido,
fidelidade de cão.
Quando era um menino pobre
eu mendigava nas ruas
buscando a minha comida.

Tradução ao português: José Eduardo Degrazia
Translation into Portuguese by José Eduardo Degrazia

***

CANI

Tuttu a na vota vizziatu,
accarizzatu, cu la saluti assicurata
e li vaccinazioni fatti.
A lu minimu sintumu
mi portanu nnû medicu,
li vizziatini crisciunu:
li vuci lamintusi
chi offrunu cunfortu,
e li squisiti curi.
Non haju autru rimediu
chi dimustrari allegria
e fidelità canina.
Quannu era nicareddu e poviru

nta li strati
limosina dumannava:
circannu cosi pi manciari.

Traduzioni in sicilianu di Gaetano Cipolla
Translation into Sicilian by Gaetano Cipolla

***

CÂINE

Deodată răsfățat și mângâiat,
cu îngrijirea medicală la zi,
cu vaccinuri corect administrate,

la cel mai mic simptom
sunt dus la consultații
și atenția sporește,
iar voci îngrijorate
sar să mă consoleze
îngrijidu-mă tandre.

Nu pot decât să mă arăt
îndatorat și profund fericit,
recunoștință demonstrând
prin fidelitatea-mi canină.

Însă pe când era un pui nevolnic,
cerșea pe străzi
căutând ceva de mâncare.

Traducere: Gabriela Căluțiu Sonnenberg
Translation into Romanian by Gabriela Căluțiu Sonnenberg

***

PIES

Niespodziewanie rozpieszczany, głaskany
jakże zdrowy
z kompletem szczepień.

Nawet przy najmniejszych dolegliwościach,
zabierany na konsultacje.

Coraz więcej czułości
współczujące głosy
niosące mi ulgę
i nadzwyczajna dbałość.

Nie mam innego wyjścia
jak tylko okazywać radość,
szczęście i wdzięczność,
psią wierność.

Ale gdy byłem biednym szczenięciem,
żebrałem na ulicach
poszukując resztek.

Przekład na polski: Mirosław Grudzień — Małgorzata Żurecka
Translation into Polish by Mirosław Grudzień — Małgorzata Żurecka

***

Ο ΣΚΥΛΟΣ

Τελικά με κακομάθανε με χάδια
και φροντίδες
και με ενέσεις για τα νοσήματα
με το παραμικρό με τρέχουν στο γιατρό
για συμβουλές και χάπια
και υπερβολικά με θωπεύουν
και προσπαθούν με λόγια
και με προσοχή
για να περνώ καλά.

Δεν έχω άλλη επιλογή
παρά χαρά να δείχνω
κι υποταγή σκυλίσια.

Σαν ήμουνα μικρό σκυλάκι
ικέτευα σ’ όλα τα στενά
για μια μπουκιά φαί.

Μετάφραση Μανώλη Αλυγιζάκη
Translation into Greek by Manolis Aligizakis

***

突然,被宠坏,被爱抚,
被精心照料
着接种疫苗。
稍有症状,
我就被带去会诊。
娇惯还在增加
用怜爱的声音
寻求对我的安慰
和精心护理。
我别无选择
只有表示喜悦,
幸福和感激,
表达狗的忠诚。
我还是可怜小狗时,
曾在街上乞讨
寻找过剩饭。

汉 译:中 国 周道模
Translation into Chinese by William Zhou

***

ما يرويه كلب.

على حين غرة،
صرت مدللا جدا، ومحط اهتمام ورعاية قصوى
تنهال علّي اللقاحات
لأدنى عارض صحي.
وأحظى باستشارة الطبيب.
هذا الدلال صار أعظم
وأصوات العطف تنهال عليّ
تناشد راحتي
ورعايتي التامة.
لا خيار آخر أمامي
سوى التعبير عن البهجة
والسعادة والامتنان،
وإظهار الولاء الذي يميزنا نحن الكلاب،
عندما كنت جروا بائسا.
أخذت أجوب الشوارع متوسلا
بحثا عن فتات يسد رمقي.

ترجمة عن الإنجليزية سارة سليم

Translation into Arab by Sarah Selim

***

कुत्ता

अचानक, इतना बिगड़ गया, सहलाया,
अच्छी तरह से परवाह है
टीकों के साथ प्रशासित।
मामूली लक्षण पर,
मुझे परामर्श के लिए ले जाया जा रहा है।
लाड़-प्यार बढ़ता है
दयनीय आवाज
मेरे आराम की मांग
और उत्तम देखभाल।
मेरे पास और कोई चारा नहीं है
लेकिन खुशी दिखाने के लिए,
खुश और आभारी,
कुत्ते की वफादारी।
जब मैं एक गरीब पिल्ला था,
मैं सड़कों पर भीख माँगता हूँ
रद्दी माल के लिए मांग कर रहा हूँ।

Translation into Hindi by Jyotirmaya Thakur

***

それは突然に
あれほど愛撫され、大切にされていたのに
ワクチンだって打ってもらった

ちょっとした症状が出て
病院に連れて行かれた
ますます甘やかされた
哀れむ声
なぐさめ方を探してた
申し分のない看護

他にできることはなかった
よろこびを見せること
しあわせな感謝に満ちた
犬の忠誠心

かつて僕がまずしい子犬の頃
道端で食べ物の恵んでもらっていたのだったよな

アントニオ・ガルシア・ヴァレスコ(スペイン)
Translation into Japanese by Dr. Manabu Kitawaki

***

سگ
ناگهان، بسیار لوس و‌نوازش شدم
خوب مراقب شدم و
واکسن هایم زده شد.
با کمترین علایمی،
برای معاینه مرا بردند
نوازش ها همچنان ادامه دارد
صدای ترحم آمیز
برای راحتی من
و‌ مراقبتی عالی.
چاره ای دیگر ندارم
غیر از نشان دادن خرسندی،
شادی و سپاسگذاری،
و وفاداری ام.
زمانی توله ی بیچاره ای بودم،
محتاج در خیابانها
بدنبال ته مانده ای .
آنتونیو گراسیا ولاسکو، اسپانیا

ترجمه: سپیده زمانی
Translation into Farsi by Sepideh Zamani

***

КУЧЕ

Изведнъж, така разглезено, ласкаво,
добре обгрижено,
с редовна ваксинация.
И при най-малкия симптом
ме водят на консултация.
Глезенето още повече усилва
жалостивите гласове,
искащи моя комфорт
и деликатна грижа.
Аз нямам друг избор,
но да демонстрирам радост,
щастие и благодарност,
кучешка лоялност.
Когато бях бедно кутре,
аз просех по улиците,
търсейки отпадъци.

ПРЕВОД ОТ АНГЛИЙСКИ: ИВАН ХРИСТОВ
Trranslation into Bulgarian by Ivan Hristov

***

HUNDUR

Allt í einu er dekrað við mig, mér er klappað,
það er annast um mig
ég er bólusettur.

Við minnsta kvilla
er farið með mig í skoðun.
Eftirlætið bætist við
vorkunnsamar raddir
sem veita mér huggun
og frábæra umsjá.

Ég á ekkert annað val
en að sýna gleði,
sæll og þakklátur,
hundtryggur.

Þegar ég var vesæll hvolpur,
betlaði ég á götum úti
og snapaði matarleifar.

Þór Stefánsson þýddi
Translation into Icelandic by Þór Stefánsson

***

СОБАКА

Внезапно избалована, наглажена,
у врача проверена,
прививки все поставлены.
Лишь стоит приболеть,
меня ведут лечить.
Еще мне потакают,
и добрым, милым голосом
ежесекундно хвалят
и оберегают.
Никак нельзя иначе:
я всегда счастливая,
и очень благодарная,
как верная собака.
Когда была я маленькой,
слонялась я по улицам
в поисках покушать.

Перевод на русский язык Дарьи Мишуевой
Translation into Russian by Daria Mishueva

***

ANJING

Tiba-tiba menjadi begitu manja, dengan mesra dipeluk
mendapat perhatian
diberikan suntikan vaksin.

Pabila ada simptom ringan,
dibawa ke hospital untuk mendapatkan nasihat.
kemanjaannya meningkat
suara hiba
meminta keselesaan
dan penjagaan cermat.

Tiada pilihan lain
melainkan berasa gembira,
bahagia dan berasa syukur
kesetiaan seekor anjing.

Tatkala sekor anak anjing
hidup melarat,
pernah mengemis di jalan
demi sisa makanan.

Penterjemah :Dr.Raja Rajeswari Seetha Raman
Translation into Malay by Dr.Raja Rajeswari Seetha Raman

***

ASO

Biglana lamang, sobrang layaw, hinahaplos
Alagang-alaga
tinurukan ng bakuna.

Kahit maliit lang na sintomas,
agad ako’y ipinakokonsulta.

Sobrang pag-aalagang nakapagdaragdag
ng mga tinig na nahahabag
nag-aalala sa aking kalagayan
at pangangalaga’y katangi-tangi nga.

Wala akong ibang pagpipilian
kundi magpakita ng tuwa
kasiyahan at pagpapapasalamat
marubdob na katapatan.

Ako noo’y tutang gala
Ako’y namamalimos sa mga daan
Naghahanap ng basura.

Translation into Filipino by Eden S Trinidad-Philippines

***

פִּתְאוֹם, מְפֻנָּק כָּל כָּךְ, מְלֻטָּף,
מְטֻפָּל הֵיטֵב
עִם חִסּוּנִים שׁוֹטְפִים.

בַּתַּסְמִין הַקַּל בְּיוֹתֵר,
נִלְקַחְתִּי לַהִתְיָעֲצוּת.
הַהִתְפַּנְּקוּת עוֹד גּוֹבֶרֶת
הַקּוֹלוֹת מְלֵאֵי הָרַחֲמִים
מְחַפְּשִׂים לִי נוֹחִיּוּת
וְטִפּוּל מְצֻיָּן.

אֵין לִי בְּרֵרָה
אֶלָּא לְהֵרָאוֹת עַלִּיז,
מְאֻשָּׁר וּמַכִּיר-תּוֹדָה,
נֶאֱמָנוּת כַּלְבִּית.

כְּשֶׁהָיִיתִי גּוּר מִסְכֵּן,
קִבַּצְתִּי בָּרְחוֹבוֹת
מְחַפֵּשׂ שְׁאֵרִיּוֹת.

תרגום מספרדית לאנגלית: ג’רמיין דרוגנברודט וסטנלי ברקן
תרגום מאנגלית לעברית: דורית ויסמן
בצילום: גאיה, כלבו של ג’רמיין דרוגנברודט
Translation into Hebrew by Dorit Weisman

***

நாய்

திடீரென, கெடுக்கப்பட்டு, அணைக்கப்பட்டு
பத்திரமாகக் காப்பாற்றப்பட்டு
அம்மைப்பால் மருந்து தரப்பட்டது
சிறு நோய்க்குறி தெரிந்த உடனே
என்னை அறிவுரையாளனாக ஏற்று.
அதிக சலுகை மேலும் அதிகரிக்கிறது!
பரிதாபத்திற்குரிய குரல்கள்
என்னுடைய ஆறுதலையும்
அருமையான கவனிப்பையும் கேட்கிறது.
எனது மகிழ்வையும், இன்பத்தையும், நன்றியையும்
நாய்மேல் வைத்த பற்றையும் காட்டுவதைத்தவிற
எனக்கு வேறு வழியில்லை!
நான் ஒரு சிறு நாய்க்குட்டியாக
நான் தெருக்களில் பிச்சை எடுத்தேன்
மிச்சம் மீதியை வேண்டி!
மூலக்கவிஞர்

Translation into Tamil by Dr. N V Subbaraman

***

SEG

Ji nişkava weha lareyî, pelandî,
hay ji xwe hebûna tendirustî,
li dijî vîrosan aşlebûyî.

Li dijî her nima nexweşiyekê
ez dibirim bo şêwirdariyê,
lareyetî bêtir dibe,
dengên liberketiyan
ewên hewildin di ber dil re biçin,
bi awarteyî xemgîn e.

Tu rê li ber min nemane.
Divê şadî bê raberkirin,
xenî û spasdrî,
seghezî.

Dema ez têjikekî reben bûm
li ser kolanan parsdikir
li xwarinê digerîm.

Translation into Kurdish by Hussein Habasch

***

সারমেয়

হঠাৎ করে, এত আদরে, নষ্ট আমি,
এত যত্ন
আর টিকা দিয়ে।
একটু সামান্য লক্ষণ দেখা দিলে,
আমাকে নেওয়া হয় ডাক্তারের পরামর্শের জন্য।
এত প্রশ্রয় তবুও বাড়িয়ে দেয়
করুন কণ্ঠস্বর গুলি
খুঁজে বেড়ায় আমার স্বাচ্ছন্দ
আর অসাধারণ যত্ন।
আমার আর নেই কোন উপায়
শুধু আছে প্রকাশ করা আমার আনন্দ,
সুখ আর কৃতজ্ঞতা,
কুকুরের আনুগত্য।
যখন আমি ছিলাম আশ্রয়হীন সারমেয় শাবক,
আমি ভিক্ষা করেছি রাস্তায় রাস্তায়
খুঁজে বেড়িয়েছি এঁটো।
অ্যান্টোনিও গার্সিয়া ভেলাসকো, স্পেন

Translation into Bangla by Tabassum Tahmina Shagufta Hussein

***

GADHAR

Tugtar an-aire dhom anois,
táim loite acu,
agus na vaicsaíní go léir
faighte agam.
Má tá siomptóm ar bith le brath orm,
tugtar chuig an lia láithreach mé.

Déantar a thuilleadh peataireachta fós orm
guthanna truachroíocha
ag iarraidh sólás a thabhairt dom
agus a bheith go deas liom.
Níl aon rogha agam
ach áthas a léiriú,
bheith sona is bheith buíoch,
dílseacht mhadrúil.

Nuair nach raibh ionam ach coileán,
is ar na sráideanna a bhíos
ag lorg déirce.

Transcreation into Irish by Gabriel Rosenstock

(Antonio García Velasco)

 

Recueil: ITHACA 646
Editions: POINT
Site: http://www.point-editions.com/en/

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L’écorce du bouleau (Pablo Neruda)

Posted by arbrealettres sur 10 mars 2020



L’écorce du bouleau

Comme l’écorce du bouleau
tu es argent, tu es parfum,
et je dois emprunter tes yeux
lorsque je décris le printemps.

J’ignore ton nom mais il n’est
de premier volume sans femme:
on écrit avec des baisers
(et je réclame le silence
pour laisser la pluie s’approcher)

[…]

Tu es celle que tu seras,
la femme innée de mon amour,
celle qui fut faite d’argile
ou de plumes, la femme-oiseau,
ou la femme territoriale,
chevelure dans le feuillage,
ou bien la femme concentrique
tombée comme une monnaie nue
dans le bassin d’une topaze
ou celle d’à présent qui soigne
mon incorrecte indiscipline
ou celle qui n’est jamais née
et que je continue d’attendre.

Car la lumière du bouleau
est la peau même du printemps.

(Pablo Neruda)


Illustration

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Le pauvre pion (Francis Jammes)

Posted by arbrealettres sur 15 novembre 2019



pion

Le pauvre pion

Le pauvre pion doux si sale m’a dit : j’ai
bien mal aux yeux et le bras droit paralysé.

Bien sûr que le pauvre diable n’a pas de mère
pour le consoler doucement de sa misère.

Il vit comme cela, pion dans une boîte,
et passe parfois sur son front froid sa main moite.

Avec ses bras il fait un coussin sur un banc
et s’assoupit un peu comme un petit enfant.

Mais au lieu de traversin bien blanc, sa vareuse
se mêle à sa barbe dure, grise et crasseuse.

Il économise pour se faire soigner.
Il a des douleurs. C’est trop cher de se doucher.

Alors il enveloppe dans un pauvre linge
tout son pauvre corps misérable de grand singe.

Le pauvre pion doux si sale m’a dit : j’ai
bien mal aux yeux et le bras droit paralysé.

(Francis Jammes)

 

 

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Nourrir les bêtes (Thomas Vinau)

Posted by arbrealettres sur 27 septembre 2019




    
Nourrir les bêtes

Vient ce moment
où tu n’es pas encore
un homme
mais déjà plus
un enfant
tu comprends
que les fleurs
germent poussent
fleurissent
puis meurent
tout cela n’est
pas bien grave
c’est juste
qu’il faut nourrir
et soigner les bêtes
pour qu’elles vivent
c’est juste
que pour aimer
il faut avoir
quelque chose
à perdre

(Thomas Vinau)

 

Recueil: Juste après la pluie
Traduction:
Editions: Alma

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Milord (Georges Moustaki)

Posted by arbrealettres sur 31 août 2019



 

Régis Bernard _Fille_de_joie_a_Amsterdam_78

Milord

Allez, venez, Milord!
Vous asseoir à ma table;
Il fait si froid, dehors,
Ici c’est confortable.
Laissez-vous faire, Milord
Et prenez bien vos aises,
Vos peines sur mon coeur
Et vos pieds sur une chaise
Je vous connais, Milord,
Vous ne m’avez jamais vue
Je ne suis qu’une fille du port,
Qu’une ombre de la rue…

Pourtant je vous ai frôlé
Quand vous passiez hier,
Vous n’étiez pas peu fier,
Dame! Le ciel vous comblait:
Votre foulard de soie
Flottant sur vos épaules,
Vous aviez le beau rôle,
On aurait dit le roi…
Vous marchiez en vainqueur
Au bras d’une demoiselle
Mon Dieu!… Qu’elle était belle…
J’en ai froid dans le coeur…

Allez, venez, Milord!
Vous asseoir à ma table;
Il fait si froid, dehors,
Ici c’est confortable.
Laissez-vous faire, Milord,
Et prenez bien vos aises,
Vos peines sur mon coeur
Et vos pieds sur une chaise
Je vous connais, Milord,
Vous ne m’avez jamais vue
Je ne suis qu’une fille du port
Qu’une ombre de la rue…

Dire qu’il suffit parfois
Qu’il y ait un navire
Pour que tout se déchire
Quand le navire s’en va…
Il emmenait avec lui
La douce aux yeux si tendres
Qui n’a pas su comprendre
Qu’elle brisait votre vie
L’amour, ça fait pleurer
Comme quoi l’existence
Ça vous donne toutes les chances
Pour les reprendre après…

Allez, venez, Milord!
Vous avez l’air d’un môme!
Laissez-vous faire, Milord,
Venez dans mon royaume:
Je soigne les remords,
Je chante la romance,
Je chante les milords
Qui n’ont pas eu de chance!
Regardez-moi, Milord,
Vous ne m’avez jamais vue…
…Mais vous pleurez, Milord?
Ça je l’aurais jamais cru!

Eh ben, voyons, Milord!
Souriez-moi, Milord!
…Mieux que ça! Un petit effort…
Voilà, c’est ça!
Allez, riez, Milord!
Allez, chantez, Milord!
La-la-la…

Mais oui, dansez, Milord!
La-la-la…
Bravo Milord!
La-la-la…
Encore Milord!…
La-la-la…

(Georges Moustaki)

Illustration: Régis Bernard


 

 

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LE NOM TERRESTRE (Marina Tsetaeva)

Posted by arbrealettres sur 17 août 2019



Illustration: Ben Madeska
    
LE NOM TERRESTRE

Un verre d’eau ! Lors d’une soif torride
« Donne-moi à boire, sinon je meurs. »
Insistant, faible, comme un chant,
Telle une plainte dans la chaleur…

Et je redis, et je répète, plus fort,
Et à nouveau, encore, encore,
Comme la nuit, quand on veut tant dormir
Et que sans cesse le sommeil fuit.

Comme si on manquait d’herbes dans les prés,
D’herbes qui soignent de tous les maux !
J’insiste, je perds les mots, je dis encore,
Telle la syllabe d’un mot d’enfant,

À chaque instant, toujours unique,
Le plus serré, la corde au cou,
Car ici-bas le nom terrestre
Ce n’est pas ça, ce n’est pas tout.

(Marina Tsetaeva)

 

Recueil: Mon dernier livre 1940
Traduction: Véronique Lossky
Editions: Cerf

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