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Posts Tagged ‘songe’

L’AVENTURIER (Jaroslav Seifert)

Posted by arbrealettres sur 11 mars 2023




    
L’AVENTURIER

Dans le noeud bleu des veines
que voile une peau tendre
il vit une carte des fleuves ;
combien il désirait
ces courants bleus ! S’y rendre
sans retour désormais !

Au souffle de la bouche
qui effleura son visage
il sut le sel des mers.
Là-bas, une tempête bouge
et, hors des livres des mages,
passe un songe fiévreux.

Les serpents, leurs danses : il sait ;
le venin vint d’une lèvre
quand chantonna la flûte.
Abattu, accablé,
dans le demi-jour lunaire
il rentrait par la suite.

Et combien de ses rêves
dans un sein se sont éteints ;
les rires lui étaient pleurs,
les larmes, elles, étaient gaies.
Le doigt tremblait, discret,
contre le tambourin.

(Jaroslav Seifert)

Recueil: Les danseuses passaient près d’ici
Traduction: Petr Kral et Jan Rubes
Editions: Actes Sud

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Je rêve d’un beau soir (Jacques Rabemananjara)

Posted by arbrealettres sur 25 février 2023




    
Je rêve d’un beau soir au bord d’un étang vert
Où la verdeur des joncs s’irise de sarcelles.
L’azur y baignera ses arrière-étincelles
Comme des souvenirs dans l’onde découverts.

Les flots auront des fleurs d’écumes et d’éclairs.
Mon coeur, qu’auront repris les ultimes parcelles
D’une offrande oubliée au creux de la nacelle,
Sentira le frôler le Songe enfui dans l’air.

Sur les verts espaliers où pend le crépuscule,
Mes doigts fins s’en iront, au bout des nénuphars,
Cueillir le vert phosphorescent des libellules.

Mais j’y verrai bientôt, sous le cri des canards,
La lune éparpiller, en harmonie inerte,
Ses sanglots bleus d’argent au cil des moires vertes.

(Jacques Rabemananjara)

 

Recueil:Oeuvres complètes POÉSIE
Editions: Présence africaine

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Je t’ai possédée, ô fille de Kuprôs (Sappho)

Posted by arbrealettres sur 24 février 2023



Illustration: Odile Wysocki-Grec
    
Je t’ai possédée, ô fille de Kuprôs !
Pâle, je servis ta volupté cruelle…
Je pris, aux lueurs du flambeau d’Hesperôs,
Ton corps d’Immortelle.

Et ma chair connut le soleil de ta chair…
J’étreignis la flamme et l’ombre et la rosée,
Ton gémissement mourait comme la mer
Lascive et brisée.

Mortelle, je bus dans la coupe des Dieux,
J’écartai l’azur ondoyant de tes voiles…
Ma caresse fit agoniser tes yeux
Sur ton lit d’étoiles…

… Depuis, c’est en vain que la nuit de Lesbôs
M’appelle, et que l’or du paktis se prolonge…
Je t’ai possédée, ô fille de Kuprôs,
Dans l’ardeur d’un songe.

(Sappho)

 

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CHANT D’AMOUR (Alphonse de Lamartine)

Posted by arbrealettres sur 21 février 2023




    
CHANT D’AMOUR
Naples, 1822.

Si tu pouvais jamais égaler, ô ma lyre,
Le doux frémissement des ailes du zéphyre
A travers les rameaux,
Ou l’onde qui murmure en caressant ces rives,
Ou le roucoulement des colombes plaintives,
Jouant aux bords des eaux ;

Si, comme ce roseau qu’un souffle heureux anime,
Tes cordes exhalaient ce langage sublime,
Divin secret des cieux,
Que, dans le pur séjour où l’esprit seul s’envole,
Les anges amoureux se parlent sans parole,
Comme les yeux aux yeux ;

Si de ta douce voix la flexible harmonie,
Caressant doucement une âme épanouie
Au souffle de l’amour,
La berçait mollement sur de vagues images,
Comme le vent du ciel fait flotter les nuages
Dans la pourpre du jour :

Tandis que sur les fleurs mon amante sommeille,
Ma voix murmurerait tout bas à son oreille
Des soupirs, des accords,
Aussi purs que l’extase où son regard me plonge,
Aussi doux que le son que nous apporte un songe
Des ineffables bords !

Ouvre les yeux, dirais-je, à ma seule lumière !
Laisse-moi, laisse-moi lire dans ta paupière
Ma vie et ton amour !
Ton regard languissant est plus cher à mon âme
Que le premier rayon de la céleste flamme
Aux yeux privés du jour.

[…]

(Alphonse de Lamartine)

 

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L’intensité l’inattendu (Mireille Fargier-Caruso)

Posted by arbrealettres sur 17 février 2023



Illustration: Edward Hopper
    
L’intensité l’inattendu
force fragile du désir
un éclair du dedans
que l’on croit sans limites

comme Ulysse dépasser le Chaos
trouver dans l’univers sa place
dans les déchirements de l’Histoire
condamnés à choisir

il nous faut vivre avec ces failles
chercher dans nos voyages des indices
pour avoir raison d’espérer

en coulisse des songes plus vifs que nous
tenus à l’impossible

même si le partage étranglé
même si tu te sais périssable

dis-toi que maintenant est là devant toi

ouvre-le

(Mireille Fargier-Caruso)

Recueil: Comme une promesse abandonnée
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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UNE LUMIÈRE ACROPOLE (André Frénaud)

Posted by arbrealettres sur 8 février 2023




    
UNE LUMIÈRE ACROPOLE
à Jean Tardieu

Une lumière, acropole au sommet de mes songes,
ayant lui s’éboula, les bêtes m’ont repris
dans le tourbillon de leurs serres froides
et me creusent en nouveau nid
pour que j’y puisse à loisir irrité
cuver ma cendre
et soudain m’éclairer à ma réalité,
avant de retomber par l’épaisseur si lente.

(André Frénaud)

Recueil: Il n’y a pas de paradis
Traduction:
Editions: Gallimard

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SUR L’AIR DE COMME EN SONGE (Li Qing Zhào)

Posted by arbrealettres sur 21 janvier 2023



Illustration: Dai Dunbang
    
SUR L’AIR DE COMME EN SONGE

Souvent je me rappelle la gloriette du ruisseau à la tombée du jour,
Alors que plongée dans l’ivresse j’avais perdu le chemin pour rentrer.
L’euphorie passée, au soir revenant en barque,
Égarée, je m’enfonçai dans les lotus en fleurs.
Frayer la brèche, frayer la brèche,
D’effroi je fis s’envoler toute une grève de goélands et d’aigrettes !

***

(Li Qing Zhào) (1084 — après 1149)

Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise

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Songe d’une nuit d’été (Cécile Coulon)

Posted by arbrealettres sur 8 janvier 2023



Illustration: Benjamin Chaud
    
Songe d’une nuit d’été

C’est une mélodie simple qui passe par la fenêtre,
les amants sont rompus, ils vont pour s’endormir,
mais dans la chaleur du soir le plus fort
c’est le désir.
La voilà qui demande : Encore?
Et lui de répondre : Peut-être…

(Cécile Coulon)

 

Recueil: Les romantiques
Traduction:
Editions: Robert Laffont

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Cent fois que je vais à la poste (Varlam Chalamov)

Posted by arbrealettres sur 21 décembre 2022




    
Cent fois que je vais à la poste
Pour aller chercher ta lettre.
À présent la nuit je ne dors plus,
je ne vis plus le jour.

Je crois, je crois à tous les signes,
Aux songes comme aux araignées,
Je crois aux skis, je crois en été
Aux barques étroites qui filent.

Je crois au vrombissement des automobiles,
À leurs orageux diesels,
Aux colombes messagères,
Aux mâts des navires.

Je crois aux sifflets des vapeurs,
Je crois aux trains,
Même à l’été
Je crois parfois.

Je crois dans les traîneaux à rennes,
Dans la boussole du voyageur
Près de ses cartes engivrées
Et dans la désolation de l’heure.

Dans les vaillantes kibitkas
Et dans les chiens d’attelage,
Aux escargots et leur sang-froid,
À l’indolence des tortues.

Je crois comme par enchantement,
Au sang qui se glace,
Je crois aussi à la patience
Et à ton amour.

(Kibitka : traîneau couvert)

(Varlam Chalamov)

 

Recueil: Cahiers de La Kolyma
Traduction: du russe par Christian Mouze
Editions: Maurice Nadeau

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Un songe de printemps (Jin Zan)

Posted by arbrealettres sur 8 décembre 2022



Illustration: Shan Sa
    
Un songe de printemps

Durant la nuit, un air de printemps est entré par la fenêtre.
Il sut gagner rapidement les profondeurs de ma chambre.
Il sut toucher mon âme et la fit convoler sur les bords du Yangzi.
Elle se tenait sur la rive, la belle que le printemps m’amène.
Il dura bien peu ce songe de printemps ;
Le temps d’un mouvement sur l’oreiller.
Mais cet instant si court me fit voyager cent lieues.

(Jin Zan)

(VIII siècle)

 

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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