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Poésie

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Ils étaient huit jeunes hommes (Charles Camproux)

Posted by arbrealettres sur 26 juin 2022




    
Ils étaient huit jeunes hommes

Ils étaient huit jeunes hommes, nus, nus et qui tremblaient
ils étaient descendus, gelés, enchaînés,
l’un derrière l’autre, nus, les mains dans le dos
et ils savaient pour sûr, ils se savaient condamnés:
le grand camion, au fond, le long de la grande allée,
l’allée des longs cyprès, longs, hauts, est venu s’arrêter,
et les huit jeunes hommes nus, blancs, sans mot sont descendus
entre des hommes verts, vert clair, qui les font se tenir:
se tenir, blancs, nus, devant la grande tombe,
devant le grand trou, long, profond, tout juste creusé,
là tout le long, là, le long de l’allée,
derrière les tombeaux, tout le long, comme une longue tranchée:
par la mitraillette, d’un coup, ils ont tous plongé
dans la longue tranchée, blancs, nus, avec un peu de sang
sur leurs torses blancs, blancs, nus, aux premières aurores:
ils étaient huit jeunes hommes, nus, dépouillés de lendemains.

(Charles Camproux)

Recueil: Guerre à la guerre
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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OH ! TES SI DOUCES MAINS… (Emile Verhaeren)

Posted by arbrealettres sur 3 juin 2022




    
OH ! TES SI DOUCES MAINS…

Oh ! tes si douces mains et leur lente caresse
Se nouant à mon cou et glissant sur mon torse
Quand je te dis, au soir tombant, combien ma force
S’alourdit, jour à jour, du plomb de ma faiblesse !

Tu ne veux pas que je devienne ombre et ruine
Comme ceux qui s’en vont du côté des ténèbres,
Fût-ce avec un laurier entre leurs mains funèbres
Et la gloire endormie en leur creuse poitrine.

Oh ! que la loi du temps m’est par toi adoucie,
Et que m’est généreux et consolant ton songe.
Pour la première fois tu berces d’un mensonge
Mon coeur qui t’en excuse et qui t’en remercie ;

Mais qui sait bien pourtant que toute ardeur est vaine
Contre tout ce qui est et tout ce qui doit être,
Et qu’un profond bonheur se rencontre peut-être
A finir en tes yeux ma belle vie humaine.

(Emile Verhaeren)

Recueil: 35 siècles de poésie amoureuse
Traduction:
Editions: Saint-Germain-des-Prés Le Cherche-Midi

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Cirque (José Saramago)

Posted by arbrealettres sur 16 mai 2022




    
Cirque

Le poète n’est pas quelqu’un, il est bête chose
Qui de la geôle ou la cage a vagabondé
Et il parcourt le monde en cabriolant,
Souvenir du cirque qu’il a inventé.

Il étend sur le sol la cape qui le découvre,
Fait de la poitrine le tambour, et roule, saute,
Il est ours danseur, singe savant,
Oiseau torse du bec et échasse.

Pour finir il joue la fanfare du poème,
Grosse caisse, basson, notes écorchées,
Et parce que bête il est, bête il reste là
A chanter pour les étoiles éteintes.

***

Circo

Poeta não é gente, é bicho coiso
Que da jaula ou gaiola vadiou
E anda pelo mundo às cambalhotas,
Recordadas do circo que inventou.

Estende no chão a capa que o destapa,
Faz do peito tambor, e rufa, salta,
E urso bailarino, mono sábio,
Ave torta de bico e pernalta.

Ao fim toca a charanga do poema,
Caixa, fagote, notas arranhadas,
E porque bicho é, bicho lá fica,
A cantar às estrelas apagadas.

(José Saramago)

 

Recueil: Les poèmes possibles
Traduction: Nicole Siganos
Editions: Jacques Brémond

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LA PAROLE (António Ramos Rosa)

Posted by arbrealettres sur 9 juillet 2021




    
LA PAROLE

La parole est une statue immergée, un léopard
qui frémit en des taillis obscurs, une anémone
dans une chevelure. Parfois c’est une étoile qui
projette son ombre sur un torse.
La voici errante dans la clameur de la nuit,
aveugle et nue, mais vibrante de désir
comme un magnolia mouillé. Rapide est la bouche
qui effleure juste les rayons d’une autre lumière. Je
touche ses fines chevilles, ses cheveux ardents et je
vois une eau limpide dans la nacre d’une coquille.
Et c’est toujours un corps aimant et fugace
qui chante dans une mer musicale le sang des voyelles.

(António Ramos Rosa)

 

Recueil: Le cycle du cheval
Traduction: du portugais par Michel Chandeigne
Editions: Gallimard

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UN DUO (Jacques Lacarrière)

Posted by arbrealettres sur 19 mars 2021



Illustration: Giorgio de Chirico
    
UN DUO
(Le duo)

Un couple de mannequins en bois utilisé dans les ateliers de sculpture :
habitants typiques du monde chiriquien.
Qu’attendre des amours d’un tel couple
si ce n’est un rituel d’insectes rigides, une pariade de robots ?

— Étant sans bras pour nous étreindre, rien ne pourra nous séparer.
— Étant sans sexe pour aimer, rien ne pourra nous désunir.
— Sans yeux et sans nez, mon visage. je suis une élégie de cire.
— Sans front; sans bouche, mon partage. je suis un brouillon de sourire.
— Mannequins au torse d’absence ?
— Simulacres que l’éther encense ?
— Appelants du plus grand silence ?
— Aubiers d’être enfantés du tremble ?

Le savez-vous qu’ainsi livrés à la rigidité dorienne des momies,
vous êtes entrelacés à l’énigme du monde?
Le savez-vous qu’en cette terrasse ensoleillée
s’ébauche en vous une théologie des automates ?

(Jacques Lacarrière)

 

Recueil: A l’orée du pays fertile
Traduction:
Editions: Seghers

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Chanson de la maîtresse du boulanger (Jean Follain)

Posted by arbrealettres sur 6 mai 2020



 

Mon coeur connaît le boulanger
au torse comme un marbre antique
seul en cachette il travaille
pour me faire un pain de blandices
je suis au monde pour lui seul
lui seul sait voir dans mes yeux d’or.
Beau secret de la fleur de blé
secret tu dors
sauf en lui.

(Jean Follain)

 

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Les flèches de la Beauté (Marcel Proust)

Posted by arbrealettres sur 13 janvier 2020



 

Albert Lynch b

Pour peu que la nuit tombe et que la voiture aille vite, à la campagne, dans une ville,
il n’y a pas un torse féminin, mutilé comme un marbre antique par la vitesse qui nous entraîne
et le crépuscule qui le noie, qui ne tire sur notre cœur, à chaque coin de route, du fond de chaque boutique,
les flèches de la Beauté, de la Beauté dont on serait parfois tenté de se demander si elle est en ce monde autre chose
que la partie de complément qu’ajoute à une passante fragmentaire et fugitive notre imagination surexcitée par le regret.

(Marcel Proust)

Découvert ici Dans le Couloir

Illustration: Albert Lynch

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AMOUR DÉSHABILLÉ DE NOUS… (Jean Rousselot)

Posted by arbrealettres sur 9 octobre 2019




    
AMOUR DÉSHABILLÉ DE NOUS…

Amour déshabillé de nous comme, de mousse,
Par la rage de l’eau,
Un mur, toujours plus bas plongeant dans le terreau
Peuplé de larves douces,

Ton torse blanc résiste à la griffe des houx,
Aux hachures de l’ombre
Et chaque pierre en toi reste fidèle au nombre
Qui s’est défait de nous.

Te retrouverons-nous ? Brûlerons-nous ensemble ?
Parfois, dans le charbon,
L’enfant croit reconnaître en nos amas profonds
Quelqu’un qui lui ressemble,

Mais ce n’est qu’un nuage, une feuille, un serpent
Ou quelque rêve informe
Comme en font les rochers lorsque l’on croit qu’ils dorment
A l’ombre des vivants.

Et toi tu resplendis, à la fois vierge et veuve
Au soleil revenu :
On dirait que, nous arrachant à ton flanc nu,
La mort te fait plus neuve,

Amour femelle, et ton entêtement joyeux
Dans la beauté du monde
Qui n’est beau que de toi, de ton haleine blonde
Et de l’eau de tes yeux.

(Jean Rousselot)

 

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LES STATUES (Henri De Régnier)

Posted by arbrealettres sur 18 septembre 2019



 

Aristide Maillol

LES STATUES

Les feuilles, une à une, et le temps, heure à heure,
Tombent dans le bassin dont le jet d’eau larmoie;
Iphigénie en sang près d’Hélène de Troie,
Danaé, Antigone, Ariane qui pleure,

Marbres purs que le vent soufflette ou qu’il effleure!
Si le torse se cambre ou si la tête ploie,
Héroïque au destin qui caresse ou rudoie,
La statue aux yeux blancs persévère ou demeure.

L’éternelle beauté subsiste à jamais belle.
Le Silence a ployé le crêpe de son aile
Et songe, assis, le coude au socle où il inscrit

Le nom de l’héroïne énergique ou morose
Qui dérobe un sourire ou cache un sein meurtri
Derrière les cyprès ou derrière des roses.

(Henri De Régnier)

Illustration: Aristide Maillol

 

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Au premier rendez-vous… (Samantha Barendson)

Posted by arbrealettres sur 9 septembre 2018



Illustration: Konstantin Razumov
    
Au premier rendez-vous…

Au premier
rendez-vous
j’essaie d’avoir
l’air belle
drôle
intelligente

Je parle
de ce qu’il aime
de ce qu’il me dit aimer

Il me dit
qu’il n’en a rien à foutre
Il me dit
qu’il veut faire l’amour

Et tandis
que ses doigts
glissent
là où
aucun
autre
n’est
jamais allé
je me dis
que tout ça

n’est pas
très
raisonnable

Plus tard
Nous faisons..l’amour
à Amsterdam

Il y a
ses épaules
ses cheveux gris
les poils de son torse
son cul ferme
et ses yeux
parfois verts
parfois bruns
ses mains
son sourire
et sa queue courbée

(Samantha Barendson)

 

Recueil: L’Ardeur ABC poétique du vivre plus
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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