Turquoise rafale fuient
Par couples les perroquets
Véhémences
Le monde flambe
Un arbre
Bouillonnant de corbeaux
S’embrase sans brûler
Immobile
Parmi les hauts tournesols
Tu es
Pause de la lumière
Le jour
Un vaste mot clair
Battements de voyelles
Tes seins
Mûrissent sous mes yeux
Ma pensée
Est plus légère que l’air
Je suis réel
Je vois ma vie je vois ma mort
Le monde est réel
Je vois
J’habite une transparence
Entre mer, entre ciel, le bleu de ton destin.
Opaque toutefois, veiné de gravité, ancré
d’azur éteint. Comme si la lumière avait chu.
En toi, son deuil céruléen.
Le désir transparent que tout arrive dans l’éclair ;
la peur que les jambes cassent ;
l’idée d’une certaine perfection, même imparfaite, telle turquoise ;
la profondeur, toujours :
le ciel.
(Franck André Jamme)
Recueil: La récitation de l’oubli
Traduction:
Editions: Flammarion
Je m’habille chaque jour d’un bleu nouveau
veste électrique ou indigo
turquoise vase troublée des émaux
fluorescence ou lait de brumes
rage violette cernes de lune
Circassienne beauté, ces brasiers lumineux
ne sont pas faits pour le mépris qui blesse,
ou la fureur. Ils offrent, flambeaux généreux,
l’amour qui va nous rendre heureux,
du plaisir la douce promesse.
S’ils étaient faits pour éloigner un coeur aimant,
accroître ses souffrances,
s’ils étaient envoyés par un dieu inclément,
alors la différence
serait nette, et la voûte tranquille des cieux
ne leur donnerait point ce bleu turquoise,
le soleil bienfaisant se soucierait fort peu
de leur offrir ce même feu
qui de désir son corps embrase.
(Constantin Cavàfis)
Recueil: Tous les poèmes
Traduction: Michel Volkovitch
Editions: Le miel des Anges
Vois, tandis que gauchit la bruine sournoise,
Les nuages pareils à des chauves-souris,
Et là-bas, gris et bleu sous les cieux bleus et gris,
Ruisseler le reflet pluvieux de l’ardoise.
O mon divin Tourment, dans tes yeux bleus et gris
S’aiguise et se ternit le reflet de l’ardoise.
Tes longs doigts, où sommeille une étrange turquoise,
Ont pour les lys fanés un geste de mépris.
La clarté du couchant prestigieux pavoise
La mer et les vaisseaux d’ailes de colibris…
Vois là-bas, gris et bleu sous les cieux bleus et gris,
Ruisseler le reflet pluvieux de l’ardoise.
Le flux et le reflux du soir déferlent, gris
Comme la mer, noyant les pierres et l’ardoise.
Sur mon chemin le Doute aux yeux pâles se croise
Avec le Souvenir, près des ifs assombris.
Jamais, nous défendant de la foule narquoise,
Un toit n’abritera nos soupirs incompris…
Vois là-bas, gris et bleu sous les cieux bleus et gris,
Ruisseler le reflet pluvieux de l’ardoise.