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Poésie

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Les enfants de la liberté (Maram al-Masri)

Posted by arbrealettres sur 31 mai 2023




    
Les enfants de la liberté
ne s’habillent pas en Petit Bateau.
Leur peau s’habitue vite à une étoffe rêche.
Les enfants de la liberté
ont des vêtements usés
et des chaussures trop grandes pour leurs pieds.
Souvent ils enfilent l’air nu ou la terre.

Les enfants de la liberté
ne connaissent pas le goût de la banane
ni de la fraise.
Ils mangent du pain sec
trempé dans l’eau de la patience.

Le soir,
les enfants de la liberté
ne prennent pas de bain,
ils ne soufflent pas dans des bulles de savon.
Ils jouent avec des pneus, des cailloux
et les débris
des bombes.

Avant de dormir,
les enfants de la liberté ne se brossent pas les dents.
Ils n’attendent pas les histoires magiques
de prince et de princesse.

Ils écoutent le bruit de la peur et du froid.
Sur les trottoirs de la rue,
devant les portes de leur maison détruite,
dans les camps des pays voisins ou
dans les tombes.

Les enfants de la liberté
attendent comme
tous les enfants du monde
le retour de leur mère.

(Maram al-Masri)

Recueil: Elle va nue la liberté
Editions: Bruno Doucey

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COUVÉE PASCALE (Guy Goffette)

Posted by arbrealettres sur 3 avril 2023




    
COUVÉE PASCALE

À l’aube quand vibrait encore
la gloire du monde, nous descendions
l’échelle des rêves pour chercher
dans l’herbe du jardin

l’oeuf bleu de toutes les promesses
et dans le ciel un reste du vertige
qui nous tirait des cris, mais tout
retombait vite et l’horizon

reprenait son vrai visage : enclos,
barrière, octroi. Nous rentrions couver
notre butin les yeux dans l’ombre
comme si l’aile d’un ange

allait soudain venir briser la coque.

(Guy Goffette)

Recueil: Petits riens pour jours absolus
Editions: Gallimard

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PETIT AIR (Hermann Hesse)

Posted by arbrealettres sur 31 mars 2023



Illustration: Laszló Mindszenti
    
PETIT AIR

Arc-en-ciel de mon poème,
Lumière à l’heure suprême,
Chant vite éteint du bonheur,
Au front de la Vierge même
Amère joie et douleur.

Fleurs que dispersent les bises,
Gerbes sur des tombes mises,
Ô fugitive gaîté !
Etoile en la nuit profonde,
Voile de deuil, de beauté
Sur cet abîme du monde !

***

KLEINER GESANG

Regenbogengedicht,
Zauber aus sterbendem Licht,
Glück wie Musik zerronnen,
Schmerz im Madonnengesicht,
Daseins bittere Wonnen…

Blüten vom Sturm gefegt,
Kränze auf Gräber gelegt,
Heiterkeit ohne Dauer,
Stern, der ins Dunkel fällt :
Schleier von Schönheit und Trauer
Über dem Abgrund der Welt.

(Hermann Hesse)

Recueil: Poèmes choisis
Traduction: Jean Malaplate
Editions: José Corti

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Il n’a aucune couleur (Dôgen)

Posted by arbrealettres sur 27 mars 2023


nature_eau

Même si on l’appelle l’esprit
Il n’a aucune couleur
Qui permette d’en faire une personne.
Telles la rosée ou la gelée blanche
Il est vite évaporé.

(Dôgen)

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Sans toi (Claude de Burine)

Posted by arbrealettres sur 25 février 2023




    
Sans toi

J’écris comme on perd son sang
Comme on signe une traite
Dans la maison des morts
Comme un soir égaré
Qui lance ses tracts
Au coin des avenues

Il se fait tard peut-être
Là où tu es
Ou très tôt.

Chez nous,
La neige est venue vite
La nuit
Comme un voleur d’enfants.

(Claude de Burine)

Recueil: A Henri de l’été à midi
Editions: Saint Germain des Prés

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Exil (Grégory Rateau)

Posted by arbrealettres sur 18 février 2023




    
Exil

Je ne suis plus d’ici
Lieu de transit
Comptoir d’un hôtel
Baie vitrée panoramique
Les silhouettes tournent
Et me reviennent
La ville les appelle
Vivre vite
Ne plus chercher un visage en particulier
J’ai échoué en suivant des ombres
Dans les impasses de l’amitié
Alors je me glisse dans la première valise venue
Retiens mon souffle
Bringuebalé aux douanes du hasard
En passe-muraille de mon époque
Je rentre peut-être chez moi

(Grégory Rateau)

Recueil: Imprécations nocturnes
Traduction:
Editions: Conspiration

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Rien ne cesse (Jean Cocteau)

Posted by arbrealettres sur 10 janvier 2023



Illustration  
    
Rien ne cesse rien n’est les morts ne sont pas morts
Les vivants s’imaginent vivre
Un acte continue où l’on ne peut le suivre
Rien n’est dedans rien n’est dehors.

Rien ne pèse tout pèse et notre marche lourde
Est légère dans le sommeil
Aveugles sont nos yeux et nos oreilles sourdes
Dans un monde au rêve pareil.

D’autres formes sont là que jadis accumule
Avec celles du lendemain
Et ce que notre temps par un mensonge annule
Reste dans son avare main.

Tout combine un seul bloc que le temps nous débite
Peu à peu morceau par morceau.
Le bâton se brise dans l’eau
Et l’immobilité se vante d’aller vite.

Or parfois dans le rêve ou par quelque ressort
Qui l’étrange machine embrouille
L’invisibilité de sa cachette sort
Comme la Vénus d’une fouille.

(Jean Cocteau)

 

Recueil: Clair-obscur
Traduction:
Editions: Points

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Tristes souvenirs (Mei Yaochen)

Posted by arbrealettres sur 13 décembre 2022



Illustration: Shan Sa
    
Tristes souvenirs

Du temps où tu gagnas ma maison
Jamais je n’ai eu dans tes yeux l’impression d’être pauvre.
Chaque soir, jusqu’à minuit aux travaux de couture ;
Le repas toujours prêt au temps accordé.
Neuf jours sur dix, nous nous contentions de légumes salés.
Mais toujours tu gardais en surprise une belle pièce de viande.
Nous comme l’est et l’ouest unis dix-huit ans durant,
Partageant l’amer et le doux.
Nous comptions alors sur cent ans d’amour.
Mais en une nuit seulement je t’ai perdu.
Ta fin me revient inlassable en mémoire ;
Comme tu tenais ma main, incapable de parler.
Ce corps vieilli qui dure encore,
Te rejoindra vite dans la poussière.

(Mei Yaochen)

(1002-1060)

 

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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Vent d’automne (Liu Che)

Posted by arbrealettres sur 6 décembre 2022



Illustration: Shan Sa
    
Vent d’automne

Le vent d’automne se lève,
La course tranquille des nuages blancs se précipite.
Plantes et arbres jaunissent et se dépouillent.
Les oies sauvages rejoignent le sud.
L’orchidée garde sa beauté
Et le Chrysanthème son parfum
Je me languis de mon unique amour,
Impuissant à oublier.
Nous lançons le grand navire sur la rivière Fen
Il fend sans peine son courant,
S’agitant en vagues blanches.
L’écho des tubes et des tambours
Amplifie le chant des rameurs.
Au sommet de la joie, les pensées tristes me pointent
Jeunesse et force, comme vous passez vite !
Sans espoir possible, nous déclinons.

(Liu Che)

l’empereur Wu des Han (156-87)

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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LE VOYAGEUR (Jean Cocteau)

Posted by arbrealettres sur 8 avril 2022



Illustration: Gao Xingjian
    
LE VOYAGEUR

Plus vite il marchait,
plus il approchait de sa maison,
plus elle rapetissait,
devenait inhabitable.

La distance se solidifiait derrière sa marche
et le poussait avec le rythme
d’une troupe militaire que rien ne presse.

Il lui fallait entrer dans cette maison minuscule,
ce qui était impossible et devint possible
lorsque la muraille militaire s’arrêta.

Le voyageur, alors, rapetissa très vite
cependant que sa maison grandissait à vue d’oeil
et qu’une belle jeune fille apparaissait à une fenêtre
et riait de son aventure.

(Jean Cocteau)

Recueil: Poèmes Appogiatures Clair-obscur Paraprosodies
Editions: Du Rocher

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