Arbrealettres

Poésie

AU COIN DU FEU (Jean Richepin)

Posted by arbrealettres sur 5 février 2017



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AU COIN DU FEU

Rappelle-toi le mois d’antan qu’il fit si froid !
Tout le monde a souffert de ce cruel décembre.
Notre amour cependant y vécut comme un roi,
Tant son large soleil chauffa bien notre chambre.

Nous nous moquions du froid et du temps qu’il faisait,
Ayant capitonné de baisers notre geôle.
Au feu de notre cœur plus rouge qu’un creuset
Nous aurions fait flamber les banquises du pôle.

Parfois nous regardions les floraisons du gel
Au jardin de la vitre où croît l’arbre du givre.
Tout était blanc dehors, les champs, les toits, le ciel.
Rien qu’à voir ce linceul, nous nous sentions mieux vivre.

Bougonnant, se mouchant, toussant, crachant, couvert
D’un grand feutre de neige avec des plumes grises,
Parmi les aboiements des dogues de l’hiver
Du pays de l’onglée arrivait Jean-des-Bises.

Mais nous faisions la nique à ses cheveux poudrés;
Et quand à la fenêtre il nous jetait sa laine,
Nous lui disions : « Entrez, vieux gueux, quand vous voudrez !
Votre nez de glaçons fondra sous notre haleine. »

Et jusqu’au jour plus tiède où le carreau terni
Eut laissé couler l’eau de ses blanches écailles,
Pelotonnés au fond de notre amoureux nid,
Nous avons eu toujours bien chaud, comme deux cailles.

(Jean Richepin)

 

 

Une Réponse to “AU COIN DU FEU (Jean Richepin)”

  1. Trinité du Cercle Polaire
    ————

    L’aurore boréale étale ses couleurs
    Et le vent dit des mots qui n’ont rien de futile ;
    Ici ne vivent point les pluvians fluviatiles,
    Mais trois ours magiciens, trois sources de chaleur.

    Eux qui de la banquise éloignent le malheur,
    J’aime les inventions de leur esprit fertile ;
    Ils agissent fort peu, ne font rien d’inutile,
    Mais savent éloigner les démons harceleurs.

    Buvant de l’eau de mer et mangeant de la glace,
    D’arpenter ce décor leur âme n’est point lasse,
    Ils sont les trois gardiens de l’océan sans bords.

    Voici le tavernier qui leur apporte à boire,
    C’est pour triquer avec leur vieux cousin, le porc
    Qui sa plume brandit pour proclamer leur gloire.

Qu'est-ce que ça vous inspire ?