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APPROCHES (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 30 août 2018



 

Alberto Donaire doza-ana

APPROCHES

La poésie n’est pas une manière d’embellir l’existence.
Elle répugne à ce qui est mièvre, ou de l’ordre de la joliesse et de l’ornement.
Elle n’est pas simple divertissement, bien qu’elle concerne
aussi le « Jeu » ; mais là où les mots « jouent » à bousculer nos ancrages.
Là où « jouer » inverse ou renverse l’apparence, la fait pivoter.

*

Il faut au poète une fenêtre sur l’inconnu, un espace que ne gouverne
aucune structure rigide, aucun dogme.
Un regard qui embrasse de vastes et multiples horizons.

*

Définir la poésie est hors de question. Avec sa charge de réel et d’irréel,
son poids de rêve et de quotidien, celle-ci nous devancera toujours.

*

À la question : « Pourquoi écrivez-vous ? »,
Saint-John Perse répond : « Pour mieux vivre. »
C’est ainsi que je le ressens. La poésie multiplie nos chemins ;
nous donne à voir, à respirer, à espérer. Nous offre à la fois
nudité, profondeur et largesse.

(Andrée Chedid)

Illustration: Alberto Donaire

 

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Les chemins mènent tous au secret (Jean Malrieu)

Posted by arbrealettres sur 30 septembre 2017




Illustration: ArbreaPhotos
    
Les chemins mènent tous au secret.
Ils s’infléchissent à quelque tournant,
on marche ainsi en pays réel
et puis soudain hors du temps mesurable.

On se retrouve enrichi de quelque épaisseur de vie étrange
comme si l’on avait déjà vécu plusieurs existences.

Pays à la brisure du crépuscule
comme s’il voulait signifier qu’il est tard
mais toujours temps.

On ramène alors de ces sortes de regards, de ces voyages,
la connaissance de l’être dilaté,
perméable au possible, un réel annexé, magnifié.

Dans ces randonnées en pays de vertige,
toujours hâtives, on grandit.

Il reste de ces fulgurations une ivresse toujours plus menaçante,
une drogue plus exigeante qui demande, au péril de la vie,
toujours plus d’audace.

C’est la vie multipliée dans les humbles choses
qui débouchent sur la largesse et l’illumination.

Alors le respect devient amour.

(Jean Malrieu)

 

Recueil: EN PAYS DE VERTIGE
Editions: Le Verbe et l’Empreinte

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Heureux les semeurs (Avraham Ben-Yitzhak)

Posted by arbrealettres sur 27 juillet 2017



Illustration: Paul Hannaux
    
Heureux les semeurs

Heureux les semeurs qui ne moissonnent pas
car ils erreront au loin.

Heureux les prodigues dont la jeunesse splendide
accrut la lumière des jours et leur largesse
et qui abandonnèrent leurs parures à la croisée des chemins.
Heureux les orgueilleux dont la fierté franchit les limites de l’âme
et devient humble comme la blancheur
après que l’arc-en-ciel s’est levé dans la nuée.

Heureux ceux qui savent que leur coeur clamera dans le désert
et que sur leurs lèvres fleurira le silence.

Ils seront recueillis dans le coeur du monde
ils seront enveloppés du manteau de l’oubli
et leur lot immuable refusera toute parole.

(Avraham Ben-Yitzhak)

 

Recueil: Anthologie de la poésie en hébreu moderne
Traduction: E. Moses
Editions: Gallimard

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Le Rien (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 28 Mai 2017



 

Gao Xingjian an

Le Rien

J’ai traversé le Rien
Aux jours de mon enfance
Déchiffrant la mort
En nos corps d’argile
Et de brièveté
J’ai récusé l’orgueil
Disloqué les triomphes
Dévoilé notre escale
Et sa précarité
Cependant j’y ai cru
A nos petites existences
A ses saveurs d’orage
Aux foudres du bonheur
A ses éveils ses percées
Ses troubles ou ses silences
A ses fougues du présent
A ses forces d’espérance
Au contenu des heures
J’y ai cru tellement cru
Aux couleurs éphémères
Aux bienfaits de l’aube
Aux largesses des nuits
Oubliant que plus loin
Vers les courbures du temps
L’explosion fugace
Ne laissera aucune trace
De nos vies consumées
Et qu’un jour notre Planète
A bout de souffle
Se détruirait

(Andrée Chedid)

Illustration: Gao Xingjian

 

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Bonjour mon coeur (Pierre de Ronsard)

Posted by arbrealettres sur 30 mars 2017



Bonjour mon coeur, bonjour ma douce vie.
Bonjour mon oeil, bonjour ma chère amie,
Hé ! bonjour ma toute belle,
Ma mignardise, bonjour,
Mes délices, mon amour,
Mon doux printemps, ma douce fleur nouvelle,
Mon doux plaisir, ma douce colombelle,
Mon passereau, ma gente tourterelle,
Bonjour, ma douce rebelle.

Hé ! faudra-t-il que quelqu’un me reproche
Que j’aie vers toi le coeur plus dur que roche
De t’avoir laissée, maîtresse,
Pour aller suivre le Roi,
Mendiant je ne sais quoi
Que le vulgaire appelle une largesse ?
Plutôt périsse honneur, court, et richesse,
Que pour les biens jamais je te relaisse,
Ma douce et belle déesse.

(Pierre de Ronsard)

 Illustration: Jean-Antoine Watteau

 

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