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Posts Tagged ‘crépuscule’

AU TEMPS PRÉSENT (Henrique Huaco)

Posted by arbrealettres sur 23 avril 2023




    
AU TEMPS PRÉSENT

Au crépuscule je me lève et m’envole
dans ma grande chemise d’ange
au-dessus de la terre ;
je vole sur les fleuves et les arbres,
je vole sur le bois tendre et fragile
des paliers de ce monde.

Mais mes yeux restent fermés.
Ma bouche à peine montre la tristesse,
pour les humbles jours de terreur qui m’attendent
derrière et devant moi,
comme un grand pont.

Penché sur le bord de ce fleuve à Paris
appelé la «Seine»,
celui qui va aux marchés
les matinées du Samedi
transportant la cendre et la lumière d’autres temps,
je me suis retourné pour me deviner
plus clairement dans l’eau.

Peut-être je me suis perdu,
comme disent les bonnes gens.
Peut-être je me suis perdu
en bougeant la tête,
en secouant la manche de chemise,
en retournant la chaussure
multipliant mon ombre
sur la terre
à chaque geste, chaque mot,
avec la voix qui s’éloigne
et la voix qui revient
sur ce miroir d’eaux.

Nous imaginons des anges et des voix,
nous imaginons des bois et des visages
au travers de l’obscurité
sans personne qui grandit,
au travers du linceul
que jours et nuits nous imposent
avec leurs quatre saisons,
leurs jours, leurs mois,
leurs heures.

Mais où est la grâce ?
En regardant dans quelle direction
au-dessus ou au-dessous de moi ?
Mais où est la grâce ?

Je suis suspendu
sans ombre entre les doigts,
sans ombre aux semelles,
espérant qu’ils m’empoignent
pour entendre.

***

EN EL TIEMPO PRESENTE

Al anochecer me levanto y vuelo
en mi gran camisón de ángel
sobre la tierra;
vuelo sobre los ríos y los árboles,
vuelo sobre la madera tierna y fácil
de los pisos de este mundo.

Pero mis ojos permanecen cerrados.
Mi boca apenas muestra la tristeza,
po los días humildes de terror que me aguardan,
detrás y delante de mí,
como un gran puente.

Reclinado al borde de ese río en París,
llamado «La Seine »,
aquel que va a los mercados
en las mañanas del sábado
trayendo la ceniza y luz de otros tiempos,
me he volteado para adivinarme
más claramente sobre las aguas.

Acaso me he perdido,
como dicen las buenas gentes.
Acaso me he perdido
moviendo la cabeza,
sacudiendo la manga de la camisa,
doblando el zapato,
multiplicando mi sombra
sobre la tierra
con cada gesto, cada palabra,
con la voz que se aleja
y la voz que regresa
sobre este espejo de aguas.

Imagínamos ángeles y voces,
imaginamos bosques y rostros
a través de la oscuridad
sin gente que crece,
a través de la mortaja
que los días y las noches nos imponen
con sus cuatro estaciones,
sus días y sus meses,
sus horas.

Pero dónde está la gracia ?
Y mirando hacia qué lado,
encima o debajo de mí?
Pero dónde está la gracia ?

Estoy suspendido
sin sombra entre los dedos,
sin sombra en las suelas,
esperando que me empujen
para oír.

(Henrique Huaco)

Recueil: La peau du temps
Traduction: Anne-Marie Vindras
Editions: des Crépuscules

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TOUTE CETTE HISTOIRE… (Claude de Burine)

Posted by arbrealettres sur 25 février 2023




    
TOUTE CETTE HISTOIRE…

Toute cette histoire au fond, qui prend fin,
qui prend date sans nous concerner :
les grands sapins qui furent neige,
ce que l’on peut nommer, je crois, d’émotion blanche,
et qui ne s’achevait que dans le soir.

Toi, tu étais fait de soleil,
tu étais fait de miel et d’enfance.

Est-ce que cela s’avoue,
est-ce que cela se compte :
les pas qui tremblent, le regret, le silence
et puis le désespoir;
dans un crépuscule qui n’en finissait pas de t’attendre ?
Et
Pouvait-on parler d’étoiles de musique
quand la fête aux gants rouges
s’était tellement ouverte sur ton épaule ?

A moins d’être la pierre,
sommes-nous jamais assez vêtus
pour l’ombre !

(Claude de Burine)

Recueil: Le Passeur Passeur
Editions: Saint Germain des Prés

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Je rêve d’un beau soir (Jacques Rabemananjara)

Posted by arbrealettres sur 25 février 2023




    
Je rêve d’un beau soir au bord d’un étang vert
Où la verdeur des joncs s’irise de sarcelles.
L’azur y baignera ses arrière-étincelles
Comme des souvenirs dans l’onde découverts.

Les flots auront des fleurs d’écumes et d’éclairs.
Mon coeur, qu’auront repris les ultimes parcelles
D’une offrande oubliée au creux de la nacelle,
Sentira le frôler le Songe enfui dans l’air.

Sur les verts espaliers où pend le crépuscule,
Mes doigts fins s’en iront, au bout des nénuphars,
Cueillir le vert phosphorescent des libellules.

Mais j’y verrai bientôt, sous le cri des canards,
La lune éparpiller, en harmonie inerte,
Ses sanglots bleus d’argent au cil des moires vertes.

(Jacques Rabemananjara)

 

Recueil:Oeuvres complètes POÉSIE
Editions: Présence africaine

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PRÉSENCE (Pierre Gamara)

Posted by arbrealettres sur 21 février 2023




    
PRÉSENCE

Ne bouge pas. Écoute.
Quelqu’un viendra ce soir,
Peut-être…
Les rideaux se balancent.
Le ciel est plein de fraises
Et de lis.

Écoute les paroles
De la brise, écoute
Les longs murmures
Du crépuscule,
Écoute les chansons bleues
Des arbres,
Les silences de la rue.

Ne bouge pas. Regarde.
Quelqu’un viendra ce soir,
Peut-être.
Une porte a gémi
Avec finesse.

Regarde au fil des rues
Les colliers des feux rouges.
Toutes les voitures
S’éloignent
Vers des maisons de velours noir.
Regarde. Les portes de l’ombre
Vont s’ouvrir.

(Pierre Gamara)

 

Recueil: Noël en poésie
Editions: Folio Junior

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À chacun sa chanson (Corinne Albaut)

Posted by arbrealettres sur 31 janvier 2023



Illustration: Catherine Fichaux
    
À chacun sa chanson

Le merle siffleur
Siffle de bon coeur,
La pie jacasse,
Le coucou répète « coucou ».
Le pic tapageur
Tape avec ardeur,
Le corbeau croasse,
La tourterelle roucoule
Et quand vient le crépuscule,
La chouette chevêche hulule.

(Corinne Albaut)

Recueil: Comptines des secrets de la Forêt
Traduction:
Editions: Actes Sud Junior

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SUR L’AIR D’UN MAÎTRE EN DIVINATION (Lù Yóu)

Posted by arbrealettres sur 21 janvier 2023



Illustration: Dai Dunbang
    
SUR L’AIR D’UN MAÎTRE EN DIVINATION

Un chant au prunier
À l’écart de la grand-route, près du pont rompu,
Silencieux, solitaire, il fleurit à sa guise.
Voici déjà le crépuscule, et seul à son chagrin
Il subira encore le vent avec la pluie.

Sans intention de s’acharner pour gagner le printemps,
Seul à soutenir d’une volée de fragrances la jalousie.
Que ses fleurs fanent et tombent, réduites en boue et poussière,
Subsistera toujours ce parfum comme avant.

***

(Lù Yóu) (1125-1210)

Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise

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SUR UN AIR LENT (Li Qing Zhào)

Posted by arbrealettres sur 21 janvier 2023



Illustration: Dai Dunbang
    
SUR UN AIR LENT

Quêter, quérir, fouiller, fureter,
Froidure vide, froid dur limpide,
Morne monotonie, amère mélancolie, lamentable ennui…
Douceur subite, retour du froid,
Cette saison où je souffre le plus de respirer ;
Avec trois gobelets et deux coupes de vin clair,
Comment y résister, quand le soir vient, quand le vent s’énerve ?
Voici les oies sauvages parties,
Le plus cruel à mon coeur,
Pourtant nous étions bien complices aux temps passés.

Partout au sol les chrysanthèmes s’amoncellent,
Défraîchis et déchus
à présent, qui viendrait prendre la peine de les ramasser ?
Veillant près de la fenêtre,
Solitaire, par moi-même comment parviendrai-je à rejoindre l’obscurité ?
Au sterculier vient s’adjoindre la bruine,
Qui jusqu’au crépuscule dégoutte et dégouline ;
Et toute cette composition,
Comment le seul mot de « souci » pourrait-il en donner le sens ?

***

(Li Qing Zhào) (1084 — après 1149)

Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise

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Sourate des guérisons (Khayr al-Din al-Asadi)

Posted by arbrealettres sur 17 janvier 2023




    
Sourate des guérisons
(extrait)

Je me suis consumé comme bois d’agar dans le feu du repentir
sans avoir même atteint la terrasse du palais de notre union

la colombe de mon cœur a tressailli sous mes côtes
voyant les pièges posés en chaque lieu

une trombe couleur du crépuscule est tombée mais
l’éclair de l’espérance n’a pas lui

j’ai parcouru les quatre coins du monde en quête de soulagement à ma douleur
et j’ai trouvé le chagrin de la passion ivre. Inconsciente

ivre et la voix fanée, elle tisse des rêves de soie
fine et de brocart et elle glane des souhaits

mon ivresse s’est enivrée, ma voix s’est fanée et on est passé
au langage des signes

(Khayr al-Din al-Asadi)

***

Recueil: Poésie Syrienne contemporaine
Traduction:de l’Arabe par Saleh Diab
Editions: Le Castor Astral

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VIEILLIR I (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 15 janvier 2023




    
VIEILLIR I

Il est temps de vieillir
D’accepter ce qui te revient
D’assumer encore et encore
À chaque crépuscule
Ce qui depuis l’aube
T’appartient

Courant sans cesse
Le temps t’enlève dans ses bras
Tu découvres pas à pas
Toute l’absence de sa présence.

(Andrée Chedid)

 

Recueil: L’Étoffe de l’univers
Traduction:
Editions: Flammarion

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CETTE VIE SANS SEL ? (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 15 janvier 2023




    
CETTE VIE SANS SEL ?

Ce crépuscule
Où le jour se tamise
Où l’éphémère s’alourdit
Et le glas sonne minuit

Cette vie sans sel ?
Où le jour s’affadit
Où l’amour se déterre
Où l’amour se dépèce ?

Ce jour à jour
Qui reprend vie
Et s’empare d’amour
Et reprend souffle
Pour briller en silence

Demain
La lumière
Envahira
Ce monde.

(Andrée Chedid)

 

Recueil: L’Étoffe de l’univers
Traduction:
Editions: Flammarion

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