Arbrealettres

Poésie

Posts Tagged ‘se répandre’

Marée Basse (Philippe Soupault)

Posted by arbrealettres sur 8 janvier 2024



    

Marée Basse

Je songe à tous les vents
Simoun sirocco et mousson
à vous phénomènes et typhons
tandis qu’ici tout craque
et que la chaleur épaisse comme la neige
se répand dans le silence
O Lune simplicité oracle
qu’un vent de crépuscule
réduit en lucioles
O lune tout t’abandonne
toi l’amie du silence ennemie des vents
plus est-ce toi qui mène les nuages
paitre
au-delà de la nuit
tout t’abandonne tout te fuit
obéissante moins aimée
mes yeux se ferme grâce à toi
et ta douceur se répand dans les veines de la terre
je songe à vous absents ivres ou dormeurs
vents de terre et de mer
vous qui apprenez qu’il faut vivre
avec des ailes
ou dormir sans scrupules
quand les oiseaux vos enfants
cueillent les étoiles de la vie et du sommeil
vents des continents
roses vous tremblez
vous qui préférez le supplice du crépuscule

(Philippe Soupault)

Recueil: Georgia – Épitaphes – Chansons
Editions: Gallimard

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Lèvres de feu (Bernard Bertrand)

Posted by arbrealettres sur 13 décembre 2023




Sous la braise
Couve le feu
d’Amour naissant.

Lèvres de braise
Où couve le feu
de tes amants.

Lèvres de feu
Où je m’embrase
Et dans ta chair
Je me répands.

Lèvres de feu,
Lèvres de braise,
Lèvres de chair
Rougies de sang!

(Bernard Bertrand)

Illustration: Man Ray

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Corps mémorable (Paul Eluard)

Posted by arbrealettres sur 8 novembre 2023



Illustration: Bruno Di Maio
    
Corps mémorable

I

Tes mains pourraient cacher ton corps
Car tes mains sont d’abord pour toi
Cacher ton corps tu fermerais les yeux
Et si tu les ouvrais on n’y verrait plus rien

Et sur ton corps tes mains font un très court chemin
De ton rêve à toi-même elles sont tes maîtresses
Au double de la paume est un miroir profond
Qui sait ce que les doigts composent et défont.

II

Si tes mains sont pour toi tes seins sont pour les autres
Comme ta bouche où tout revient prendre du goût
La voile de tes seins se gonfle avec la vague
De ta bouche qui s’ouvre et joint tous les rivages

Bonté d’être ivre de fatigue quand rougit
Ton visage rigide et que tes mains se vident
Ô mon agile et la plus lente et la plus vive
Tes jambes et tes bras passent la chair compacte

D’aplomb et renversée tu partages tes forces
A tous tu donnes de la joie comme une aurore
Qui se répand au fond du cœur d’un jour d’été
Tu oublies ta naissance et brûles d’exister.

III

Et tu te fends comme un fruit mûr ô savoureuse
Mouvement bien en vue spectacle humide et lisse
Gouffre franchi très bas en volant lourdement
Je suis partout en toi partout où bat ton sang

Limite de tous les voyages tu résonnes
Comme un voyage sans nuages tu frissonnes
Comme une pierre dénudée aux feux d’eau folle
Et ta soif d’être nue éteint toutes les nuits.

(Paul Eluard)

Recueil: Eluard amoureux
Editions: Bruno Doucey

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

À MA SŒUR (William Wordsworth)

Posted by arbrealettres sur 25 octobre 2023



Illustration: Albert Lynch
    
À MA SŒUR

Jour de mars où l’hiver s’apaise :
Il fait à chaque instant plus doux,
Le rouge-gorge du mélèze
Chante là, tout près de chez nous.

Quel bonheur se répand dans l’air,
Quelle joie immense illumine
L’herbe nouvelle du pré vert
Et les arbres nus, les collines !

Viens, ma soeur! (telle est ma prière)
Fini le repas du matin,
Hâte-toi, laisse tes affaires,
Viens prendre le soleil un brin.

Edward nous accompagne; — vite,
Je te prie, vêts-toi pour les champs ;
Viens sans livre car je t’invite
Au loisir exclusivement.

Nulle nonne ne réglera
Notre vivant calendrier :
Notre année, Amie, datera
De ce jour-ci son jour premier.

L’amour, naissance universelle,
D’un cœur à l’autre se répand,
La terre à l’homme, l’homme à elle :
— C’est l’aurore du sentiment.

L’instant présent nous donne encore
Plus que tant d’efforts de raison :
Et nos êtres par chaque pore
Boiront l’esprit de la saison.

Nos cœurs feront des lois muettes
Et leur obéiront toujours :
Et nous, pour l’année qui s’apprête,
Suivrons notre humeur de ce jour.

Et dans la puissance bénie
En bas comme en haut, alentour,
Nos âmes puisant l’harmonie,
Seront accordées à l’amour.

Allons, ma Sœur, viens donc ! et vite,
Je te prie, vêts-toi pour les champs ;
Viens sans livre car je t’invite
Au loisir exclusivement.

***

TO MY SISTER

It is the first mild day of March :
Each minute sweeter than before,
The redbreast sings from the tall larch
That stands beside our door.

There is a blessing in the air,
Which seems a sense of joy to yield
To the bare trees, and mountains bare,
And grass in the green field.

My sister ! (’tis a wish of mine)
Now that our morning meal is done,
Make haste, your morning task resign ;
Come forth and feel the sun.

Edward will come with you; — and, pray,
Put on with speed your woodland dress;
And bring no book; for this one day
We’ll give to idleness.

No joyless forms shall regulate
Our living calendar :
We from to-day, my Friend, will date
The opening of the year.

Love, now a universal birth,
From heart to heart is stealing,
From earth to man, from man to earth :
— It is the hour of feeling.

One moment now may give us more
Than years of toiling reason :
Our minds shall drink at every pore
The spirit of the season.

Some silent laws our hearts will make,
Which they shall long obey :
We for the year to come may take
Our temper from to-day.

And from the blessed power that rolls
About, below, above,
We’ll frame the measure of our souls :
They shall be tuned to love.

Then come, my Sister! come,
I pray, With speed put on your woodland dress;
And bring no book : for this one day
We’ll give to idleness.

(William Wordsworth)

Recueil: Poèmes
Traduction: François-René Daillie
Editions: Gallimard

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Puisque j’ai mis ma lèvre à ta coupe encor pleine (Victor Hugo)

Posted by arbrealettres sur 15 août 2023



Illustration: Étienne Pirot
    
Puisque j’ai mis ma lèvre à ta coupe encor pleine
Les chants du Crépuscule

Puisque j’ai mis ma lèvre à ta coupe encor pleine ;
Puisque j’ai dans tes mains posé mon front pâli ;
Puisque j’ai respiré parfois la douce haleine
De ton âme, parfum dans l’ombre enseveli ;

Puisqu’il me fut donné de t’entendre me dire
Les mots où se répand le cœur mystérieux ;
Puisque j’ai vu pleurer, puisque j’ai vu sourire
Ta bouche sur ma bouche et tes yeux sur mes yeux ;

Puisque j’ai vu briller sur ma tête ravie
Un rayon de ton astre, hélas ! voilé toujours ;
Puisque j’ai vu tomber dans l’onde de ma vie
Une feuille de rose arrachée à tes jours ;

Je puis maintenant dire aux rapides années :
– Passez ! passez toujours ! je n’ai plus à vieillir !
Allez-vous-en avec vos fleurs toutes fanées ;
J’ai dans l’âme une fleur que nul ne peut cueillir !

Votre aile en le heurtant ne fera rien répandre
Du vase où je m’abreuve et que j’ai bien rempli.
Mon âme a plus de feu que vous n’avez de cendre !
Mon cœur a plus d’amour que vous n’avez d’oubli !

(Victor Hugo)

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Seul est patent le poids doré (Jean Rousselot)

Posted by arbrealettres sur 12 juillet 2023




    
Seul est patent le poids doré
D’un corps qui se répand entre nos bras
Comme une mousson sur la terre desséchée.

(Jean Rousselot)

Recueil: Passible de …
Editions: Autres Temps

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , | 4 Comments »

LES BARRIÈRES CÉLESTES (Jaroslav Seifert)

Posted by arbrealettres sur 12 mars 2023



Illustration: Ron Mueck
    
LES BARRIÈRES CÉLESTES

Quelques secondes avant de mourir
la mère tourna son visage vers nous
et d’une voix rauque s’écria :
Il n’y a rien !
Puis la voûte du silence s’éleva sur sa bouche.

Dans quel abîme se sont répandus
les grains de son chapelet
cent fois embrassés,
où sont tombés les mots de toutes ses prières
et le bruissement des chansons
qu’elle chantait depuis l’enfance ?
Que sont devenues la peur et l’angoisse
devant ses actes les plus menus ?
Ils portent les noms des péchés
sans être meilleurs ou pires
que les autres.

Quelle obscurité a-t-elle aperçue
dans cette cruelle seconde,
où, du talon, nous repoussons le sol
pour retomber aussitôt sur lui ?

e sortis sur le balcon
et de la chaise branlante de ma mère
je regardai quelque part,
dans les hauteurs célestes.
Durant toute notre longue vie
elles ne cessent de lorgner vers nos fenêtres,
elles n’ordonnent rien,
elles ne demandent rien
et, si vous voulez, elles
sont d’une beauté indicible.
Et nous, nous essayons de les acheter
par un grain d’encens par un grain du chapelet,
par des mots, par une larme !

Et à la fin
nous voulons soulever leurs barrières lumineuses
par notre dernier soupir,
celui qui, de tous nos gémissements,
est le plus vain.

(Jaroslav Seifert)

Recueil: Les danseuses passaient près d’ici
Traduction: Petr Kral et Jan Rubes
Editions: Actes Sud

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

SUR L’AIR DE LA MÉLODIE DES PASSES DU SOLEIL (Kòu Zhùn)

Posted by arbrealettres sur 21 janvier 2023



Illustration: Dai Dunbang
    
SUR L’AIR DE LA MÉLODIE DES PASSES DU SOLEIL

L’herbe du défilé sous un halo de brouillard s’étale,
De la Wei en remous s’entend le grondement.
Les vagues de pluie du printemps s’apaisent,
une légère poussière se répand,
On monte en selle pour partir en campagne.
Voyez là si verdoyants les saules,
Dont ici on a tiré et brisé un rameau.
On se met en branle le coeur lourd,
Qui sait en quelle saison nous serons à nouveau réunis ?

Alors, vidons encore un verre,
Chantons encore un air !
On soupire sur l’existence,
Si amer de passer d’une joyeuse compagnie aux adieux, au départ.
Aussi ne nous dérobons pas à l’ivresse profonde,
Prêtons l’oreille aux « Passes du Soleil » jusqu’au bout.
Quand nous repenserons à nos chers vieux amis,
Éloignés de cent lieues, avec eux nous partagerons le clair de lune.

***

(Kòu Zhùn) (961-1023)

 

Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

ILS ÉTAIENT DEUX (Hugo von Hofmannsthal)

Posted by arbrealettres sur 26 juillet 2022


 


Frank Cadogan Cowper  _33 

ILS ÉTAIENT DEUX

Une coupe au bord de la bouche,
elle allait d’un si ferme pas
et la main si sûre que pas
une goutte ne se versa.
Il montait un cheval farouche.
Si sûre et ferme était sa main
que, frémissant au coup de frein,
le cheval s’arrêta soudain.
Et pourtant, quand la main légère
à l’autre main gantée de fer
cette simple coupe tendit,
ils tremblaient si fort, elle et lui,
que les mains ne se rencontrèrent,
et le vin noir se répandit.

(Hugo von Hofmannsthal)

Illustration: Frank Cadogan Cowper

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

JEUNESSE (Rainer-Maria Rilke)

Posted by arbrealettres sur 11 juin 2022



Illustration: ArbreaPhotos
    
JEUNESSE

Un chant, comme tombé des étoiles,
se répand loin dans la campagne.
C’est comme si, dans de lointaines
tavernes ceintes de vignes, se
trouvaient des gens heureux.

Il plane sur mes promenades,
il chante dans mon repos ;
je vais comme dans de profonds jardins
et sais : toutes les fleurs attendent
patiemment une même splendeur.

(Rainer-Maria Rilke)

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | 1 Comment »