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Poésie

Posts Tagged ‘joyeux’

JE NE VEUX PAS SAVOIR S’IL FAIT CLAIR (Anna de Noailles)

Posted by arbrealettres sur 7 juin 2023



Illustration: Josephine Wall 
    
JE NE VEUX PAS SAVOIR S’IL FAIT CLAIR

Je ne veux pas savoir s’il fait clair, s’il fait triste,
Si le printemps, exact, va reverdir encor,
Si l’orgueilleux soleil jette son cerceau d’or
Sur les chemins légers de bleuâtre piste,
Ni si le vif matin a son joyeux ressort,
Et le soir ses couleurs de lin et d’améthyste,
Je sais que pour les morts plus aucun temps n’existe
Je suis jalouse pour les morts.

(Anna de Noailles)

Recueil: Je serai le FEU (Diglee)
Editions: La ville brûle

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UN JOUR DE NAISSANCE (Christina Rossetti)

Posted by arbrealettres sur 5 juin 2023




    
UN JOUR DE NAISSANCE

Mon coeur est comme un oiseau qui chantonne
Depuis son nid de roseaux frais;
Mon coeur est comme un pommier verdoyant,
Fléchissant sous les fruits épais;
Mon coeur est comme une coque arc-en-Ciel
Qui danse au fond de la marée;
Mon coeur est plus joyeux encore,
Car mon amour vient me chercher.

Qu’on me tisse un fideau de soie, de plumes,
De vair, teínté de violet vif,
Qu’on y brode colombes et grenades,
Et les cent yeux d’un paon oisif,
Qu’y perlent des pompons d’or et d’argent,
Des fleurs de lys, des feuilles d’if.
C’est la naissance de ma vie,
Car mon amour vient aujourd’hui.

(Christina Rossetti)

Recueil: Goblin Market and Other Poems
Traduction: de l’anglais par Clémentine Beauvais
Editions: Penguin Classics

Recueil: Je serai le FEU (Diglee)
Editions: La ville brûle

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FADAISES (Paul Verlaine)

Posted by arbrealettres sur 19 mai 2023



    

FADAISES

Daignez souffrir qu’à vos genoux, Madame
Mon pauvre coeur vous explique sa flamme

Je vous adore autant et plus que Dieu,
Et rien jamais n’éteindra ce beau feu.

Votre regard, profond et rempli d’ombre,
Me fait joyeux, s’il brille, et sinon, sombre

Quand vous passez, je baise le chemin,
Et vous tenez mon coeur dans votre main

Seule, en son nid, pleure la tourterelle.
Las, je suis seul et je pleure comme elle.

L’aube, au matin ressuscite les fleurs,
Et votre vue apaise les douleurs.

Disparaissez, toute floraison cesse,
Et, loin de vous, s’établit la tristesse.

Apparaissez, la verdure et les fleurs
Aux prés, aux bois, diaprent leurs couleur

Si vous voulez, Madame et bien-aimée,
Si tu voulais, sous la verte ramée,

Nous en aller, bras dessus, bras dessous,
Dieu! Quels baisers! Et quels propos de fous!

Mais non! Toujours vous vous montrez revêche
Et cependant je brûle et me dessèche,

Et le désir me talonne et me mord,
Car je vous aime, ô Madame la Mort!

(Paul Verlaine)

Recueil: Poésies Verlaine
Editions: Hachette

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NUIT OBSCURE (Jean de la Croix)

Posted by arbrealettres sur 15 mai 2023




    
NUIT OBSCURE

CHANSONS DE L’ÂME
qui se réjouit d’avoir atteint
le haut état de perfection,
qui est l’union avec Dieu,
par le chemin de la négation spirituelle

Dans une nuit obscure
par un désir d’amour tout embrasée
oh joyeuse aventure
dehors me suis glissée
quand ma maison fut enfin apaisée

Dans l’obscur et très sûre
par la secrète échelle déguisée
oh joyeuse aventure
dans l’obscur et cachée
quand ma maison fut enfin apaisée

Dans cette nuit de joie
secrètement car nul ne me voyait
ni mes yeux rien qui soit
sans lumière j’allais
autre que celle en mon coeur qui brûlait

Et elle me guidait
plus sûr que la lumière de midi
au lieu où m’attendait
moi je savais bien qui
en un pays où nul ne paraissait

Oh nuit qui as conduit
nuit plus aimable que l’aube levée
oh nuit qui as uni
l’ami avec l’aimée
l’aimée en l’ami même transformée

Contre mon sein fleuri
qui tout entier pour lui seul se gardait
il resta endormi
moi je le caressais
de l’éventail des cèdres l’air venait

Du haut du créneau l’air
quand sous mes doigts ses cheveux s’écartaient
avec sa main légère
à mon cou me blessait
et chacun de mes sens me ravissait

En paix je m’oubliai
j’inclinai le visage sur l’ami
tout cessa je cédai
délaissant mon souci
entre les fleurs des lis parmi l’oubli

***

NOCHE OSCURA

CANCIONES DEL ALMA
que se goza de haber llegado
al alto estado de la perfección,
que es la unión con Dios,
por el camino de la negación espiritual

En una noche oscura
con ansias en amores inflamada
oh dichosa ventura
salí sin ser notada
estando ya mi casa sosegada

A oscuras y segura
por la secreta escala disfrazada
oh dichosa ventura
a oscuras y en celada
estando ya mi casa sosegada

En la noche dichosa
en secreto que nadie me veía
ni yo miraba cosa
sin otra luz y guía
sino la que en el corazón ardía

Aquesta me guiaba
mds cierto que la luz del mediodía
adonde me esperaba
quien yo bien me sabía
en parte donde nadie parecía

O noche que guiaste
O noche amable más que el alborada
O noche que juntaste
amado con amada
amada en el amado transformada

En mi pecho florido
que entero para él solo se guardaba
allí quedó dormido
y yo le regalaba
y el ventalle de cedros aire daba

El aire de la almena
cuando yo sus cabellos esparcía
con su mano serena
en mi cuello hería
y todos mis sentidos suspendía

Quedéme y olvidéme
el rostro recliné sobre el amado
cesó todo y dejéme
dejando mi cuidado
entre las azucenas olvidado

(Jean de la Croix)

Recueil: Nuit obscure Cantique spirituel
Traduction: Jacques Ancet
Editions: Gallimard

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FAIS CHANTER TA LYRE (Rosa Burel)

Posted by arbrealettres sur 12 mai 2023



Illustration
    
FAIS CHANTER TA LYRE

Sais-tu qu’il faut aimer pour devenir heureux ?
C’est la loi de la vie on ne peut la trahir
Sans se blesser soi-même et parfois se haïr
Heureuse condition pour le coeur généreux.

Tu n’as jamais médit. Surtout n’y songe pas
Reste bien grand de paix et fais chanter ta lyre
Au-dessus du pardon comme l’amour délire
C’est la belle prière à faire encor tout bas.

Il te faut donc aimer au grand jeu du destin
Le soleil et les fleurs, le prix de la souffrance
Alors t’apparaîtra celui de l’espérance
Plus grand que la douleur lumineux et certain.

Puisque tu crois au ciel il faut lever les yeux
Ne fais jamais douter ton cœur de sa puissance
Prends ce chemin qui monte et console joyeux
Toutes choses, un jour perdent leur suffisance.

Il te faut donc aimer au fort de l’aquilon
Et même plus encor comme au jour le plus long
Dieu peut-il oublier et le roseau qui tremble
Et l’amour qui se donne à lui et marche d’amble.

(Rosa Burel)

Recueil: à coeur ouvert
Editions: Bertout

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NOTÉ UNE NUIT D’AVRIL (Hermann Hesse)

Posted by arbrealettres sur 31 mars 2023




    
NOTÉ UNE NUIT D’AVRIL

Qu’il y ait des couleurs, c’est étrange :
Blanc, jaune, bleu, vert, rouge, orange !

Etrange qu’il y ait des sons :
Cors, sopranos, hautbois, bassons !

Qu’il y ait une langue encore :
Vocables, vers, rimes, cadence,
Inflexion délicate ou sonore,
Syntaxe qui marche ou qui danse !

Qui se plaît à ces jeux,
Dans leur charme se baigne,
Pour lui le monde rit, joyeux,
Fleurit et lui enseigne
Son coeur, son sens mystérieux.

Ce que tu aimas, voulus,
Que tu rêvas ou vécus
Pour toi garde existence.
Fut-ce heure bonne ou mauvaise ?
Sol dièse ou la bémol, mi bémol ou ré dièse,
Fait-on la différence ?

***

NACHTS IM APRIL NOTIERT

O daß es Farben gibt :
Blau, Gelb, Weiß, Rot und Grün !

O daß es Töne gibt :
Sopran, Baß, Horn, Oboe !

O daß es Sprache gibt :
Vokabeln, Verse, Reime,
Zärtlichkeiten des Anklangs,
Marsch und Tänze der Syntax !

Wer ihre Spiele spielte,
Wer ihre Zauber schmeckte,
Ihm blüht die Welt,
Ihm lacht sie und weist ihm
Ihr Herz, ihren Sinn.

Was du liebtest und erstrebtest,
Was du träumtest und erlebtest,
Ist dir noch gewiß.
Ob es Wonne oder Leid war ?
Gis und As, Es oder Dis —
Sind dem Ohr sie unterscheidbar ?

(Hermann Hesse)

Recueil: Poèmes choisis
Traduction: Jean Malaplate
Editions: José Corti

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CHOSES (Gabriela Mistral)

Posted by arbrealettres sur 26 février 2023



Gabriela Mistral
    
CHOSES
A Max Daireaux.

J’aime les choses jamais eues,
avec celles que je n’ai plus.

Je palpe une eau silencieuse,
étale sur des prés frileux,
frissonnant sans la moindre brise,
dans un clos qui fut mon enclos.

Je la vois comme la voyais,
une étrange pensée me vient
et je joue, lente, avec cette eau,
comme avec poisson ou mystère.

Je pense au lieu où j’ai laissé
des pas joyeux que je n’ai plus
et sur le seuil, vois une plaie,
pleine de mousse et de silence.

Je cherche un vers que j’ai perdu
et que m’avait dit à sept ans
une femme faisant le pain,
dont je vois la bouche bénie.

Un parfum défait en rafales
m’apporte bonheur quand il vient,
si ténu qu’il n’est pas parfum,
et c’est l’odeur des amandiers.

Il redonne enfance à mes sens,
je lui cherche un nom et ne trouve
et flaire l’air et les villages,
en quête d’amandiers absents.

J’entends tout près une rivière;
je l’entends depuis quarante ans :
c’est le murmure de mon sang,
ou quelque rythme à moi donné;

ou bien l’Elqui de mon enfance,
que je remonte et passe à gué,
jamais perdu, coeur contre coeur,
nous allons comme deux enfants.

Lorsque je rêve de mes Andes,
j’avance par des défilés
où me parvient un sifflement,
presque une conjuration.

Je vois à ras de Pacifique
mon archipel violet sombre,
avec l’île qui m’a laissé
une âcre odeur d’alcyon mort.

Un dos, un dos grave et paisible
au bout du rêve que je fais
marque la fin de mon chemin;
je m’y repose quand j’arrive.

Tronc d’arbre mort ou bien mon père
est ce vague dos couleur cendre;
je ne l’interroge ni trouble,
je me couche à côté et dors.

J’aime une pierre d’Oaxaca
ou Guatemala; j’en approche;
fixe et rouge, elle me ressemble;
la crevasse en expire un souffle.

Dans son sommeil, je la vois nue,
et ne sais pourquoi la retourne.
Je ne l’ai pas eue peut-être :
c’est mon sépulcre que je vois.

(Gabriela Mistral)

Recueil: Poèmes choisis Prix Nobel de littérature 1945
Editions: Rombaldi

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Accueille (Sappho)

Posted by arbrealettres sur 24 février 2023



Illustration: Erte
    
Accueille, immortelle Aphrodita, Déesse,
Tisseuse de ruse à l’âme d’arc-en-ciel,
Le frémissement, l’orage et la détresse
De mon long appel.

J’ai longtemps rêvé : ne brise pas mon âme
Parmi la stupeur et l’effroi de l’éveil,
Blanche Bienheureuse aux paupières de flamme,
Aux yeux de soleil.

Jadis, entendant ma triste voix lointaine,
Tu vins l’écouter dans la paix des couchants
Où songe la mer, car ta faveur hautaine
Couronne les chants.

Je vis le reflet de tes cheveux splendides
Sur l’or du nuage et la pourpre des eaux,
Ton char attelé de colombes rapides
Et de passereaux.

Et le battement lumineux de leurs ailes
Jetait des clartés sur le sombre univers
Qui resplendissait de lueurs d’asphodèles
Et de roux éclairs.

Déchaînant les pleurs et l’angoisse des rires,
Tu quittas l’aurore immuable des cieux.
Là-bas surgissait la tempête des lyres
Aux sanglots joyeux.

Et Toi, souriant de ton divin visage,
Tu me demandas : « D’où vient l’anxiété
A ton grave front, et quel désir ravage
Ton corps tourmenté ?

« Qui te fait souffrir de l’âpre convoitise ?
Et quelle Peithô, plus blonde que le jour
Aux cheveux d’argent, te trahit et méprise,
Psappha, ton amour ?

« Tu ne sauras plus les langueurs de l’attente.
Celle qui te fuit te suivra pas à pas.
Elle t’ouvrira, comme la Nuit ardente,
L’ombre de ses bras.

« Et, tremblante ainsi qu’une esclave confuse,
Offrant des parfums, des présents et des pleurs,
Elle ira vers toi, la vierge qui refuse
Tes fruits et tes fleurs.

« Par un soir brûlant de rubis et d’opales
Elle te dira des mots las et brisés,
Et tu connaîtras ses lèvres nuptiales,
Pâles de baisers. »

(Sappho)

 

Recueil: 52 poèmes d’Occident pour apprendre à s’émerveiller
Editions: Pocket

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SUR L’AIR DE LA MÉLODIE DES PASSES DU SOLEIL (Kòu Zhùn)

Posted by arbrealettres sur 21 janvier 2023



Illustration: Dai Dunbang
    
SUR L’AIR DE LA MÉLODIE DES PASSES DU SOLEIL

L’herbe du défilé sous un halo de brouillard s’étale,
De la Wei en remous s’entend le grondement.
Les vagues de pluie du printemps s’apaisent,
une légère poussière se répand,
On monte en selle pour partir en campagne.
Voyez là si verdoyants les saules,
Dont ici on a tiré et brisé un rameau.
On se met en branle le coeur lourd,
Qui sait en quelle saison nous serons à nouveau réunis ?

Alors, vidons encore un verre,
Chantons encore un air !
On soupire sur l’existence,
Si amer de passer d’une joyeuse compagnie aux adieux, au départ.
Aussi ne nous dérobons pas à l’ivresse profonde,
Prêtons l’oreille aux « Passes du Soleil » jusqu’au bout.
Quand nous repenserons à nos chers vieux amis,
Éloignés de cent lieues, avec eux nous partagerons le clair de lune.

***

(Kòu Zhùn) (961-1023)

 

Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise

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ON SORT ET ON ENTRE… (Jean Cocteau)

Posted by arbrealettres sur 10 janvier 2023



Illustration: Fred Einaudi
    
ON SORT ET ON ENTRE…

On sort et on entre
On entre et on sort
On change de ventre
C’est là notre sort.

Maternelle terre
Ventre maternel
Ô double lumière
De notre tunnel.

De ventre je change
L’un l’autre m’aimant
Le dernier nous mange
Maternellement.

D’une nuit en route
Vers une autre nuit
La joyeuse voûte
Trompe notre ennui.

Trop de solitude
Ne m’a pas ôté
Ma vieille habitude
De l’éternité.

(Jean Cocteau)

 

Recueil: Clair-obscur
Traduction:
Editions: Points

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