Un soleil aveuglant martèle l’arène ronde.
L’air vibre, languissant, et la lumière poudroie.
Tassées dans des gradins qui s’énervent et qui grondent,
Vingt mille hyènes assoiffées y attendent leur proie.
C’est jour de grande liesse et c’est jour de carnage :
César Imperator donne à ses gens une fête,
Le rideau peut s’ouvrir sur la moisson sauvage
Où les faux sont des glaives et les épis des têtes.
Tremblant de tous leurs membres au ventre des cachots,
Les chrétiens enchaînés vomissent d’épouvante,
Et respirant leur mort au milieu des sanglots,
Ils reniflent au-dehors la rumeur impatiente.
Soudain les portes craquent sur la lumière violente,
Le cirque halluciné hurle ses pauvres haines,
Et face à l’empereur qu’un vague ennui tourmente,
Tout un peuple délire, ivre de joie païenne.
Les brebis sont groupées au centre de l’arène,
Terrorisées, muettes, elles se touchent et se serrent
Et lancent vers le ciel, dans la chaleur romaine,
Pour la dernière fois, une dernière prière.
Après ne restent plus sur le sable rougi,
Dans le soir qui descend aux marches italiennes,
Que l’ombre de leur peur et l’écho de leurs cris,
Et, fantôme debout, l’arche marmoréenne…
Depuis des lustres
j’ai parlé à des amis
et de même noté dans mes journaux intimes
que tout est mouvement
que même la pierre est vie
J’ai longtemps affirmé
que la terre aussi est un être vivant
Nous voyons simplement les formes rondes des planètes
avec les yeux que nous avons. —
Mais les rayonnements ?
Tout est certes rond —
l’homme avec ses rayonnements
et toute vie
(Edvard Munch)
Recueil: Mots de Munch
Traduction: Hélène Hervieu
Editions: de la réunion des grands musées nationaux – Grand Palais
Quand s’étire et déroule
Son corps en paillasson,
Qu’il n’est plus en boule,
Tout hirsute et brouillon,
On aperçoit son nez pointu,
Ses petites pattes griffues,
Ses yeux noirs tout ronds
Brillants comme des boutons.
Qu’il est mignon
Le hérisson !
(Corinne Albaut)
Recueil: Comptines des secrets de la Forêt
Traduction:
Editions: Actes Sud Junior
Les mousserons
Sont des champignons
Qui poussent en rond
Dans la clairière.
Ce sont des ronds de sorcières,
Car c’est là, dit-on, qu’elles vont danser,
Lorsque la nuit est tombée.
Mais au petit matin,
Il ne reste plus rien
Que des champignons.
(Corinne Albaut)
Recueil: Comptines des secrets de la Forêt
Traduction:
Editions: Actes Sud Junior
par la maison de ma tante passe la route des fourmis,
cette route ancestrale attestée par les chroniques de l’Orient.
Les fourmis montent du jardin de la voisine, le long d’une lézarde dans le mur.
Dans la salle de bains, elles valsent sur les dalles blanches et bleues,
traversent le panier à linge, la paroi et soudain, dans le salon,
elles défilent sur le cadre doré de la glace ronde.
***
(Constantin Abaluta)
Traduction de Carl Norac et d’Annie Bentoïu
Recueil: Poésies du Monde
Traduction:
Editions: Seghers
CEUX QUI NE DANSENT PAS (Gabriela Mistral)
Posted by arbrealettres sur 26 février 2023
CEUX QUI NE DANSENT PAS
La petite infirme
dit : « Comment danser ? »
Nous lui répondons :
« Fais danser ton coeur. »
Et l’estropiée
dit : « Comment chanter? »
Nous lui répondons :
« Fais chanter ton coeur. »
Le chardon sec dit :
« Comment danserai-je ? »
— En faisant au vent
s’envoler ton coeur.
Dieu dans la hauteur
dit : « Comment descendre ? »
— Descends en lumière
danser avec nous.
Toute la vallée
n’est que vaste ronde
et celui qui manque,
son coeur devient cendre.
(Gabriela Mistral)
Recueil: Poèmes choisis Prix Nobel de littérature 1945
Editions: Rombaldi
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