Les mousserons
Sont des champignons
Qui poussent en rond
Dans la clairière.
Ce sont des ronds de sorcières,
Car c’est là, dit-on, qu’elles vont danser,
Lorsque la nuit est tombée.
Mais au petit matin,
Il ne reste plus rien
Que des champignons.
(Corinne Albaut)
Recueil: Comptines des secrets de la Forêt
Traduction:
Editions: Actes Sud Junior
Il me fait entendre
quand il danse avec moi…
des mots…
qui ne ressemblent pas à des mots
il me saisit
par le bras
me plante
dans l’un des nuages
et dans mes yeux
tombe la pluie noire
averse …
averse
il m’emporte avec lui…
il m’emporte
vers un soir de balcons roses
et moi comme une enfant dans ses mains
comme une plume… portée par la brise
il apporte pour moi…
sept lunes dans ses mains
et un bouquet de chansons
il m’offre un soleil.
Il m’offre…
un été…
un troupeau d’hirondelles…
il m’informe…
que je suis sa merveille
que je vaux…
des milliers d’étoiles
que je suis un trésor…
et que je suis…
le tableau le plus beau qu’il ait jamais vu
il raconte…
des choses qui me font tourner la tête
me font oublier le tintamarre de la musique
me font oublier…
la piste…
et les pas
des mots
qui retournent sens dessus-dessous mon histoire…
qui me font femme en quelques instants
une autre femme…
en quelques instants…
Il me fait entendre quand il danse avec moi…
des mots…
qui ne ressemblent pas à des mots
il me laisse…
perdue pendant des heures…
il me laisse
m’amuser avec un fil
un fil dont les noeuds sont serrés
un fil fait de cauris
un fil fait de mots
il me laisse
au milieu du drame…
je ressasse…
je ressasse…
les mots
avec moi rien…
que…
les mots
***
(Nizar Qabbani)
Recueil: Poésie Syrienne contemporaine
Traduction:de l’Arabe par Saleh Diab
Editions: Le Castor Astral
Avant d’entrer dans ma cellule
Il a fallu me mettre nu
Et quelle voix sinistre ulule
Guillaume qu’es-tu devenu
Le Lazare entrant dans la tombe
Au lieu d’en sortir comme il fit
Adieu Adieu chantante ronde
Ô mes années ô jeunes filles
II
Non je ne me sens plus là
Moi-même
Je suis le quinze de la
Onzième
Le soleil filtre à travers
Les vitres
Ses rayons font sur mes vers
Les pitres
Et dansent sur le papier
J’écoute
Quelqu’un qui frappe du pied
La voûte
III
Dans une fosse comme un ours
Chaque matin je me promène
Tournons tournons tournons toujours
Le ciel est bleu comme une chaîne
Dans une fosse comme un ours
Chaque matin je me promène
Dans la cellule d’à côté
On y fait couler la fontaine
Avec le clefs qu’il fait tinter
Que le geôlier aille et revienne
Dans la cellule d’à coté
On y fait couler la fontaine
IV
Que je m’ennuie entre ces murs tout nus
Et peint de couleurs pâles
Une mouche sur le papier à pas menus
Parcourt mes lignes inégales
Que deviendrai-je ô Dieu qui connais ma douleur
Toi qui me l’as donnée
Prends en pitié mes yeux sans larmes ma pâleur
Le bruit de ma chaise enchainée
Et tour ces pauvres coeurs battant dans la prison
L’Amour qui m’accompagne
Prends en pitié surtout ma débile raison
Et ce désespoir qui la gagne
V
Que lentement passent les heures
Comme passe un enterrement
Tu pleureras l’heure ou tu pleures
Qui passera trop vitement
Comme passent toutes les heures
VI
J’écoute les bruits de la ville
Et prisonnier sans horizon
Je ne vois rien qu’un ciel hostile
Et les murs nus de ma prison
Le jour s’en va voici que brûle
Une lampe dans la prison
Nous sommes seuls dans ma cellule
Belle clarté Chère raison
(Guillaume Apollinaire)
Recueil: La Liberté en poésie
Traduction:
Editions: Folio junior