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Poésie

Posts Tagged ‘persister’

En exil (Paul Eluard)

Posted by arbrealettres sur 14 Mai 2024



En exil

Elle est triste elle fait valoir
Le doute qu’elle a de sa réalité
dans les yeux d’un autre.

Plante majeure dans le bain
Végétal travaillé brune ou blonde
A l’extrême fleur de la tête
Sa nudité continuelle

Ses seins de faveurs refusées
Un rire aux cheveux de cytise
Parmi les arbres
L’orage qui défend les siens
Brise les tiges de lumière

C’est elle c’est l’orage aussi
Qui distribue des armes maladroites
Aux herbes aux insectes
Aux dernières chaleurs
Les fumées de l’automne
Les cendres de l’hiver

La perle noire n’est plus rare
Le désir et l’ennui fraternisent
Manège des manies
Tout est oublié
Rien n’est sacrifié
L’odeur des décombres persiste.

Les yeux fermés c’est elle tout entière.

(Paul Eluard)


Illustration: Schilder Antoon Van Wely

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Il est un chagrin vague (Fernando Pessoa)

Posted by arbrealettres sur 16 avril 2024



Illustration: Guy Baron
    
Il est un chagrin vague
Dans le fond de mon coeur…
Semblable à un bruit d’eau
Dans une solitude…
Un fragile bruit d’eau…

Je pense à ce qui, mort,
Persiste à vivre en moi…
J’y pense, et je m’enfouis
Dans un rêve sans fin,
Stérile et qui m’enfouit.

Me suffit-elle enfin
La vie vécue en vain ?
Allons, que rien ne sorte
Hors de sa solitude…
De moi que je ne sorte !

Je ne sais pas. J’endure les à-coups
Du chagrin dans mon être…
Je médite, et en moi résonne le couchant
De tout ce que j’ai voulu vivre
— Toujours seulement le couchant.

(Fernando Pessoa)

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Je persiste à sonder les brumes (Frankétienne)

Posted by arbrealettres sur 20 février 2024



Illustration: Viviane-Josée Restieau
    
Je persiste à sonder les brumes
et les nuages de l’horizon
sous le clignotement
de la toute petite flamme
rebelle à la mort.

Vivre
Frémir
Bondir
Sauter
Piaffer
Courir
Danser
Voltiger
Sans jamais briser mes tremplins.

(Frankétienne)

Recueil: Anthologie secrète
Editions: Mémoire d’encrier

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La flamme de la petite bougie (Abdellatif Laâbi)

Posted by arbrealettres sur 1 février 2024




    
La flamme de la petite bougie

« C’est de persister qu’il s’agit.
Ne pas oublier le feuillage ayant cette vertu,
les astres inexplorés
qui naviguent à vue
sur les flots de l’éternité.
Protéger de ses poèmes nus
la flamme de la petite bougie. »

(Abdellatif Laâbi)

Recueil: Anthologie Poèmes ouverts
Editions: POINTS

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Tenter, braver, persister, persévérer (Victor Hugo)

Posted by arbrealettres sur 26 janvier 2024



Illustration: Eugène Delacroix
    
Tenter, braver, persister, persévérer,
être fidèle à soi-même,
prendre corps à corps le destin,
étonner la catastrophe
par le peu de peur qu’elle nous fait,
tantôt affronter la puissance injuste,
tantôt insulter la victoire ivre,
tenir bon, tenir tête;

voilà l’exemple dont les peuples ont besoin,
et la lumière qui les électrise.

(Victor Hugo)

 

Recueil: L’Ardeur ABC poétique du vivre plus
Editions: Bruno Doucey

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Hors des pièges (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 16 décembre 2023



Illustration: Christian Lloveras
    
Hors des pièges

Le temps s’est rompu
Mais les chaînes persistent.

Un oiseau se déchire
Une étoile abdiquera ;
Le vainqueur lasse son ombre
Et les chevreuils gémissent.

En habits d’océan le poète veillera.

(Andrée Chedid)

Recueil: Andrée Chedid Poèmes
Editions: Flammarion

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CE SOUVENIR (Pierre Reverdy)

Posted by arbrealettres sur 30 août 2023




    

Illustration: ArbreaPhotos

CE SOUVENIR

Je t’ai vu
Je t’ai vu au fond devant le mur
J’ai vu le trou de ton ombre sur le mur
Il y avait encore du sable
Et tes pieds nus
La trace de tes pieds qui ne s’arrêtait plus
Comment t’aurais-je reconnu
Le ciel tenait tout le fond tout l’espace
Un peu de terre en bas qui brillait au soleil
Encore un peu de place
Et la mer
L’astre est sorti de l’eau
Un navire passait volant bas
Un oiseau
La ligne à l’horizon d’où venait le courant
Les vagues mouraient en riant
Tout continue
On ne sait pas où finira le temps
Ni la nuit
Tout est effacé par le vent
On chante autrement
On parle avec un autre accent
Je reconnais des yeux qui sont restés vivants
Et la pendule qui sonnait dans la chambre
Une heure en retard
Le matin vert qui vient quand on n’a pas dormi
Ii y a un gai ruisseau d’eau claire et d’autres cris
Devant la porte une silhouette qui disparaît
Un visage dans la lumière
Et au milieu de tout ce qui vit et se réveille
La même et seule voix qui persiste
dans mon oreille

(Pierre Reverdy)

Recueil: Main d’oeuvre 1913-1949
Editions: Gallimard

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O Monde, j’ai cueilli ta fleur (Rabindranath Tagore)

Posted by arbrealettres sur 8 juillet 2023




    
O Monde, j’ai cueilli ta fleur
Je l’ai pressée contre mon coeur
et son épine m’a piqué.
Au sombre déclin du jour
la fleur s’est fanée,

mais la douleur a persisté.

O Monde, bien des fleurs
te reviendront parfumées et glorieuses.
Mais l’heure de cueillir des fleurs
est passée pour moi
et dans la nuit sombre,
je n’ai plus ma rose ;

sa douleur seule persiste.

(Rabindranath Tagore)

Recueil: Le Jardinier d’Amour
Editions: Gallimard

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À UNE MYOPE (Nathalie Clifford Barney)

Posted by arbrealettres sur 8 juin 2023




    
À UNE MYOPE

J’aime tes yeux d’aveugles agrandis par les rêves,
Tes yeux hantés de nuit, ne voyant que trop tard
Toute chose, et de près tes cils quand tu les lèves;
Et je voudrais frôler de ma bouche sans fard

Tes yeux purs comme une onde où malgré toi persiste
La sirène : je veux aspirer ton regard
Mais puisque pour tes yeux l’irréel seul existe,

Sans cesse contemplant d’invisibles beautés,
Trop frêle pour la vie, et pour l’amour trop triste,
Tu passes sans les voir tous deux à tes côtés.

(Nathalie Clifford Barney)

Recueil: Je serai le FEU (Diglee)
Editions: La ville brûle

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Une fois, presque à la fin de la journée (Marie Noël)

Posted by arbrealettres sur 24 Mai 2023



    

Une fois, presque à la fin de la journée,
elle (ma nourrice) m’a conduite très loin,
au bord du monde, dans un champ mystérieux
où nous avons coupé avec la faucille
de grandes fougères.

Je n’ai jamais retrouvé ce champ.
Il n’avait pas d’entrée.
Mais un bonheur était dedans,
sur le bord du soleil qui allait partir.

Comment étions-nous venues là
toutes les deux,
sans route ni sentier?

*

Quand viendra le soir, au bout des années
Où, l’épaule basse et les yeux rougis,
Je ne serai plus, traînante et fanée,
Qu’une vieille en trop qui vague au logis.

Alors, quand le jour hésite et décline,
Comme une étrangère à jamais qui part,
A jamais… alors, comme une orpheline
Dont le cri n’a plus d’abri nulle part,

Je m’en irai seule avec mon pauvre âge
Qui n’a plus ni chant, ni charme, ni fleur,
Je m’en irai seule à la mort sauvage,
Sans faire alentour ni bruit ni malheur.

J’irai retrouver le pré seul au monde
0ù je traversai, petite, un bonheur
Que nul autre pré ne sut à la ronde,
Le champ oublié de tous les faneurs;

Le champ égaré depuis mon enfance
Que les bois au fond de leur secret noir
Ont si loin serré dans un grand silence
Que nul sentier clair n’a su le revoir.

Là se tient la fleur qui n’est pas sortie
Pour d’autres que moi dans mon prime temps.
Peut-être en ce champ, derrière l’ortie,
Que l’oiseau de l’aube à mi-ciel m’attend?

J’entrerai dedans sans bouquet ni gerbe,
La fleur et l’oiseau perdus y seront.
Je m’enfermerai dans ma chambre d’herbe…
Ce que j’y viens faire, eux seuls le sauront.

…….

Pas à pas le temps faible qui persiste
A battre en mon coeur sans savoir pourquoi
Sortira du monde… Et les feuilles tristes
Qui meurent le soir tomberont sur moi.

(Marie Noël)

Recueil: Poètes d’aujourd’hui – Marie Noël
Editions: Pierre Seghers

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