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Poésie

Posts Tagged ‘place’

Mettre au propre la Matière (Fernando Pessoa)

Posted by arbrealettres sur 12 Mai 2024



Fernando Pessoa
    

Mettre au propre la Matière
Remettre à leur place les choses que les hommes ont dérangées
Parce qu’ils ne comprenaient pas à quoi elles servaient.
Remettre droit, comme
Une bonne ménagère de la Réalité,
Les rideaux des fenêtres de la Sensation
Et les paillassons aux portes de la Perception.
Balayer les chambres de l’observation
Et secouer la poussière des idées simples.
Telle est ma vie, vers par vers.

(Fernando Pessoa)

Recueil: Poèmes jamais assemblés
Traduction: du portugais par Jean-Louis Giovannoni, Isabelle Hourcade, Rémy Hourcade,Fabienne Vallin
Editions: Unes

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Avec les mains brûlées (Tristan Cabral)

Posted by arbrealettres sur 4 Mai 2024



Illustration: Nébuleuse de l’Aigle Piliers de la Création  
    
Avec les mains brûlées
Je ne suis pas d’ici
Je viens des nébuleuses
J’incise les époques
Et je joue sur les places
Des musiques douloureuses
Des chiens perdus hurlent dans l’Atlantique
Je commence un voyage
Avec les mains brulées
Et je finirai bien
Par faire de mon visage
Une île intraduisible.

(Tristan Cabral)

Recueil: Poèmes à dire
Editions: Chemins de Plume

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Enfance (Brigitte Baumié)

Posted by arbrealettres sur 29 avril 2024




    

Enfance

Quand je lis
j’arrête d’attendre.
Les livres
ils attendent à notre place.

(Brigitte Baumié)

Recueil: paysages intermittents
Editions: La Boucherie littéraire

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JE PASSERAI PAR LA PLACE D’ESPAGNE (Cesare Pavese)

Posted by arbrealettres sur 28 avril 2024



Illustration: Louise Georgette Agutte
    
JE PASSERAI PAR LA PLACE D’ESPAGNE

Le ciel sera limpide.
Les rues s’ouvriront
sur la colline de pins et de pierre.
Le tumulte des rues
ne changera pas cet air immobile.

Les fleurs éclaboussées
de couleurs aux fontaines
feront des clins d’oeil
comme des femmes gaies.

Escaliers et terrasses
et les hirondelles
chanteront au soleil.

Cette rue s’ouvrira,
les pierres chanteront,
le coeur en tressaillant battra,
comme l’eau des fontaines.

Ce sera cette voix
qui montera chez toi.
Les fenêtres sauront
le parfum de la pierre
et de l’air du matin.

Une porte s’ouvrira.
Le tumulte des rues
sera le tumulte du coeur
dans la lumière hagarde.

Tu seras là – immobile et limpide.

(Cesare Pavese)

Recueil: Travailler fatigue La mort viendra et aura tes yeux
Traduction: Gilles de Van
Editions: Gallimard

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Quitte ou double (Elvira Sastre)

Posted by arbrealettres sur 20 avril 2024




    
Quitte ou double

Nous sommes tous amoureux.
Seuls certains d’entre nous sont éveillés.

*

L’amour est une parenthèse ouverte.

*

Je sais que tu me rends heureuse
car ma tristesse ne te reconnaît pas.

*

Elle était si belle qu’elle m’a fait douter :
Allais-je l’aimer de l’extérieur
ou m’aimer de l’intérieur ?

*

Je l’aimais avec l’éternité que concède
la brièveté d’un moment inoubliable.

*
Elle m’a demandé de lui écrire
un poème d’amour.
J’ai dessiné un oiseau
Et elle est partie.

*

Je suis aussi faible et aussi forte
qu’une fleur au milieu d’un champ en ruine.

*

Je t’aime jusqu’à ce que tu me prouves le contraire.

*

Il est des moments où la vie te place à égale distance
de l’envie de fuir ou de rester pour toujours.

*

La paix, ce n’est pas l’absence de bruits,
mais les écouter et les changer en silence.

*

Écrire est une affaire de lâches ;
l’amour est pur courage.
Les deux ensemble, poésie.

*

Deux personnes qui s’oublient
s’aiment juste différemment.
L’oubli arrive avec la solitude,
quand un n’est plus qu’un
et qu’il n’y a pas de place pour un autre.

(Elvira Sastre)

Recueil: Tu es la plus belle chose que j’ai faite pour moi
Traduction: de l’espagnol par Isabelle Gugnon
Editions: NIL

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EXIL DE LA MÉMOIRE (Joy Harjo)

Posted by arbrealettres sur 3 avril 2024




    

EXIL DE LA MÉMOIRE

Ne revenez pas,
Nous a avertis un qui sait des choses,
Vous ne ferez que déranger les morts.
Ils émergeront de la spirale de petites maisons
Alignées dans les sillons de moelle
Et parcourront la terre.
Il n’y aura pas de place dans la mémoire
Pour ce qu’ils voient
Les routes, les maisons, les magasins d’intrus
Plantés sur les prairies de sang
Où les morts se tinrent pour la dernière fois.
Et puis quoi, vous, avec vos mots
De la langue de l’ennemi,
Savez-vous tracer une route paisible
Dans la mémoire humaine ?
Et les fantômes enragés de l’histoire ?
Et puis quoi ?
[…]
Ne regardez pas en arrière.
Au catéchisme on nous a dit que la femme de Loth
Regarda en arrière et fut changée
En sel.
Sauf que sa famille ne quittait pas le Paradis.
Nous aimions nos arbres et nos eaux
Et les créatures et les terres et les cieux
De ce lieu adoré.
Ces êtres étaient nos compagnons
Alors même qu’ils nous nourrissaient,
nous protégeaient.
Si je suis changée en sel
Ce sera à cause des larmes pétrifiées
Dans les empreintes des miens
Lorsqu’ils marchaient vers l’ouest.

***

EXILE OF MEMORY

Do not return,
We were warned by one who knows things
You will only upset the dead.
They will emerge from the spiral of little houses
Lined up in the furrows of marrow
And walk the land.
There will be no place in memory
For what they see
The highways, the houses, the stores of interlopers
Perched over the blood fields
Where the dead last stood.
And then what, you with your words
In the enemy’s language,
Do you know how to make a peaceful road
Through human memory?
And what of angry ghosts of history?
Then what?
[…]
Don’t look back.
In Sunday school we were told Lot’s wife
Looked back and turned
To salt.
But her family wasn’t leaving Paradise.
We loved our trees and waters
And the creatures and earths and skies
In that beloved place.
Those beings were our companions
Even as they fed us, cared for us.
If I turn to salt
It will be of petrified tears
From the footsteps of my relatives
As they walked west.

(Joy Harjo)

Recueil: L’aube américaine
Traduction: de l’anglais (Etats Unis) par Héloïse Esquié
Editions: Globe

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Repousser le scintillement (Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 2 avril 2024



    
Repousser le scintillement de ce qu’on sait
comme l’enfant repousse son jouet au bord de la table
et le laisse tomber sans raison,
peut-être pour jouer avec sa place vide.

Il y a un ciel des choses enterrées,
un ciel brusque et double,
où l’autre s’abstient.

(Roberto Juarroz)

Recueil: Poésie verticale
Traduction: de l’espagnol par Roger Munier
Editions: Gallimard

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Une fibre plus mince que la pensée Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 1 avril 2024



    

Une fibre plus mince que la pensée, un fil au calibre nul,
unit nos yeux quand nous ne nous regardons pas.

Quand nous nous regardons
nous unissent tous les fils du monde,
mais celui-là manque,
qui seul donne l’ombre
à la lumière la plus secrète de l’amour.

Quand nous ne serons plus, restera peut-être ce fil
pour unir nos places vides.

(Roberto Juarroz)

Recueil: Poésie verticale
Traduction: de l’espagnol par Roger Munier
Editions: Gallimard

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Une chose se glisse hors de son lieu de chose (Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 1 avril 2024



Illustration: Auriane Phillippon
    
Une chose se glisse hors de son lieu de chose
ouvrant ainsi une brèche
par où se découvre son dessin parallèle,
sa ligne doublant une autre ligne égale,
mais de plus de silence.
Puis elle revient à sa place.
Si l’on parvient à maintenir la brèche ouverte,
les deux traits parallèles finiront par se confondre.

(Roberto Juarroz)

Recueil: Poésie verticale
Traduction: de l’espagnol par Roger Munier
Editions: Gallimard

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Paix (Yannis Ritsos)

Posted by arbrealettres sur 20 mars 2024




    

Paix

Le rêve de l’enfant, c’est la paix.
Le rêve de la mère, c’est la paix.
Les paroles de l’amour sous les arbres, c’est la paix.
Quand les cicatrices des blessures se ferment sur le visage du monde
et que nos morts peuvent se tourner sur le flanc et trouver
un sommeil sans grief
en sachant que leur sang n’a pas été répandu en vain,
c’est la paix.

La paix est l’odeur du repas, le soir,
lorsqu’on n’entend plus avec crainte
la voiture faire halte dans la rue,
lorsque le coup à la porte désigne l’ami
et qu’en s’ouvrant la fenêtre
désigne à chaque heure le ciel
en fêtant nos yeux aux cloches lointaines des couleurs,
c’est la paix.

La paix est un verre de lait chaud
et un livre posés devant l’enfant qui s’éveille.
Lorsque les prisons sont réaménagées en bibliothèques,
lorsqu’un chant s’élève de seuil en seuil, la nuit,
à l’heure où la lune printanière sort du nuage
comme l’ouvrier rasé de frais
sort du coiffeur du quartier, le samedi soir
c’est la paix

Lorsque le jour qui est passé
n’est pas un jour qui est perdu
mais une racine
qui hisse les feuilles de la joie dans le soir,
et qu’il s’agit d’un jour de gagné
et d’un sommeil légitime, c’est la paix.

Lorsque la mort tient peu de place dans le coeur
et que le poète et le prolétaire
peuvent pareillement humer le grand oeillet du soir,
c’est la paix.

Sur les rails de mes vers,
le train qui s’en va vers l’avenir chargé de blé et de roses,
c’est la paix.

Mes frères,
au sein de la paix, le monde entier
avec tous ses rêves respire à pleins poumons.
Joignez vos mains, mes frères,
C’est cela, la paix.

(Yannis Ritsos)

Recueil: L’insurrection poétique Manifeste pour vivre ici
Editions: Bruno Doucey

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