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Poésie

Posts Tagged ‘hirondelle’

JE PASSERAI PAR LA PLACE D’ESPAGNE (Cesare Pavese)

Posted by arbrealettres sur 28 avril 2024



Illustration: Louise Georgette Agutte
    
JE PASSERAI PAR LA PLACE D’ESPAGNE

Le ciel sera limpide.
Les rues s’ouvriront
sur la colline de pins et de pierre.
Le tumulte des rues
ne changera pas cet air immobile.

Les fleurs éclaboussées
de couleurs aux fontaines
feront des clins d’oeil
comme des femmes gaies.

Escaliers et terrasses
et les hirondelles
chanteront au soleil.

Cette rue s’ouvrira,
les pierres chanteront,
le coeur en tressaillant battra,
comme l’eau des fontaines.

Ce sera cette voix
qui montera chez toi.
Les fenêtres sauront
le parfum de la pierre
et de l’air du matin.

Une porte s’ouvrira.
Le tumulte des rues
sera le tumulte du coeur
dans la lumière hagarde.

Tu seras là – immobile et limpide.

(Cesare Pavese)

Recueil: Travailler fatigue La mort viendra et aura tes yeux
Traduction: Gilles de Van
Editions: Gallimard

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BALLADE DU PRINTEMPS VENU (Paul Fort)

Posted by arbrealettres sur 19 février 2024



    

BALLADE DU PRINTEMPS VENU

Un jour du Printemps vient de naître.
Je crois bien que c’est le Premier.
Deux branches de mon noisetier
viennent d’enjamber ma fenêtre.

Viennent encor d’être amoureux
le soleil don Juan des cieux
et la lune et toi dans mes yeux,
moi dans les tiens si bleus, si bleus,

bleus ! voire même à la chandelle,
au petit jour même orageux.
Vivons ! le Printemps est fidèle.
Au lit, ô ma belle des belles!

Elles viendront les hirondelles…

(Paul Fort)

Recueil: Ballades du beau hasard
Editions: Flammarion

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Tu es comme l’hirondelle (Umberto Saba)

Posted by arbrealettres sur 12 février 2024




    
Tu es comme l’hirondelle
qui revient au printemps
et repart en automne ;
mais tu n’as pas cette capacité.
Toi, de l’hirondelle, tu as cela :
les gestes légers ;
ce qui, à moi qui me sentais et étais
vieux, annonçait un autre printemps.

***

Tu sei come la rondine
che tonna in primavera.
Ma in autunno riparte;
e tu non hai quest’arte.
Tu questo hai della rondine:
le movenze leggere;
questo che a me, che mi sentiva ed era
vecchio, annunciavi un’altra primavera.

(Umberto Saba)

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Le cri des aigles (Mélanie Leblanc)

Posted by arbrealettres sur 9 février 2024



Illustration: Sonia Mandel
    
le cri________________________________________des aigles
    les vagues_____________________________qui me soulèvent
le vol__________________________des hirondelles
 le vent____________________comme il se lève
tout me parle de voler
ouvrir mes ailes
Oser

(Mélanie Leblanc)

Recueil: Soleils vivaces vibrent dans nos mains
Editions: Le Castor Astral

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J’ai toujours su que quelque chose manquait à la vie (Christian Bobin)

Posted by arbrealettres sur 5 février 2024




Illustration
    
J’ai toujours su que quelque chose manquait à la vie.

J’ai adoré ce manque.
Le printemps rouge des hortensias,
le livre bleu des neiges,
le miracle de l’arc-en-ciel,
les chansons en or de quatre sous,
j’accepte que tout disparaisse
puisque tout reviendra.
J’accepte de tout perdre et que,
dans le temps passager de cette perte,
le nid d’hirondelle qua j’ai dans la poitrine
soit vide, vide, vide,
féériquement vide et appelant.

(Christian Bobin)

Recueil: Un bruit de balançoire
Editions: L’Iconoclaste

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SOIF (Aksinia Mihaylova)

Posted by arbrealettres sur 10 janvier 2024



    

SOIF

I
Le jour où un semeur invisible arracha
les racines des fourmilières
avec tout le blé caché dedans
et les jeta dans le ciel,
le disque du soleil ternit
et je compris soudain
que je n’étais plus la fille de personne.

L’absence a la capacité
de dilater les espaces orphelins,
de soulever les plafonds,
d’élargir les escaliers.
La maison où je suis née grandit,
et je ne sais que faire
avec ce vide.

Et pendant que je reste sur le seuil
un cadenas dans la main
pareille à une étrangère
qui ne se souvient pas
des mots d’adieu,
un rayon de soleil se faufile tel un voleur
parmi les orties au fond du jardin
et dépose une clé brûlante
sur la carcasse de la tortue :
la nouvelle hôtesse de la maison.

II
Une autre saison est venue,
le disque du soleil a émergé
vert par les blés drus.
Il a mûri longtemps
et quand il est devenu pain rituel
au-dessus de la colline
les invités se sont assis
autour de la table sous la treille.

Soudain un tourbillon est descendu,
a soulevé la nappe
et renversé les verres
jusqu’à la dernière goutte.
La fiancée de Dieu est revenue,
a dit quelqu’un tout bas,
et elle a très soif.
Ou bien elle cherche son trousseau,
a ajouté un autre
qui fait vite le signe de la croix
en montrant la table nue.

Et puis le calme.

Seule la poule, ayant pondu un œuf d’or,
a caqueté longtemps dans l’après-midi figé.
Un souffle chaud a remué
les fleurs du fenouil,
une charrette vide
a résonné dans la rue.
Et tout était comme jadis,
avant que maman soit devenue
une hirondelle.

Si ce n’était les fourmilières
dans mes yeux
qui continuent à prendre racine
dans une direction inverse
de celle des larmes.

(Aksinia Mihaylova)

 

Recueil: Le baiser du temps
Traduction:
Editions: Gallimard

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Les écrits s’en vont (André Breton)

Posted by arbrealettres sur 8 janvier 2024



Illustration: Max Ernst et Marie-Berthe Aurenche
    
Les écrits s’en vont

Le satin des pages qu’on tourne dans les livres moule une femme si belle
Que lorsqu’on ne lit pas on contemple cette femme avec tristesse
Sans oser lui parler sans oser lui dire qu’elle est si belle
Que ce qu’on va savoir n’a pas de prix
Cette femme passe imperceptiblement dans un bruit de fleurs
Parfois elle se retourne dans les saisons imprimées
Et demande l’heure ou bien encore elle fait mine de regarder des bijoux bien en face
Comme les créatures réelles ne font pas
Et le monde se meurt, une rupture se produit dans les anneaux d’air
Un accroc à l’endroit du coeur
Les journaux du matin apportent des chanteuses dont la voix a la couleur
du sable sur des rivages tendres et dangereux
Et parfois ceux du soir livrent passage à de toutes jeunes filles qui mènent des bêtes enchaînées
Mais le plus beau c’est dans l’intervalle de certaines lettres
Où des mains plus blanches que la corne des étoiles à midi
Ravagent un nid d’hirondelles blanches
Pour qu’il pleuve toujours
Si bas si bas que les ailes ne s’en peuvent plus mêler
Des mains d’où l’on remonte à des bras si légers que la vapeur des prés dans ses gracieux entrelacs au-dessus des étangs est leur imparfait miroir
Des bras qui ne s’articulent à rien d’autre qu’au danger exceptionnel d’un corps fait pour l’amour
Dont le ventre appelle les soupirs détachés des buissons pleins de voiles
Et qui n’a de terrestre que l’immense vérité glacée des traîneaux de regards
sur l’étendue toute blanche
De ce que je ne reverrai plus
A cause d’un bandeau merveilleux
Qui est le mien dans le colin-maillard des blessures.

(André Breton)

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LA MORT ROSE (André Breton)

Posted by arbrealettres sur 8 janvier 2024




Illustration: ArbreaPhotos
    
LA MORT ROSE

Les pieuvres ailées guideront une dernière fois la barque
dont les voiles sont faites de ce seul jour heure par heure
C’est la veillée unique après quoi
tu sentiras monter dans tes cheveux le soleil blanc et noir
Des cachots suintera une liqueur plus forte que la mort
Quand on la contemple du haut d’un précipice
Les comètes s’appuieront tendrement aux forêts avant de les foudroyer
Et tout passera dans l’amour invincible
Si jamais le motif des fleuves disparaît
Avant qu’il fasse complètement nuit tu observeras
La grande pause de l’argent
Sur un pêcher en fleur apparaîtront les mains
Qui écrivirent ces vers et qui seront des fuseaux d’argent
Elles aussi et aussi des hirondelles d’argent sur le métier de la pluie
Tu verras l’horizon s’entrouvrir
et c’en sera fini tout à coup du baiser de l’espace
Mais la peur n’existera déjà plus et les carreaux du ciel et de la mer
Voleront au vent plus fort que nous
Que ferai-je du tremblement de ta voix
Souris valseuse autour du seul lustre qui ne tombera pas
Treuil du temps
Je monterai les cœurs des hommes
Pour une suprême lapidation
Ma faim tournoiera comme un diamant trop taillé
Elle nattera les cheveux de son enfant le feu
Silence et vie
Mais les noms des amants seront oubliés
Comme l’adonide goutte de sang
Dans la lumière folle
Demain tu mentiras à ta propre jeunesse
A ta grande jeunesse luciole
Les échos mouleront seuls tous ces lieux qui furent
Et dans l’infinie végétation transparente
Tu te promèneras avec la vitesse
Qui commande aux bêtes des bois
Mon épave peut-être tu t’y égratigneras
Sans la voir comme on se jette sur une arme flottante
C’est que j’appartiendrai au vide semblable aux marches
D’un escalier dont le mouvement s’appelle bien en peine
A toi les parfums dès lors les parfums défendus
L’angélique
Sous la mousse creuse et sous tes pas qui n’en sont pas
Mes rêves seront formels et vains
comme le bruit de paupières de l’eau dans l’ombre
Je m’introduirai dans les tiens pour y sonder la profondeur de tes larmes
Mes appels te laisseront doucement incertaine
Et dans le train fait de tortues de glace
Tu n’auras pas à tirer le signal d’alarme
Tu arriveras seule sur cette plage perdue
Où une étoile descendra sur tes bagages de sable

(André Breton)

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Union libre (André Breton)

Posted by arbrealettres sur 7 janvier 2024



    

Union libre

Ma femme à la chevelure de feu de bois
Aux pensées d’éclairs de chaleur
A la taille de sablier
Ma femme à la taille de loutre entre les dents du tigre
Ma femme à la bouche de cocarde et de bouquet d’étoiles de dernière grandeur
Aux dents d’empreintes de souris blanche sur la terre blanche
A la langue d’ambre et de verre frottés
Ma femme à la langue d’hostie poignardée
A la langue de poupée qui ouvre et ferme les yeux
A la langue de pierre incroyable
Ma femme aux cils de bâtons d’écriture d’enfant
Aux sourcils de bord de nid d’hirondelle
Ma femme aux tempes d’ardoise de toit de serre
Et de buée aux vitres
Ma femme aux épaules de champagne
Et de fontaine à têtes de dauphins sous la glace
Ma femme aux poignets d’allumettes
Ma femme aux doigts de hasard et d’as de cœur
Aux doigts de foin coupé
Ma femme aux aisselles de martre et de fênes
De nuit de la Saint-Jean
De troène et de nid de scalares
Aux bras d’écume de mer et d’écluse
Et de mélange du blé et du moulin
Ma femme aux jambes de fusée
Aux mouvements d’horlogerie et de désespoir
Ma femme aux mollets de moelle de sureau
Ma femme aux pieds d’initiales
Aux pieds de trousseaux de clés aux pieds de calfats qui boivent
Ma femme au cou d’orge imperlé
Ma femme à la gorge de Val d’or
De rendez-vous dans le lit même du torrent
Aux seins de nuit
Ma femme aux seins de taupinière marine
Ma femme aux seins de creuset du rubis
Aux seins de spectre de la rose sous la rosée
Ma femme au ventre de dépliement d’éventail des jours
Au ventre de griffe géante
Ma femme au dos d’oiseau qui fuit vertical
Au dos de vif-argent
Au dos de lumière
A la nuque de pierre roulée et de craie mouillée
Et de chute d’un verre dans lequel on vient de boire
Ma femme aux hanches de nacelle
Aux hanches de lustre et de pennes de flèche
Et de tiges de plumes de paon blanc
De balance insensible
Ma femme aux fesses de grès et d’amiante
Ma femme aux fesses de dos de cygne
Ma femme aux fesses de printemps
Au sexe de glaïeul
Ma femme au sexe de placer et d’ornithorynque
Ma femme au sexe d’algue et de bonbons anciens
Ma femme au sexe de miroir
Ma femme aux yeux pleins de larmes
Aux yeux de panoplie violette et d’aiguille aimantée
Ma femme aux yeux de savane
Ma femme aux yeux d’eau pour boire en prison
Ma femme aux yeux de bois toujours sous la hache
Aux yeux de niveau d’eau de niveau d’air de terre et de feu.

(André Breton)

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Le poids du monde (Jean Orizet)

Posted by arbrealettres sur 28 décembre 2023




    
Le poids du monde

L’hirondelle au vol de feutre caresse
tout le poids du monde en se jouant.

(Jean Orizet)

Recueil: La peau bleue des rêves
Editions: Le Cherche Midi

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