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Poésie

Posts Tagged ‘poignarder’

Union libre (André Breton)

Posted by arbrealettres sur 7 janvier 2024



    

Union libre

Ma femme à la chevelure de feu de bois
Aux pensées d’éclairs de chaleur
A la taille de sablier
Ma femme à la taille de loutre entre les dents du tigre
Ma femme à la bouche de cocarde et de bouquet d’étoiles de dernière grandeur
Aux dents d’empreintes de souris blanche sur la terre blanche
A la langue d’ambre et de verre frottés
Ma femme à la langue d’hostie poignardée
A la langue de poupée qui ouvre et ferme les yeux
A la langue de pierre incroyable
Ma femme aux cils de bâtons d’écriture d’enfant
Aux sourcils de bord de nid d’hirondelle
Ma femme aux tempes d’ardoise de toit de serre
Et de buée aux vitres
Ma femme aux épaules de champagne
Et de fontaine à têtes de dauphins sous la glace
Ma femme aux poignets d’allumettes
Ma femme aux doigts de hasard et d’as de cœur
Aux doigts de foin coupé
Ma femme aux aisselles de martre et de fênes
De nuit de la Saint-Jean
De troène et de nid de scalares
Aux bras d’écume de mer et d’écluse
Et de mélange du blé et du moulin
Ma femme aux jambes de fusée
Aux mouvements d’horlogerie et de désespoir
Ma femme aux mollets de moelle de sureau
Ma femme aux pieds d’initiales
Aux pieds de trousseaux de clés aux pieds de calfats qui boivent
Ma femme au cou d’orge imperlé
Ma femme à la gorge de Val d’or
De rendez-vous dans le lit même du torrent
Aux seins de nuit
Ma femme aux seins de taupinière marine
Ma femme aux seins de creuset du rubis
Aux seins de spectre de la rose sous la rosée
Ma femme au ventre de dépliement d’éventail des jours
Au ventre de griffe géante
Ma femme au dos d’oiseau qui fuit vertical
Au dos de vif-argent
Au dos de lumière
A la nuque de pierre roulée et de craie mouillée
Et de chute d’un verre dans lequel on vient de boire
Ma femme aux hanches de nacelle
Aux hanches de lustre et de pennes de flèche
Et de tiges de plumes de paon blanc
De balance insensible
Ma femme aux fesses de grès et d’amiante
Ma femme aux fesses de dos de cygne
Ma femme aux fesses de printemps
Au sexe de glaïeul
Ma femme au sexe de placer et d’ornithorynque
Ma femme au sexe d’algue et de bonbons anciens
Ma femme au sexe de miroir
Ma femme aux yeux pleins de larmes
Aux yeux de panoplie violette et d’aiguille aimantée
Ma femme aux yeux de savane
Ma femme aux yeux d’eau pour boire en prison
Ma femme aux yeux de bois toujours sous la hache
Aux yeux de niveau d’eau de niveau d’air de terre et de feu.

(André Breton)

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HOMME (Adel Khozam)

Posted by arbrealettres sur 28 juin 2023



Nirman – Giacinto Laruccia 
    
***

HOMME

L’homme est vexé quand une femme lui dit :
“ Tu es un moins que rien. “
Il est capable de saisir un couteau et de poignarder son ombre,
de retirer le ventilateur du plafond pour s’envoler,
mais il sait que la femme dit toujours vrai
et qu’en effet l’homme n’est rien
seulement poussière rassemblée dans son utérus et mise au jour,
rien qu’un roc, qui a besoin d’une tendre main pour s’adoucir.
Et l’homme est aussi un chaos permanent,
une angoisse qui erre dans le vaste univers
à la recherche de deux seins.
Et l’homme même s’il devient puissant,
est un esclave du parfum,
un prisonnier du fantôme de la femme qui tournoie librement
en fantaisies flottantes.

(Adel Khozam)

M, Dubaï – UAE
Traduction Germain Droogenbroodt – Elisabeth Gerlache

***

Autres langues:

Anglais: https://www.point-editions.com/en/765-man/
Espagnol: https://www.point-editions.com/es/765-man/
Néerlandais: https://www.point-editions.com/nl/765-man/

Autres: https://www.point-editions.com/ww/765-man/

Recueil: ITHACA 765
Editions: POINT
Site: http://www.point-editions.com/en/

FRIENDS ITHACA
Holland: https://boekenplan.nl
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NOYÉE (Joyce Mansour)

Posted by arbrealettres sur 10 avril 2023




    
NOYÉE…

Noyée au fond d’un rêve ennuyeux
J’effeuillais l’homme
L’homme cet artichaut drapé d’huile noire
Que je lèche et poignarde avec ma langue bien polie
L’homme que je tue l’homme que je nie
Cet inconnu qui est mon frère
Et qui m’offre l’autre joue
Quand je crève son oeil d’agneau larmoyant
Cet homme qui pour la communauté est mort assassiné
Hier avant-hier et avant ça et encore
Dans ses pauvres pantalons pendants de surhomme

(Joyce Mansour)

Recueil: Le livre d’or de la poésie française contemporaine
Editions: Marabout

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Nos jours (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 28 décembre 2019



Nos jours
Pétris de racines

Cerclés de liens
Touchés de lumière

Poignarderont l’opaque
de leur sève continuée.

(Andrée Chedid)


Illustration: Carmen Meyer

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An ollzent (Anthony Lhéritier)

Posted by arbrealettres sur 1 novembre 2019



An ollzent

C’est la Toussaint de ma jeunesse
Mes petits morts, dormez en paix
Dans le caveau de ma paresse
Morts à peu près, pas tout à fait.

Dormez, mes rêves de fortune
Point n’est besoin d’un tas d’écus
Je n’ai pas décroché la lune
Pauvre naquis, pauvre vécus.

Amour, qui peu me fis la guerre
Et toutefois me déconfis
Fais ton bon somme de grand-père
Garde bien clos tes yeux rougis.

Or vous qui tentez de revivre
A me poignarder toujours prêts
Beaux gisants que la nuit délivre
Dormez aussi, vous, mes regrets.

(Anthony Lhéritier)

 

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Dors ! (Marceline Desbordes-Valmore)

Posted by arbrealettres sur 23 juillet 2018



 

Odd Nerdrum  Man in a Boat [1280x768]

Dors !

L’orage de tes jours a passé sur ma vie ;
J’ai plié sous ton sort, j’ai pleuré de tes pleurs ;
Où ton âme a monté mon âme l’a suivie ;
Pour aider tes chagrins, j’en ai fait mes douleurs.

Mais, que peut l’amitié ? l’amour prend toute une âme !
Je n’ai rien obtenu ; rien changé ; rien guéri :
L’onde ne verdit plus ce qu’a séché la flamme,
Et le coeur poignardé reste froid et meurtri.

Moi, je ne suis pas morte : allons ! moi, j’aime encore ;
J’écarte devant toi les ombres du chemin :
Comme un pâle reflet descendu de l’aurore,
Moi, j’éclaire tes yeux ; moi, j’échauffe ta main.

Le malade assoupi ne sent pas de la brise
L’haleine ravivante étancher ses sueurs ;
Mais un songe a fléchi la fièvre qui le brise ;
Dors ! ma vie est le songe où Dieu met ses lueurs.

Comme un ange accablé qui n’étend plus ses ailes,
Enferme ses rayons dans sa blanche beauté,
Cache ton auréole aux vives étincelles :
Moi je suis l’humble lampe émue à ton côté.

(Marceline Desbordes-Valmore)

Illustration: Odd Nerdrum

 

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L’homme poignardé (Claudine Helft)

Posted by arbrealettres sur 14 Mai 2018



Illustration: Félix Vallotton

    
L’homme poignardé

C’était un dimanche,
mon coeur pensait loin.

Un bruit d’avion nommait l’homme poignardé.
Il pleuvait triste sur la mélodie
croassante des pigeons parisiens
lancinant ce bruit d’avion qui tournait.
Il pleuvait prières, liens, et regrets,
des jeunesses et des joies altérées.
Il pleuvait un silence sur l’épaisseur
du monde à repenser dans le souvenir
et dans l’avenir, sous un filet de rire
mince, où coulait l’enfance de nos fils.
Un dimanche sans rose, et sans café,
Un dimanche sans croissant, sans miracle.
Un sale dimanche de guerre larvéе.
de mauvaises odeurs et de poubelles
Dimanche d’un homme seul et désarmé
d’un homme réel, ami des libertés
et qui court, sans le savoir, vers un poignard.

(Claudine Helft)

 

Recueil: Une indécente éternité
Traduction:
Editions: De la Différence

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Rive ancienne (Luis Cernuda)

Posted by arbrealettres sur 29 décembre 2017




Illustration
    
Rive ancienne

Il a tant plu depuis lors,
Quand les dents n’étaient pas chair, mais jours
Tout petits comme un fleuve ignorant
Appelant ses parents car il sent le sommeil,
Il a tant plu depuis lors,
Que les pas s’oublient déjà dans la tête.

Les uns disent que oui, d’autres disent que non ;
Mais oui et non sont deux petites ailes,
Equilibre d’un ciel au cœur d’un autre ciel,
Comme un amour est au-dedans d’un autre,
Comme l’oubli est au coeur de l’oubli.

Si, furieux, le supplice réclame des fêtes
Parmi les nuits les plus viriles,
Nous ne ferons rien d’autre que poignarder la vie,
Sourire aveuglément à la déroute,
Tandis que les années, mortes comme des morts,
Ouvrent leur tombe d’étoiles éteintes.

***

Vieja ribera

Tanto ha llovido desde entonces,
Entonces, cuando los dientes no eran carne, sino días
Pequeños como un río ignorante
A sus padres llamando porque siente sueño,
Tanto ha llovido desde entonces,
Que ya el paso se olvida en la cabeza.

Unos dicen que sí, otros dicen que no;
Mas sí y no son dos alas pequeñas,
Equilibrio de un cielo dentro de otro cielo,
Como un amor está dentro de otro,
Como el olvido está dentro del olvido.

Si el suplicio con ira pide fiestas
Entre las noches más viriles,
No haremos otra cosa que apuñalar la vida,
Sonreír ciegamente a la derrota,
Mientras los años, muertos como un muerto,
Abren su tumba de estrellas apagadas.

(Luis Cernuda)

 

Recueil: Un fleuve, un amour
Traduction: Jacques Ancet
Editions: Fata Morgana

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Raison des larmes (Luis Cernuda)

Posted by arbrealettres sur 29 décembre 2017



Illustration: Caroline Duvivier
    

Raison des larmes

La nuit parce qu’elle est triste manque de frontières,
Son ombre, rebelle comme l’écume,
Brise les murs fragiles,
Honteux de leur blancheur ;
Nuit qui ne peut être rien d’autre que nuit.

Peut-être les amants poignardent-ils des astres,
Peut-être l’aventure apaisera-t-elle une tristesse.
Mais toi, nuit, portée par les désirs
Jusqu’à la pâleur de l’eau,
Tu attends toujours debout on ne sait quels rossignols.

Au-delà frémissent les abîmes
Que peuplent des serpents entre les plumes,
Chevet d’hommes malades
Qui ne fixent rien d’autre que la nuit
Tandis que leurs lèvres se referment sur l’air.

La nuit, la nuit éblouissante,
Qui, aux coins des rues, tortille des hanches
Et qui attend, qui sait,
Comme moi, comme tous.

***

Razón de las lagrimas

La noche por ser triste carece de fronteras.
Su sombra, en rebelión como la espuma,
Rompe los muros débiles
Avergonzados de blancura;
Noche que no puede ser otra cosa sino noche.

Acaso los amantes acuchillan estrellas,
Acaso la aventura apague una tristeza.
Mas tú, noche, impulsada por deseos
Hasta la palidez del agua,
Aguardas siempre en pie quién sabe a cuáles ruiseñores.

Más allá se estremecen los abismos
Poblados de serpientes entre pluma,
Cabecera de enfermos
No mirando otra cosa que la noche
Mientras cierran el aire entre los labios.

La noche, la noche deslumbrante,
Que junto a las esquinas retuerce sus caderas,
Aguardando, quién sabe,
Como yo, como todos.

(Luis Cernuda)

 

Recueil: Un fleuve, un amour
Traduction: Jacques Ancet
Editions: Fata Morgana

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Il ne fait jamais nuit quand tu meurs (René Char)

Posted by arbrealettres sur 16 décembre 2017



bosch-ascension

 

Il ne fait jamais nuit quand tu meurs,
Cerné de ténèbres qui crient,
Soleil aux deux pointes semblables.

Fauve d’amour, vérité dans l’épée;
Couple qui se poignarde unique parmi tous.

(René Char)

 Illustration: Jerome Bosch

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