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Poésie

Posts Tagged ‘couteau’

Griffonnage (Octavio Paz)

Posted by arbrealettres sur 8 Mai 2024




Griffonnage

Avec un morceau de charbon
avec ma craie cassée et mon crayon rouge
dessiner ton nom
le nom de ta bouche
le signe de tes jambes
sur le mur de personne
Sur la porte interdite
graver le nom de ton corps
jusqu’à ce que la lame de mon couteau
saigne
et la pierre crie
et le mur respire comme un sein

***

Garabato

Con un trozo de carbón
con mi gis roto y mi lápiz rojo
dibujar tu nombre
el nombre de tu boca
el signo de tus piernas
en la pared de nadie
En la puerta prohibida
grabar el nombre de tu cuerpo
hasta que la hoja de mi navaja
sangre
y la piedra grite
y el muro respire como un pecho

(Octavio Paz)

 

 

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Presque hors du ciel (Pablo Neruda)

Posted by arbrealettres sur 26 avril 2024



Illustration: Silvia Leveroni Calvi
    
Presque hors du ciel jette l’ancre entre deux montagnes
la moitié de la lune.
Tournante, errante nuit, la terrassière des yeux.
Que d’étoiles en morceaux à voir dans la flaque.

Elle fait une croix de deuil entre mes sourcils, elle fuit.
Forge de métaux bleus, nuits des luttes silencieuses,
mon coeur tourne comme un volant fou.
Petite venue de si loin, amenée de si loin,
parfois fulgure son regard sous le ciel.

Plainte incessante, tempête, tourbillon de furie,
traverse sur mon coeur, sans t’arrêter.
Ô vent des sépulcres charrie, détruis,
disperse ta racine somnolente.

Déracine les grands arbres de l’autre côté d’elle.
Mais toi, claire petite, question de fumée, épi.
Elle était celle que formait peu à peu le vent
avec des feuilles illuminées.

Derrière les montagnes nocturnes, blanc lys d’incendie,
ah je ne peux rien dire !
Elle était faite de toutes les choses.

Désir violent, toi qui me fendis la poitrine à coups de couteau,
il est l’heure de suivre un autre chemin,
où elle ne sourira pas.

Tempête qui enterra les cloches,
trouble et nouvel essor des tourments
pourquoi la toucher maintenant,
pourquoi l’attrister.

Suivre hélas le chemin qui s’éloigne de tout,
où ne taillade pas l’angoisse, la mort, l’hiver,
avec ses yeux ouverts parmi la rosée.

***

Casi fuera del cielo ancla entre dos montañas la mitad de la luna.
Girante, errante noche, la cavadora de ojos.
A ver cuántas estrellas trizadas en la charca.

Hace una cruz de luto entre mis cejas, huye.
Fragua de metales azules, noches de las calladas luchas,
mi corazón da vueltas como un volante loco.
Niña venida de tan lejos, traída de tan lejos,
a veces fulgurece su mirada debajo del cielo.
Quejumbre, tempestad, remolino de furia,
cruza encima de mi corazón, sin detenerte.

Viento de los sepulcros acarrea, destroza, dispersa tu raíz soñolienta.
Desarraiga los grandes árboles al otro lado de ella.
Pero tú, clara niña, pregunta de humo, espiga.
Era la que iba formando el viento con hojas iluminadas.
Detrás de las montañas nocturnas, blanco lirio de incendio,
ah nada puedo decir! Era hecha de todas las cosas.

Ansiedad que partiste mi pecho a cuchillazos,
es hora de seguir otro camino, donde ella no sonría.
Tempestad que enterró las campanas, turbio revuelo de tormentas
para qué tocarla ahora, para qué entristecerla.

Ay seguir el camino que se aleja de todo,
donde no esté atajando la angustia, la muerte, el invierno,
con sus ojos abiertos entre el rocío.

(Pablo Neruda)

Recueil: Vingt poèmes d’amour et une chanson désespérée suivi des vers du capitaine
Traduction: Claude Couffon et Christian Rinderknecht
Editions: Gallimard

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Avec la famille (Luba Yakymtchouk)

Posted by arbrealettres sur 25 février 2024




    
Avec la famille on partage la table et tombes
Avec l’ennemi ; seulement les tombes
Que vienne à moi un tel prétendant
Partager avec moi une tombe
Me dire :
Je suis plus grand que toi
Je suis plus dur que toi
Je suis plus fort que toi

Couteau après couteau
plante dans le ventre et plus bas
Lame contre lame
Sa pression est plus pressante

Mais
Il est plus petit que nous
Il est plus faible que nous
Car de lame, il n’a qu’une seule
Et nous sur la table, beaucoup

(Luba Yakymtchouk)

Recueil: Les Abricots du Donbas
Traduction: de l’ukrainien par Iryna Dmytrychyn et Agathe Bonin
Editions: des Femmes

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DESTINÉE COMMUNE (Kiki Dimoula)

Posted by arbrealettres sur 21 février 2024




    
DESTINÉE COMMUNE

Mes chemins,
vos chemins,
et puis ça.

Lui,
moi,
et puis ça.

Les Mai nouveaux
mariés, l’habit approprié
et puis ça.

Le sentiment sans armes,
le couteau caché
et puis ça.

La soif qui chemine,
la bonne Samaritaine
et puis ça.

La longévité des rêves,
les espoirs industrieux
et puis ça.

Les serments sautant par-dessus le temps,
la mémoire feuillue
et puis ça.

Le soleil nécessaire,
la bonne humeur soudaine
et puis ça.

Les feuilles jaunies qui rivalisent
de sang-froid dans la chute,
la poésie qui les anime
et puis ça.

La sécheresse,
la pluie
et puis ça.

Votre angoisse,
mon angoisse,
et puis ça.

L’initiation des statues
à nos méthodes d’ennui à nous,
le sacrifice d’Iphigénies successives
pour un méchant souffle de vent,
et puis ça.

Les mots qu’on entraîne
à passer par le silence,
le silence qu’on entraîne
à passer par les mots
et puis ça.

L’avenir sévèrement gardé
qui sera pour finir
emporté par ça :

L’échec.

(Kiki Dimoula)

Recueil: Le Peu du monde suivi de Je te salue Jamais
Traduction: du grec par Michel Volkovitch
Editions: Gallimard

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Ceux de l’espoir (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 23 décembre 2023



Illustration: Annagol
    
Ceux de l’espoir

Attisés par le chant
Ils échappent à l’aimantation
Des sols et des couteaux

Émergeant des abris taciturnes
Ils apprivoisent l’horizon
Se libèrent des mots flétris
Quittent les ornières du soupçon

L’avenir cédant à l’espérance
Leur rêve engrènera le réel.

(Andrée Chedid)

Recueil: Andrée Chedid Poèmes
Editions: Flammarion

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Та solitude (Edmond Jabès)

Posted by arbrealettres sur 14 décembre 2023




    
Та solitude
a une chouette
pour amie

Та solitude
a une gitane
pour sosie

Son châle est un nuage
Son peigne l’enjeu d’un pari
impossible

Та solitude
a combien de cris
pour couteau

(Edmond Jabès)

 

Recueil: Le Seuil Le Sable Poésies complètes 1943-1988
Traduction:
Editions: Gallimard

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Ressac (Arthur Teboul)

Posted by arbrealettres sur 29 octobre 2023




    
Ressac

J’ai plusieurs choses qui me traversent.
Dont toi par instant.

Tu es un million de pensées
qui sont comme des petits couteaux.

(Arthur Teboul)

Recueil: Le Déversoir Poèmes minute
Editions: Seghers

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LE LION (Henry Bauchau)

Posted by arbrealettres sur 28 septembre 2023




    
LE LION

Un roi d’ombre est couché dans son lit de verdure
Quand hennit le roi d’or vers le blanc des rivières
O nubile fléchis, qui pressens la morsure
Et l’enfant de l’été sous le feu des crinières.

*

Le prince au couteau d’or amer
En suivant sa course étoilée
Au bord d’une mer oubliée
Découvre sa statue de fer.

(Henry Bauchau)

Recueil: Poésie complète
Editions: ACTES SUD

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CHEVEUX (Edward Stachura)

Posted by arbrealettres sur 26 juillet 2023



 

Edvard Munch-239966 [1280x768]

CHEVEUX

La rivière coule
entre les yeux des poissons
comme un arc-en-ciel
ou la coupure ouverte d’un couteau

Sur la surface flottent
des grands cœurs de baobabs
des roues de chariots
et les lourds candélabres
des bois des cerfs noyés

Mes larmes
comme des éclats de porcelaine chinoise
s’y noient lentement en virevoltant

(Edward Stachura)

Illustration: Edvard Munch

 

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FEMME (Georges-Emmanuel Clancier)

Posted by arbrealettres sur 13 juillet 2023




    
FEMME

I
FEMME
Que je menace, désigne, fuis.

Ombre,
Feu de sarments, étincelle,
Grande ombre sur ma nuit.

Noir,
Voile sacré de mes ténèbres.

Femme
Je te brûle, te tue, je te supplie.

Fauve,
Fausse promesse.

O reine,
O souveraine indigne, ô belle
Griffe.

Herse,
Milliers de couteaux solaires.

II
JE suis ton fasciné, ta poussière
Furieuse, adorante,
Ta fumée.

Je suis ton juge, ton bourreau, ta trace,
Folle
Écharpe d’aubépine autour de ma vie,
Merveille
Étrangère,
Innocent bourreau.

Je te vois, je te cerne, je te veux
Mais
Vouloir l’ombre, le feu, l’étincelle,
L’aubépine d’ombre sur ma nuit,
L’écharpe de ténèbres?

(Georges-Emmanuel Clancier)

Recueil: Terres de mémoire
Editions: La Table Ronde

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