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Poésie

Posts Tagged ‘éteint’

Cierges (Constantin Cavafis)

Posted by arbrealettres sur 29 décembre 2023




    
Cierges

Les jours futurs se dressent devant moi
comme une rangée de petits cierges allumés
— de vivaces, de chauds petits cierges dorés.

Derrière sont les jours révolus,
triste file de cierges éteints ;
les plus proches fument encore,
refroidis, courbés et fondus.

Je ne veux pas les voir :
leur aspect me désole
comme me désole le souvenir de leur flamme première.
Ce sont mes cierges allumés que je regarde.

Je ne veux pas me retourner pour ne pas avoir à frémir
en voyant de quel train s’allonge la file obscure,
de quel train les cierges éteints se multiplient.

(Constantin Cavafis)

Recueil: Poèmes anciens ou retrouvés
Traduction: Gilles Ortlieb et Pierre Leyris
Editions: Seghers

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Destination : arbre (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 23 décembre 2023



Illustration: Christine Delfosse
    
Destination : arbre

Parcourir l’Arbre
Se lier aux jardins
Se mêler aux forêts
Plonger au fond des terres
Pour renaître de l’argile

Peu à peu
S’affranchir des sols et des racines
Gravir lentement le fût
Envahir la charpente
Se greffer aux branchages

Puis dans un éclat de feuilles
Embrasser l’espace
Résister aux orages
Déchiffrer les soleils
Affronter jour et nuit

Évoquer ensuite
Au coeur d’une métropole
Un arbre un seul
Enclos dans l’asphalte
Éloigné des jardins
Orphelin des forêts

Un arbre
Au tronc rêche
Aux branches taries
Aux feuilles longuement éteintes

S’unir à cette soif
Rejoindre cette retraite
Écouter ces appels

Sentir sous l’écorce
Captives mais invincibles
La montée des sèves
La pression des bourgeons
Semblables aux rêves tenaces
Qui fortifient nos vies

Cheminer d’arbre en arbre
Explorant l’éphémère
Aller d’arbre en arbre
Dépistant la durée.

(Andrée Chedid)

Recueil: Andrée Chedid Poèmes
Editions: Flammarion

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Jeunesse (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 19 décembre 2023



Illustration: Odile Wysocki-Grec
    
Jeunesse

Tu chantes !

Pour un temps s’apaise
L’univers en tornade
que tu portes dans tes flancs

Tu danses !

Ton corps brûle ses frontières
T’emporte hors de ton corps

Tu cries !

Ta fureur attise l’âme
des univers éteints

Tous les appels du monde
te traversent jeunesse !

Tu enfantes le feu.

(Andrée Chedid)

Recueil: Andrée Chedid Poèmes
Editions: Flammarion

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Exil (Luis Cernuda)

Posted by arbrealettres sur 13 décembre 2023



Exil

Devant les portes bien fermées,
Sur un fleuve d’oubli, va la chanson ancienne.
Une lumière pense au loin
Comme à travers un ciel.
Tous dorment peut-être,
Tandis que solitaire il porte son destin.

Fatigue d’être vivant, d’être mort,
Avec du froid au lieu de sang,
Du froid qui sourit s’insinuant
Par les trottoirs éteints.

La nuit l’abandonne, l’aurore le rencontre,
Sur ses traces l’ombre obstinément.

(Luis Cernuda)

Découvert chez Lara ici

Illustration

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LA PORTE TOURNANTE (André Pieyre de Mandiargues)

Posted by arbrealettres sur 10 décembre 2023



 

LA PORTE TOURNANTE

La porte tourne,

J’y suis,

La porte a tourné,

Je n’y suis pas,

La porte me regarde
La porte se nettoie d’un coup de langue
La porte se gratte et s’endort,

La porte s’est raidie
Et ses yeux sont éteints,

J’attends
Cependant je sais bien
Que la porte a tourné
Pour la dernière fois.

(André Pieyre de Mandiargues)

 

 

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La passion vaincue (Anne De La Vigne)

Posted by arbrealettres sur 24 novembre 2023



Illustration: Camille Pissarro
    
La passion vaincue

La bergère Liris, sur le bord de la Seine
Se plaignait l’autre jour d’un volage berger.
Après tant de serments peux-tu rompre ta chaîne;
Perfide, disait-elle, oses-tu bien changer ?

Puisqu’au mépris des dieux tu peux te dégager,
Que ta flamme est éteinte et ma honte certaine;
Sur moi-même, de toi je saurai me venger,
Et ces flots uniront mon amour et ma peine.

A ces mots, résolue à se précipiter,
Elle hâta ses pas, et sans plus consulter,
Elle allait satisfaire une fatale envie;

Mais bientôt, s’étonnant des horreurs de la mort
Je suis folle, dit-elle, en s’éloignant du bord
Il est tant de bergers, et je n’ai qu’une vie !

(Anne De La Vigne)

Recueil: L’AMOUR en Poésie
Editions: Folio Junior

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Le Christ aux oliviers (Gérard de Nerval)

Posted by arbrealettres sur 2 novembre 2023



Illustration: Paul Gaugin

Le Christ aux oliviers

III

« Immobile Destin, muette sentinelle,
Froide Nécessité! … Hasard qui, t’avançant
Parmi les mondes morts sous la neige éternelle,
Refroidis, par degrés, l’univers pâlissant,

« Sais-tu ce que tu fais, puissance originelle,
De tes soleils éteints, l’un l’autre se froissant …
Es-tu sûr de transmettre une haleine immortelle,
Entre un monde qui meurt et l’autre renaissant? …

« Sais-tu ce que tu fais, puissance originelle,
O mon père! est-ce toi que je sens en moi-même?
As-tu pouvoir de vivre et de vaincre la mort?
Aurais-tu succombé sous un dernier effort

« De cet ange des nuits que frappa l’anathème? …
Car je me sens tout seul à pleurer et souffrir,
Hélas! et, si je meurs, c’est que tout va mourir! »

(Gérard de Nerval)

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Iseut séjourne dans la salle basse (Yves Bonnefoy)

Posted by arbrealettres sur 2 novembre 2023



Illustration 
    
Iseut séjourne dans la salle basse très peu claire,
Sa robe a la couleur de l’attente des morts,
Et c’est le bleu le plus éteint qui soit au monde,
Écaillé, découvrant l’ocre des pierres nues.
Iseut est seule, et ceux qui viennent sont obscurs,
Ils se penchent avec des lampes sur son corps,
Est-il vrai, disent-ils, qu’Iseut soit morte,
Iseut la triste est morte, disent-ils.

(Yves Bonnefoy)

Recueil: Max-Pol Fouchet La poésie française Anthologie thématique
Editions: Seghers

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La pendule — Quelle heure est-il? (Marina Tsvetaeva)

Posted by arbrealettres sur 1 octobre 2023




    
La pendule — Quelle heure est-il?
A déjà sonné !
Creux immenses de vos yeux,
Votre robe à reflets de satin…
Je vous vois à peine,
À peine, à peine.

Au perron de la maison voisine
— Lumière éteinte.
Quelque part, l’amour à la folie !
Le dessin de votre visage
Me fait peur.

La chambre est presque noire,
Nuit unique !
Le clair de lune à la fenêtre
Profonde ressemble
À de la glace.

— Vous vous êtes rendue ? C’est la question.
— Je n’ai pas lutté.
La voix est glacée par la lune,
Venue de très loin,
C’est bien cette voix-là !

Le rayon de lune dressé entre nous
Dirige le monde.
Éclat de cheveux fous,
Foncés et roux,
Brillant tel du métal.

Oubliée la course de l’histoire
Dans la course lunaire.
Le miroir brise la lune,
Les fers des chevaux tintent au loin
La charrette grince.

Le réverbère est éteint.
La course est ralentie.
Bientôt le coq chantera
La séparation
De deux jeunes femmes.

(Marina Tsvetaeva)

Recueil: Poèmes de Russie (1912-1920) suivi de La Porte arrachée par Marina
Traduction: Véronique Lossky & Georges Nivat
Editions: Des Syrthes

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Le vide (Jacques Dupin)

Posted by arbrealettres sur 24 juillet 2023



spirit_flight
le vide ravale fleurs et tatouages
posant sur mes yeux éteints

l’odeur de la neige

(Jacques Dupin)

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