Traduction: Philippe Jaccottet
Editions: Fata Morga
Posted by arbrealettres sur 9 mars 2024
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Posted by arbrealettres sur 27 février 2024
Dansez l’orange…
Retenez-le — ah, ce goût ! — qui s’échappe.
— Sourde musique : un murmure en cadence, —
Jeunes filles, vous, chaudes, jeunes filles, muettes,
du fruit éprouvé exécutez la danse !
Dansez l’orange. Qui peut oublier
comme de sa douceur se défendait le fruit,
en soi-même fondant. Vous l’avez possédé,
en vous exquisément vous l’avez converti.
Dansez l’orange. Ce pays plus chaud,
projetez-le : qu’elle rayonne, mûre,
dans l’air natal. Dévoilez, embrasées,
tous ses parfums, pour créer le rapport
avec l’écorce pure et rebelle,
avec le suc dont l’heureuse ruisselle.
(Rainer Maria Rilke)
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Posted by arbrealettres sur 9 février 2024
Quand la neige fond, où va le blanc ?
Sur les pâquerettes, peut-être ?
Pâquerettes filles de pâques,
foulées au pied
vous êtes pourtant
parmi mes préférées
vous offrez le plus court chemin
vers l’enfance et ses trésors
de mes doigts maladroits
j’essaie toujours de faire
des colliers de pâquerettes
avec les mots
(Mélanie Leblanc)
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Posted by arbrealettres sur 17 janvier 2024
ENTREVUE
La neige est drue et forte,
Il neige sur les toits.
Je sors devant la porte.
Devant moi je te vois.
Dans un manteau d’automne,
Sans chapeau, sans sabots,
Tu trembles, tu t’étonnes,
Mâchant des flocons d’eau.
Les arbres, les clôtures
Se noient dans le brouillard.
Seule, au coin du mur,
Tu te tiens à l’écart.
De ton fichu l’eau glisse
Lentement jusqu’aux gants,
Et sur tes cheveux lisses
L’eau scintille en tremblant.
Et une blonde mèche
Eclaire ton fichu,
Ta figure si fraîche,
Ton petit pardessus.
Sur tes cils fond la neige,
Tes yeux sont attristés.
Ton visage, pensé-je,
D’un seul bloc est sculpté.
Ton visage en épure
Comme par de l’airain
Marqué de noircissure
En mon coeur est empreint.
Il garde en souvenance
La douceur de ces traits,
Aussi quelle importance
Si le monde est mal fait ?
Aussi la nuit de neige
Paraît scindée en deux ;
Des frontières n’osé-je
Tracer entre nous deux.
Mais qui donc sommes-nous
Quand il ne restera
De ces temps que ragots
Et de nous que les cendres ?
(Boris Pasternak)
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Posted by arbrealettres sur 29 décembre 2023
Cierges
Les jours futurs se dressent devant moi
comme une rangée de petits cierges allumés
— de vivaces, de chauds petits cierges dorés.
Derrière sont les jours révolus,
triste file de cierges éteints ;
les plus proches fument encore,
refroidis, courbés et fondus.
Je ne veux pas les voir :
leur aspect me désole
comme me désole le souvenir de leur flamme première.
Ce sont mes cierges allumés que je regarde.
Je ne veux pas me retourner pour ne pas avoir à frémir
en voyant de quel train s’allonge la file obscure,
de quel train les cierges éteints se multiplient.
(Constantin Cavafis)
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Posted by arbrealettres sur 5 décembre 2023
(Paul Henri Lezac)
Textes de Prisonniers: lecercledespoetesdetenus
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Posted by arbrealettres sur 22 novembre 2023
Illustration: Vincent Van Gogh
Quand nous nous retournons
Quand nous nous retournons sur le sentier de la vie,
Nous voyons les lueurs et le vert subsister sous nos pas ;
La distance estompe et fond tout à présent ;
Quand nous nous retournons.
Rose, violet et gris argenté,
Ce nuage est-il bien celui que nous trouvions si noir ?
Le soir harmonise tout à présent,
Quand nous nous retournons.
Fous ces pieds si enclins à s’arrêter ou à se perdre,
Fou ce cœur si agité dans ses tourments !
Nous soupirions hier, mais plus à présent,
Quand nous nous retournons.
(Verses, 1893)
(Christina Rossetti)
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Posted by arbrealettres sur 8 novembre 2023
Illustration: Henri Eisenberg
PRÊTE AUX BAISERS RÉSURRECTEURS
Pauvre je ne peux pas vivre dans l’ignorance
Il me faut voir entendre et abuser
T’entendre nue et te voir nue
Pour abuser de tes caresses
Par bonheur ou par malheur
Je connais ton secret par cœur
Toutes les portes de ton empire
Celle des yeux celle des mains
Des seins et de ta bouche où chaque langue fond
Et la porte du temps ouverte entre tes jambes
La fleur des nuits d’été aux lèvres de la foudre
Au seuil du paysage où la fleur rit et pleure
Tout en gardant cette pâleur de perle morte
Tout en donnant ton cœur tout en ouvrant tes jambes
Tu es comme la mer tu berces les étoiles
Tu es le champ d’amour tu lies et tu sépares
Les amants et les fous
Tu es la faim le pain la soif l’ivresse haute
Et le dernier mariage entre rêve et vertu.
(Paul Eluard)
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