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Sa peau sentait le vent et la pomme (Robert Mallet)

Posted by arbrealettres sur 31 janvier 2024



    

Sa peau sentait le vent et la pomme.
Gloria Alcorta, L’oreiller noir.

Rassurantes odeurs des celliers
obscurs, silencieux
où mûrissent les fruits protégés
des menaces du temps

Exaltantes lueurs de l’air
remous des feuillages bruissants
qu’habitent les senteurs libres
de l’espace et du vent

Sombres enclos, souffles solaires
sauvages nuées, vergers sages
nous espérons sauver le rêve
en nos mains de cueilleurs aérés

Toi, la gardienne et l’évadée
la recluse et la buissonnière
la pensive et l’échevelée

serais-tu la très rare
qui donnerait
au secret de sa peau fruitée
les beaux risques
des lieux et des parfums
conjugués?

(Robert Mallet)

 

Recueil: Presqu’îles presqu’amours
Traduction:
Editions: Gallimard

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À la toute fin (Constantin Cavafis)

Posted by arbrealettres sur 29 décembre 2023




    
À la toute fin

En proie aux craintes et aux doutes,
l’esprit troublé et les yeux apeurés,
nous n’avons de cesse de chercher à échapper
à la certitude du danger, à sa terrible menace.
Nous faisons erreur, pourtant, car ce n’est pas lui
qui est là devant nous ; les messages étaient erronés
(ou bien nous n’avons pas entendu, ou les avons mal compris).
Voici qu’une autre catastrophe, que nous n’aurions pu imaginer,
fond soudain sur nous, brutalement, sans prévenir
— il est trop tard, maintenant — et nous emporte.

(Constantin Cavafis)

Recueil: Poèmes anciens ou retrouvés
Traduction: Gilles Ortlieb et Pierre Leyris
Editions: Seghers

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Reverdir (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 25 décembre 2023



Illustration: Namiki Hajime
    
Reverdir

En sa raideur farouche
Et ses habits de cendre
L’arbre hivernal
Perd mémoire des sèves
Qui se hissent sans faillir
Hors des sépulcres de terre
Explosent en feuillages
Défient la menace du temps

Tandis qu’oscillent nos vies
En leurs si brèves saisons
Souvent perclus de tourmentes
Nous égarons nos sources intimes
Qui sécrètent sans trêve
De vertes floraisons.

(Andrée Chedid)

Recueil: Andrée Chedid Poèmes
Editions: Flammarion

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Pourquoi êtes-vous venu troubler mon déclin ? (Hilda Doolittle)

Posted by arbrealettres sur 21 juin 2023




Illustration 
    
Pourquoi êtes-vous venu
troubler mon déclin ?
Je suis vieille (j’étais vieille jusqu’à votre venue).

La rose la plus rouge s’épanouit
(et c’est ridicule,
en ce moment, en ce lieu,

inconvenant, impossible,
mais légèrement scandaleux).
La rose la plus rouge s’épanouit

(personne ne peut arrêter cela,
aucune menace immanente de l’air,
pas même des intempéries

gâtant notre fruit d’été) ;
La rose la plus rouge s’épanouit
(de cela il faut qu’ils tiennent compte).

(Hilda Doolittle)

Recueil: Je serai le FEU (Diglee)
Editions: La ville brûle

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MENACE (Denise Jallais)

Posted by arbrealettres sur 9 avril 2023



Illustration: Pablo Picasso
    
MENACE

Si tu m’encages
J’aurai un amant au dos lisse
Aux hanches adolescentes
Aux muscles comme un tambour
Aux lèvres cruelles
Un amant qui aura quarante ans
Toute son enfance
Et bien plus
Nous séparera
Mais nous nous raconterons
De la littérature
Si tu m’encages
Nous nous apprendrons
A faire l’amour
Et je le partagerai
Avec ses maîtresses
Parce qu’il ne m’aimera pas
Et moi non plus.
Si tu m’encages
N’oublie pas
J’aurai un amant au dos lisse

(Denise Jallais)

Recueil: Le livre d’or de la poésie française contemporaine
Traduction:
Editions: Marabout

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Depuis qu’Amour cruel empoisonna (Louise Labé)

Posted by arbrealettres sur 28 juin 2022




Depuis qu’Amour cruel empoisonna
Premièrement de son feu ma poitrine,
Toujours brûlai de sa fureur divine,
Qui un seul jour mon coeur n’abandonna.

Quelque travail, dont assez me donna,
Quelque menace et prochaine ruine,
Quelque penser de mort qui tout termine,
De rien mon coeur ardent ne s’étonna.

Tant plus qu’Amour nous vient fort assaillir,
Plus il nous fait nos forces recueillir,
Et toujours frais en ses combats fait être;

Mais ce n’est pas qu’en rien nous favorise,
Lui qui méprise les dieux et les hommes,
Mais pour plus fort contre les forts paraître.

(Louise Labé)

Illustration: Jules Joseph Lefebvre

 

 

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VERS LE POÈME (Jorge Guillén)

Posted by arbrealettres sur 18 Mai 2021



Illustration: Mathieu Levis
    
VERS LE POÈME

… Mon coeur ne peut arrêter de rimer.
(JUAN RUIZ)

Je sens un rythme en moi qui se détache
De ce vacarme où je vais sans chemin
Et m’accordant au charme neuf, soudain
J’accède à la clarté d’une terrasse,
Où quelque main me guide et vient tracer
Limpide un ordre où je puis me déprendre
Du démon murmurant plus malicieux
Que le silence pur sous la menace.
Et se rejoignent maintenant à la surface
Du mauvais songe les paroles résolues
À s’éclairer lucides en un volume.
Le son m’invente une effigie de chair.
La forme redevient ma sauvegarde.
Vers un soleil mes peines se consument.

Cantique, 1950. Trad. : Éditions Gallimard, 1995.

***

HACIA EL POEMA JORGE GUILLÉN

… Mi corazôn de trovar non se quita.
JUAN RUIZ.

Siento que un rimo se me desenlaza
De este barullo en que sin meta vago,
Y entregándome todo al nuevo halago
Doy con la claridad de una terraza,

Donde es mi guía quien ahora traza
Limpido el orden en que me deshago
Del murmullo y su duende, más aciago
Que et gran silencio bajo la amenaza.

Se me juntan a flor de tanto obseso
Mal soñar las palabras decididas
A iluminarse en vivido volumen

El son me da un perfil de carne y hueso.
La forma se me vuelve salvavidas.
Hacia una luz mis penas se consumen.

(Jorge Guillén)

 

Recueil: Petite anthologie Poésie européenne
Traduction:
Editions: Singulières

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L’amour est un oiseau rebelle (Sebastián Iradier repris par Georges Bizet)

Posted by arbrealettres sur 5 août 2020



Antoine Bourdelle   Isadora Duncan 00

L’amour est un oiseau rebelle

L’amour est un oiseau rebelle
Que nul ne peut apprivoiser
Et c’est bien en vain qu’on l’appelle
S’il lui convient de refuser

Rien n’y fait, menace ou prière
L’un parle bien, l’autre se tait
Et c’est l’autre que je préfère
Il n’a rien dit, mais il me plaît

L’oiseau que tu croyais surprendre
Battit de l’aile et s’envola
L’amour est loin, tu peux l’attendre
Tu ne l’attends plus, il est là

Tout autour de toi, vite, vite
Il vient, s’en va, puis il revient
Tu crois le tenir, il t’évite
Tu crois l’éviter, il te tient

L’amour est enfant de bohème
Il n’a jamais jamais connu de loi
Si tu ne m’aimes pas, je t’aime
Et si je t’aime, prends garde à toi
Prends garde à toi
Si tu ne m’aimes pas, si tu ne m’aimes pas, je t’aime
Prends garde à toi
Mais si je t’aime, si je t’aime, prends garde à toi

(Sebastián Iradier repris par Georges Bizet)

Illustration: Antoine Bourdelle

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… Et voilà (Jacques Prévert)

Posted by arbrealettres sur 15 février 2020



Illustration: Fabienne Contat
    
Un marin a quitté la mer
son bateau a quitté le port
et le roi a quitté la reine
un avare a quitté son or
… et voilà

Une veuve a quitté le deuil
une folle a quitté l’asile
et ton sourire a quitté mes lèvres
… et voilà

Tu me quitteras
tu me quitteras
Tu me quitteras
tu me reviendras
tu m’épouseras
tu m’épouseras

Le couteau épouse la plaie
rarc-en-ciel épouse la pluie
le sourire épouse les larmes
les caresses épousent les menaces
… et voilà

Et le feu épouse la glace
et la mort épouse la vie
comme la vie épouse l’amour

Tu m’épouseras
Tu m’épouseras
Tu m’épouseras.

(Jacques Prévert)

 

Recueil: Embrasse-moi
Traduction:
Editions: Gallimard

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Oh amour, rayon fou, oh menace de pourpre (Pablo Neruda)

Posted by arbrealettres sur 23 décembre 2019



Oh amour, rayon fou, oh menace de pourpre
tu viens me voir, grimpant par ton frais escalier
au château que le temps a couronné de brumes,
à mon coeur enfermé dans ses pâles murailles.
Personne ne saura que la seule douceur
fit peu à peu des cristaux durs comme des villes,
que le sang a ouvert d’infortunés tunnels
sans que sa monarchie ait surmonté l’hiver.
C’est pour cela, amour, que ta bouche, ta peau,
ta lumière et tes peines sont le patrimoine
vivant, dons sacrés de la pluie, de la nature
dont l’accueil fait lever la promesse du grain,
la tempête du vin secrète dans les caves,
le flamboiement souterrain de la céréale.

***

Oh amor, oh rayo loco y amenaza purpúrea,
me visitas y subes por tu fresca escalera
el castillo que el tiempo coronó de neblinas,
las pálidas paredes del corazón cerrado.
Nadie sabrá que sólo fue la delicadeza
construyendo cristales duros como ciudades
y que la sangre abría túneles desdichados
sin que su monarquía derribara el invierno.
Por eso, amor, tu boca, tu pie, tu luz, tus penas,
fueron el patrimonio de la vida, los dones
sagrados de la lluvia, de la naturaleza
que recibe y levanta la gravidez del grano,
la tempestad secreta del vino en las bodegas,
la llamarada del cereal en el suelo.

(Pablo Neruda)

Illustration: René Julien

 

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