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Poésie

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L’univers immortel (Jean-Claude Pirotte)

Posted by arbrealettres sur 19 Mai 2024



    

l’univers immortel était peuplé de dieux
on les voyait s’asseoir parmi les noctambules
ils parlaient par la voix des vagabonds nocturnes
ou celle des enfants qui inventaient les fables

un songe se tissait au centre des forêts
il devenait réel comme les ustensiles
de bois de glaise de pierre ou d’onyx
le sage avec les dieux s’entretenait le soir

il n’était nul besoin de prêtre ou de chameau
le langage était là comme l’outil du temps
le dieu choisi dans le vent ou la source

éveillait la mémoire et disait l’avenir
on le croyait ou non mais on était ravi
par le chant mystérieux qui enrobait la vie

(Jean-Claude Pirotte)

Recueil: Plein emploi
Editions: Le Castor Astral

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Qu’ai-je à voir moi, avec ce qui devrait être ? (Fernando Pessoa)

Posted by arbrealettres sur 14 Mai 2024




    
Qu’ai-je à voir moi, avec ce qui devrait être ?
Ce qui doit être est ce qui n’existe pas.
Si les choses étaient différentes, elles seraient différentes, voilà tout.
Si les choses étaient comme tu le souhaites, elles seraient comme
tu le souhaites.
Pauvre de toi et de tous ceux qui passent leur vie
A vouloir inventer la machine à bonheur.

(Fernando Pessoa)

Recueil: Poèmes jamais assemblés
Traduction: du portugais par Jean-Louis Giovannoni, Isabelle Hourcade, Rémy Hourcade,Fabienne Vallin
Editions: Unes

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Toucher (Octavio Paz)

Posted by arbrealettres sur 7 Mai 2024




Toucher

Mes mains
ouvrent les rideaux de ton être
t’habillent d’une autre nudité
découvrent les corps de ton corps
Mes mains
inventent dans ton corps un autre corps

***

Palpar

Mis manos
abren las cortinas de tu ser
te visten con otra desnudez
descubren los cuerpos de tu cuerpo
Mis manos
inventan otro cuerpo a tu cuerpo

(Octavio Paz)

Illustration: Zinaida Serebriakova

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Il est des messages (Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 13 avril 2024




    
Il est des messages dont le destin est la perte,
des mots antérieurs ou postérieurs à leur destinataire,
des images qui viennent de l’autre côté de la vision,
des signes qui pointent plus haut ou plus bas que leur cible,
des signaux sans code,
des messages enrobés dans d’autres messages,
des gestes qui butent contre la paroi,
un parfum qui régresse sans retrouver son origine,
une musique qui se déverse sur elle-même
comme un escargot définitivement abandonné.

Mais toute perte est le prétexte d’une rencontre.
Les messages perdus inventent toujours qui doit les trouver.

(Roberto Juarroz)

Recueil: Poésie verticale
Traduction: de l’espagnol par Roger Munier
Editions: Gallimard

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Le toucher (Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 12 avril 2024




    
Le toucher invente dans la nuit
un dessin nouveau.

Et le corps reformule en lui-même
la réalité primordiale.

Le toucher
est une autre forme de pensée du corps.

(Roberto Juarroz)

Recueil: Poésie verticale
Traduction: de l’espagnol par Roger Munier
Editions: Gallimard

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Il est temps que l’homme se fixe à lui-même son but (Frédéric Nietzsche)

Posted by arbrealettres sur 7 avril 2024



 

Sylvie Lemelin_Des fleurs pour ArlequinWEB

Et ainsi Zarathoustra se mit à parler au peuple :
Il est temps que l’homme se fixe à lui-même son but.
Il est temps que l’homme plante le germe de sa plus haute espérance.
Maintenant son sol est encore assez riche.
Mais ce sol un jour sera pauvre et stérile et aucun grand arbre ne pourra plus y croître.
Malheur ! Les temps sont proches où l’homme ne jettera plus par-dessus les hommes la flèche de son désir,
où les cordes de son arc ne sauront plus vibrer !

Je vous le dis : il faut porter encore en soi un chaos pour pouvoir mettre au monde une étoile dansante.

Je vous le dis : vous portez en vous un chaos.
Malheur ! Les temps sont proches où l’homme ne mettra plus d’étoile au monde.
Malheur ! Les temps sont proches du plus méprisable des hommes, qui ne sait plus se mépriser lui-même.
Voici ! Je vous montre le dernier homme.

Amour ? Création ? Désir ? Etoile ? Qu’est cela ?
Ainsi demande le dernier homme, et il cligne de l’œil.

La terre sera alors devenue plus petite, et sur elle sautillera le dernier homme, qui rapetisse tout.
Sa race est indestructible comme celle du puceron; le dernier homme vit le plus longtemps.
Nous avons inventé le bonheur, – disent les derniers hommes, et ils clignent de l’œil.

Ils ont abandonné les contrées où il était dur de vivre : car on a besoin de chaleur.
On aime encore son voisin et l’on se frotte à lui: car on a besoin de chaleur.
Tomber malade et être méfiant passe chez eux pour un péché : on s’avance prudemment.
Bien fou qui trébuche encore sur les pierres et sur les hommes !
Un peu de poison de-ci de-là, pour se procurer des rêves agréables.
Et beaucoup de poisons enfin, pour mourir agréablement.

On travaille encore, car le travail est une distraction.
Mais l’on veille à ce que la distraction ne débilite point.
On ne devient plus ni pauvre ni riche : ce sont deux choses trop pénibles.
Qui voudrait encore gouverner ?
Qui voudrait obéir encore?
Ce sont deux choses trop pénibles.

Point de berger et un seul troupeau ! Chacun veut la même chose, tous sont égaux :
qui a d’autres sentiments va de son plein gré dans la maison des fous.
Autrefois tout le monde était fou, – disent ceux qui sont les plus fins, et ils clignent de l’œil.

On est prudent et l’on sait tout ce qui est arrivé c’est ainsi que l’on peut railler sans fin.
On se dispute encore, mais on se réconcilie bientôt – car on ne veut pas se gâter l’estomac.
On a son petit plaisir pour le jour et son petit plaisir pour la nuit : mais on respecte la santé.

Nous avons inventé le bonheur, – disent les derniers hommes, et ils clignent de l’œil.

(Frédéric Nietzsche)

Illustration: Sylvie Lemelin

 

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LE PRÉNOM DES CHOSES (Laurent Albarracin)

Posted by arbrealettres sur 13 mars 2024




    
LE PRÉNOM DES CHOSES

Devrons-nous inventer le prénom des objets ?
Ils possèdent un nom, un nom d’état civil,
Mais dans l’intimité des choses faudra-t-il
Leur donner le petit nom qui les rapprocherait?

Est-ce que oui, non, Louis est le prénom de l’or?
L’échelle au creux des lits se prénomme Escabelle?
Est-ce que les chapeaux, quand entre eux ils s’appellent
Usent intimement d’un affectif Rebord?

Serait-ce Rémoulade un prénom pour la lame?
Ou vaut-il pour la pierre ? À moins que ce ne fût
Le vrai nom du fusil caché dans les affûts.

Le beau diminutif que les objets réclament!
On les connaîtrait mieux si on les savait autres
Et ainsi ils seraient véritablement nôtres.

(Laurent Albarracin)

Recueil: Contrebande
Editions: Le corridor bleu

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ET APRÈS (Federico Garcia Lorca)

Posted by arbrealettres sur 22 février 2024




    
ET APRÈS

Les labyrinthes
qu’invente le temps
s’annulent.
(Ne reste
que le désert.)

Fontaine du désir,
le coeur s’annule.
(Ne reste
que le désert.)

L’illusion de l’aurore
et les baisers
s’annulent.

Ne reste que le désert.
Une onde,
un désert.

***

Y DESPUÉS

Los laberintos
que crea el tiempo,
se desvanecen

(Sólo queda
el desierto.)

El corazón,
fuente del deseo,
se desvanece.

(Sólo queda
el desierto.)

La ilusión de la aurora
y los besos,
se desvanecen.

Sólo queda el desierto.
Un ondulado
desierto.

(Federico Garcia Lorca)

Recueil: Romancero gitan Poème du chant profond
Traduction: Claude Esteban
Editions: Aubier

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AVEC CE QUI COMMENCE (Marc Alyn)

Posted by arbrealettres sur 1 février 2024



Illustration: Hans Zatzka
    
AVEC CE QUI COMMENCE

Dans cette ville où tout se vend je suis le vent
je suis la marge.
Je vais où m’entraîne le chant. Oiseau libre je
prends le large.

Le verbe est semblable à la mer.
Il a le goût salé des larmes.
Je suis la bouche qui profère au nom des dieux
le sens du drame.

J’ai charge des mots solennels qui aident l’âme
à s’élever.
J’invente s’il le faut le ciel. Je donne à vivre
et à rêver.

Hors ma voix qui vient les fouetter les sons se suivent se ressemblent :
Sans fin il faut ressusciter ces mots de Panurge qui tremblent.

Je dis l’amour avec mon sang. L’enfance est un fruit
que je cueille
Parmi les astres éclatants qui la nuit nichent
dans les feuilles.

Tel un changeur les monnaies d’or je pèse et compte
les paroles.
En songe je vais chez les morts chercher mon Eurydice
folle.

Comprenez-vous que dans mon chant ce qui chante c’est le silence ?
Je n’existe pas à plein temps. Je suis avec ce qui
commence.

Comme un sablier renversé le ciel a glissé dans ma tête.
Je fais la fête avec les fées. Laissez s’envoler le
poète !

(Marc Alyn)

Recueil: Anthologie Poèmes ouverts
Editions: POINTS

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Empreintes (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 25 décembre 2023




    
Empreintes

D’où surgissent
Ces empreintes
Qui cisaillent
Le temps?

Où mène
Le signe
Qui rompt
L’encerclement?

Que dévoilent
Ces traces
Qui franchissent
Leurs limites?

Qui invente
D’autres angles
Qui ranime
L’instant?

(Andrée Chedid)

Recueil: Andrée Chedid Poèmes
Editions: Flammarion

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