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Posts Tagged ‘prénom’

LE PRÉNOM DES CHOSES (Laurent Albarracin)

Posted by arbrealettres sur 13 mars 2024




    
LE PRÉNOM DES CHOSES

Devrons-nous inventer le prénom des objets ?
Ils possèdent un nom, un nom d’état civil,
Mais dans l’intimité des choses faudra-t-il
Leur donner le petit nom qui les rapprocherait?

Est-ce que oui, non, Louis est le prénom de l’or?
L’échelle au creux des lits se prénomme Escabelle?
Est-ce que les chapeaux, quand entre eux ils s’appellent
Usent intimement d’un affectif Rebord?

Serait-ce Rémoulade un prénom pour la lame?
Ou vaut-il pour la pierre ? À moins que ce ne fût
Le vrai nom du fusil caché dans les affûts.

Le beau diminutif que les objets réclament!
On les connaîtrait mieux si on les savait autres
Et ainsi ils seraient véritablement nôtres.

(Laurent Albarracin)

Recueil: Contrebande
Editions: Le corridor bleu

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PAS UN CADEAU (Kiki Dimoula)

Posted by arbrealettres sur 22 février 2024




    
PAS UN CADEAU

Quel délice que la vie à cause d’elle
et de quelle abnégation font preuve
les rêves la religion et autres inventions
tombant dans leur non-vie écumante
pour sauver le pénible.

Routes miséreuses et routes royales
se bousculent dans une même fuite
poursuivies par le même souvenir
de notre mortalité.
L’oubli, cachette plus fragile qu’une ombre.
L’homme se fait aisément connaître par son destin
dans des circonstances, comme les promettent les psaumes,
exceptionnelles; là, point de douleur.

Ô soulagement inhabité.
Ainsi donc elle nous quitte, la tristesse,
il se tait, cet hymne
national de notre existence?
Et le soupir, ce faux brave, s’évade?
Il s’en va donc, ce petit nuage des poumons
ce ventilateur du silence?
Le soupir

prénom du soulagement nom de l’asphyxie
funiculaire de notre poids abrupt
masque respiratoire de nos tourments et
océan dans une goutte comme nous-même.

Vraiment, tout cela se perd?
Alors, quels couverts, quel goût
pour nous empiffrer de toutes
ces circonstances exceptionnelles?

Quelle cosmédie quelle cosmédie.

(Kiki Dimoula)

Recueil: Le Peu du monde suivi de Je te salue Jamais
Traduction: du grec par Michel Volkovitch
Editions: Gallimard

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VOILÀ (Guy Goffette)

Posted by arbrealettres sur 10 janvier 2024




    

VOILÀ
pour André Schmitz

Tout offert, tout perdu, comme le prénom
du matin dans l’herbe déjà verte — ô pâle,
si pâle visage de l’aimée à peine entrevu,
et c’est encore (encore déjà)

ton vieux chien sale et fidèle et traînant
son gros derrière qui le rapporte : voilà,
dit-il, voilà tout ce que j’ai, mon seul trésor, accepte-le, accepte

que ce jour soit un jour simplement,
un jour donné, un jour de passage encore
et qui traîne un peu les pieds dans ta vie
où rien ne bouge dangereusement,

comme une voile dans l’embargo du vent.

(Guy Goffette)

 

Recueil: Le pêcheur d’eau
Editions: Gallimard

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Un Etre bleu, peut-être un ange (Mathieu Bénézet)

Posted by arbrealettres sur 13 décembre 2023




Quand s’allongent les longues pensées de l’herbe.
Un corps de lettres majuscules
avec des lèvres attachées à un prénom
comme l’alevin s’attache à la rivière.
Un être bleu.
Je crois aux anges.

(Mathieu Bénézet)

Illustration

 

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Ce n’était que des corbeaux (Jean-Louis Rambour)

Posted by arbrealettres sur 5 décembre 2023



Ce n’était que des corbeaux

puisque cette nuit changeait de place.

Les couleurs tournent le dos.
Une couleur verte où il fait froid
et qui sert à aimer
là-bas.

Qui parle du jour
de la nuit ?
Un de mes yeux avec un prénom d’Orient !

(Jean-Louis Rambour)

 

Illustration: Odilon Redon

 

 

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Je m’en sors très bien sans toi (Chet Baker)

Posted by arbrealettres sur 22 juin 2023




Illustration: Robert Bared
    
Je m’en sors très bien sans toi
Bien sûr que c’est le cas
Excepté quand il pleut doucement
Et que les gouttes tombent des feuilles, alors je me souviens
Du frisson d’être à l’abri dans tes bras
Bien sûr que c’était le cas
Mais je m’en sors très bien sans toi

Je t’ai oublié exactement comme je devais le faire
Bien sûr que j’y suis parvenu
Excepté quand j’entends ton prénom ou le rire de quelqu’un
Qui ressemble au tien
Mais je t’ai oublié exactement comme je devais le faire

Quel genre de type, quel idiot suis je
Pour avoir pensé que mon cœur brisé pouvait kidnapper la lune
Que me réserve l’avenir, devrais je te rappeler une fois de plus?
Non, mieux vaut rester accroché à ma musique

Je m’en sors très bien sans toi
Bien sûr que c’est la cas
Excepté peut-être au printemps, Mais je ne devrais
Jamais penser au printemps
Car ça briserait mon cœur en deux pour de bon

***

I get along without you very well
Of course I do
Except when soft rains fall
And drip from leaves, then I recall
The thrill of being sheltered in you arms
Of course I do
But I get along without you very well

I’ve forgotten you just like I should
Of course I have
Except to hear your name or someone’s laugh
That is the same
But I’ve forgotten you just like I should

What a guy, what a fool am I
To think my breaking heart could kid the moon
What’s in store, should I phone once more?
No, it’s best that I stick to my tune

I get along without you very well
Of course I do
Except perhaps in spring, but I should
Never think of spring
For that would surely break my heart in two

(Chet Baker)

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IL SUFFIT (André Hardellet)

Posted by arbrealettres sur 3 septembre 2022



 

Christian Schloe - Austrian Surrealist Digital painter - Tutt'Art@ (34)

IL SUFFIT

Il suffit de biffer un matricule
Sur les registres des Assurances sociales
Et de prévenir les croque-morts.

Il suffit d’effacer un prénom
Sur l’étiquette d’une rose
Clouée par l’été.

Il suffit de dormir
Pour revoir les pupitres tailladés à coups de canifs
Et le soleil inondant l’école vide
Un jeudi.

Il suffit de regarder le fil de sable
Coulant dans le sablier.

Il suffit de porter un masque.

Il suffit d’être seul
Sans juges ni lois
Pour s’infliger soi-même
La peine que l’on mérite.

Et plus tard
Il suffit de renverser le sablier.

(André Hardellet)

Illustration: Christian Schloe

 

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Hommage à T.S. (Old Possum) Eliot (Claude Roy)

Posted by arbrealettres sur 24 août 2022



Illustration: Frédéric Rébéna
    
Hommage à T.S. (Old Possum) Eliot

La mésange sur le cerisier nu
le hérisson qui dort caché dans la haie
la chatte noire qui rôde dans la brume
ne sont mésange hérisson ou chatte que par politesse

Chacun d’eux sait qu’il a un vrai nom
un nom caché au fond du fond de lui-même
mais il ne le dira à personne
Ils font semblant d’avoir les noms qu’on leur donne
viennent parfois quand on les nomme
mésange chatte ou hérisson

Mais c’est juste pour faire plaisir
à ces animaux à noms et prénoms
les humains qui croient qu’on peut dire simplement
qu’une mésange est une mésange
qu’une chatte est une chatte
ou qu’un hérisson est un hérisson

Devant notre naïveté désarmante
les bêtes sont tentées parfois de trahir leur secret
et de nous révéler leurs véritables noms
Mais elles se méfient du qu’en-dira-t-on
et préfèrent garder leur strict incognito
Elles vivent dans l’ombre reposante
de ces noms saugrenus sortes de noms d’emprunt
mésange chatte hérisson noms à l’usage humain

(Claude Roy)

 

Recueil: Poèmes de Claude Roy
Traduction:
Editions : Bayard Jeunesse

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Toucher terre (Robert Momeux)

Posted by arbrealettres sur 8 octobre 2021



Toucher terre

Nous ne savions pas qu’il te fallait cela
Village
Nous ignorions
Que la pluie t’était nécessaire
Et ces roseaux dans ta rivière
Et aussi ces pétales de roses
Epandus par le vent
Nous ne savions pas
Qu’il te fallait que la nuit tombe droit
Sur les pentes d’en face
Et que le puits dont la chaîne grince
Interminablement dans l’aube douloureuse
Est un signe attendu
Par tous les arbres de ta place
Nous ne savions pas village
Qu’il te fallait savoir le nom
Et le prénom de tous les enfants dans tes rues
Pour que le ciel ait la juste couleur
Oui t’est nécessaire inéluctablement.

(Robert Momeux)

Illustration: William Lamboley

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Au petit bonheur (Edmond Radiguet)

Posted by arbrealettres sur 14 juillet 2021



Au petit bonheur

Au-dessous de zéro

Les visages sont muets

Tant mieux tu ne saurais plus dire Au revoir
La Belle saison est ailleurs On s’y fait
Et depuis que nous avons les jeux de hasard
Il a fallu mettre une rallonge à la table
En dépit du bon sens,
Ce jour fut le plus court de l’année
Divers prénoms
Un autre bien plus joli
En vain j’effeuille l’éphéméride
Encore une année trop courte
Pour toutes les fêtes à souhaiter

(Edmond Radiguet)

Découvert ici: http://www.ipernity.com/blog/lara-alpha

Illustration

 

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