Posts Tagged ‘creux’
Posted by arbrealettres sur 8 juin 2023

DIALOGUE
Résignez-vous, mon âme, aux choses imparfaites;
Transformez-vous, changez, passez avec le temps;
Quittez vos anciens biens pour de neuves conquêtes
Et dans l’oubli, les deuils, les travaux et les fêtes
Reflétez l’univers aux rythmes inconstants.
Pourquoi? J’ai le dégoût de ces grâces d’une heure;
De ce monde où tout change afin de vivre encor;
Je voudrais ce qui dure avec ce qui demeure
Et fixer, haut et loin de tout ce qui vous leurre,
Le vol resplendissant d’un immobile essor…
— Ma dernière saison va s’effeuiller… Mon âme,
Il me faut en cueillir les suprêmes beautés.
Taisez votre rumeur, votre ordre et votre blâme
Je veux me défleurir dans mes jardins de femme
Parmi la passion des défaillants étés.
— Il n’est point de bonheur dans les amours mortelles;
Détournez vos regards de ces sombres plaisirs.
Il est terrible d’être aimée et d’être belle ;
Tout ce qui crie en vous, éphémère et rebelle,
Impitoyablement, écoutez-le finir.
Mon âme, il faut jouir de tout ce qui nous quitte
L’attrait de ce qui passe est amer et divin.
Tout fuit et tout renaît pour expirer plus vite…
Encore un jour! avant que ce coeur qui palpite
Soit cendre, puisque tout, ô ma chère âme, est vain !
— Mais alors, quelle est donc cette flamme immortelle
Qui, partant d’un grand coeur, dépasse son destin?
Et que tout alimente et que tout renouvelle
Et dont la force vive et si brûlante, est telle
Qu’elle brille le soir plus haut que le matin?
Quel est donc ce tourment tout rempli d’espérance?
Ce jaillissant élan, ce désir d’un bonheur,
D’une félicité sans heure et sans souffrance,
Que les voix de la terre ayant fait le silence,
Un ciel de certitude emplisse notre coeur?
Non, non ! tout n’est pas cendre au creux morne de l’urne ;
Tu me dis que tout sombre en des gouffres obscurs…
Non ! tout n’est pas promis au néant taciturne
Et hors de sa corolle infiniment nocturne,
L’irrésistible espoir dresse ses pistils purs.
Non! tout ne finit pas aux plis des derniers langes…
Et malgré le passé dévorant l’avenir,
Triomphe pour jamais des tristesses étranges
Et contemple, éblouie, avec les yeux de l’ange
Ce quelque chose en loi, qui ne peut pas mourir.
(Gérard d’Houville)
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Posted in poésie | Tagué: (Gérard d'Houville), aimer, alimenter, amais, amer, amour, ancien, ange, attrait, avenir, âme, ébloui, écouter, élan, éphémère, été, étrange, béant, beau, beuf, bien, blâme, bonheur, brûler, briller, cendre, certitude, changer, cher, chose, ciel, coeur, conquête, contempler, corolle, creux, crier, défaillant, défleurir, dégoût, dépasser, désir, détourner, dévorer, demeurer, dernier, destin, deuil, dialogue, divin, dresser, durer, emplir, encore, espérance, espoir, essor, expirer, félicité, fête, femme, finir, fixer, flamme, force, fuir, gouffre, grâce, haut, heure, hors, immobile, immortel, imparfait, impitoyable, inconstant, infini, irrésistible, jaillissant, jardin, jouir, jour, lange, leurrer, Loi, loin, monde, morne, mortel, mourir, nocturne, obscur, ordre, oubli, palpiter, partir, passé, passer, passion, pistil, plaisir, pli, pourquoi, pouvoir, promettre, pur, quelque chose, quitter, rebelle, refléter, regard, rempli, renaître, renouveler, resplendir, rumeur, rythme, s'effeuiller, saison, se résigner, se transformer, silence, soir, sombre, sombrer, souffrance, taciturne, taire, temps, terre, terrible, tourment, travail, triompher, tristesse, univers, urne, vain, vif, vite, vivre, voix, vol, vouloir, yeux | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 30 mai 2023

… ces gens de tout repos,
Qui font tout bonnement tous une même chose.
Je m’ennuie à mourir sur ce chemin morose…
Je n’aime pas brouter l’herbe déjà tondue,
Ce petit foin sans goût, sans fleur inattendue.
Rien de nouveau, rien, rien… Tout est toujours pareil.
Je m’échappe, je cours à travers la campagne,
Je bondis pour trouver quelque peu de montagne,
Je grimpe à des talus très hauts de chemins creux.
On est très bien tout seul, sans moutons, si loin d’eux
Qu’ils semblent tout au fond du val des pierres grises.
Les thyms inviolés ont des saveurs exquises…
Je cours, je broute ici, puis là… je perds du temps,
Je hume l’odeur froide et sauvage des vents.
(Marie Noël)
Recueil: Poètes d’aujourd’hui – Marie Noël
Editions: Pierre Seghers
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Posted in poésie | Tagué: (Marie Noël), aimer, à travers, bien, bondir, bonnement, brouter, campagne, chemin, courir, creux, exquis, faire, fleur, foin, fond, froid, gens, goût, grimper, gris, haut, herbe, humer, inattendu, inviolé, même, montagne, morose, mourir, mouton, nouveau, odeur, pareil, perdre, pierre, repos, rien, s'échapper, s'ennuyer, sauvage, saveur, sembler, seul, talus, temps, thym, tondre, toujours, trouver, val, vent | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 16 mai 2023

LE MONT SAINT-MICHEL
C’est un gros rocher noir debout sur l’océan,
Le sombre diadème d’un Neptune géant,
L’épée d’un dieu fichée sur la grève atlantique.
C’est la flèche élevée en prière phallique,
Le menhir orgueilleux des rêveries celtiques,
Le fantasme sacré d’un vieil abbé dément.
C’est l’hommage de granit à l’archange Michel,
L’improbable totem aux gargouilles de sel,
Un vieux vaisseau-fantôme échoué sur la plage.
C’est le phare déserté tombé du fond des âges,
Un bout de paradis oublié aux rivages
Tout au creux d’une baie où la mer étincèle.
C’est l’abbatiale bâtarde, et gothique et romane,
Ses voûtes dessinées par la foi artisane,
Ses vitraux bégayant leurs lueurs marines.
C’est le cloître-jardin des orants de matines,
Les salles de la Merveille aux cheminées malouines,
Et les cryptes enterrées sous la pierre chamane.
C’est le lieu de mystère et d’indolente brume
Que le soleil oublie quand les cierges s’allument
Mais que l’on aperçoit des marches de Bretagne
Quand on chemine seul, pèlerin de hasard,
Et que soudain le Mont se donne à nos regards,
Serti comme un diamant dans sa gangue océane.
(Roger Bevand)
Recueil: Le Damier 6
Editions: France Europe
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Posted by arbrealettres sur 15 mai 2023

«TON BONHEUR»
Tout «ton bonheur» : me voir heureuse
Il dit aux fleurs de la maison
Que je me forge une chanson
Au-delà de ta tombe creuse.
Ton ultime bonheur, ma paix,
Celle qui n’est point de la terre
Se veut en son profond mystère
Me rendre le fardeau moins vrai.
Tes pas qui ne résonnent plus
Que dans mon cœur et dans ma tête
Tu veux que j’en fasse la fête
Quand sonnent les trois Angélus !
Tu prends avec soin ma journée
Quand, lasse de tout, je souris
Quand même à l’arbre refleuri.
Vois, j’en deviens toute étonnée !…
Le bonheur, tu le fais venir
Même s’il m’apparait un leurre
Subsiste au fond de la demeure
«Ce bonheur» qu’est ton souvenir !…
(Rosa Burel)
Recueil: à coeur ouvert
Editions: Bertout
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Posted in poésie | Tagué: (Rosa Burel), Anglus, apparaître, arbre, au-delà, étonner, bonheur, chanson, coeur, creux, demeure, devenir, dire, faire, fardeau, fête, fleur, fond, forger, heureux, journée, las, leurre, maison, mystère, paix, pas, prendre, profond, résonner, refleurir, rendre, soin, sonner, sourire, souvenir, subsister, tête, terre, tombe, ultime, venir, voir, vrai | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 10 mai 2023

Illustration: Joseph Galante
LE POSTE DÉSERT
Une route attire les yeux au point de mire.
Toute route ! Mais celle-là qui part du coeur
et se perd dans les brumes proches, à venir,
aspirée par le grondement muet du gouffre,
le souffle au coeur, l’énorme souffle sans odeur,
je la connais avec ses arbres à contre jour,
et les cris des oiseaux venus d’un autre monde.
Quels cris?
On n’entend crisser que les corps qui souffrent
(baignés d’un soleil noir qui monte à contre-jour).
Un seul poste désert, quand la route est coupée.
La voix du fond répond : le creux en toi te sonde.
Maintenant, dans ton coeur, où le temps s’est vidé.
(Jean Mambrino)
Recueil: Anthologie de la poésie française du XXè siècle
Editions: Gallimard
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Posted in poésie | Tagué: (Jean Mambrino), arbre, aspirer, attirer, à venir, énorme, baigner, brume, coeur, connaître, contre-jour, corps, couper, creux, cri, crisser, désert, entendre, fond, gouffre, grondement, mire, monde, monter, muet, noir, odeur, oiseau, partir, point, poset, poste, proche, répondre, route, se perdre, soleil, sonder, souffrir, temps, venir, vider, voix, yeux | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 9 avril 2023

Illustration: Gennady Privedentsev
COMME UN AUTRE DOMAINE
J’étais auprès de toi comme un autre domaine.
Nos versants se touchaient — et nous ne savions plus
si des cieux étrangers frôlaient nos bois perdus.
Des miroirs t’appelaient au creux de mes fontaines,
tu cueillais l’eau vivante ou l’éclair bleu d’un geai.
Je bâtissais des feux sous tes branches pressées.
Sur le noeud des aubiers nos doigts se rencontraient
Nous échangions le vent, des ailes par poignées,
et de longues ciguës qui ombrageaient nos coeurs.
Nous étions deux enfants aux confins de la vie,
plus secrets que des faons, avec des yeux vainqueurs,
à jamais possesseurs de terres agrandies.
(Anne-Marie Kegels)
Recueil: Le livre d’or de la poésie française contemporaine
Editions: Marabout
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Posted by arbrealettres sur 14 mars 2023

L’école buissonnière
Je t’ouvre des pays qui n’ont pas de frontières
Je te présente à Dieu
Tu prends fleur dans le vent
L’oiseau bâtit son nid au creux de ton épaule
Je te poursuis encor sur la mer
C’est pour toi
Que cette main devient étoile et primevère
Et c’est pour toi
L’envol inquiétant des fenêtres
En ce moment tu viens de m’apparaître
À la place que j’occupais
A celle que j’occuperai
Pendant bien des années encor
Tu es le lierre de mon corps
Je ne veux plus te voir effrayée
Mais dormante
Et la poitrine nue
Comme un pays neigeux
Je te destine au frais tumulte de ma bouche.
(René Guy Cadou)
Recueil: Frontières Petit atlas poétique
Editions: Bruno Doucey
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Posted by arbrealettres sur 28 février 2023

Il n’est pas rare que je me plonge dans un livre de haïkus
quand je traverse des événements rudes et âpres :
décès d’un proche, maladie, creux de la vague…
Se frotter à la beauté abrupte et sans apprêt du haïku
aide à affronter les épreuves de la vie,
ces moments où la réalité semble se dérober sous nos pas.
Dans ces instants-là,
tous les ornements de la littérature tape-à-l’oeil
sonnent creux et faux.
On a soif d’authenticité, de dénuement,
de simplicité radicale.
Ce n’est pas par de mièvres flonflons
que l’on soigne le vague à l’âme ou la mélancolie,
mais par le silence sec des déserts
et l’eau glacée des torrents.
(Thierry Cazals)
Recueil: L’effet haïku (Pascale Senk)
Editions: POINTS
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Posted in méditations, poésie | Tagué: (Thierry Cazals), abrupt, affronter, aider, apprêt, authenticité, âme, âpre, épreuve, évènement, beauté, creux, décès, dénuement, désert, eau, faux, flonflon, glace, haïku, instant, littérature, livre, maladie, mélancolie, mièvre, moment, ornement, pas, plonger, proche, radical, rare, réalité, rude, se dérober, se frotter, sembler, silence, simplicité, soif, soigner, sonner, tape-à-l'oeil, torrent, traverser, vague, vie | 1 Comment »
Posted by arbrealettres sur 26 février 2023

Illustration: Auguste Rodin
« LE PENSEUR » DE RODIN
Son menton sur sa main rude,
le Penseur se souvient qu’il est chair vouée à la fosse,
chair de fatalité, nue en face du destin,
chair qui hait la mort, qui a frémi de beauté,
frémi d’amour, tout le long de son ardent printemps
et maintenant, à son automne, sent l’envahir le flot de la vérité et de la tristesse.
Sur son front passe le « il faut mourir »
du bronze, lorsque la nuit tombe.
L’angoisse sillonne ses muscles tendus,
chaque creux de sa chair s’emplit de terreur;
il se fend, telle feuille d’automne, à la voix du Seigneur
qui l’appelle dans le bronze… Et il n’y a pas d’arbre tordu,
sur la plaine au feu du soleil, pas de lion blessé,
crispés comme cet homme qui médite sur la mort.
(Gabriela Mistral)
Recueil: Poèmes choisis Prix Nobel de littérature 1945
Editions: Rombaldi
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Posted in poésie | Tagué: (Gabriela Mistral), angoisse, appeler, arbre, automne, beauté, blesser, bronze, chair, creux, crisper, destin, en face, envahir, falloir, fatalité, feu, feuille, flot, fossé, frémir, front, haïr, homme, lion, main, méditer, menton, mort, mourir, muscle, nu, nuit, passer, penseur, plaine, Rodin, rude, s'emplir, se fendre, se souvenir, seigneur, sentir, sillonner, soleil, tendu, terreur, tomber, tordu, tristesse, vérité, voix, vouer | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 25 février 2023

HÔPITAL
La tête allait seule,
avait cet éclat qu’on voit aux bronzes,
aux grilles dominantes
qui ne s’ouvrent qu’aux oiseaux.
Gagnait les bois noirs,
la montagne verte,
le creux des forêts où s’endorment,
au matin, les abandonnés.
Pesait les choses,
le blanc des maisons,
l’arrondi courtois des noisettes
et ce fumier des solitudes
qui monte quand le jour prend congé.
Relevait ses collets,
prenait des notes.
(Claude de Burine)
Recueil: A Henri de l’été à midi
Editions: Saint Germain des Prés
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Posted in poésie | Tagué: (Claude de Burine), abandonné, aller, arrondi, éclat, blanc, bois, bronze, chose, collet, congé, courtois, creux, dominant, forêt, fumier, gagner, grille, hôpital, jour, maison, matin, montagne, monter, noir, noisette, note, oiseau, peser, prendre, relever, s'endormir, s'ouvrir, seul, solitude, tête, vert, voir | Leave a Comment »