Posted by arbrealettres sur 20 février 2024
La lumière creuse les masques sans un cri.
Douleur plus durable que le feu,
ma discordante déchirante.
La nuit s’infléchit vers les blessures
qui saignent entre la muraille à effacer
et le regard à supprimer.
Des chrysalides bougent lentement sur un chemin boiteux
raturant les nourritures archaïques
sous les chuchotements imperceptibles d’une aube lointaine.
Gardons l’oeil en éveil
à travers le balbutiement des lucioles de solitude.
Vivre/survivre dans la jungle à la terreur des chimères.
Faute de lumière, apprenons à mûrir
en suçant le miel occulte des ténèbres.
Les feux du désir peu à peu mangent la nuit.
(Frankétienne)
Recueil: Anthologie secrète
Editions: Mémoire d’encrier
Posted in poésie | Tagué: (Frankétienne), apprendre, archaïque, aube, à travers, éveil, balbutiement, blessure, boiteux, bouger, chemin, chimère, chrysalide, chuchotement, creuser, cri, déchirant, désir, discordant, douleur, durable, effacer, faute, feu, garder, imperceptible, jungle, lentement, lointain, luciole, lumière, manger, masque, mûrir, miel, muraille, nourriture, nuit, occulté, oeil, raturer, regard, s'infléchir, saigner, solitude, sucer, supprimer, survivre, ténèbres, terreur, vivre | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 8 janvier 2024
Marée Basse
Je songe à tous les vents
Simoun sirocco et mousson
à vous phénomènes et typhons
tandis qu’ici tout craque
et que la chaleur épaisse comme la neige
se répand dans le silence
O Lune simplicité oracle
qu’un vent de crépuscule
réduit en lucioles
O lune tout t’abandonne
toi l’amie du silence ennemie des vents
plus est-ce toi qui mène les nuages
paitre
au-delà de la nuit
tout t’abandonne tout te fuit
obéissante moins aimée
mes yeux se ferme grâce à toi
et ta douceur se répand dans les veines de la terre
je songe à vous absents ivres ou dormeurs
vents de terre et de mer
vous qui apprenez qu’il faut vivre
avec des ailes
ou dormir sans scrupules
quand les oiseaux vos enfants
cueillent les étoiles de la vie et du sommeil
vents des continents
roses vous tremblez
vous qui préférez le supplice du crépuscule
(Philippe Soupault)
Recueil: Georgia – Épitaphes – Chansons
Editions: Gallimard
Posted in poésie | Tagué: (Philippe Soupault), abandonner, absent, aile, aimer, ami, apprendre, au-delà, épais, étoile, bas, chaleur, continent, craquer, crépuscule, cueillir, dormeur, dormir, douceur, enfant, ennemi, fuir, grâce, ivre, luciole, lune, marée, mener, mer, mousson, neige, nuage, nuit, obéissant, oiseau, oracle, paître, phénomène, préférer, réduire, rose, scrupule, se fermer, se répandre, silence, simoun, simplicité, sirocco, sommeil, songer, supplice, terre, trembler, typhon, veine, vent, vie, vivre, yeux | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 8 janvier 2024
Illustration: ArbreaPhotos
LA MORT ROSE
Les pieuvres ailées guideront une dernière fois la barque
dont les voiles sont faites de ce seul jour heure par heure
C’est la veillée unique après quoi
tu sentiras monter dans tes cheveux le soleil blanc et noir
Des cachots suintera une liqueur plus forte que la mort
Quand on la contemple du haut d’un précipice
Les comètes s’appuieront tendrement aux forêts avant de les foudroyer
Et tout passera dans l’amour invincible
Si jamais le motif des fleuves disparaît
Avant qu’il fasse complètement nuit tu observeras
La grande pause de l’argent
Sur un pêcher en fleur apparaîtront les mains
Qui écrivirent ces vers et qui seront des fuseaux d’argent
Elles aussi et aussi des hirondelles d’argent sur le métier de la pluie
Tu verras l’horizon s’entrouvrir
et c’en sera fini tout à coup du baiser de l’espace
Mais la peur n’existera déjà plus et les carreaux du ciel et de la mer
Voleront au vent plus fort que nous
Que ferai-je du tremblement de ta voix
Souris valseuse autour du seul lustre qui ne tombera pas
Treuil du temps
Je monterai les cœurs des hommes
Pour une suprême lapidation
Ma faim tournoiera comme un diamant trop taillé
Elle nattera les cheveux de son enfant le feu
Silence et vie
Mais les noms des amants seront oubliés
Comme l’adonide goutte de sang
Dans la lumière folle
Demain tu mentiras à ta propre jeunesse
A ta grande jeunesse luciole
Les échos mouleront seuls tous ces lieux qui furent
Et dans l’infinie végétation transparente
Tu te promèneras avec la vitesse
Qui commande aux bêtes des bois
Mon épave peut-être tu t’y égratigneras
Sans la voir comme on se jette sur une arme flottante
C’est que j’appartiendrai au vide semblable aux marches
D’un escalier dont le mouvement s’appelle bien en peine
A toi les parfums dès lors les parfums défendus
L’angélique
Sous la mousse creuse et sous tes pas qui n’en sont pas
Mes rêves seront formels et vains
comme le bruit de paupières de l’eau dans l’ombre
Je m’introduirai dans les tiens pour y sonder la profondeur de tes larmes
Mes appels te laisseront doucement incertaine
Et dans le train fait de tortues de glace
Tu n’auras pas à tirer le signal d’alarme
Tu arriveras seule sur cette plage perdue
Où une étoile descendra sur tes bagages de sable
(André Breton)
Posted in poésie | Tagué: (André Breton), aile, alarme, amant, amour, angélique, apparaître, appartenir, appel, argent, arme, arriver, écho, écrire, égratigner, épave, étoile, bagage, baiser, barque, bête, blanc, bois, cachot, carreau, cheveux, ciel, coeur, comète, commander, complètement, contempler, creux, défendu, descendre, diamant, disparaître, doucement, eau, enfant, escalier, espace, exister, faim, feu, fini, fleur, fleuve, flotter, forêt, formel, fort, fou, foufroyer, fuseau, glace, goutte, guider, haut, heure, hirondelle, homme, horizon, incertain, infini, invincible, jeter, jeunesse, jour, laisser, larme, lieu, liqueur, luciole, lumière, lustre, main, marche, métier, mentir, mer, monter, mort, motif, mouler, mousse, mouvement, natter, noir, nom, nuit, observer, ombre, oublier, parfum, passer, paupière, pause, pêcher, peine, perdu, peur, pieuvre, plage, pluie, précipice, profondeur, rêve, rose, s'appeler, s'appuyer, s'entrouvir, s'introduire, sablebruit, sang, se promener, semblable, sentir, seul, signal, silence, soleil, sonder, souris, suinter, tailler, temps, tendrement, tirer, tomber, tortue, tournoyer, train, transparent, travail, tremblement, treuil, unique, vain, valseur, végétation, veillée, vent, vers, vide, vie, vitesse, voile, voir, voix, voler | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 8 octobre 2023
VOYAGEURS
I
Nous sommes venus de la rive lointaine,
lumière d’étoile, et nous y retournerons
dans une frêle embarcation
grande comme deux mains tendues.
II
Réfléchir à la compassion.
Une luciole dans un jardin obscur.
Un lombric nu
sur une allée de béton.
III
Je pense à la traversée que
nous ferons ensemble
dans la barque sans rame
du fleuve sans rive.
***
TRAVELERS
I
We came from the far side of the
river of starlight and will cross back
over in a little boat
no bigger than two cupped hands.
II
Thinking about compassion.
A firefly in a great dark garden.
An earthworm naked
on a concrete path.
III
I think of the journey
we will take together
in the oarless boat
across the shoreless river.
(Ursula K. Le Guin)
Recueil: Derniers poèmes
Editions: Aux Forges de Vulcain
Posted in poésie | Tagué: (Ursula K. Le Guin), allée, étoile, barque, béton, compassion, embracation, ensemble, faire, fleuve, frêle, grand, jardin, lointain, lombric, luciole, lumière, main, nu, obscur, penser, rame, réfléchir, retourner, rive, tendu, traversée, venir, voyageur | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 7 octobre 2023
HYMNE AU TEMPS
Le Temps dit « Qu’advienne » chaque instant
et immédiatement
l’espace advient
et la radiance de chaque galaxie.
Et les yeux qui contemplent.
Et la danse des lucioles.
Et le vaste océan.
Et l’amour. Et le hasard.
Le temps laisse la place
de partir et de rentrer
et dans ses entrailles
Naît toute fin.
Le temps c’est l’être et l’être
Le temps, ce n’est qu’une seule et même chose,
Briller, voir,
L’abondance des ténèbres.
***
HYMN TO TIME
Time says « Let there be » every moment
and instantly
there is space
and the radiance of each bright galaxy.
And eyes beholding radiance.
And the gnats’ flickering dance.
And the seas’ expanse.
And death, and chance.
Time makes room
for going and coming home
and in time’s womb
begins all ending.
Time is being and being time,
it is all one thing,
the shining, the seeing,
the dark abounding.
(Ursula K. Le Guin)
Recueil: Derniers poèmes
Editions: Aux Forges de Vulcain
Posted in poésie | Tagué: (Ursula K. Le Guin), abondance, advenir, amour, être, briller, chose, contempler, danse, entrailles, espace, fin, galaxie, hasard, hymne, immédiat, instant, laisser, luciole, naître, océan, partir, place, radiance, rentrer, ténèbres, temps, vaste, voir, yeux | Leave a Comment »