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Posts Tagged ‘maîtresse’

IL DIT QUE TOUT IRA BIEN (Luba Yakymtchouk)

Posted by arbrealettres sur 3 mars 2024




    
IL DIT QUE TOUT IRA BIEN

Il dit : les bombes ont détruit ton école
Il dit : la nourriture disparaît, l’argent manque
Il dit : l’aide humanitaire dans les camions blancs est notre unique salut
Il dit : l’aide humanitaire vient de voler en éclats

Il n’y a plus d’école
Comment ça, plus d’école ?
Elle est vide, trouée ou il n’en reste plus rien ?
Qu’est devenue ma photo, accrochée au tableau d’honneur ?
Qu’est devenue ma maîtresse, qui faisait la classe ?

Il dit : ta photo ? qui a besoin de ta photo ?
Il dit : ton école a fondu, cet hiver est trop brûlant
Il dit : je n’ai pas vu ta maîtresse et ne me demande pas d’aller voir
Il dit : j’ai vu ta marraine, elle n’est plus de ce monde

Fuyez
Laissez tout tomber et fuyez
Abandonnez la maison, la cave et les confitures d’abricots
Les chrysanthèmes roses dans la véranda
Abattez les chiens, pour leur éviter de souffrir
Abandonnez cette terre, quittez-la

Il dit : arrête tes bêtises, tous les jours nous en jetons de la terre sur les cercueils
Il dit : tout ira bien, le salut est proche
Il dit : l’aide humanitaire est déjà en route

***

(Luba Yakymtchouk)

Recueil: Les Abricots du Donbas
Traduction: de l’ukrainien par Iryna Dmytrychyn et Agathe Bonin
Editions: des femmes

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Si la maîtresse (Edith Bruck)

Posted by arbrealettres sur 5 février 2024




    
Si la maîtresse
aujourd’hui me demandait
combien font un et un
avec la même assurance qu’alors
je répondrais un.

(Edith Bruck)

Recueil: Pourquoi aurais-je vécu ?
Editions: Rivages Poche

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Le chat et les rats (Jean-Pierre Claris de Florian)

Posted by arbrealettres sur 10 janvier 2024



Illustration: Grandville
    
Le chat et les rats

Un angora que sa maîtresse
Nourrissait de mets délicats
Ne faisait plus la guerre aux rats ;
Et les rats, connaissant sa bonté, sa paresse,
Allaient, trottaient partout, et ne se gênaient pas.

Un jour, dans un grenier retiré, solitaire,
Où notre chat dormait après un bon festin,
Plusieurs rats viennent dans le grain
Prendre leur repas ordinaire.

L’angora ne bougeait. Alors mes étourdis
Pensent qu’ils lui font peur ; l’orateur de la troupe
Parle des chats avec mépris.
On applaudit fort, on s’attroupe,

On le proclame général.
Grimpé sur un boisseau qui sert de tribunal :
Braves amis, dit-il, courons à la vengeance.
De ce grain désormais nous devons être las,
Jurons de ne manger désormais que des chats :
On les dit excellents, nous en ferons bombance.

À ces mots, partageant son belliqueux transport,
Chaque nouveau guerrier sur l’angora s’élance,
Et réveille le chat qui dort.
Celui-ci, comme on croit, dans sa juste colère,
Couche bientôt sur la poussière
Général, tribuns et soldats.
Il ne s’échappa que deux rats

Qui disaient, en fuyant bien vite à leur tanière :
Il ne faut point pousser à bout
L’ennemi le plus débonnaire ;
On perd ce que l’on tient quand on veut gagner tout.

(Jean-Pierre Claris de Florian)

 

Recueil: Fables
Traduction:
Editions:

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Ma maîtresse a des yeux … (William Shakespeare)

Posted by arbrealettres sur 21 novembre 2023



Illustration: Achille Devéria
    
Ma maîtresse a des yeux qui n’ont rien du soleil
Et ses lèvres n’ont point la rougeur coralline ;
A de noirs fils de fer ses cheveux sont pareils
Et, si la neige est blanche, est brune sa poitrine ;

Rouge et blanche, j’ai vu la rose de Damas,
Mais sur sa joue en vain je cherche rose telle,
Et je sais des parfums plus doux à l’odorat
Que l’haleine qui sort des lèvres de ma belle.

Je sais bien, quoique j’aime à l’entendre parler,
Que musique a des sons beaucoup mieux faits pour plaire ;
J’accorde n’avoir vu de déesse marcher,
Mais quand va ma maîtresse, elle a les pieds sur terre :

Et pourtant, par le ciel, je la prise aussi haut
Que femmes qu’on déguise en parallèles faux.

Traduit de l’anglais par Jean Fuzier,
Editions Gallimard, 1959

(William Shakespeare)

Recueil: L’AMOUR en Poésie
Editions: Folio Junior

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IRIS SENSIBLE AU TORRENT DE LARMES (Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2023



Illustration: Gilles Demarteau
    
IRIS SENSIBLE AU TORRENT DE LARMES

1

Le dieu d’amour tient mon cœur dans ses chaînes.
Je suis réduit à pousser des soupirs !
Quand finiront de si cruelles peines ?
Quand viendra-t-il le jour du plaisir ? (bis)

2

Je suis l’amant d’une ingrate maîtresse.
Depuis longtemps j’aime la jeune Iris.
J’ai bien marqué mes soins et ma tendresse.
L’ingrate n’a pour moi que du mépris. (bis)

3

Quand un amant sait aimer et peut plaire,
Qu’il est heureux ! Que n’ai-je un pareil sort !
Pour moi l’amour n’a rien que de sévère.
Pour vivre ainsi j’aimerais mieux la mort. (bis)

4

Coulant ruisseau cessez vos doux murmures ;
Augmentez-vous du coulant de mes pleurs.
Petits oiseaux voyez ce que j’endure ;
Cessez vos chants et plaignez mes malheurs. (bis)

5

Sombre forêt, séjour rempli des charmes
Où les amants goûtent tout doucement.
Arrosez vous de ce torrent de larmes
Que je répands pour soulager mon cœur. (bis)

6

Sa chère Iris était dedans la plaine
Qui entendait gémir ce tendre amant
Son cœur touché d’un amour qui l’entraîne
S’approche à lui pour finir son tourment. (bis)

7

Charmant berger pourquoi tant de tristesse ?
Cessez vos pleurs, finissez vos soupirs !
Si vous m’aimez vous aurez la tendresse.
Prenez mon cœur et goûtez du plaisir. (bis)

8

Quel changement je ressens dans mon âme !
Ma chère Iris vient soulager mon cœur.
Le dieu d’amour couronne enfin ma flamme.
Quel doux plaisir succède à ma douleur ! (bis)

(Chansons du XVIIIè)

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LE SOLDAT QUI TROUVE SA MIE MORTE (Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2023




    
LE SOLDAT QUI TROUVE SA MIE MORTE

1

Ils étions trois soldats
S’en allaient à la guerre,
S’en allaient à la guerre
Sans pouvoir l’éviter.
Et leurs chères maîtresses
Ne faisaient que pleurer.

2

Le plus jeune des trois
Regrettait bien la sienne,
Regrettait bien la sienne.
Puisqu’il faut la quitter,
Puisqu’il faut la quitter
Dans le bois de merveilles
Fut la reconsoler.

3

Quand ils furent au Piémont
Prêts à monter la garde :
« Bonjour mon capitaine,
Donnez-moi un congé
Pour aller voir ma maîtresse,
Celle que j’ai tant aimé ».

4

Le capitaine répond,
Comme un brave gendarme :
« Voilà la carte blanche
Et un joli passeport.
Va t’en voir ta maîtresse
Et reviens tout d’abord ».

5

Quand il fut au pays
Demande à voir la belle.
« Va ta maîtresse est morte
Et enterrée aussi.
Son corps est sous la terre
Son âme au paradis ».

6

Battez, battez tambours,
Sonnez, sonnez trompettes,
Sonnez, sonnez trompettes,
Puisque ma maîtresse est morte
Je retourne au régiment.

7

Que maudit soit l’amour
Que bénie soit la guerre,
Que bénie soit la guerre
Et celui qui la fait.
Tout le temps de ma vie
Je la regretterai.

(Chansons du XVIIIè)

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VIVE LE VIN, VIVE L’AMOUR (Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 17 novembre 2023




    
VIVE LE VIN, VIVE L’AMOUR

1

Vive le vin, vive l’amour
Amant et buveur tour à tour
Je marque la mélancolie
Jamais les peines de la vie
Ne m’ont causé quelque soupir
Avec l’amour je change de plaisir
Avec le vin je les oublie.

2

Soupirais-je pour un tendron
Je me munis d’un bon flacon
Je vole aux pieds de ma maîtresse
Elle s’oppose à ma sagesse
Au flacon alors j’ai recours :
Avec le vin je triomphe. L’amour
Voilà le nœud de la tendresse.

3

Lise est sensible à mon ardeur
Ce serait trop peu pour mon cœur
Si je n’y vois que ma bouteille
Avec Lise assise sous la treille
Je partage ses trésors
Si le bras de l’autre s’endort
Avec Lise je le réveille.

(Chansons du XVIIIè)

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LE CELA (Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 15 novembre 2023



Illustration: Miklós Barabás
    
LE CELA

Partout on suit le même ton
Partout la gaudriole
Est un langage de raison,
Qui paraît toujours drôle.
Dans un cercle, ou dans un festin
Joliment on s’escrime,
Quand Vénus, ou le Dieu du vin
Sur ce point nous anime.

Chez jeune, ou vieux, fille, ou garçon
Ce propose s’accrédite.
Femme jolie à ce jargon
Donne un nouveau mérite,
Chacun se réveille à Cela ;
L’on s’arrête à ce titre :
Où l’on en revient toujours là,
Sans tarir le chapitre.

Sur ce que l’on nomme Cela,
En langue de Cythère,
Jamais on ne se méprendra,
Fut-on simple bergère.
Iris de ce mot expressif
Entend le badinage ;
On en voit un rouge plus vif
Lui monter au visage.

Fille est rêveuse, quand
Cela Lui trotte dans la tête ;
Ou soudain aux champs la voilà,
Il n’est rien qui l’arrête :
De novice en Cela souvent
Elle devient maîtresse ;
Et même une fille aisément
En Cela nous redresse.

Ce que l’on entend par Cela,
Est donc pas excellence,
Chose exquise qu’on désigna,
Sous ce mot d’importance.
C’est à Cela, dans tout pays,
Que tout tend, tout aspire ;
C’est par Cela, mes chers amis,
Qu’ici bas tout respire.

Chacun veut tâter de Cela
Notre mère nature,
Par un doux instinct, nous porta
A Cela… qu’en conclure !
Sinon que si tout nous parla
De Cela sans mystère,
Nous devons, sans en rester là,
Chercher tous à le faire.

(Chansons du XVIIIè)

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Corps mémorable (Paul Eluard)

Posted by arbrealettres sur 8 novembre 2023



Illustration: Bruno Di Maio
    
Corps mémorable

I

Tes mains pourraient cacher ton corps
Car tes mains sont d’abord pour toi
Cacher ton corps tu fermerais les yeux
Et si tu les ouvrais on n’y verrait plus rien

Et sur ton corps tes mains font un très court chemin
De ton rêve à toi-même elles sont tes maîtresses
Au double de la paume est un miroir profond
Qui sait ce que les doigts composent et défont.

II

Si tes mains sont pour toi tes seins sont pour les autres
Comme ta bouche où tout revient prendre du goût
La voile de tes seins se gonfle avec la vague
De ta bouche qui s’ouvre et joint tous les rivages

Bonté d’être ivre de fatigue quand rougit
Ton visage rigide et que tes mains se vident
Ô mon agile et la plus lente et la plus vive
Tes jambes et tes bras passent la chair compacte

D’aplomb et renversée tu partages tes forces
A tous tu donnes de la joie comme une aurore
Qui se répand au fond du cœur d’un jour d’été
Tu oublies ta naissance et brûles d’exister.

III

Et tu te fends comme un fruit mûr ô savoureuse
Mouvement bien en vue spectacle humide et lisse
Gouffre franchi très bas en volant lourdement
Je suis partout en toi partout où bat ton sang

Limite de tous les voyages tu résonnes
Comme un voyage sans nuages tu frissonnes
Comme une pierre dénudée aux feux d’eau folle
Et ta soif d’être nue éteint toutes les nuits.

(Paul Eluard)

Recueil: Eluard amoureux
Editions: Bruno Doucey

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Ma seule amour… (Charles d’Orléans)

Posted by arbrealettres sur 12 août 2023




    
Ma seule amour…

Ma seule amour, ma joie et ma maîtresse,
Puisqu’il me faut loin de vous demeurer,
Je n’ai plus rien, à me réconforter,
Qu’un souvenir pour retenir liesse.

En allégeant, par Espoir, ma détresse,
Me conviendra le temps ainsi passer,
Ma seule amour, ma joie et ma maîtresse,
Puisqu’il me faut loin de vous demeurer.

Car mon las cœur, bien garni de tristesse,
S’en est voulu avecques vous aller,
Ne je ne puis jamais le recouvrer,
Jusque verrai votre belle jeunesse,
Ma seule amour, ma joie et ma maîtresse.

(Charles d’Orléans)

 

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