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Posts Tagged ‘guerrier’

Dans ce lotissement il y a un arbre chantant (Joy Harjo)

Posted by arbrealettres sur 3 avril 2024



Menawa
    

Dans ce lotissement il y a un arbre chantant.
Il chante l’histoire des arbres d’ici.
Il chante Monahwee qui se tint avec ses amis guerriers
Sur le belvédère pour observer la nouvelle ville érigée
Par des résidents illégaux.
Il chante les campements de la guerre
de Sécession, les ensanglantés
Les sûrs de leur vertu, les abandonnés.
Il chante la puissance atomique et l’avènement
Des banques dont les flèches indiquent
Les lieux de culte.
Le dernier vers revient toujours aux arbres.
Ils resteront.

***

In the complex here there is a singing tree.
It sings of the history of the trees here.
It sings of Monahwee who stood with his warrior friends
On the overlook staring into the new town erected
By illegal residents.
It sings of the Civil War camp, the bloodied
The self-righteous, and the forsaken.
It sings of atomic power and the rise
Of banks whose spires mark
The worship places.
The final verse is always the trees.
They will remain.

(Joy Harjo)

Recueil: L’aube américaine
Traduction: de l’anglais (Etats Unis) par Héloïse Esquié
Editions: Globe

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Le chat et les rats (Jean-Pierre Claris de Florian)

Posted by arbrealettres sur 10 janvier 2024



Illustration: Grandville
    
Le chat et les rats

Un angora que sa maîtresse
Nourrissait de mets délicats
Ne faisait plus la guerre aux rats ;
Et les rats, connaissant sa bonté, sa paresse,
Allaient, trottaient partout, et ne se gênaient pas.

Un jour, dans un grenier retiré, solitaire,
Où notre chat dormait après un bon festin,
Plusieurs rats viennent dans le grain
Prendre leur repas ordinaire.

L’angora ne bougeait. Alors mes étourdis
Pensent qu’ils lui font peur ; l’orateur de la troupe
Parle des chats avec mépris.
On applaudit fort, on s’attroupe,

On le proclame général.
Grimpé sur un boisseau qui sert de tribunal :
Braves amis, dit-il, courons à la vengeance.
De ce grain désormais nous devons être las,
Jurons de ne manger désormais que des chats :
On les dit excellents, nous en ferons bombance.

À ces mots, partageant son belliqueux transport,
Chaque nouveau guerrier sur l’angora s’élance,
Et réveille le chat qui dort.
Celui-ci, comme on croit, dans sa juste colère,
Couche bientôt sur la poussière
Général, tribuns et soldats.
Il ne s’échappa que deux rats

Qui disaient, en fuyant bien vite à leur tanière :
Il ne faut point pousser à bout
L’ennemi le plus débonnaire ;
On perd ce que l’on tient quand on veut gagner tout.

(Jean-Pierre Claris de Florian)

 

Recueil: Fables
Traduction:
Editions:

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Les troubadours (Christian Bobin)

Posted by arbrealettres sur 12 novembre 2023




    
Les troubadours étaient ces guerriers qui avaient pour armure un poème.
J’ai pris leur armure, j’ai adopté leur chant.
C’est très simple, la morale des troubadours.
Il s’agit d’aimer et de mourir dans son amour inaccessible.
Des Christs à cheval, avec les pierres très nues des chapelles pour tombeau et pour livre.

(Christian Bobin)

Recueil: La nuit du coeur
Editions: Gallimard

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Tout là-bas un ruisseau dans un pré (William Butler Yeats)

Posted by arbrealettres sur 17 octobre 2023



Illustration: He Zhihong
    
Tout là-bas un ruisseau dans un pré,
Dans ses narines l’odeur du foin coupé,
Le noble seigneur de Chou s’écria
En rejetant la neige des montagnes,
«Que passent toutes choses ».

Des roues que tournent des ânes d’un blanc laiteux
Où s’élevaient Ninive ou Babylone ;
Quelque conquérant, serrant la bride, cria
Aux guerriers repus de combats,
« Que passent toutes choses ».

Du coeur de l’homme saoulé de sang
Jaillissent ces branches du jour et de la nuit
Où s’accroche le disque criard de la lune.
Que disent toutes les chansons ?
«Que passent toutes choses ».

***

A rivery field spread out below,
An odour of the new-mown hay
In his nostrils, the great lord of Chou
Cried, casting off the mountain snow,
‘Let all things pass away.’

Wheels by milk-white asses drawn
Where Babylon or Nineveh Rose;
some conqueror drew rein
And cried to battle-weary men,
‘Let all things pass away.’

From man’s blood-sodden heart are sprung
Those branches of the night and day
Where the gaudy moon is hung.
What’s the meaning of all song?
‘Let all things pass away.’

(William Butler Yeats)

Recueil: La Rose et autres poèmes
Traduction; de l’anglais (Irlande) par Jean Briat
Editions: POINTS

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Guerrier de l’obscur (Jules Supervielle)

Posted by arbrealettres sur 4 octobre 2023




    
Guerrier de l’obscur,
Vous vous étoilez,
Prenez garde à vous,
Vos yeux vont brûler !
Vous ne pouvez rien
Sans obscurité.
Il faut une armure
Prise dans la nuit
Pour que se précise
Votre âme secrète,
Ombre militaire,
Toujours ennemie.
Que restera-t-il
Du meilleur de vous
Lorsque vous serez
Une étoile aveugle
Sans autorité,
Une étoile errante,
La tête et les pieds ?
Il faut revenir
À votre ténèbre,
Il faut retrouver
La pulsation
De vos grosses fièvres,
C’est votre façon
De vous étoiler.

(Jules Supervielle)

Recueil: La Fable du monde suivi de Oublieuse mémoire
Editions: Gallimard

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Venez que je vous parle, ô jeune enchanteresse (Victor Hugo)

Posted by arbrealettres sur 15 août 2023



Illustration: Freydoon Rassouli
    
Venez que je vous parle, ô jeune enchanteresse

Venez que je vous parle, ô jeune enchanteresse!
Dante vous eût faite ange et Virgile déesse.
Vous avez le front haut, le pied vif et charmant,
Une bouche qu’entrouvre un bel air d’enjouement,
Et vous pourriez porter, fière entre les plus fières,
La cuirasse d’azur des antiques guerrières.

Tout essaim de beautés, gynécée ou sérail,
Madame, admirerait vos lèvres de corail.
Cellini sourirait à votre grâce pure,
Et, dans un vase grec sculptant votre figure,
Il vous ferait sortir d’un beau calice d’or,
D’un lys qui devient femme en restant lys encor,
Ou d’un de ces lotus qui lui doivent la vie,
Etranges fleurs de l’art que la nature envie!

Venez que je vous parle, ô belle aux yeux divins,
Pour la première fois quand près de vous je vins,
Ce fut un jour doré. Ce souvenir, madame,
A-t-il comme en mon coeur son rayon dans votre âme?
Vous souriez. Mettez votre main dans ma main,
Venez. Le printemps rit, l’ombre est sur le chemin,
L’air est tiède, et là-bas, dans les forêts prochaines,
La mousse épaisse et verte abonde au pied des chênes.

(Victor Hugo)

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L’Orgueil (Bernard Dimey)

Posted by arbrealettres sur 9 juillet 2023




    
L’Orgueil

Vos mépris ne m’atteignent pas,
Vos paroles non plus,
Votre ironie m’amuse
Et vos talents divers me laissent
Indifférent.

Vous barbouillez quand je dessine,
Vous balbutiez quand j’écris.

Je suis requin, je glisse
Très au-dessus de vos jardins
D’éponges.

Le silence est mon royaume,
Je m’y dresse tout seul,
Habillé de cristal,
Fragile,
Indestructible,
Mais tellement plus haut que vous,
Dur comme le diamant.

Je vous contemple de très haut,
Je suis le compagnon des aigles,
Votre dédain ne m’atteint pas,
Ni vos silences.

Je suis tout habillé d’amiante,
Je sais piétiner vos fournaises,
En ressortir vivant
Plus étincelant que jamais,
Superbe.

Vous n’êtes rien pour moi
Que des guerriers de givre.

Vos louanges, vos symphonies
Ne sont qu’un peu de vent pour moi,
Je tournoie tout seul
En plein ciel.

Je vous survole.

JE VOUS IGNORE.

(Bernard Dimey)

Recueil: Le milieu de la nuit
Editions: Christian Pirot

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La Frontière (Bernard Lavilliers)

Posted by arbrealettres sur 12 mars 2023



    

La Frontière

Allongé sur le sable on dirait qu’il dort
Il est beau et très calme dans le froid qui mord
C’est un guerrier nomade, un homme du désert
Qui est couché dans le sable les yeux grands ouverts

Jusqu’où vont les nomades plus loin que la mort
Dans le chant des étoiles y’a le mirador
A quoi rêvent les nomades sous le ciel ouvert
A des pur-sang arabes écumant la mer.

Reste dans ton rêve, c’est peut-être mieux
Mais le jour se lève et en plein milieu
Il y a la frontière.

La violence est silence,
Silence est désert
Sentinelles de sable tournés vers la mer
Tirez sur tout ce qui bouge, même sur la poussière
Tirez sur le soleil rouge qui meurt dans la mer.

Qui partage les pierres, les jungles et le sable
Qui a mis l’univers à plat sur la table
Qui a peur de son ombre et qui fait la guerre
Mais déjà le vent efface ton nom sur la pierre.
Couché sur le sable, on dirait qu’il dort
Mais pour un nomade, c’est après la mort
Qu’y a plus de frontière.

Où est la frontière?
Où est la frontière?
Pour qui la frontière?
C’est loin la frontière?
Pourquoi la frontière?
C’est loin la frontière?
Où est la frontière?

(Bernard Lavilliers)

Recueil: Frontières Petit atlas poétique
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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L’HOMME POSTHUME (Georges Henein)

Posted by arbrealettres sur 24 juillet 2022



 

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L’HOMME POSTHUME

Nous étions nés pour la froideur des armes
nés pour contrarier le cours de la naissance
et pour tracer à l’intérieur des êtres
les signes du mauvais vouloir.
« Laissez errer le sang » nous disait notre Maître
et nous ne sûmes jamais
de l’errance ou de l’erreur
laquelle fut notre voie.

Sans cesse pourchassée
l’éternelle grimace de vivre
est loin de renoncer à nous
dans nos mouvements séparés de la terre
un souffle secret introduit la discorde
comme on disperserait des oiseaux.
« C’est la volonté des Absents » s’écrie l’un de nous
et sous nos épaulettes de roc
nous devinons que nous sommes nus

nous resterons, cette fois encore, d’improbables guerriers…

(Georges Henein)

Illustration

 

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TOMBES DE SOLDATS (Maurice Carême)

Posted by arbrealettres sur 24 mars 2022



TOMBES DE SOLDATS

Près des tombes vertes de lierre
Des soldats tués à la guerre,
Des enfants jouent au cimetière.

Des enfants aux sabres de bois
Jouent naïvement aux soldats
Et font les morts couchés en tas.

Sans un regard pour ces guerriers,
Des moutons broutent dans le pré
Comme toujours ils ont brouté.

L’heure sonne, lente à la tour.
Un chien aboie dans une cour.
Un paysan, au loin, laboure.

(Maurice Carême)

Illustration: Jules Jacques Veyrassat

 

 

 

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