Aimer la pierre abandonné sur le chemin
Depuis la nuit des temps
Le coquelicot fragile
Loin des bottes des conquérants
Le bouleau qui attend le printemps
Des ailes d’un cheval ailé aimant
Pousseront à la montagne endormie
Ou les cendres d’un volcan
Et si le printemps est en retard
Attends le bourgeon difficile
La neige sera promue
A la source où tu te désaltères
Petits yeux, clairs et bleus
dents si fines et menues,
lèvres roses, belles boucles,
menottes si petites ;
rire de clochette
prompt conquérant !
Si je te loue encore
ce sera encore trop peu.
Être si merveilleux,
ai-je le choix,
comment te nommerai-je ? —
Idéal !
Je suis le cuisinier d’un feu de poésie,
Magicien tournant dans la marmite d’or
Le coeur purifié des paroles choisies
Avec le piment noir et pourpre de la Mort.
Je suis le capitaine d’un prince plus fort
Que tous les conquérants des Indes ou d’Asie,
Chuchotant tout à coup aux oreilles saisies
Le mot de passe impérieux, de port en port.
Par le monde mon seul adversaire est l’ennui;
Pour le mettre en déroute il n’est que sérénades :
Le caprice arlequin en bondissant me suit.
Bien déluré d’ailleurs qui dira d’où je suis,
Car chasseur kurde ou guitariste de Grenade,
J’enferme des oiseaux dans un cercle de nuit.
La nuit t’habille dans mes bras
Pâles rumeurs et bruits de soie
Conquérante immobile
Reine du sang des villes
Je la supposais, la voilà
Tout n’est plus qu’ombre, rien ne ment
Le temps demeure et meurt pourtant
Tombent les apparences
Les amants se perdent en s’aimant
Solitaire à un souffle de toi
Si près tu m’échappes déjà
Mon intime étrangère
Se trouver c’est se défaire
A qui dit-on ces choses-là ?
As down lights up another day
Visions I once had fade away
All of those words unspoken
My widest dreams off broken
It wasn’t supposed to be that way
Should I leave why should
I stay Solitaire un souffle de toi
Leavin’behing me yesterday
Tout près tu m’echappes déjà
Am I free or forsaken
Mon intime étrangère
Cheated or awakened
Se trouver, se défaire
Does it matter anyway?
Étincelle.
Incandescence.
Rougeoiements du charbon enflammé.
Chaleur fiévreuse de l’été.
Vie, vivacité, vigueur et volupté.
Sens, sensualité,excitation, extase.
Fougue batailleuse ou conquérante, généreusement créatrice.
Combustion naturelle de l’existence.
Zèle des dieux qui sommeillent en nous
à la manière des rupestres dans leur abri sous roche…
Ardeur.
Le mot vibre de la charge solaire qui est en lui.
Qu’elles soient provençale, italienne ou espagnole,
ses parentés linguistiques puisent invariablement dans la même matière en fusion:
« ardeur » vient du latin ardor, de ardere qui signifie « brûler ».
(Bruno Doucey)(Thierry Renard)
Recueil: L’Ardeur ABC poétique du vivre plus
Traduction:
Editions: Bruno Doucey
T’en souviens-tu, Sarah ?
La mort s’est abattue sur toi et sur les hommes.
Plus pressée que d’habitude. Cette mort-là n’est pas celle que nos sages
nous ont appris à respecter et à aimer.
Mort engendrée par la haine.
T’en souviens-tu, Sarah ?
En ce temps-là – temps de misère et de guerre – des millions d’hommes étaient partis
en croisade contre le nez, la bouche ; contre le front et l’âme d’une fraction de leurs
semblables dont les poitrines se rétrécissaient, dont les paumes avaient glissé le long des hanches.
Sarah, t’en souviens-tu ?
En ce temps-là – ceci se passait à l’intérieur de la parole donnée, glorifiée, répandue –
l’adolescent avait vu père et mère pris au piège, devenir le centre foisonnant d’une rafle,
le fardeau d’une rose humiliée et disparaître avec son parfum…
En ce temps-là, en ce temps-là – Sarah, t’en souviens-tu ? –
le crachat du conquérant, dans la nuit, rivalisait d’éclat avec l’étoile étirée
et le monde voguait sans mât (…)
Ce monde-ci n’est qu’une œuvre comique
Où chacun fait ses rôles différents.
Là, sur la scène, en habit dramatique,
Brillent prélats, ministres, conquérants.
Pour nous, vil peuple, assis aux derniers rangs,
Troupe futile et des grands rebutée,
Par nous d’en bas la pièce est écoutée,
Mais nous payons, utiles spectateurs ;
Et, quand la farce est mal représentée,
Pour notre argent nous sifflons les acteurs.