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LE VOEU DE LOUISE DE FRANCE : CARMELITE (Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 14 novembre 2023



Illustration: Jean-Marc Nattier
    
LE VOEU DE LOUISE DE FRANCE : CARMELITE

1

S’en est fait l’esprit divin
Vient s’emparer de mon âme.
Je sens naître dans mon sein
Une merveilleuse flamme.
Mon cœur en est consolé
Qu’un seul dieu me plaise mes charmes
Tant que je le possédrai
Je ne tarirai point mes larmes.

2

Non le plaisir de la cour
Ne saurait me satisfaire.
Un si aimable séjour
Ne saurait à mon cœur plaire.
Les biens de l’éternité
De mes pensées sont les délices,
Mais comme un cerf altéré
Qui court aux eaux de la justice.

3

A quoi sert ce grand cela
D’une vaine créature
Qui du séjour au trépas
Devient les verts de la parure.
Les rois et les empereurs
Ne risquent hélas que sur la terre,
Mais devant leur créateur
Ne sont que cendres et poussières.

4

Nous voyons le conquérant,
Ces César, ces Alexandre
Dans un affreux monument,
En pourriture et en cendres,
Et les biens pour incertains
Que le bonheur est manifeste
C’est aspirer au vrai bien
Et abandonner les terrestres.

5

Nous avons trois ennemis :
J’entends la chair et le monde
Qui nous combattra à l’envie.
Leur fureur est sans seconde,
Mais pour me mettre à l’abri
De leurs insolentes poursuites
Au couvent de Saint-Denis
Je veux me rendre carmélite.

6

Aujourd’hui toute chargée d’or
Et de pierres précieuses,
Demain être au rang des morts,
Abandonnée et affreuse,
Retombée dans le néant !
Sans nul égard à la noblesse :
Elle prouve constamment
Notre orgueil et notre faiblesse.

7

Ouvrez mes chères sœurs, ouvrez
La porte du monastère.
Je veux rester renfermée
Courant ma vie tout entière
Je suis venue en secret
Sans la vue de mon cher père
Mais il a tant de bonté
Qu’il saura ma vie austère.

8

Je ne veux pas parmi vous
Ouvrir la préférence
Mais partageons entre nous
Le jeûne et la pénitence.
Allez, partez, écriez,
Dites au Roi avec révérence
Que vous avez vu cloîtrer
Madame Louise de France.

(Chansons du XVIIIè)

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Quand on est amoureux (Christian Bobin)

Posted by arbrealettres sur 29 novembre 2022



  Illustration
    
Quand on est amoureux
on met une seule personne
jolie de préférence
bien au centre du monde
Et quand on aime
d’un amour de personne
on met le monde
au coeur du monde
Bien sûr on n’est jamais à l’abri
d’une rechute
mais quand même quelle douceur
d’aller partout
avec l’insouciance de ce saint
qui entrant dans le château du roi
enlevait son manteau et l’accrochait à
un rayon de soleil
continuant d’avancer impassible
comme si ce geste
était le geste le plus naturel du monde
Oui quel bonheur d’aller ainsi
aimant et ne retenant rien
de ce qu’on aime

Vivre Nella
Vivre respirer chanter
comme si l’on n’y était
plus
pour personne

(Christian Bobin)

 

Recueil: La Vie Passante
Editions: Fata Morgana

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Il n’y a que des portes (Pierre Dhainaut)

Posted by arbrealettres sur 15 janvier 2022


porte

Courants d’air ou rayons
sans préférence: devant la porte
il n’y a que des portes.

(Pierre Dhainaut)

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PLUIE (Nuno Jùdice)

Posted by arbrealettres sur 2 février 2021




    
PLUIE

Il pleut comme toujours.
Et, comme toujours quand il pleut, les gens s’abritent
(ceux qui ne s’attendaient pas à ce qu’il pleuve) ;
ou ils ouvrent, simplement, leur parapluie —
de préférence à ouverture automatique.

Parce que, quand il pleut, nous devons tous faire quelque chose :
même nous, qui sommes à l’intérieur de la maison.
Les uns vont à la fenêtre, en commentant : «Quel hiver ! »;
les autres s’assoient, un papier devant eux :
et ils écrivent un poème, comme celui-ci.

(Nuno Jùdice)

 

Recueil: Un chant dans l’épaisseur du temps suivi de méditation sur des ruines
Traduction: Michel Chandeigne
Editions: Gallimard

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Le bon moment (Hâfez Shirâzi)(Hafiz)

Posted by arbrealettres sur 21 décembre 2020



    
Le bon moment

Rien de meilleur que le plaisir :
printemps, verdure et amis tendres.
Où est l’échanson ? Dis-le-moi !
Pourquoi donc me fait-il attendre ?
Sache apprécier chaque occasion
que la fortune te propose,
Car personne ne peut savoir
quelle sera la fin des choses.
Sois vigilant, car notre vie
est suspendue à un cheveu.
Ne prends garde qu’à tes ennuis :
le monde tournera sans eux.
Que signifie : Eau de Jouvence ?
Qu’est-ce qu’un Paradis terrestre ?
L’une n’est qu’un petit ruisseau ;
l’autre, un bon petit vin champêtre.
Pudique ou buveur, ce ne sont
que deux facettes du réel.
Les deux aspects sont attirants,
mais nous allons choisir lequel ?
Le secret derrière l’écran,
qu’en connaît le Ciel ? Maintenant,
Tais-toi, prétentieux ! A quoi bon
traiter avec le chambellan ?
Si je n’étais pas responsable
de mes erreurs, de mes offenses,
Que signifierait Ton pardon,
ô mon Dieu miséricordieux ?
Le dévot boit l’eau de l’Eden ;
Hâfez, le vin. Auquel des deux
Le Créateur, en fin de compte,
donnera-t-il la préférence ?

***

(Hâfez Shirâzi)(Hafiz)

 

Recueil: L’amour, l’amant, l’aimé
Traduction: Vincent-Masour Monteil
Editions: Actes Sud

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Sans vouloir déprécier (Michel Butor)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2019



Illustration
    
Sans vouloir déprécier
nulle des fleurs éparses
j’avoue ma préférence
pour les oeillets sauvages

(Michel Butor)

 

Recueil: Collation précédé de HORS-D’OEUVRE scandés par les SOUVENIRS ILLUSOIRES D’UN JAPON TRES ANCIENS
Traduction:
Editions: Seghers

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Avec lequel de tes os (Guillevic)

Posted by arbrealettres sur 8 octobre 2019



Avec lequel de tes os
Jouerais-tu
De préférence?

(Guillevic)

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Mieux que les ours et la tigresse (Louise de Vilmorin)

Posted by arbrealettres sur 21 août 2018



Catherine Musnier  cirque [800x600]

Mieux que les ours et la tigresse,
La chatte grise, un gris d’iris,
La chouette devineresse,
La guenon, plurent à mon fils
Mieux que les ours et la tigresse.

« Je les ferai rire à mon tour.
Allons leur dire bon voyage;
Elles s’en vont au petit jour.
Rien qu’en leur demandant leur âge
Je les ferai rire à mon tour. »

Mon amour, en sa préférence
Aimait prolonger les plaisirs.
Elle reconnut son enfance
En cet enfant de nos désirs,
Notre amour et sa préférence.

Ces bêtes n’attiraient que nous,
Chacun s’en allait vers les cages
Où rampe et tourne le courroux
Des fauves grondant leur orage.
Ces bêtes n’attiraient que nous.

De la lune, les eaux laiteuses
Baignaient le campement forain.
Curieux, dompteurs et jongleuses,
Les acrobates et les nains
Se mouvaient en cette eau laiteuse.

Alors, devant les animaux
Qu’il voulut revoir dans leur cage,
Mon fils agita son chapeau,
Les taquina jusqu’à la rage.
Il taquina ces animaux.

Le feu d’une lampe à pétrole,
Troublé par un souffle de vent,
Projetait autant d’ombres molles
Que de lueurs en se mouvant,
Et cette flamme de pétrole

Tremblait sur de jeunes amants,
Baiser premier, seul baiser rare
Qu’interrompit le jeu dément
De mon fils et ses cris barbares.
Ce jeu fit trembler les amants.

« Enfant, ces bêtes sont savantes
Et, savantes, peuvent punir.
Ton jeu méchant les mécontente,
Prends garde, dis je, il faut partir.
Enfant, ces bêtes sont savantes. »

(Louise de Vilmorin)

Illustration: Catherine Musnier 

 

 

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Rien n’est plus proche (Franck André Jamme)

Posted by arbrealettres sur 25 Mai 2018




    
Rien n’est plus proche de la fin
que l’Un qui règne, que Dieu, que l’amour fou.

Mais tout cela est même chose.
Et chaque fois mes proches lèvent les yeux.

Evidemment, l’amour tout court, sans préférence,
pour cet homme et pour cet enfant,
pour l’abeille et pour le chemin, ce serait autre chose
– comme une délicieuse vérité.
Les songes ne seraient pas loin.

(Franck André Jamme)

 

Recueil: La récitation de l’oubli
Traduction:
Editions: Flammarion

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LA CONSCIENCE (René Guy Cadou)

Posted by arbrealettres sur 11 décembre 2017



Illustration: Xing Jianjian 
    
LA CONSCIENCE

Est-ce toi dans cette petite vie
Dans l’intérieur si mal tenu de ma poitrine
Tu fais si peu de bruit que je crains de te perdre
Et tu passes sur moi comme une main mouillée
Je peux t’abandonner comme au cours d’un voyage
On oublie dans un lit d’hôtel ou d’un meublé
Une fatigue de dix ans un corps maussade
Malgré moi je saurai bien te retrouver
Au détour d’un jour creux et doux comme une ruine
Dans l’avenue trop courte où mes jours sont comptés
Car j’ai besoin de toi comme l’enfant prodige
Ballotté dans les draps brûlants de la pensée
Se réveille en criant c’en est trop du vertige
Un peu d’eau douce
Dans cette grande solitude salée
Je saurai te donner toujours la préférence
Ce peu de moi si loin de moi qui me revient
Épousé par tant d’angles durs de murs atroces
Cette balle sanglante et triste comme un poing.

(René Guy Cadou)

 

Recueil: Comme un oiseau dans la tête
Traduction:
Editions: Points

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