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Je suis allé me promener (Younous Emré)

Posted by arbrealettres sur 5 avril 2023




    
Je suis allé me promener
Au matin j’ai vu les tombeaux
A la terre noire mêlés

J’ai vu les corps délicats
Certains tristes, d’autres souriants
Couchés mystérieusement dans les tombes
Les veines vidées, le sang tari

j’ai vu les linceuls engloutis.
Des tombes pleines, démolies
Leurs maisons à tous sont en ruines

Je les ai vus libres de tout souci
j’en ai vu tant en piètre état.
Plus de pâture au pâturage
Et plus d’hiver à l’hivernage
Toutes rouillées, rendues muettes

J’ai vu les langues dans les bouches.
Les uns dans les plaisirs et la boisson
Certains dans la musique et dans la fête
Certains dans le malheur et la souffrance

J’ai vu les jours devenus hier.
Ces yeux noirs sont ternis
Ces visages de lune effacés
Dessous la terre noire

J’ai vu les mains qui ont cueilli des roses.
Les uns tête inclinée
Ont à la terre abandonné leur corps
Partis fâchés avec leur mère

Je les ai vus tourner la tête.
Certains pleurent en gémissant
Les démons marquent leur âme au fer
Leur tombeau est en flammes

J’ai vu s’élever la fumée.
Lorsque Younous a vu cela
Il est venu nous l’annoncer
Mon esprit s’émut, ma raison s’étonna
Lorsque j’ai vu tout cela.

(Younous Emré)

Recueil: Poèmes des derviches anatoliens
Traduction: Guzine Dino,Michèle Aquien,Pierre Chuvin
Editions: Fata Morgana

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NOTÉ UNE NUIT D’AVRIL (Hermann Hesse)

Posted by arbrealettres sur 31 mars 2023




    
NOTÉ UNE NUIT D’AVRIL

Qu’il y ait des couleurs, c’est étrange :
Blanc, jaune, bleu, vert, rouge, orange !

Etrange qu’il y ait des sons :
Cors, sopranos, hautbois, bassons !

Qu’il y ait une langue encore :
Vocables, vers, rimes, cadence,
Inflexion délicate ou sonore,
Syntaxe qui marche ou qui danse !

Qui se plaît à ces jeux,
Dans leur charme se baigne,
Pour lui le monde rit, joyeux,
Fleurit et lui enseigne
Son coeur, son sens mystérieux.

Ce que tu aimas, voulus,
Que tu rêvas ou vécus
Pour toi garde existence.
Fut-ce heure bonne ou mauvaise ?
Sol dièse ou la bémol, mi bémol ou ré dièse,
Fait-on la différence ?

***

NACHTS IM APRIL NOTIERT

O daß es Farben gibt :
Blau, Gelb, Weiß, Rot und Grün !

O daß es Töne gibt :
Sopran, Baß, Horn, Oboe !

O daß es Sprache gibt :
Vokabeln, Verse, Reime,
Zärtlichkeiten des Anklangs,
Marsch und Tänze der Syntax !

Wer ihre Spiele spielte,
Wer ihre Zauber schmeckte,
Ihm blüht die Welt,
Ihm lacht sie und weist ihm
Ihr Herz, ihren Sinn.

Was du liebtest und erstrebtest,
Was du träumtest und erlebtest,
Ist dir noch gewiß.
Ob es Wonne oder Leid war ?
Gis und As, Es oder Dis —
Sind dem Ohr sie unterscheidbar ?

(Hermann Hesse)

Recueil: Poèmes choisis
Traduction: Jean Malaplate
Editions: José Corti

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Un mégot de cigarette (Richard Brautigan)

Posted by arbrealettres sur 4 janvier 2023




    
Un mégot de cigarette

Un mégot de cigarette n’a rien de
joli.
Ce n’est pas comme les arbres imposants,
les prairies vertes ou les fleurs
de la forêt.
Ce n’est pas comme un faon délicat, un
oiseau chanteur ou un lapin
bondissant.
Mais tout cela a disparu maintenant,
Et, à la place de la fôret, se trouve
Un monde noirci d’arbres calcinés
et de chair pourrissante —
Les restes d’un autre feu de
forêt
Un mégot de cigarette n’a rien de
joli.

***

A Cigarette Butt

A cigarette butt is not a pretty
thing.
It is not like the towering trees,
the green meadows, or the for
est flowers.
It is not like a gentle fawn, a
singing bird, or a hopping
rabbit.
But these are all gone now,
And in the forest’s place is a
Blackened world of charred trees
and rotting flesh —
The remnants of another forrest
fire
A cigarette butt is not a pretty
thing.

(Richard Brautigan)

 

Recueil: C’est tout ce que j’ai à déclarer Oeuvres poétiques complètes
Traduction: Thierry Beauchamp, Frédéric Lasaygues et Nicolas Richard
Editions: Le Castor Astral

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Assis avec ma femme au début du printemps (Xu Junqian)

Posted by arbrealettres sur 7 décembre 2022



Illustration: Shan Sa
    
Assis avec ma femme au début du printemps

Toilettes et parures audacieuses,
Tu t’apprêtes toujours d’avant-garde.
L’herbe encore courte perce au travers des sandales
Les prunes en promesse détachent leur parfum d’à venir
Les arbres s’inclinent pour cueillir ton châle de brocarts
Et l’air s’élève délicat puis dégage ton col écarlate
Remplis ma coupe de vin d’orchidée !
Cette seule vue fait chanter mon esprit.

(Xu Junqian)

(540-609)

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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 » Quelqu’un qui a vu quelque chose  » (Christian Bobin)

Posted by arbrealettres sur 29 novembre 2022



 

 Mozart

 » Quelqu’un qui a vu quelque chose  » :
c’est ainsi que l’on pourrait désigner aussi bien les saints que les génies.
Le plus délicat est ensuite de s’accorder sur ce qui a été « vu ».

Thérèse d’Avila donne à son éblouissement
un nom qui a la vertu de faire crier les sots et les doctes :  » Dieu « .

Quant à Mozart, s’il est difficile de dire ce que précisément il a vu,
il s’agit assurément d’une chose qui engendre puissance, gaieté et compassion.

(Christian Bobin)

Découvert chez la boucheaoreilles ici

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Avant, j’en voulais un (Margaret Atwood)

Posted by arbrealettres sur 19 août 2022



Illustration
    
Avant, j’en voulais un :
un délicat coussin de soie rouge
suspendu à un ruban de sang,
où on enfonce des épingles.
Mais j’ai changé d’avis.
Avoir un coeur fait mal.

(Margaret Atwood)

Recueil:Poèmes tardifs
Traduction: Christine Évain & Bruno Doucey
Editions: Pavillons

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Le vent calligraphe (Abdourahman A. Waberi)

Posted by arbrealettres sur 4 août 2022



Le vent calligraphe

pinceau en main le vent dessine
des paysages de mots
des montagnes sculptées
des plaines d’ombre
des enclaves d’horizons

le calligraphe chatouille
les sillons enflammés du désert
avec un bâtonnet d’encre bien délicat

(Abdourahman A. Waberi)

Découvert ici: http://www.ipernity.com/blog/lara-alpha
Illustration: Martin Schoeller

 

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Beaucoup ne verront plus… (Cécile Périn)

Posted by arbrealettres sur 4 juillet 2022




    

Beaucoup ne verront plus…

Beaucoup ne verront plus palpiter la lumière,
Ni l’éclat délicat des matins de printemps.
Un doux soleil entr’ouvre en vain les primevères ;
Je pense aux jeunes morts qui n’avaient pas vingt ans.

Le destin les coucha dans l’ombre, à peine en vie.
Et les vieillards et les femmes regarderont,
La flamme vacillant dans ces mains engourdies,
S’éteindre les divins flambeaux ; — et survivront.

Mais ils ne pourront plus connaître cette ivresse
Qui les envahissait, jadis, au temps joyeux.
Pour un rayon posé sur les pousses qui naissent,
Pour un jeune arbre en fleur, pour un pan de ciel bleu.

Ils n’auront plus jamais l’exaltation douce
De ceux que la beauté seule autrefois rythmait.
Leur coeur se souviendra de l’horrible secousse
Quand l’oubli s’étendra sur les jardins de Mai.

(Cécile Périn)

 

Recueil: Poésie au féminin
Traduction:
Editions: Folio

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Le Corroyeur et le Financier (Isaac de Benserade)

Posted by arbrealettres sur 18 juin 2022




    
Le Corroyeur et le Financier

Le délicat voisin d’un puant corroyeur
Plaida pour l’éloigner, et gagna son affaire :
Pendant qu’à déloger le corroyeur diffère,
Le voisin s’accoutume à la mauvaise odeur.

Bientôt le délicat plaideur
Des peaux de son voisin ne sentit plus l’odeur :
Que conclure de là ? Que ce qui semble rude
Devient avec le temps, plus doux par l’habitude.

(Isaac de Benserade)

 

Recueil: Fables
Traduction:
Editions:

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CHAQUE ATOME SUR TERRE… (Omar Khayyam)

Posted by arbrealettres sur 3 juin 2022



Illustration: Josephine Wall
    
CHAQUE ATOME SUR TERRE…

Chaque atome sur terre
Fut une joue de soleil, un front de Vénus.
La poussière qui se pose sur ce front délicat, essuie-la doucement :
Elle fut, elle aussi, visage et chevelure d’un être fragile.

(Omar Khayyam)

Recueil: 35 siècles de poésie amoureuse
Traduction:
Editions: Saint-Germain-des-Prés Le Cherche-Midi

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