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Poésie

Posts Tagged ‘tisser’

J’en appelle … (Mélanie Leblanc)

Posted by arbrealettres sur 9 février 2024




    
j’en appelle à l’animal
– araignée, enseigne-moi
comment relier la terre au ciel
les mondes aux mondes
tendre le fil de la voix
scintiller sous la pluie
rendre visible
l’harmonie secrète et fragile

écrire comme on tisse

*

j’en appelle au végétal
– fleur sauvage, enseigne-moi
comment exhaler son odeur
témoigner de la beauté
être là être libre
offrir les mots les plus précieux
puis dans un soupir
partir

écrire comme on fleurit

*

j’en appelle au minéral
— galet, enseigne-moi
comment faire des ricochets
choisir avec attention puis
jeter les mots-cailloux
rompre les lois
faire voler ce qui pèse
marcher sur l’eau

écrire comme on joue

(Mélanie Leblanc)

Recueil: Soleils vivaces vibrent dans nos mains
Editions: Le Castor Astral

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Rideaux d’acier baissés (Lydia Padellec)

Posted by arbrealettres sur 31 janvier 2024




    
Rideaux d’acier
baissés – la respiration
suspendue
aux cris funestes
des sirènes
où es-tu mon amour
la nuit tisse sa toile
longe les murs
s’attarde aux reflets
troués des vitrines –
un visage d’ange
regarde le ciel
pétrifié

(Lydia Padellec)

Découvert ici: http://laboucheaoreilles.wordpress.com/

Recueil: Cicatrices de l’Avant-jour
Editions: Al Manar

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Je pense à la chaleur que tisse la parole (Tristan Tzara)

Posted by arbrealettres sur 8 janvier 2024




    
je pense à la chaleur que tisse la parole
autour de son noyau le rêve qu’on appelle nous

(Tristan Tzara)

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Le fantôme (Jean Orizet)

Posted by arbrealettres sur 25 décembre 2023




    
Le fantôme

Mon enfant se niche dans l’herbe
pour y chercher un magicien.

Il plonge au secret de la mer
pour chanter avec les sirènes.

Il escalade les sommets là
où des fées tissent le temps.

Quand il se réveille à la fin
un doux fantôme le surveille.

(Jean Orizet)

Recueil: La peau bleue des rêves
Editions: Le Cherche Midi

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D’instant en instant (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 23 décembre 2023



Illustration: Olivier Valsecchi
    
D’instant en instant

D’instant en instant
Germe le temps qui me tisse
File le temps qui me traque
S’écourte le temps qui me fuit

D’instant en instant
Captif du temps qui s’élance
Je navigue
Sur les jeux du songe
Sur le flux du présent
Sur l’élan de l’âme
Sur les remous du coeur

D’instant en instant
Au rythme du temps qui nous modèle
Nos ombres se démènent
Sur la toile de vie.

(Andrée Chedid)

Recueil: Andrée Chedid Poèmes
Editions: Flammarion

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DIRE : FAIRE (Octavio Paz)

Posted by arbrealettres sur 9 décembre 2023




DIRE : FAIRE

Entre ce que je vois et dis,
entre ce que je dis et tais,
entre ce que je tais et rêve,
entre ce que je rêve et oublie,
la poésie.
Elle glisse
entre le oui et le non :
elle dit
ce que je tais,
elle tait
ce que je dis,
elle rêve
ce que j’oublie.
Elle n’est pas un dire :
elle est un faire.
Elle est un faire
qui est un dire.
La poésie
se dit et s’entend :

elle est réelle.
Et à peine je dis
« elle est réelle »,
elle se dissipe.
Est-elle ainsi plus réelle ?

Idée palpable,
mot
impalpable :
la poésie
va et vient
entre ce qui est
et ce qui n’est pas.
Elle tisse des reflets
et les défisse.
La poésie
sème des yeux sur la page,
sème des mots dans les yeux.
Les yeux parlent,
les mots regardent,
les regards pensent.
Entendre
les pensées,
voir
ce que nous disons,
toucher
le corps de l’idée.
Les yeux
se ferment,
les mots s’ouvrent.

(Octavio Paz)

 

 

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Lorsque j’écris nuage (Eugène Guillevic)

Posted by arbrealettres sur 7 décembre 2023



Lorsque j’écris nuage,
Le mot nuage,

C’est qu’il se passe quelque chose
Avec le nuage,

Qu’entre nous deux
Se tisse un lien,

Que pour nous réunir
Il y a une histoire,

Et quand l’histoire est finie
Le roman s’écrit dans le poème.

(Eugène Guillevic)

 

 

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LA GOURMANDISE (Odette Romeu)

Posted by arbrealettres sur 16 septembre 2023




    
LA GOURMANDISE

A coups de langue et de dents
Qu’as-tu fait de tes artères
Pauvre convive imprudent ?
Car les dépôts délétères
Qui durcissent leurs parois
Resserrant les fils d’un drame
Dans le métal de leur trame
Tissent ton chemin de croix

Si tu veux retarder l’heure
D’un trépas prématuré
A ce poison, riche en beurre
Savamment édulcoré
Préfère l’eau des fontaines
Et va glaner au désert
Cette manne que Dieu sert
Sur la table d’autres Cènes.

(Odette Romeu)

Recueil: Sur les rives du Jourdain
Editions: émergences

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TOUSSAINT POUR TOI MAMAN (Odette Romeu)

Posted by arbrealettres sur 15 septembre 2023




    

« Puis à l’heure par Dieu choisie
Je partirai pour les grands Cieux
Adieu la terre, adieu la vie
Où l’on ne peut pas être heureux »
Marguerite ORRIT
(1962, juste avant sa mort)

TOUSSAINT POUR TOI MAMAN
A mon père A mon frère A ma tante

Toussaint… et j’omettais de t’envoyer des fleurs
M’en voudras-tu, maman, toi jadis toujours prête
A t’enfuir comme moi vers l’azur des poètes ?
Je pense qu’aujourd’hui l’amertume des pleurs

Qui brouillent mon regard et baignent mon visage
Et cette main qui tremble au long de cette page
Te prouveront assez, qu’après bientôt dix ans,
Je garde au fond du coeur, tranchant comme une lame,

Aussi dense, aussi dur, le souvenir du drame
De cette nuit hagarde où pendant si longtemps
J’ai dû, pâle et glacée, accourir vers ces lieux
Où tu n’étais plus qu’ombre en la clarté funèbre

Des cierges vacillant au milieu des ténèbres,
Toi dont je n’avais pu fermer les pauvres yeux.
Depuis, sourde à la voix d’un cyprès d’où retombent
Des écailles tissant un linceul clairsemé,

Tu dors : un cyclamen, quelques glaïeuls, des tombes…
Et sur ce clou profond mon coeur s’est refermé.
Pourtant je ne crois pas qu’un mur longtemps résiste

Même si c’est la Mort, aux assauts de l’Amour
Et j’entrevois en songe un collier d’améthyste
Où tu luiras pour moi, plus pure encore, un jour.

Mais avant, que d’écueils, mais avant, que de larmes
Sur ma route d’exil je devrai rencontrer.
Dis, toutes ces douleurs, dis, toutes ces alarmes,
Si l’amour jusqu’à toi les force à pénétrer,

A travers ce linceul dont nous t’avions drapée
Ne les ressens-tu pas encor comme une épée ?
Et n’as-tu pas encor, graves et triomphants,
Des mots mélodieux pour bercer ton enfant ?

Quand mon corps se révolte à l’acmé de sa fièvre,
N’est-ce pas toi qui clos d’un doigt tendre mes lèvres ?
Ce bleu vers le zénith, dis, n’est-ce pas ta main
Dans l’arc-en-ciel mouvant, qui montre le chemin ?

Et pour que n’erre plus mon âme solitaire,
N’as-tu pas fait reluire un nouveau sanctuaire ?
Toi qui me chérissais si maladroitement,
Prête à donner ta vie afin que je renaisse,
Toi qui voyais le monde à travers un tourment,
Qui m’irritais parfois à force de tendresse,

A force de vouloir, éperdument, mourir,
De trop scruter le ciel sans regarder à terre,
De trop heurter du pied, à chaque pas, des pierres,
Toi que dans mon oubli je n’ai pas su fleurir
De ces roses, miroir de ton âme rêveuse
Où tes yeux auraient vu passer ma main pieuse,

En ce jour de Toussaint où croulent tant de fleurs,
Où tant de marbre luit sous tant de chrysanthèmes,
De mes doigts sans bouquet recueille ce poème
Où chaque rose perle et tremble comme un pleur.

(Odette Romeu)

Recueil: Sur les rives du Jourdain
Editions: émergences

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ARDOISE VERTE (Odette Romeu)

Posted by arbrealettres sur 14 septembre 2023




    
ARDOISE VERTE
à mon mari

Autour d’une ardoise grise
Ultime maillon
Où terne, la vie épuise
Un dernier rayon

Au fond des sous-bois la mousse
Tisse au fil des jours
Un manteau d’étoffe douce
Comme du velours

Et la roche ainsi couverte
De brillant satin
Est une émeraude verte
Au pied d’un sapin

Toi dont les yeux pers s’inondent
Comme à l’horizon,
De mer où des cieux se fondent,
Ma glauque prison,

Mon océan, ma turquoise,
Puisses-tu, bleu-vert,
Ne pas sombrer sur l’ardoise
D’un dernier hiver

De tes yeux remplis d’automne
Que d’un souvenir
Une feuille à l’aile atone
Vient parfois jaunir

De tes yeux brode une ganse
De mousse et d’or fin
Pour revêtir d’espérance
Mon âme sans fin.

(Odette Romeu)

Recueil: Sur les rives du Jourdain
Editions: émergences

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