Arbrealettres

Poésie

Posts Tagged ‘miroir’

VENT ET NUIT (Octavio Paz)

Posted by arbrealettres sur 9 Mai 2024





VENT ET NUIT

Heure de vent,
nuit contre la nuit,
ici, dans ma nuit.

Le vent taureau,
court, s’arrête, tourne,
va-t-il quelque part ?

Vent courroucé :
aux carrefours
l’âme se brise.

Comme moi-même,
colère accumulée
sans dénouement.

Vers où suis-je ?
Le vent vient et va.
Ni ici ni là.

Miroir aveugle.

(Octavio Paz)

Illustration

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

INSOMNIE (Octavio Paz)

Posted by arbrealettres sur 9 Mai 2024




INSOMNIE

Veille du miroir :
la lune l’accompagne.
Reflet sur reflet
l’araignée ourdit ses trames.

À peine cligne-t-elle
la pensée en veille :
elle n’est ni fantôme ni idée
ma mort sentinelle.

Je ne suis ni vivant ni mort:
réveillé je suis, réveillé
dans un oeil désert.

(Octavio Paz)

Illustration: Salvador Dali

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Chanson persane (Rémy de Gourmont)

Posted by arbrealettres sur 6 Mai 2024




    

Chanson persane

Celle qui tiens mon cœur m’a dit languissamment :
« Pourquoi donc es-tu triste et pâle, ô mon Charmant ? »
M’a dit languissamment celle qui tient mon cœur.

Celle qui tient mon cœur m’a dit moqueusement :
« Quel miel d’amour a donc englué mon Charmant ? »
M’a dit moqueusement celle qui tient mon cœur.

Moi, j’ai pris un miroir et j’ai dit à la Belle :
« Regarde en ce miroir, regarde, ô ma cruelle ! »
Et j’ai dit à la Belle, en brisant le miroir :

« Comme une perle d’ambre attire un brin de paille,
La langueur de ton teint m’appelle, je défaille,
Je suis le brin de paille et toi la perle d’ambre. »

« Apportez-moi des fleurs fleurantes et des cinnames
Pour ranimer le cœur de mon Roi qui se pâme,
Des cinnames pour son âme et des fleurs pour son son cœur ! »

(Rémy de Gourmont)

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Créer certaines paroles (Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 13 avril 2024



Illustration: Chantal Dufour
    
Créer certaines paroles non pour les dire,
mais seulement pour les contempler
comme si elles étaient les visages de
créatures nouveau-nées de l’abîme.

Créer ces paroles
avec la gratuité exaltée
d’un feu qui n’aura pas d’usage
et brûlera comme un miroir hypnotique
de notre propre gratuité fondamentale.

Créer ces paroles
uniquement pour que le jeu continue
comme si certaine mer qui n’existe pas
attendait à la fois
certains poissons qui n’existent pas
et certaines vagues qui néanmoins existent.

(Roberto Juarroz)

Recueil: Poésie verticale
Traduction: de l’espagnol par Roger Munier
Editions: Gallimard

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Ce matin l’automne (Seishi Yamaguchi)

Posted by arbrealettres sur 13 avril 2024



Ce matin l’automne
Dans le miroir
Le visage de mon père.

(Seishi Yamaguchi)

 

 

Posted in haïku, poésie | Tagué: , , , , , | Leave a Comment »

Retouche à l’alcôve (Daniel Boulanger)

Posted by arbrealettres sur 7 avril 2024



 

Retouche à l’alcôve

miroir de lait
visage nénuphar

l’amour a bruit de pomme que l’on croque
le feu jappe

à reculons ma main sur l’ombre incomparable

(Daniel Boulanger)

Illustration

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

BERCEUSE AU MIROIR ENDORMI (Federico Garcia Lorca)

Posted by arbrealettres sur 7 avril 2024



BERCEUSE AU MIROIR ENDORMI

Dors.
Ne crains pas le regard
errant.
Dors.
Ni le papillon,
ni la parole,
ni le rayon furtif
de la serrure
ne t’atteindront.
Dors.
Comme mon coeur,
comme lui,
mon miroir.
Jardin où l’amour
m’espère.
Endors-toi sans crainte,
mais réveille-toi,
quand mourra le dernier
baiser de mes lèvres.

(Federico Garcia Lorca)

Illustration: Jean Raoux

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Aucun amant n’a osé… (Maria-Mercè Marçal)

Posted by arbrealettres sur 24 mars 2024




    
Aucun amant n’a osé…

Aucun amant n’a osé approcher
cet endroit extrême d’où tu me touches.
Dedans dehors, amour, je sens la houle
et je deviens dune et grève et rocher.

Sable et souvenir de demain, mains braves du risque,
miroir de l’ombre de l’hier qui t’a ourdie
hôte de moi, lierre.
Je vis en toi, tes gestes et abordages.

Tu vis en moi, vas dans le clos commun
— eau aux aguets des échos de la terre
qui lave au sel les traces de la guerre —.

Sens-tu le vent qui sonde, coeur à jeun,
les quais lointains où mon orgueil se perd?
Montant en toi, la mer et moi font un.

(Maria-Mercè Marçal)

Recueil: L’insurrection poétique Manifeste pour vivre ici
Editions: Bruno Doucey

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

LE CAFÉ (Laurent Albarracin)

Posted by arbrealettres sur 18 mars 2024



 


   
LE CAFÉ

D’où remonte que noir est le café en tasse,
Profond dès sa surface ? Et que peut-il vouloir,
Que veut-il que je fasse autre chose que boire
Ce breuvage de choix rallongé d’eau fadasse ?

Hé ! il vient de la nuit qui affleure au matin,
Tel un miroir sans tain où la ténèbre luit.
À sept heures moins vingt un relent de minuit.
Tout l’obscur s’amenuise au clair du kaolin.

Le vieux fond de mystère en fumée se dissipe.
Le principe s’éclaire aux abords de la lippe.
Les lointains amenés sur les rivages sus

Délaissent l’ambigu pour la clarté donnée
À travers le feuillu d’un coeur acuminé.
Attaquons la journée maintenant que c’est bu.

(Laurent Albarracin)

Recueil: Contrebande
Editions: Le corridor bleu

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

ESSAYE-MOI D’ABORD (Jacques Higelin)

Posted by arbrealettres sur 16 mars 2024



Illustration: François-Joseph Durand
    
ESSAYE-MOI D’ABORD

Essaye-moi,
Essaye-moi d’abord
Avant de t’enflammer
Puis avant de sombrer
dans la loi des chassés croisés
Teste-moi d’abord

Avant qu’on se divise qu’on se sépare en deux
Avant qu’on se dégrise du vertige amoureux

Avant qu’on baisse les bras
Avant qu’on baisse les yeux

Rompons la glace
Ouvrons nos corps
Et d’un commun accord
Testons-nous encore

Avant que nos miroirs se brisent
Avant qu’on n’en puisse plus
Que nos âmes et nos corps s’enlisent
Plus vite qu’on ne l’aurait cru

Avant que sonne la disgrâce
Et la fin de nos face à face
Avant qu’on se volatilise
Qu’on se déguise en courant d’air

Avant qu’on ait perdu les traces
Du chemin qui restait à faire

(Jacques Higelin)

Recueil: Flâner entre les intervalles
Editions: Pauvert

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »