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INTIMITÉ (Albert Lozeau)

Posted by arbrealettres sur 7 Mai 2024



Illustration: Raymond Peynet
    
INTIMITÉ

En attendant le jour où vous viendrez à moi,
Les regards pleins d’amour, de pudeur et de foi,
Je rêve à tous les mots futurs de votre bouche,
Qui sembleront un air de musique qui touche

Et dont je goûterai le charme à vos genoux…
Et ce rêve m’est cher comme un baiser de vous!
Votre beauté saura m’être indulgente et bonne,
Et vos lèvres auront le goût des fruits d’automne !

Par les longs soirs d’hiver, sous la lampe qui luit,
Douce, vous resterez près de moi, sans ennui,
Tandis que feuilletant les pages d’un vieux livre,
Dans les poètes morts je m’écouterai vivre;

Ou que, songeant depuis des heures, revenu
D’un voyage lointain en pays inconnu,
Heureux, j’apercevrai, sereine et chaste ivresse,
A mon côté veillant, la fidèle tendresse!

Et notre amour sera comme un beau jour de mai,
Calme, plein de soleil,joyeux et parfumé!
Et nous vivrons ainsi, dans une paix profonde,

Isolés du vain bruit dont s’étourdit le monde,
Seuls comme deux amants qui n’ont besoin entre eux
Que de se regarder, pour s’aimer, dans les yeux!

(Albert Lozeau)

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Quand il m’arrive d’oublier (Jean-François Mathé)

Posted by arbrealettres sur 4 Mai 2024




    
Quand il m’arrive d’oublier que vous êtes morts,
je vous entends venir,
comme du vent plein d’arbres,
rendre toutes ses feuilles à ma mémoire.

Tout ce temps que vous rapportez,
ma maison si petite aujourd’hui
le contient à peine,

seule s’agrandit la page,
mieux éclairée par vos ombres que par des lampes,
où j’écris ce que vous me murmurez.

(Jean-François Mathé)

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Chute sans distance (Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 13 avril 2024



Illustration: Caroline Morel
    
Chute sans distance,
changement du même en même,
subtilité dernière du mouvement,
ultime combinaison de la chute.

Il n’y a pas à attendre le choc du fond,
ni à tourner la page,
ni à éprouver de vertige.
La chute est un point.

(Roberto Juarroz)

Recueil: Poésie verticale
Traduction: de l’espagnol par Roger Munier
Editions: Gallimard

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L’amour est un mot de lumière (Khalil Gibran)

Posted by arbrealettres sur 5 mars 2024




    
L’amour est un mot de lumière,
écrit par une main de lumière,
sur une page de lumière.

(Khalil Gibran)

Recueil: Le sable et l’écume et autres poèmes
Traduction: de l’anglais par Thierry Gillyboeuf et de l’arabe par Elie Dermarkar
Editions: POINTS

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Je suis né poumon (Ludovic Janvier)

Posted by arbrealettres sur 4 mars 2024




    
Je suis né poumon comme tout le monde
la grâce attendue tardait à venir
jusqu’au jour où pour mieux m’entendre
j’ai marché mot à mot sur des pages au hasard
voilà que d’un seul coup ça respirait tranquille
j’avais trouvé je continue j’inspire
j’expire calmement sous le vent des paroles

(Ludovic Janvier)

Recueil: La mer à boire
Editions: Gallimard

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Les écrits s’en vont (André Breton)

Posted by arbrealettres sur 8 janvier 2024



Illustration: Max Ernst et Marie-Berthe Aurenche
    
Les écrits s’en vont

Le satin des pages qu’on tourne dans les livres moule une femme si belle
Que lorsqu’on ne lit pas on contemple cette femme avec tristesse
Sans oser lui parler sans oser lui dire qu’elle est si belle
Que ce qu’on va savoir n’a pas de prix
Cette femme passe imperceptiblement dans un bruit de fleurs
Parfois elle se retourne dans les saisons imprimées
Et demande l’heure ou bien encore elle fait mine de regarder des bijoux bien en face
Comme les créatures réelles ne font pas
Et le monde se meurt, une rupture se produit dans les anneaux d’air
Un accroc à l’endroit du coeur
Les journaux du matin apportent des chanteuses dont la voix a la couleur
du sable sur des rivages tendres et dangereux
Et parfois ceux du soir livrent passage à de toutes jeunes filles qui mènent des bêtes enchaînées
Mais le plus beau c’est dans l’intervalle de certaines lettres
Où des mains plus blanches que la corne des étoiles à midi
Ravagent un nid d’hirondelles blanches
Pour qu’il pleuve toujours
Si bas si bas que les ailes ne s’en peuvent plus mêler
Des mains d’où l’on remonte à des bras si légers que la vapeur des prés dans ses gracieux entrelacs au-dessus des étangs est leur imparfait miroir
Des bras qui ne s’articulent à rien d’autre qu’au danger exceptionnel d’un corps fait pour l’amour
Dont le ventre appelle les soupirs détachés des buissons pleins de voiles
Et qui n’a de terrestre que l’immense vérité glacée des traîneaux de regards
sur l’étendue toute blanche
De ce que je ne reverrai plus
A cause d’un bandeau merveilleux
Qui est le mien dans le colin-maillard des blessures.

(André Breton)

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Une nappe de silence (Jean-Baptiste Besnard)

Posted by arbrealettres sur 14 décembre 2023




Une nappe de silence
S’étale sur la table
Où les pages d’un livre
Ecrasent des souvenirs
Comme des fleurs séchées.

(Jean-Baptiste Besnard)

 

 

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VILLE (Jean-Baptiste Besnard)

Posted by arbrealettres sur 14 décembre 2023



VILLE

La nuit se renverse comme une bouteille d’encre sur la page du jour.
La tache s’étale que n’arrête pas l’horizon
sur l’écriture des êtres et des choses.
Un rayon de lune glisse sur les tuiles.
Un toit miaule.
Les réverbères éclaboussent les trottoirs
où défilent les platanes, raides comme à la parade,
et qui longent une alternance de pavillons et de terrains vagues, pas encore bâtis.
La chaussée ne me renvoie que l’écho de mes pas, accompagné
par le souvenir des liens, sur de hauts talons.
J’irai jusqu’au bout de la ville,
jusqu’à cette aube de lait et de rosée
qui accrochera des chants d’oiseaux
sur les arbres du quai et les poutrelles du pont Eiffel.

(Jean-Baptiste Besnard)

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Si ton crayon s’attarde (Claude Esteban)

Posted by arbrealettres sur 13 décembre 2023


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Si ton crayon
s’attarde sur la page,
déchire le dessin.

(Claude Esteban)

 

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De cet automne à Paris (Christian Bobin)

Posted by arbrealettres sur 12 novembre 2023




    
De cet automne à Paris, je ne retiens que la place Saint-Sulpice,
et de la place Saint-Sulpice je ne garde que quelques carrés adorables
avec un mandala de pavés à l’intérieur,
et des herbes noires à force d’être vertes, entre les pierres.

Le dieu, c’est le simple.
Je l’ai connu par la joie que la vue de ce labyrinthe m’a donnée.
Découvrir la sainteté de la vie,
c’est aussi gai que mettre la main sur un oeuf crotté dans la paille chaude.

Ces herbes qui n’entreraient pas dans l’église étaient une lettre.
J’ai défroissé les pavés, repassé chaque brin d’herbe et j’ai lu en silence.

Ce n’est pas moi qui vois les choses.
Ce sont les choses qui me donnent leurs yeux.

Les images pures, personne ne les invente.
L’âme de l’arbre se sépare un instant de l’arbre,
vient sur la page, écrit le poème sur l’arbre
et signe Ronsard.

(Christian Bobin)

Recueil: La nuit du coeur
Editions: Gallimard

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