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Poésie

Posts Tagged ‘cuisse’

LE VENT (Jacques Higelin)

Posted by arbrealettres sur 16 mars 2024




    
LE VENT

Le vent
ça brasse de l’air
ça fait danser les feuilles mortes
ça fait claquer les portes
et baisser les paupières

Le vent ça donne des ailes
à ceux qui traînent la patte
ça ramène des nouvelles
de la Terre de Feu aux Carpates

Le vent ça vous matraque
juste ce qu’il faut derrière l’oreille

Ça fait voler les châles
ça fait gonfler les voiles
ça fait danser les flammes
et ça plaque les volants des robes
sur les cuisses des femmes…
ça fait chanter les morts
et vibrer les étoiles

Le vent ça hurle dehors
ça hurle dans la nuit
ça murmure sous les portes
et puis ça pousse des cris

Le vent ça affole les cerveaux
ça bouscule les poivrots
ça retourne les bagnoles

Le vent
ça enflamme les crinières
ça gicle dans l’ornière
ça souffle dans les crânes

Le vent ça sculpte les rochers
ça couche les champs de blé
ça décoiffe les beautés

Le vent ça claque les étendards
ça déchire les drapeaux
ça balaie les remparts

Le vent ça vous plaque contre un mur
ça vous lèche la figure
comme un grand chien joyeux.

Le vent
qui fait tourner la Terre
et tourner la poussière autour de tes pieds nus

Le vent
qui souffle dans ma tête
me chante un air de fête un air de liberté

Le vent

Emportera mes restes
balaiera la poussière
de mes os sur la terre
où j’ai dansé
mortel
parmi les ombres
entre les flammes
autour du feu qui crache
sur le ciel étoilé
des milliards d’étincelles

Vendredi 30 décembre 1994, à Calvi
Un soir de grand vent, la nuit, dans la citadelle.
En repensant aux feux de la Saint-Jean.

(Jacques Higelin)

Recueil: Flâner entre les intervalles
Editions: Pauvert

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Lettre à l’inconnue d’en face (Guy Goffette)

Posted by arbrealettres sur 5 mars 2024



    

Lettre à l’inconnue d’en face

1
Rideaux, tentures, voilages, non rien, Madame,
pour dérober à votre oeil de cyclope
dans l’ombre qui m’épie ce long corps nu
de faux gisant recru d’intempérances,
et qui se pâme aussi devant votre balcon
où sèche toute une lingerie de nonne aux abois —
fleurs vénéneuses pour le solitaire
que la mort affole dresse démoelle dans la nuit,
rivé à vos blanches cuisses.

2
Si peu de lumière sur ma table,
si peu que les mots comme fleurs rabougrissent
— et ma chair, si vous n’y portez remède par saoules salives,
si votre ventre fougueusement ne l’enroule,
ma chair vive et veuve livrée nue chaque nuit à votre délectation
s’en ira elle aussi pétale à pétale avant que nous n’ayons trouvé,
belle inconnue, cette bête qui voyage beaucoup.

3
Reconnaissez Madame
que mourir hors du dérèglement de tous les sens
est triste et sans aucun profit
(présent gâché que la vertu, la nuit vient vite
et la plus belle rose est du fumier).
Ouvrez vos ombres votre giron vos lèvres :
le clou du spectacle est en bas dans la rue où,
preste comme une main sous les robes,
le vent réveille les beaux orages qui nous étaient promis.

(Guy Goffette)

Recueil: Un manteau de fourrures suivi de L’adieu aux lisières et de Tombeau du Capricorne
Editions: POINTS

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Dans la chambre fermée à clé (Lydia Padellec)

Posted by arbrealettres sur 31 janvier 2024



Illustration: Christian Schloe
    
Dans la chambre
fermée à clé
la nuit cogne
contre les meubles
tu ne l’entends pas
contre toi elle se glisse
dans les draps froids
elle se glisse et se faufile
entre tes cuisses
elle a la douceur de l’éclair
et le visage de l’oubli
tu voudrais la saisir
son odeur te poursuit
t’enveloppe d’insomnie
jusqu’à l’aube

(Lydia Padellec)

Découvert ici: http://laboucheaoreilles.wordpress.com/

Recueil: Cicatrices de l’Avant-jour
Editions: Al Manar

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Voluptueuse (Jean-Baptiste Besnard)

Posted by arbrealettres sur 13 décembre 2023



Voluptueuse

Tu touches à la plénitude
Tenant dans tes mains
Un bouquet de rêves
Que tu effeuilles comme des roses
Dans le jardin des espoirs

Dans la brume qui fleurit
Au flanc de la colline
Tu traces avec un ongle verni
La blessure de l’aurore
Sur le ventre nu
De l’adolescence du jour

Tu souris à la pierre qui médite
Sur le seuil de ta maison
Où la clarté achève
De démêler ta chevelure sombre
Qui tombe sur les épaules de la nuit

Tu agites les plis de ta robe
Sur tes jambes de marbre
Et le vent dévoile tes cuisses
Bien au-dessus des bas

(Jean-Baptiste Besnard)


Illustration: Guillaume Seignac

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Au nom du Père (Pierre Jean Jouve)

Posted by arbrealettres sur 4 décembre 2023




Au nom du Père

Nue adorée
Elle est nue
Elle est bien nue
Tout à fait nue
Elle est absolument nue
Nue comme la main
Comme le cœur
Enfant je rêvais d’avoir une femme nue

On voit ses épaules
On voit sa ceinture
Ses seins qui ne sont pas volumineux
Ses genoux ses cuisses
La dernière chose on la regarde trop pour la voir.

On a peur
On se sauve dans le coin noir pour te regarder

On voudrait dire Au nom du Père.

(Pierre Jean Jouve)

Illustration

 

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Prendre corps (Ghérasim Luca)

Posted by arbrealettres sur 20 novembre 2023



    

Illustration: Pascal Renoux

Prendre corps
(extrait)

je te flore
tu me faune

je te peau
je te porte
et te fenêtre
tu m’os
tu m’océan
tu m’audace
tu me météorite

je te clé d’or
je t’extraordinaire
tu me paroxysme

Tu me paroxysme
et me paradoxe
je te clavecin
tu me silencieusement
tu me miroir
je te montre

tu me mirage
tu m’oasis
tu m’oiseau
tu m’insecte
tu me cataracte

je te lune
tu me nuage
tu me marée haute
je te transparente
tu me pénombre
tu me translucide
tu me château vide
et me labyrinthe
tu me parallaxes
et me parabole
tu me debout
et couché
tu m’oblique

je t’équinoxe
je te poète
tu me danse
je te particulier
tu me perpendiculaire
et soupente

tu me visible
tu me silhouette
tu m’infiniment
tu m’indivisible
tu m’ironie

je te fragile
je t’ardente
je te phonétiquement
tu me hiéroglyphe
tu m’espace
tu me cascade
je te cascade
à mon tour mais toi

tu me fluide
tu m’étoile filante
tu me volcanique

nous nous pulvérisable
Nous nous scandaleusement
jour et nuit
nous nous aujourd’hui même
tu me tangente
je te concentrique

tu me soluble
tu m’insoluble
en m’asphyxiant
et me libératrice
tu me pulsatrice
pulsatrice
tu me vertige
tu m’extase
tu me passionnément
tu m’absolu

je t’absente

tu m’absurde

je te marine
je te chevelure
je te hanche

tu me hantes

je te poitrine
je buste ta poitrine
puis ton visage
je te corsage

tu m’odeur
tu me vertige
tu glisses

je te cuisse
je te caresse
je te frissonne

tu m’enjambes
tu m’insupportable

je t’amazone
je te gorge
je te ventre
je te jupe
je te jarretelle
je te peins
je te bach
pour clavecin
sein
et flûte
je te tremblante

tu m’as séduit
tu m’absorbes

je te dispute
je te risque
je te grimpe

tu me frôles
je te nage
mais toi

tu me tourbillonnes
tu m’effleures
tu me cerne
tu me chair cuir peau et morsure
tu me slip noir
tu me ballerine rouge
et quand tu ne haut talon pas mes sens
tu es crocodile
tu es phoque
tu es fascine
tu me couvres

et je te découvre
je t’invente
parfois
tu te livres

tu me lèvres humides
je te délivre je te délire
tu me délires et passionnes
je t’épaule je te vertèbre je te cheville
je te cils et pupilles
et si je n’omoplate pas avant mes poumons
même à distance tu m’aisselles
je te respire
jour et nuit je te respire
je te bouche
je te palais je te dent je te griffe
je te vulve je te paupières
je te haleine
je t’aine
je te sang je te cou
je te mollets je te certitude
je te joues je te veines

je te main
je te sueur
je te langue
je te nuque
je te navigue
je t’ombre je te corps je te fantôme
je te rétine dans mon souffle
tu t’iris

je t’écris
tu me penses

(Ghérasim Luca)

Recueil: L’AMOUR en Poésie
Editions: Folio Junior

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Lutin fripon (Bernard Bertrand)

Posted by arbrealettres sur 9 septembre 2023



Lutin fripon

Sous la robe de satin
S’est glissé le lutin.

Lentement s’est hissé
Sur le faîte charnu
D’une cuisse engourdie.
Doucement est rentré
Dans la forêt velue
D’une toison endormie.
Entre les lèvres roses
Dans le jardin secret
S’est glissé sans frapper,
A trouvé le trésor
Convoité, a pressé
Le bouton de Rose…

L’ingénue au-dehors
A frémi, a rêvé…

(Bernard Bertrand)

 

 

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Nuptial (Florentine Rey)

Posted by arbrealettres sur 24 août 2023




    
Nuptial

On rentre de soirée
On crée un corps-chimère avec:
les seins de F
les fesses de C
les cuisses d’A
et on lui fait l’amour
à deux

(Florentine Rey)

Recueil: L’ANNÉE-DU-PIED-DE-BICHE
Editions: Le Castor Astral

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Quand je vois tes belles cuisses blanches et fermes (Florentine Rey)

Posted by arbrealettres sur 23 août 2023




    
Quand je vois tes belles cuisses blanches et fermes
j’ai envie de mordre dedans

Il paraît que la chair humaine a le goût du poulet

Viens, je te paie les frites pour aller avec

(Florentine Rey)

Recueil: L’ANNÉE-DU-PIED-DE-BICHE
Editions: Le Castor Astral

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DEUX NUITS D’AMOUR (Nissim Ezekiel)

Posted by arbrealettres sur 28 janvier 2023




    
DEUX NUITS D’AMOUR

Après une nuit d’amour j’ai rêvé d’amour
sans me limiter au battage de cuisses et de seins
Qui portent mon poids ainsi qu’un esprit
Léger et libre. Je voulais être lié
À l’intérieur d’une liberté fraîche comme le nom de Dieu
À travers tous les siècles d’absence de Dieu.

Après une nuit d’amour je me suis tourné vers l’amour,
Les cuisses batteuses, les seins chantants,
Épuisé par l’acte, le désirant encore,
Dans une liberté vieille comme la terre
Et fraîche comme le nom de Dieu, à travers tous
Les siècles de beauté assombrie.

(Nissim Ezekiel) (1924-2004)

Recueil: Un feu au coeur du vent Trésor de la poésie indienne Des Védas au XXIème siècle
Traduction:
Editions: Gallimard

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