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Posts Tagged ‘lard’

La route communale (Robert Momeux)

Posted by arbrealettres sur 8 octobre 2021



La route communale

Le vieux cantonnier sur le bord de la route
Dont la moustache est grise
Et qui sait tant de choses
Il coupe son lard sur son pouce
Et mâche lentement son pain
En regardant rêveusement devant lui
Là-bas très loin la forêt
semble une bête qui dort
Et il vient dans le brouillard de l’été
Des visions qui ne sont pas
Tout à fait irréelles
Le vieux cantonnier referme son couteau
Dont la lame luit un moment
Et cela fait un bref éclair
Oui dure plus longtemps que son geste
Des oiseaux noirs s’envolent pesamment

(Robert Momeux)

Illustration: Paul Gavarni

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Chanson de la côte (Charles Cros)

Posted by arbrealettres sur 27 août 2020



 

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Chanson de la côte

Voici rentrer l’officier de marine,
Il a des favoris noirs.
Le vent de mer a gonflé sa narine,
Il dit combien de vaisseaux il a pris.

Voici rentrer l’officier de marine,
Il a deux beaux galons d’or.
Il veut surprendre, au logis, Mathurine
Sa femme, son plus précieux trésor.

Voici rentrer l’officier de marine,
Il veut revoir sa maison,
Son lard qui sèche et ses sacs de farine,
Ses pommiers lourds de pommes à foison.

Repars bien vite, officier de marine,
Tes pommiers on a coupé,
Tes sacs vidés, ton lard frit. Mathurine,
Avec des gens de la terre, t’a trompé.

Repars bien vite, officier de marine,
Pour un voyage bien long.
Tes favoris seront blancs, ta narine
Sera ridée au troisième galon.

(Charles Cros)

Illustration

 

 

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RONDEAU DE LA CHAIR TROP LOURDE (André Berry)

Posted by arbrealettres sur 19 août 2020



Illustration
    
RONDEAU DE LA CHAIR TROP LOURDE

Toujours ce poids qui t’attache à la terre,
Ce pied de plomb tirant sur le genou,
Et cette tête à ton tronc peu légère,
Mal emmanchée à ton douloureux cou;
Toujours le fiel dans cette bouche amère,
Des yeux piquants l’âcre larme qui sourd,
La cire épaisse au creux du tympan sourd;
Du gros cerveau que la tempe resserre
Toujours ce poids!

Toujours ces dents dont l’ivoire s’altère,
Ce crin hirsute en guerre avec le pou,
Toujours ce ventre enflant en demi-sphère
La pommaison de son grotesque chou.
A sa grinçante et peineuse charnière
Toujours ce bras qui pend débile et gourd,
Cette main moite où toute crasse accourt;
Du sang, de l’os, du muscle et du viscère
Toujours ce poids!

Nul réconfort au fond de ta misère
Que de presser un être encor plus mou,
Encor plus creux : tel lard en souricière,
Offrant l’appât de son funeste trou.
Lors sans bonnet sur ton occiput glabre,
Sans gant le carpe et le fémur sans bas,
En toute paix par les luneux sabbats
Tu branleras le tarse au bal macabre.
Courage encor!

(André Berry)

 

Recueil: Poèmes involontaires suivi du Petit Ecclésiaste
Traduction:
Editions: René Julliard

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Il est 5 heures, Paris s’éveille (Jacques Dutronc)

Posted by arbrealettres sur 14 mars 2020



Il est 5 heures, Paris s’éveille

Je suis l’dauphin d’la place Dauphine
Et la place Blanche a mauvaise mine
Les camions sont pleins de lait
Les balayeurs sont pleins d’balais

Il est cinq heures
Paris s’éveille
Paris s’éveille

Les travestis vont se raser
Les stripteaseuses sont rhabillées
Les traversins sont écrasés
Les amoureux sont fatigués

Il est cinq heures
Paris s’éveille
Paris s’éveille

Le café est dans les tasses
Les cafés nettoient leurs glaces
Et sur le boulevard Montparnasse
La gare n’est plus qu’une carcasse

Il est cinq heures
Paris s’éveille
Paris s’éveille

La tour Eiffel a froid aux pieds
L’Arc de Triomphe est ranimé
Et l’Obélisque est bien dressé
Entre la nuit et la journée

Il est cinq heures
Paris s’éveille
Paris s’éveille

Les banlieusards sont dans les gares
A la Villette on tranche le lard
Paris by night, regagne les cars
Les boulangers font des bâtards

Il est cinq heures
Paris s’éveille
Paris s’éveille

Les journaux sont imprimés
Les ouvriers sont déprimés
Les gens se lèvent, ils sont brimés
C’est l’heure où je vais me coucher

Il est cinq heures
Paris se lève
Il est cinq heures
Je n’ai pas sommeil

(Jacques Dutronc)


Illustration

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BRETAGNE (Jean-Baptiste Besnard)

Posted by arbrealettres sur 21 novembre 2018




BRETAGNE

Elle me rappelle un bout de saucisse
Fumée dans la cheminée
Un morceau de lard bien gras
La soupe épaisse du matin
Dans la marmite noire
Une poignée de châtaignes
Et des pommes cuites sous la cendre
Une bolée de cidre bien gouleyant
Des galettes de blé noir
Baignées de beurre salé
Des sardines frites sur le gril
Elle me rappelle la pluie ravinant le granit
Le vent hurlant sur la lande
Un calvaire à la croisée des chemins
Elle me rappelle les filles
Au corsage bien garni
Qu’on roulait dans la paille
Quand majestueuse
La batteuse ronronnait dans l’ombre du soir
Et que le travail de la terre
Exaltait la fraternité des hommes
Elle me rappelle des fermes blotties derrière des haies
Des chemins creux des embuscades d’antan
Des prés minuscules
Où broutaient des vaches placides
Au museau toujours humide
Elle me rappelle dans sa chaumière
Une fille qui te ressemblait
Derrière sa machine à coudre

(Jean-Baptiste Besnard)

Site de Jean-Baptiste

 

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Une maison perdue entre ciel et fumée (Bernard Dimey)

Posted by arbrealettres sur 8 juillet 2018


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Une maison perdue entre ciel et fumée
Dressée comme un menhir, face à l’hiver qui vient
Une porte de bois qu’on n’a jamais poussée
Depuis le Moyen Âge et la niche du chien
Un chien qui s’est enfui dans la forêt voisine
Depuis cent cinquante ans et qui hurle à la mort
Pour effrayer de loin la bête pharamine
A l’heure où les sorciers mettent leur nez dehors

Une maison qui sent le lard jaune et les pommes
Avec un grand hibou immobile au grenier
Aussi seul qu’un vieux roi qui ne reçoit personne
Trônant sur des bouquins qui perdent leur papier
Photographies de belles au bois décolorées
Par cent ans de silence et qui sourient toujours
Poitrines de soldats fraîchement décorées
Vieilles dames à chignon au regard de vautour

Une maison de pierre au flanc de la montagne
D’où l’on peut voir la mer en montant sur le toit
Où l’on pourrait se croire quelque part en Espagne
Juste entre la Touraine et la Vallée des Rois
Un jardin tout autour où des milliers d’abeilles
Butineraient des fleurs dont j’ignore le nom
Et qui viendraient le soir chanter à mes oreilles
Leurs secrets, sans souci que je comprenne ou non

Une maison sans rien qu’une lampe à pétrole
Qu’on pourrait voir de loin, à trois heures du matin
Quand l’homme que je suis, retournant à l’école
Aux lignes d’un missel apprendrait le latin
Voyageurs inconnus qui ne sauriez qu’en faire
Achetez-la pour moi, je m’installe demain
Si jamais vous trouvez n’importe où sur la Terre
La maison dont je viens de vous faire un dessin

(Bernard Dimey)

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La Famille Dupanard de Vitry-sur-Seine (Robert Desnos)

Posted by arbrealettres sur 20 février 2018



    

La Famille Dupanard
de Vitry-sur-Seine

1
La tribu Dupanard
Les parents les moutards
Habit’nt dans un gourbi
A Vitry
À Vitry-sur-Seine
Ah! quelle veine!

2
Le papa Dupanard
A jadis fait son lard
Au retour d’ Biribi
A Vitry
À Vitry-sur-Seine
Ah! quelle aubaine!

3
La maman Dupanard
S’est rangé’ sur le tard
E11′ buvait des anis
À Vitry
À Vitry-sur-Seine
Ah! quelle haleine!

4
Le p’tit Louis Dupanard
D’habitude couche au quart
Puis il fait son fourbi
A Vitry
À Vitry-sur-Seine
Ah! quell’ vilaine!

5
La Louison Dupanard
A des patt’s de canard
Des poils de ouistiti
A Vitry
À Vitry-sur-Seine
Ah! quell’ Sirène!

6
Au musé’ Dupuytren
Il y en a encor un
Il n’a pas fait son lit
À Vitry
À Vitry-sur-Seine
Ah! quelle peine!

7
Dans l’caveau familial
Ils iront c’est fatal
C’est la mort c’est la vi’
À Vitry
À Vitry-sur-Seine
Ah! quel domaine!

8
Puis on les oubliera
Tôt ou tard c’est comm’ ça!
À Pékin à Paris
A Vitry
A Vitry-sur-Seine
Faridondaine !

(Robert Desnos)

 

Recueil: Les Voix intérieures
Traduction:
Editions: L’Arganier

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INTERIEUR BRETON (Jean-Baptiste Besnard)

Posted by arbrealettres sur 16 octobre 2015



 

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INTERIEUR BRETON

Dans la cheminée aux parois
Couvertes d’épaisses couches de suie
Pend à la crémaillère
L’énorme marmite toute noire
Où cuit la soupe au lard
Et aux pommes de terre
Dont l’odeur chatouille le ciel gris
Et mes narines
Je « ramoucelle » les tisons (1)
Et avec le soufflet
Fais jaillir de la cendre
Des étoiles de feu.

LA FRESNAIS Juillet 1953

(1) Patois : rassemble

(Jean-Baptiste Besnard)

 Son site ici

 

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