Posts Tagged ‘(Luc Decaunes)’
Posted by arbrealettres sur 2 avril 2021
LA BOUCHE
Sur les bancs de l’école où tu n’as rien appris
C’est la chanson d’un avril endormi
Qui surprenait ta tête entrebâillée
Quand la neige des fleurs te remontait aux tempes
Comme un vol d’oiseaux fous dans l’azur du dimanche
C’est le chant d’un enfant que tu n’as pas connu
Ses mains avides ses pieds nus
Son mystère aux lèvres d’abeilles
Et ce grand rire clair qui lui mangeait les lèvres
Quand le soir rougeoyait aux vitres de la classe
Comme un poing renversé dans le sang des charrues
Sur les bancs de l’école avais-tu d’autres yeux
Pour menacer la vie aux griffes roses
Pour épier la fumée des images
Les beaux cahiers tachés du sang des livres
Et le monde à l’envers dans cette voix du maître
Qui faisait à ton coeur d’invisibles promesses
Avais-tu d’autres yeux pour convaincre ton rêve
Pour épouser les mots déconcertés
Au milieu des clameurs qui te brûlaient la tête
Quand tu ne savais plus ce que parler veut dire
A force d’oublier ta manière de vivre
Sur les bancs de l’école où tu n’as rien appris…
(Luc Decaunes)
Illustration: Robert Doisneau
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Posted by arbrealettres sur 27 juillet 2018
L’oiselier
Le marchand d’oiseaux
avait sa boutique au bord de l’eau.
J’entrai ayant en tête
les noms de deux ou trois sortes d’oiseaux que,
maladroitement, je tentai d’imiter,
ce qui fit rire le marchand
qui n’en reconnaissait aucun.
« Vous avez des lèvres faites pour imiter les merles »,
me dit-il en plissant les yeux à la chinoise ;
« c’est leur chant que vous auriez du choisir de préférence ».
Il me montra plusieurs modèles de cages,
dont une avait des barreaux
en forme de gouttes de pluie.
« Placez la cage ouverte, à la tombée du jour,
dans les branches basses d’un arbre, et sifflez.
Il se pourrait qu’au matin deux ou trois oiseaux
s’y furent laissé prendre ».
Il avait de beaux yeux dorés
comme certains rossignols d’Espagne.
« C’est une question d’habitude », me répétait-il doucement,
tout en fermant sur moi la porte de la plus grande de ces cages.
« Vous verrez, vous vous y ferez. »
(Luc Decaunes)
Illustration
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Posted by arbrealettres sur 26 juillet 2018
Frayeur
Il y avait un homme sous mon lit,
j’en étais sûr.
D’un doigt tremblant,
j’éteignis la lumière,
puis je m’allongeai sur le lit,
les yeux clos,
et me mis à gémir longuement
dans le creux de mes mains nouées,
comme dans une conque.
J’imaginais
combien il devait avoir peur,
dans l’ombre,
en entendant cette plainte lugubre
et incompréhensible.
A la fin,
il dut se sauver.
En effet, quand,
ayant rallumé la lampe,
j’osai regarder sous le lit,
il n’y était plus.
(Luc Decaunes)
Illustration
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Posted by arbrealettres sur 31 Mai 2018
Tantôt je suis la hache et tantôt je suis l’arbre
— ici, bourreau cruel, et là, tremblante victime;
mais toujours me remplit la même sombre haine.
Oh ! Dieu, n’être ni la hache ni l’arbre
— mais la blessure aux lèvres fraîches
et que partage un double amour égal !
(Luc Decaunes)
Illustration: Rockwell Kent
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Posted by arbrealettres sur 25 Mai 2018
MOUVEMENT
Ce qui ne peut revenir
descend le long des murailles des villes
avec des suintements glacés
ce sont les visages tristes
entrevus au coin d’une rue d’hiver
les prunelles sont cachées
on ne voit qu’une larme peinte
qui ne cesse de couler
Ce sont les paroles gardées
dans la gorge tiède au fond de la poitrine
ce sont les deux ou trois paroles
d’amour ou d’amitié
qui n’ont pas été dites
Et déjà tout va plus vite
la fenêtre s’est refermée
on n’entend plus que le silence de la pluie
et le monde
qui continue de chanceler.
(Luc Decaunes)
Illustration: Mitty Desques
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Posted by arbrealettres sur 17 Mai 2018
Le mystère de l’homme est entier il me cache
Le monstre convulsé gueule pleine de sang
Et les plaisirs du monstre et la fumée du sang
Tout ce feu qui pourrit entre des mains infâmes
Ce feu couleur d’espoir qu’on oblige à trahir
Ces larmes ces douleurs qui feront or en barre
Et la confusion terrible des regards
J’ouvre les yeux je vois
La misère est entière
Mais je suis à ma place au milieu de l’horreur
J’oublie le mal j’oublie l’erreur j’oublie la mort
Et comme un regard clair s’ouvrant dans un œil sombre
Le mystère de vie absorbe toute l’ombre.
(Luc Decaunes)
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Posted by arbrealettres sur 28 avril 2016
Je vous vois deux grâces sûres.
Votre regard est blessure,
Votre sourire est chanson.
Mais gardez que d’aventure
L’esprit, dont la force est pure,
Ne manque à votre blason.
Pour que vivre ne désole,
Il faut savoir être folle
Avec un brin de raison.
(Luc Decaunes)
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Posted by arbrealettres sur 28 avril 2016
Silence
L’oiseau qui chantait dans l’ombre,
C’est ma lampe sur la table,
C’est son reflet impalpable
Sur le plafond enfumé.
Son duvet chauffe ma joue,
Sa patte est sur mon épaule,
Et je n’ose plus bouger
De crainte qu’il ne s’envole …
Mais attends encore un peu,
Que j’abaisse ma paupière :
Cet oiseau, c’est une fille
Qui me regarde dormir,
Jusqu’à ce que sa bouche rose,
La berceuse de ses bras nus,
La douceur de sa parole
Et mon cœur ne soient plus qu’un.
(Luc Decaunes)
Illustration: Oleg Zhivetin
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Posted by arbrealettres sur 27 février 2016
Le tamanoir n’est pas bien vu
Refrain :
Non !
Je ne veux pas vous voir,
Monsieur le Tamanoir !
I
Dans notre ferme il est un chien
Qui sent mauvais, qui ne vaut rien ;
Chacun se sauve quand il vient.
Moi… je l’appelle mon copain.
II
Dans la montagne il est un loup
Avec des yeux comme des trous
Et le cœur dur comme caillou
… À qui j’ai donné rendez-vous.
III
Dans la rivière est un poisson
Qui ne mord pas les hameçons,
Seulement les petits garçons.
… On est amis comme cochons !
IV
Et dans mon lit sont des souris
Rongeant mes pieds à petits cris.
… Je leur apporte chaque nuit
Du bon fromage et du pain bis.
V
J’ai rencontré un éléphant,
Trompe terrible et grandes dents,
Qui fait peur à tous les enfants !
… Il a mon cœur, ce bon géant.
(Luc Decaunes)
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Posted by arbrealettres sur 17 février 2016
LA MAIN DU PAUVRE
Des boules d’argent
Au coin d’une maison ancienne
Le feu d’un buisson de roses pourries
Contre le veuvage d’un mur
Et derrière
Un enfant assis comme à l’école
Qui ne demande rien à personne.
Myosotis de l’an flamme d’herbe
Voici le souvenir
Dans sa robe fanée par le besoin d’amour
Voici le souvenir aux mains sales
Qui sent la terre et la pluie de septembre
La tête appuyée contre une maison villageoise
La bouche endormie et les yeux
Graves sous la mousse des rêves.
Tu fais un pas la maison est vide
Il pleut de l’argent à toutes les fenêtres
Les draps sont mis au lit du mort
La chambre propre
A l’odeur des midis d’août sous la glycine
Tous les amis sont là fidèles à leur parole
Les verres ont gardé l’empreinte de leurs bouches
C’est comme si la vie allait recommencer.
(Luc Decaunes)
Illustration: Daniel Siguier
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