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Posts Tagged ‘outre’

Vivre dans la mort vive (Edmond Jabès)

Posted by arbrealettres sur 27 juin 2024




    
Vivre dans la mort vive

Avant, il y a l’eau.
Après, il y a l’eau ;
durant, toujours durant.

— L’eau du lac ?
— L’eau de la rivière ?
— L’eau de la mer ?

Jamais l’eau sur l’eau.
Jamais l’eau pour l’eau ;
mais l’eau où il n’y a plus d’eau ;
mais l’eau dans la mémoire morte de l’eau.

Vivre dans la mort vive
entre le souvenir et l’oubli de l’eau,
entre
la soif et la soif.

L’eau entre :
Cérémonie.
L’eau s’installe
et coule :
Fertilité.
Toujours l’eau pour l’eau.
Toujours l’eau sur l’eau.
Abondance.

— Le désert fut ma terre.
Le désert est mon voyage,
mon errance.

Toujours entre deux horizons ;
entre horizon et
appels d’horizons.
Outre-frontière.

Le sable brille comme l’eau
dans la soif inextinguible.

Tourment que la nuit endort.
Nos pas font gicler la soif.
Absence.

— L’eau du lac ?
— L’eau de la rivière ?
— L’eau de la mer ?

Viendra, bientôt la pluie
pour laver l’âme des morts.

Laissez passer les ombres brûlées,
les matins aux arbres sacrifiés.
Fumée. Fumée.

(Edmond Jabès)

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HIER (Jean-Louis Rambour)

Posted by arbrealettres sur 5 décembre 2023



HIER

C’était hier
Comme un cheval
Qui brisa l’étrier,
Nous avons vu sa crinière
Refuser d’aller avec le vent,
Puis rapportée beaucoup plus tard
Par Ulysse, dans une outre.

Je n’ai pas de regrets.

(Jean-Louis Rambour)

 

 

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Attente incertaine de la pluie (Paul Nougé)

Posted by arbrealettres sur 27 septembre 2022



Attente incertaine de la pluie
puis l’outre noire épanche
ses larmes violentes.

Angle des toits
et les rues enfuies et tournantes
les rues, encore,
ville née d’un éclair et morte avec lui.

(Paul Nougé)

 

 

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Enfance (Anna Gréki)

Posted by arbrealettres sur 26 juin 2022




    
Enfance

Colère devant l’enfant sans pain
ni mère qui mange de la terre
dessine des hélicoptères reste
debout dans son sommeil

Colère devant l’enfant au ventre outré
araignée de la misère
qui joue avec la terre
sous un soleil touriste

Colère devant l’enfant courant devant la guerre
jusqu’aux frontières
depuis sept ans sans s’arrêter
s’il ne se couche dans la terre

Colère devant la terre entière
la terre qui est le pain qui
est la joie
la maison et la mort

(Anna Gréki)

Recueil: Guerre à la guerre
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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Source (Claude Roy)

Posted by arbrealettres sur 5 avril 2022



 


    
Source

À la chatte grise qui sans rien dire à personne
s’est trouvée un jour pleine, la très douce outre duveteuse
puis après soixante jours a mis bas en ronronnant
deux tigrés et deux noir et blanc
qui se collent à ses tétines roses
et boivent en fermant les yeux et pétrissant ses poils
la source de toute vie qui nourrit toutes les bouches
je demande protection…

(Claude Roy)

Recueil: le chat en cent poèmes
Traduction:
Editions: Omnibus

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UNE LONGUEUR D’AVANCE (André Welter)

Posted by arbrealettres sur 9 septembre 2021



Illustration
    
UNE LONGUEUR D’AVANCE
à Gérard Chaliand

La poésie se joue du temps.
Elle parle et sait de très loin.
Dans l’univers d’avant-naître.
Dans l’instant d’outre-venue.
Dans le réel plus vaste.

Elle est lueur de mise en abîme.
Feu souverain hors des flammes.
Trace qui préfigure.
Elle est nuit très pure.
Aube fraîche.
Grand midi.

Rythme et visée
de toute vie qui se risque.
La poésie est sursaut d’adolescence à jamais.
Désir sans frein.

Vitesse.
Vertige.
Frénésie de départ.

Comme un galop dans le sang.
Comme un soleil à la bouche.
Et l’infini qui se donne en partage…

[…]

(André Welter)

 

Recueil: La vie en dansant – Au cabaret de l’éphémère – Avec un peu plus de ciel
Traduction:
Editions: Gallimard

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OUTRE (Philippe Soupault)

Posted by arbrealettres sur 27 février 2020



Illustration: Gilbert Garcin
    
OUTRE

Seul le long de ce chemin
qui n’a ni commencement ni fin
ce n’est plus la peine de sourire
et surtout de rire aux éclats

comme ce tigre qui n’ose ni mordre ni caresser
Seul tout seul
comme un grand comme un petit
à la poursuite des nuages

et de cette nuit qui n’a ni commencement ni fin
Tout seul pour l’abandon quotidien
et la lutte contre les rêves
et les cauchemars du jour et de la nuit
qu’on invente pour mieux souffrir
alors qu’il faudrait pouvoir oublier
tout oublier tout sauf la joie

Seul contre l’injustice
l’ennui et tout le reste
la vérité l’heure du réveil
alors qu’il est temps enfin
de savoir et de connaître
le jour qui déjà se lève

(Philippe Soupault)

 

Recueil: Poèmes et poésies
Traduction:
Editions: Grasset

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Cherchant sa route (Jacqueline Saint-Jean)

Posted by arbrealettres sur 17 juin 2017



Cherchant sa route dans la table des matières
buvant à même l’outre des mémoires
Phaïstos Phaïstos où se perdent les terres
chasse à courre des heures où tournent les veneurs
parfois le voyageur rêvait qu’il entendait la mer
Au fond de l’ombre alourdi de fatigue
posant sa tête sur le mufle humide de la nuit
glissant dans les pelages du sommeil
il retrouve le cours de la rivière enfantine
le soleil et ses vocalises
les herbes les hespérides
le secret d’un verger les paroles flottantes
pollen perdu qui vous entête bien plus tard

(Jacqueline Saint-Jean)


Illustration

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La lune (Jean Moréas)

Posted by arbrealettres sur 5 décembre 2015



lune tulipier [800x600]

La lune

La lune se leva bizarrement cornue
Parmi les tulipiers au bout de l’avenue,
Ce soir. ô la villa proprette et ses blancs murs,
Et son balcon de bois chargé de raisins mûrs.

O la brise d’été qu’embaumaient les ramures
En fleurs, qu’embaumaient les pins et la haie aux mûres
L’air de violon qui s’est plaint soudain : connu,
Air connu, très doux et comme ressouvenu.

Le vin que nous buvions sentait la peau de l’outre.
Je vous pris les deux mains, mais vous passâtes outre,
Ce soir, sur le balcon où grimpaient des muscats.
Pire que bonne vous fûtes et je fus sage.
Vous aviez un bouquet de cassie au corsage,
Et votre cou cerclé d’un collier de ducats.

(Jean Moréas)

Illustration

 

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