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Posts Tagged ‘cigare’

Si vaste d’être seul (Tristan Cabral)

Posted by arbrealettres sur 4 Mai 2024



Fortino Samano
    
Si vaste d’être seul
Pour toi Fortino

Fortino Samano
en ce 12 février 1917
les mains dans les poches
un bout de cigare à la bouche
le chapeau un peu baissé sur les yeux
regarde son peloton d’exécution;
il jette sur ceux qui vont tirer
un dédain souverain;
on dirait qu’il n’y croit pas…
on dirait qu’il dit « alors vous tirez ou non? »
derrière lui
sur le mur
quelqu’un a écrit
« da me la muerte que me falta »
Fortino ! je t’envie!

Mexique, 12 février 1917

(Tristan Cabral)

Recueil: Si vaste d’être seul
Editions: Le Cherche Midi

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La chambre (Kate Chopin)

Posted by arbrealettres sur 7 février 2024




    
La chambre

Merveilleuse histoire à conter, ma foi:
Belle et frêle, ardente, une femme choit.
C’était peut-être faux, peut-être vrai:
Les faits à tous deux nous indifféraient.
Mais le vin, la fumée de ton cigare
Transformaient le tout en plaisante histoire
Plus qu’en sujet d’opprobre ou de péché:
À la femme déchue que reprocher?
Rien, tant qu’il n’y avait à découvrir
Que sa beauté, sa fougue et son plaisir.
Mais tu partis, on baissa les lumières,
La brise entra, et la pâleur lunaire:
Et je perçus une voix féminine,
Impuissante plainte au mutisme incline.
Montée du tréfonds d’infinies ténèbres
Elle emplit la pièce d’une angoisse funèbre.
Morte, cette femme ne pouvait nier:
Les femmes aux plaintes sont destinées.
Aussi me fallut-il la nuit durant,
Moi l’étrangère, écouter ce tourment…
Les femmes aux plaintes sont destinées,
Les hommes à écouter… et soupirer…

***

The Haunted Chamber

Of course ’twas an excellent story to tell
Of a fair, frail, passionate woman who fell.
It may have been false, it may have been true.
That was nothing to me—it was less to you.
But with bottle between us, and clouds of smoke
From your last cigar, ’twas more of a joke
Than a matter of sin or a matter of shame
That a woman had fallen, and nothing to blame
So far as you or I could discover,
But her beauty, her blood and an ardent lover.
But when you were gone and the lights were low
And the breeze came in with the moon’s pale glow
The far, faint voice of a woman, I heard,
‘Twas but a wail, and it spoke no word.
It rose from the depths of some infinite gloom
And its tremulous anguish filled the room.
Yet the woman was dead and could not deny,
But women forever will whine and cry.
So now I must listen the whole night through
To the torment with which I had nothing to do—
But women forever will whine and cry
And men forever must listen—and sigh—

(Kate Chopin)

Recueil: Sous le ciel de l’été
Traduction: Gérard Gâcon
Editions: Université de Saint-Étienne

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Rescousse (Tristan Corbière)

Posted by arbrealettres sur 2 août 2019



 

David Alfaro Siqueiros hart-crane-1931

Rescousse

Si ma guitare
Que je répare,
Trois fois barbare :
Kriss indien,

Cric de supplice,
Bois de justice,
Boîte à malice,
Ne fait pas bien…

Si ma voix pire
Ne peut te dire
Mon doux martyre…
– Métier de chien ! –

Si mon cigare,
Viatique et phare,
Point ne t’égare ;
– Feu de brûler…

Si ma menace,
Trombe qui passe,
Manque de grâce;
– Muet de hurler…

Si de mon âme
La mer en flamme
N’a pas de lame ;
– Cuit de geler…

Vais m’en aller !

(Tristan Corbière)

Illustration: David Alfaro Siqueiros

 

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Les yeux ouverts (Anna Akhmatova)

Posted by arbrealettres sur 23 janvier 2019




Les yeux ouverts

Il n’y a plus de temps, il n’y a plus d’espace,
J’ai tout examiné à travers la nuit blanche:
Et le narcisse sur ta table dans le vase,
Et la fumée bleue du cigare,
Et ce miroir, où, comme dans une eau pure,
Tu pourrais en ce moment te refléter.
Il n’y a plus de temps, il n’y a plus d’espace,
Et même toi, tu ne peux pas m’aider.

(Anna Akhmatova)

Illustration: Marina Podgaevskaya

 

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Tu m’apprenais à voir (Balbino)

Posted by arbrealettres sur 22 août 2018


 


 

placard

Tu m’apprenais à voir

Tu m’apprenais à voir,
à travers les murs
par-delà l’unique pièce
de mon royaume.
L’odeur du cigare dans ta barbe,
cette nuit
j’en ai rêvé.
Les placards de ta chambre,
regorgeaient de mystères
les plans d’une banque ?
Une arme cachée ?
Un sabre ancien ?
… seulement
l’odeur du papier.
Quelques toiles,
qui tordaient cet univers d’attente
cache tendre
vers un autre possible.

(Balbino)

 

 

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CALENDRIER (Philippe Soupault)

Posted by arbrealettres sur 3 août 2018



 

CALENDRIER

La fumée des cigares
la chaleur des maisons
la lumière des océans et des rivières
sont nos chers compagnons
Et pourtant notre ingratitude est sans bornes
comme nos regards comme notre voix
Nous passons avec notre rire
pour mieux voir les bonheurs des dames
et les paradis des enfants
Nous ne savons pas qu’il existe quelque part
une île
un désert
pour les petits
Aujourd’hui et demain
comme deux mains croisées
supportent malgré tout la chaleur des années
Nous pouvons courir
et nous pouvons mourir
la pluie sera pour nous la chère bienvenue
son visage sanglant et ses mains croisées
supportent elles aussi la chaleur des années

(Philippe Soupault)

Illustration

 

 

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Pourquoi écrire ? (Petr Král)

Posted by arbrealettres sur 22 juillet 2018




    
Pourquoi écrire ?
Pour la trêve du moment
où on se relit,
seul avec un cigare, un café
et le temps qui passe.

(Petr Král)

 

Recueil: Cahiers de Paris
Traduction:
Editions: Flammarion

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Une Femme Avec Toi (Nicole Croisille)

Posted by arbrealettres sur 31 Mai 2018




Nicole Croisille
    
Une Femme Avec Toi

Je fréquentais alors des hommes un peu bizarres
Aussi légers que la cendre de leurs cigares
Ils donnaient des soirées au château de Versailles
Ce n’étaient que des châteaux de paille
Et je perdais mon temps dans ce désert doré
J’étais seule quand je t’ai rencontré
Les autres s’enterraient, toi tu étais vivant
Tu chantais comme chante un enfant
Tu étais gai comme un italien
Quand il sait qu’il aura de l’amour et du vin
Et enfin pour la première fois
Je me suis enfin sentie:
Femme, femme, une femme avec toi
Femme, femme, une femme avec toi
Tu ressemblais un peu à cet air d’avant
Où galopaient des chevaux tous blancs
Ton visage était grave et ton sourire clair
Je marchais tout droit vers ta lumière
Aujourd’hui quoi qu’on fasse
Nous faisons l’amour
Près de toi le temps parait si court
Parce que tu es un homme et que tu es gentil
Et tu sais rendre belle nos vies
Toi tu es gai comme un italien
Quand il sait qu’il aura de l’amour et du vin
C’est toujours comme la première fois
Quand je suis enfin devenue:
Femme, femme, une femme avec toi
Femme, oh! femme, une femme avec toi
Femme, femme, une femme avec toi.

(Nicole Croisille)

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A une petite fille de chez nous (Jean Villard–Gilles)

Posted by arbrealettres sur 21 Mai 2018




    

 
A une petite fille de chez nous

Jour de Noël, jour d’espérance
On est là quatre cents gaillards
Officiers, soldats en silence
Perdus en Suisse quelque part
On pense en ce jour de décembre
A des visages familiers
Près du feu qui réchauffe nos membres
Hier, on a mis nos gros souliers
Cette nuit, par la cheminée
Le père Noël qu’est bon enfant
Avec ses voeux de bonne année
Nous a fait un beau p’tit présent

Y avait des cigares
Pour les torailleurs
Et pour le Cathare
Un mouchoir d’couleurs
Chocolats en barres
Pour les amateurs
Et faveur plus rare
Mon Dieu, quel bonheur !
Y avait ô délire
Plaisir sans égal
Avec son sourire
Vraiment idéal
Cela va sans dire
Mais c’était fatal
Pour nous remonter l’moral
La photo du général

Les quatre cents beaux militaires
Contemplaient d’un oeil ahuri
Le joyeux cadeau que l’arrière
Offrait à ses soldats chéris
Mais tout à coup, parmi ces choses
Voilà qu’on découvre en chemin
Comme fleurirait une rose
Une lettre écrite à la main
Ce sont, ravissante surprise
Les enfants de notre pays
Qui, d’un coeur tout simple nous disent :
« Bonjour, soldats on est amis ! »

Quelque chose nous serre
Une espèce d’émoi
Y en a qui sont pères
Y en a qui l’sont pas
Mais tendre mystère
Ce soir-là y a pas
Z’avions tous, mes frères
Des coeurs de papas
Bien que sous les armes
Et d’un dur métal
On essuie une larme
Ca fait un peu mal
Mais c’est plein de charme
Et pour le moral
Presque aussi haut – c’est fatal !
Qu’la photo du général

C’est pourtant bien vrai, sans histoires
Pour nous, soldats, Noël trente-neuf
Ce sera dans toutes nos mémoires
Ce salut d’un p’tit coeur tout neuf
Le mien s’appelle Marie-Thérèse
De Saint-Jean au val d’Annivier
Un joli nom, ne vous déplaise
Pour le livre de l’amitié
C’est pourquoi, ce soir, de Lausanne
Je lance au vent cette chanson
Pour ma petite Valaisanne
En lui demandant sans façons :

Pour fleurir ma vie
En blanc et en noir
Ma petite Marie
Je voudrais avoir
Ta photographie
Voilà mon espoir
Promis ma chérie
Envoie-la ce soir
En ce temps d’misère
Ce siècle brutal
Où le diable en guerre
Mène triste bal
Ta jeunesse claire
Ne fera pas mal
Au petit front virginal
A côté du général

(Jean Villard–Gilles)

 

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Avez-vous vu Lambert? (Robert Desnos)

Posted by arbrealettres sur 17 février 2018




    
Avez-vous vu Lambert?

1
Je vais vous chanter
Un fait historique
Qui s’est déroulé
Avant l’avèn’ment de la République:
Au bois d’ Vincenn’ monsieur Lambert
Madame Lambert, les p’tits Lambert
Par un matin d’été superbe
Allèrent déjeuner sur l’herbe.
Monsieur Lambert sans crier gare
S’éloigna pour aller acheter un cigare.

Refrain 1
Madam’ Lambert affolée
Criait d’allée en allée
Lambert! Lambert!
Avez-vous vu Lambert ?
Les p’tits Lambert tout en larmes
Faisaient aussi du vacarme
Lambert! Lambert!
Avez-vous vu Lambert?
Les passants que ça fit rire
À leur tour se mir’nt à dire
Lambert! Lambert!
Avez-vous Lambert ?
Avez-vous Lambert?
Lambert ?

2
Rentrée dans Paris
La foule joyeuse
Continua ses cris
D’ la porte Dorée à la rue Vineuse
Faubourg Saint-Denis, Rue d’ Rivoli
Rue Rossini, rue Cassini
Place du Trôn’, quai de Grenelle
Et Boulevard Bonne Nouvelle
Chacun criait à perdre haleine
Comm’ des fous, comm’ des sourds, des putois, des baleines.

Refrain 2
Napoléon trois s’inquiète
La police est en alerte
Lambert! Lambert!
Arrêtez donc Lambert!
Le tocsin, la générale
Composent une chorale
Lambert! Lambert!
Avez-vous vu Lambert ?
Méfiez-vous il est terrible
Il pourrait vous prendr’ pour cible
Lambert! Lambert!
Avez-vous vu Lambert ?
Arrêtez donc Lambert!
Lambert!

3
Je connais des gens
Dont la renommée
Est comme un volcan
Vomissant des lay’s et de la fumée
Ils pouss’nt des cris, ils, font du bruit
On est surpris, on perd l’esprit
On court à gauche, on court à droite
Et le pantin sort de sa boîte
Quoi c’était ça le monstre horrible
Le dragon, le costaud, le méchant, le terrible.

Refrain 3
Et pendant ce temps les heures
Sont rentrées dans leur demeure
Lambert! Lambert!
Avez-vous vu Lambert ?
C’est le vent qui le remporte
Le destin ouvre sa porte
Lambert! Lambert!
Viens te coucher Lambert
Et les enfants des écoles
S’amusent sur ces paroles
Lambert! Lambert!
Avez-vous vu Lambert ?
Avez-vous vu Lambert ?
Lambert!

(Robert Desnos)

 

Recueil: Les Voix intérieures
Traduction:
Editions: L’Arganier

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