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Poésie

Posts Tagged ‘enfoncer’

Un jour viendra (Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 30 mars 2024




    

Un jour viendra
où il n’y aura plus à pousser les vitres pour qu’elles tombent,
ni à enfoncer les clous pour qu’ils soutiennent,
ni à marcher sur les pierres pour qu’elles se taisent,
ni à boire le visage des femmes pour qu’elles sourient

Commencera la grande union.
Dieu lui-même apprendra à parler
et l’air et la lumière
entreront dans son antre de craintives éternités

Il n’y aura plus alors de différence
entre tes yeux et ton ventre,
ni entre mes paroles et ma voix.
Les pierres seront comme tes seins
et je ferai mes vers avec les mains
pour que nul ne puisse désormais se méprendre.

(Roberto Juarroz)

Recueil: Poésie verticale
Traduction: de l’espagnol par Roger Munier
Editions: Gallimard

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LA CHAMADE (Laurent Albarracin)

Posted by arbrealettres sur 18 mars 2024




    
LA CHAMADE

à Jacques T.

J’ai vécu mon enfance auprès d’un champ de courses,
Un endroit où le son arrive avant l’image,
Où, précédant l’éclair, un grondement d’orage
Semble avoir dans le noir la source de sa source.

On pendait notre enfance alentour de l’arène,
Le coeur au bord des yeux et les doigts au grillage,
Attendant le galop qu’annonçait le virage,
Percevant dans la cage une rumeur lointaine.

Nos coeurs et nos genoux peints au mercurochrome
Battaient à l’unisson des sabots et des coups
Enfonçant dans la chair l’hypodermique clou

Qui nous rivait au sol au coin de l’hippodrome.
Chaque fois que j’entends
le galop qui martèle,

(Laurent Albarracin)

Recueil: Contrebande
Editions: Le corridor bleu

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Autobiographie de Kerrokké (Shinpei Kusano)

Posted by arbrealettres sur 24 juillet 2023


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Dans un faubourg de Bologne
Je suis né au milieu des étangs de nénuphars.
Les grèbes, sens dessus dessous, qui cognaient le ciel,
Moi par goût des choses à faire peur, je restais à les regarder.
Mon nom est Kerokké, mais
C’est moi qui me suis donné ce nom.
Un jour je fus pris dans un filet.
Je me rendis de cette façon à l’université.
C’est dans le laboratoire de Galvani.
Peut-être un étudiant ou je ne sais qui
Tout en chantant du nez une chanson de marin, passait.
Un jour de 1780, l’après-midi,
Un bistouri s’enfonça dans mon ventre.
C’est ainsi que pour la première fois au monde naquit
le concept de courant électrique.
Moi je mourus.
Je ne suis plus nulle part, moi.
Il était beau le ciel d’Italie.

(Shinpei Kusano)

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Le désir m’embrase (Maram al-Masri)

Posted by arbrealettres sur 31 Mai 2023



Illustration: Gustav Klimt  
    
Le désir m’embrase
et mes yeux s’illuminent
j’enfonce la morale dans le premier tiroir
réincarnée en diable
je bande les yeux de mes anges
pour
un baiser

(Maram al-Masri)

Recueil: Cerise rouge sur carrelage blanc
Editions: Bruno Doucey

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Derrière la peau de pierre (Bernard Noël)

Posted by arbrealettres sur 24 avril 2023




    
Derrière la peau de pierre
on a une pensée pour l’invisible
et comme un coin
on l’enfonce dans le présent.

(Bernard Noël)

Recueil: Le reste du voyage et autres poèmes

Editions: Points

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Rêves déchus fleurs coupées (Mireille Fargier-Caruso)

Posted by arbrealettres sur 16 février 2023



Illustration
    
Rêves déchus fleurs coupées
langue morte dans le deuil des chambres

plus d’incendie de gares départs fougueux
plus d’après

dans notre dos l’invisible grignote
sans trace d’infini

à peine un bruit de pas enfoncés dans le sable
en sourdine une mélodie
vestige des notes d’avant

(Mireille Fargier-Caruso)

Recueil: Comme une promesse abandonnée
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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SUR L’AIR D’EN ENFONÇANT LES LIGNES ENNEMIES (Yàn Shu)

Posted by arbrealettres sur 21 janvier 2023



Illustration: Dai Dunbang
    
SUR L’AIR D’EN ENFONÇANT LES LIGNES ENNEMIES

Quand les hirondelles reviennent, c’est Sacrifice Nouveau,
Quand les fleurs de poiriers sont tombées, arrive Pure Lumière.
Au dessus du bassin, la mousse verte – trois ou quatre plaques,
Tout au fond du feuillage, un loriot jaune – un ou deux cris.
Aux jours qui s’allongent, le duvet volant s’allège.

Avec son charmant sourire, ma voisine du côté est me tient compagnie ;
Effeuillant les mûriers dans la sente, elle vient à ma rencontre :
Elle s’étonnait la nuit dernière d’un rêve de printemps étrange et beau,
Or voici qu’elle a été la meilleure au jeu des herbes ce matin ;
Son sourire illumine ses deux joues.

***

(Yàn Shu) (991-1055)

Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise

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9 HEURES EN MARS (Guy Goffette)

Posted by arbrealettres sur 29 octobre 2022



Illustration
    
9 HEURES EN MARS

Mais revoici la cuisine et son train
d’ombres cassées par la fine lumière
de mars. Le chat dort sur le frigo,
l’âme enfoncée jusqu’aux yeux

dans le gant du soleil. Dehors
le disque de la terre entre les pépiements
semble s’être arrêté : il est 9 heures.
Les prés sèchent leurs plaies

sous le drap bleu. Longue est l’attente,
et de quoi ? si rien ne manque apparemment,
pas le moindre rayon à la barre
des collines, pour maintenir à flot

ton frêle esquif dans le courant des jours.

(Guy Goffette)

 

Recueil: Le pêcheur d’eau
Traduction:
Editions: Gallimard

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Avant, j’en voulais un (Margaret Atwood)

Posted by arbrealettres sur 19 août 2022



Illustration
    
Avant, j’en voulais un :
un délicat coussin de soie rouge
suspendu à un ruban de sang,
où on enfonce des épingles.
Mais j’ai changé d’avis.
Avoir un coeur fait mal.

(Margaret Atwood)

Recueil:Poèmes tardifs
Traduction: Christine Évain & Bruno Doucey
Editions: Pavillons

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Ce n’est plus cette lourdeur (Paul Celan)

Posted by arbrealettres sur 31 décembre 2021



Illustration: Laurent Fièvre
    
Ce n’est plus
cette
lourdeur enfoncée
avec toi parfois dans
l’heure. C’est une lourdeur
autre.
C’est le poids qui retient le vide
qui avec
toi s’en irait.
Ça n’a, comme toi, pas de nom. Peut-être
êtes-vous la même chose. Un jour peut-être
toi aussi, tu m’appelleras
ainsi.
RESTER LÀ, TENIR, dans l’ombre de la cicatrice en l’air.
Rester là, tenir pour-personne-et-pour-rien . Non-connu de quiconque,
pour toi
seul.
Avec tout ce qui en cela possède de l’espace, et même sans la
parole.

(Paul Celan)

Recueil: Choix de poèmes
Traduction: Jean-Pierre Lefebvre
Editions: Gallimard

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