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Poésie

Posts Tagged ‘irruption’

Être fidèle au monde (André Velter)

Posted by arbrealettres sur 21 octobre 2023




    
Être fidèle au monde
n’est pas le souci premier,
la félicité tient d’abord à ce qui perpétue
l’avancée verticale, le sursaut hors d’atteinte.

Par la lumière et le souffle
c’est une autre irruption dans le paysage,
une autre déclinaison du voyage
où tout se voit et s’entend,
où tout se scande, se pense et se calligraphie.

S’invente alors le passage mélodique
d’un ici sublimé, transcendant,
qui met le ciel en tête
avec au refrain tous les mots de la terre.

(André Velter)

Recueil: Trafiquer dans l’infini
Editions: Gallimard

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PAIX DE L’ÉPOUSE (Rina Lasnier)

Posted by arbrealettres sur 20 octobre 2021



PAIX DE L’ÉPOUSE

Paix à ton épaule lustrée de jeune loutre
paix à ma main simultanée te couvrant d’oiseaux
et tes cheveux sont l’eau heurtée de mousse…

Paix à la soif sèche des lèvres par l’irruption de l’esprit
à travers l’aise et l’amour éveillant un dieu naissant ;
paix à nos ombres longues de leur seule fraîcheur
comme l’obscurité tendre née de la neige.

Tu es en moi le puits creusé jour à jour,
dors, remontée en moi comme les anneaux de l’eau…

(Rina Lasnier)

Illustration: Anne-Marie Zilberman

 

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Étrangers… (Domenico Brancale)

Posted by arbrealettres sur 20 janvier 2021



    

Étrangers…

Étrangers. Les jours ne cadrent pas. Pour
différentes raisons. Nous vivons derrière
les paupières d’une personne. Dehors
résiste. Obstinément. Dehors limite.
Derrière nous vivons.

Lumière. Dedans.
Irruption jusque là où l’emporte le noir.
«Parce que incandescente. Parce que nul ne lui résisterait ».
Dehors est un périmètre évanoui.
Les corps vaquent. La main aux aguets.

(Domenico Brancale)

Traduit de l’italien par Jean-Charles Vegliante.

 

Recueil: Voix Vives de méditerranée en méditerranée Anthologie Sète 2019
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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Je reste au-dessus de l’herbe (André du Bouchet)

Posted by arbrealettres sur 7 janvier 2021


sauterelle_brin_herbe_1

Je reste au-dessus de l’herbe,
dans l’air aveuglant.
Le sol fait sans cesse irruption vers nous,
sans que je m’éloigne du jour

(André du Bouchet)

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ÉLOGE DU SOUFFLEUR (Zéno Bianu)

Posted by arbrealettres sur 30 novembre 2020



 

mer

ÉLOGE DU SOUFFLEUR
(pour John Coltrane)

à Mimi Lorenzini

Je pars d’un point
et je vais le plus loin possible
au plus loin des possibles
je prends une note
et je la transforme
en colonne sans fin
sans relâche et sans fin
je ménage des ouvertures
dans la peau du monde
des irruptions de jardins clos
des baies vitrées
dans la chair même du son
je joue les notes comme je les vois
je n’invente rien
je fais apparaître
les désordres fluides du vivant
les marbres tremblés du temps
jusqu’à resplendir
jusqu’à m’accorder
au mouvement perpétuel de la lumière
oui
j’attends que la lumière
se pose sur mes notes
comme un amant

comme un aimant
comme l’aimant des apparitions
là où tout palpite
au fond de l’infiniment sensible
où l’identité n’est
plus qu’un vacillement
pourquoi moi pourquoi toi
toutes les aubes viennent à ma bouche
toutes les aubes
respectent l’arc-en-ciel
je suis un argonaute du souffle

Je pars d’un point
et je vais toujours plus loin
j’avance le long de ma ligne de coeur
un peu Orphée un peu Faust
je passe à travers tous les cercles
naissances morts renaissances
s’en vont s’en reviennent
à chaque seconde de chaque solo
je traverse mille frontières
pour une liberté enfin déliée
pour un surcroît de bienveillance
j’absorbe tout
au velours de la vraie vie
au velours de la vraie nuit
j’accepte le chaos
dès lors qu’il apaise
dès lors qu’il irise
dès lors qu’il flamboie
je n’aime pas la redite

mais l’obsession
je métamorphose
je tourbillon
je vortex
je voudrais me réveiller
dans chacun de vos rêves
je voudrais vous faire entendre
les grands territoires de la solitude
chacune de mes notes met un mot
sur votre mélancolie
un mot un seul
un mot d’orage éblouissant
un mot minéral
un mot volcanique
en plein coeur du monde et
out of this world
écoutez-moi
j’ouvre un espace
j’ouvre l’espace même
mes trilles ont le pouvoir
d’effacer tous les maux
je suis un ange viril

Je pars d’un point
mais quel est ce je
qui part d’un point
mon je n’est pas un je
c’est un vrai jeu un grand jeu
un je qui joue qui noue et dénoue
un je-nous un je-monde
un je immensément collectif
inconditionnel
un je qui n’est que musique
je suis une pensée qui chante
inexorable
une pensée sonore
qui ne cesse de s’élever
une pensée qui sature votre coeur
d’une douceur rugueuse
une pensée qui bruit à chaque instant
n’attendez pas de mourir
pour écouter vraiment vos étoiles internes
n’attendez pas de mourir
pour donner naissance
au meilleur de vous-même
mille roses ouvertes dans le vide
a love supreme
un amour à jamais suprême
pour parler de la constellation des âmes
reconnaissance
accomplissement
voilà tout le baume de ma véhémence
je suis un descendant de ces hauteurs
où pense la lumière
tout n’était que son
et j’étais au milieu du son
jamais je n’ai joué
sans tout donner
jamais je n’ai joué sans vous aimer
je suis le sourire du déluge

(Zéno Bianu)

Illustration

 

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La grenouille (Eugenio Montale)

Posted by arbrealettres sur 12 mars 2020



La grenouille, qui se reprend à essayer ses cordes
depuis l’étang qui noie
joncs et nuages, le bruissement des caroubiers
entrecroisés où vient éteindre ses torches
un soleil sans chaleur, sur les fleurs l’indolent
bourdonnement des coléoptères qui sucent
encor des sèves, d’ultimes sons, l’avare
vie des champs. Dans un souffle
l’heure s’épuise : un ciel d’ardoise
se prépare à l’irruption des chevaux
décharnés, à leurs sabots pleins d’étincelles.

***

La rana, prima a ritentar la corda
dallo stagno che affossa
giunchi e nubi, stormire dei carrubi
conserti dove spenge le sue fiaccole
un sole senza caldo, tardo ai fiori
ronzio di coleotteri che suggono
ancora linfe, ultimi suoni, avara
vita della campagna. Con un soffio
l’ora s’estingue : un cielo di lavagna
si prepara a un irrompere di scarni
cavalli, alle scintille degli zoccoli.

(Eugenio Montale)

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L’impossibilité de vivre (Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 16 mars 2019



Illustration: Olivier de Sagazan 
    
L’impossibilité de vivre
se glisse en nous au début
comme un caillou dans la chaussure :
on le retire et on l’oublie.

Ensuite arrive une pierre plus grande
qui n’est plus déjà dans la chaussure :
le premier ou le dernier malentendu
se mêle à l’amour ou au doute.

Viennent après d’autres échecs :
la perte d’un mot,
la sauvage irruption d’une douleur,
une mort sur le chemin,
la chute d’une feuille sur notre solitude,
la vieillesse qui s’annonce
comme un soir écorché par la pluie.

Nous émergeons de tout
avec un tremblement qui dissout la confiance.
La lune pâlit,
nous commençons à nous méfier du soleil.

Et un jour quelconque,
dans la prairie ou le ciment,
dans la dissonance qui brise une chanson
ou une rotation inattendue au lit,
quelque chose nous blesse comme un fouet:
vivre c’est dévivre.
La promesse est rompue.

Qui a fait la promesse ?
Et qui peut la croire ?
Nous ne le saurons plus.
La promesse était autre.

Vivre est impossible.
Mais à l’intérieur du vivre il y a autre chose
que nous ne comprendrons jamais
et qui pourtant saute et joue
comme un dieu étonné
qui ne s’accordera jamais
avec les scandales successifs
de vivre sans vivre
et de mourir sans vivre.

***

La imposibilidad de vivir
se nos infiltra al principio
como una pequeña piedra en el zapato:
uno la quita y se olvida.

Luego llega un piedra mas grande,
y ya no en el zapato:
el primero o el último malentendido
se mezcla con el amor o la duda.

Vienen después otros fracasos:
la pérdida de un palabra,
la salvaje irrupción de un dolor,
una muerte en el camino,
la caída de una boja sobre nuestra soledad,
la vejez que se anuncia
como un tarde desollada por la lluvia.

Emergemos de todo,
con un temblor que disuelve la confianza.
La luna empalidece,
comenzamos a desconfiar del sol.

Y un día cualquiera,
en la pradera o el cemento,
en la disonancia que rompe una canción
o en una vuelta sorpresiva en el lecho,
algo nos hiere como un látigo:
vivir es desvivir.
La promesa está rota.

¿Quién hizo la promesa?
¿ Y quién puede creerla?
Ya nunca lo sabremos.
La promesa era otra.

Vivir es imposible.
Pero adentro del vivir hay otra cosa,
que jamás entenderemos
y sin embargo salta y juega
como un dios asombrado,
que nunca armonizará
con los sucesivos escándalos
de vivir sin vivir
y morir sin vivir.

(Roberto Juarroz)

 

Recueil: Quatorzième poésie verticale
Traduction: Sivia Baron Supervielle
Editions: José Corti

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Quand le feu t’éventre (Charles Juliet)

Posted by arbrealettres sur 25 juillet 2018




    
quand le feu
t’éventre

fait éclater
ton sous-sol

jette bas
tes murailles

quand des dalles
de granit
s’entrechoquent
dans ton sang

laisse couler
de tes lèvres
le poème
de pierre
où viendra
vivre
ton visage

crépiter
la flamme

se graver
l’irruption

(Charles Juliet)

 

Recueil: une joie secrète
Traduction:
Editions: Voix d’encre

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Me détacher d’elle ? (Alfred Kolleritsch)

Posted by arbrealettres sur 30 juin 2018



Illustration: Freydoon Rassouli  
    
Me détacher d’elle ? Pourtant le soir
rentra, dans l’irruption de la lumière
son nom!
Il se laissa distordre en bien
des noms. J’y jouai
tout en haïssant.

***

Abschied von ihr ? Doch der Abend
kam heim, im stürzenden Licht
ihr Name !
Er liess sich in vielen Namen
verdrehen. Ich spielte
und hasste zugleich.

(Alfred Kolleritsch)

 

Recueil: La conspiration des mots
Traduction: Françoise David-Schaumann et Joël Vincent
Editions: Atelier la Feugraie

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Mon corps craquait sous toi (Pierre Béarn)

Posted by arbrealettres sur 11 mars 2018



Mon corps craquait sous toi
et tu plongeais tes torches de feu dans ma nuit.
Entre ronces et chardons je devenais
la gaine de ton plaisir ;
cendres chaudes dans l’animal épanouissement.
L’exaltation de ta volupté
me peuplait et me dépeuplait.
Je ne suis plus qu’une brûlure.

Tu m’irradies
et je sens dans mon ventre une irruption d’étoiles !

(Pierre Béarn)

 

 

 

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