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Poésie

Posts Tagged ‘rattraper’

Je suis une étoile (Joy Harjo)

Posted by arbrealettres sur 3 avril 2024




    
Je suis une étoile tombant du ciel nocturne
J’ai besoin de toi pour me rattraper
Je suis un arc-en-ciel sortant d’un nuage noir
J’ai besoin de toi pour me voir

***

I am a star falling from the night sky
I need you to catch me
I am a rainbow lifting from a dark cloud
I need you to see me

(Joy Harjo)

Recueil: L’aube américaine
Traduction: de l’anglais (Etats Unis) par Héloïse Esquié
Editions: Globe

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UN BRAQUE (Jules Supervielle)

Posted by arbrealettres sur 4 octobre 2023




Illustration: Georges Braque
    
UN BRAQUE

Les poissons d’un si beau noir
Qu’ils remplacent tout espoir
Par plus de sérénité
Que n’en montre un bel été.

Noir intense, sa mémoire
Où tous les noirs viennent boire
Comme de fauves nocturnes
Tendant le cou vers l’obscur.

Et la vague de la nappe
Se soulève juste à point
Pour que toujours la rattrape
La blancheur qui la soutient.

Les objets sont sûrs d’eux-mêmes,
Rocs coupants devant la mer,
Et l’inconnu qui déferle
Les éclabousse de perles
Qui s’affermissent dans l’air.

Une forme ouvre la porte,
Se fige dans l’embrasure
Comme ferait une morte,
Mais elle se transfigure
En sagesse qui rassure

Et son calme grave et tendre
sa langue nous exhorte,
Nous fait le signe d’attendre,
Puis elle ferme la porte.

(Jules Supervielle)

Recueil: La Fable du monde suivi de Oublieuse mémoire
Editions: Gallimard

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Ce que j’ ai ressenti et je ne veux pas le dire (Mundhr Masri)

Posted by arbrealettres sur 19 janvier 2023




    
Ce que j’ ai ressenti et je ne veux pas le dire

Aujourd’hui
en allant au travail
j’ai fait un détour
par le quai du vieux port
j’ai vu dans la brume matinale
beaucoup de navires immobiles
je ne pensais à rien
mais ce que j’ai ressenti, et j’ai voulu le dire,
c’est que je ne suis pas
à bord de l’un d’eux.

J’ai observé les mouettes qui miroitaient
en poussant leurs cris
elles ont toujours signifié pour moi
des corbeaux blancs
mais ce que j’ai ressenti, et j’ai voulu le dire,
c’est que je ne suis pas
l’un d’eux.

Le temps m’a rattrapé
alors j’ai tourné le dos à la mer
indifférent à tout
beaucoup de gens m’ont dépassé
certains ont échangé un salut avec moi
mais ce que j’ai ressenti, et je ne veux pas le dire,
c’est que je ne suis pas
l’un d’eux…

***

(Mundhr Masri)

 

Recueil: Poésie Syrienne contemporaine
Traduction:de l’Arabe par Saleh Diab
Editions: Le Castor Astral

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LE JARDIN (Vangelis Kassos)

Posted by arbrealettres sur 2 Mai 2022




Illustration: ArbreaPhotos
    
LE JARDIN

la belle journée
s’est accroché la robe à la palissade
quelle étourdie elle a réussi à la déchirer
la robe blanche est en loques maintenant
les voyeurs ne vont pas tarder à la rattraper
ils vont se ruer les pauvres voyeurs
languides et visqueux
s’agripper au grillage
les pauvres voyeurs

(Vangelis Kassos)

 

Recueil: Cent poèmes
Traduction: Ioannis Dimitriadis
Editions: http://www.ainigma.net

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Le Temps (Martial Nouveau)

Posted by arbrealettres sur 1 décembre 2021



Illustration: Gilbert Garcin
    
Le Temps

On dit que le temps arrange tout, il suffit de l’attendre.
Mais qu’il est donc lent, le temps de l’attente.
L’attente de l’ami, qu’on a pas vu depuis longtemps.
L’attente des secours, quand survient l’accident.
L’attente de la guérison, quand s’éternise la souffrance.
L’attente du soleil, quand tarde le printemps.
L’attente de la compassion, quand dure l’indifférence.
L’attente du pardon, pour une lointaine offense.

Pourtant, il suffit qu’on l’oublie, le temps.
Quand arrive l’ami qu’on attendait depuis longtemps.
Que se réveillent les souvenirs d’antan.
Et qu’on déroule les histoires du bon vieux temps.
Il en profite pour nous échapper et galoper, le temps.
Et quand vient le temps d’aller voir où en est le temps,
On s’aperçoit qu’il a filé comme le vent, le temps.
Et qu’on ne peut le rattraper, le temps.

On a parfois envie de l’emprisonner dans les bons moments.
Mais lent ou rapide, on ne peut l’arrêter de passer, le temps.
Puis quand vient le temps de disposer de notre temps,
On voudrait arrêter, histoire de regarder passer le temps.
Mais on se lasse vite à ne faire que regarder passer le temps.
Alors on proposera à un ami, à qui il ne reste que peu de temps,
De l’accompagner jusqu’au bout de son temps.
On répondra à l’enfant qui nous demande un peu de temps,
Que pour lui, on a tout notre temps.
En espérant que, quand il ne nous restera que peu de temps,
Quelqu’un aura pour nous, un peu de temps.

(Martial Nouveau)

 

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L’inamour est l’enfer sans cieux (Edward Estlin Cummings)

Posted by arbrealettres sur 27 octobre 2020




    
l’inamour est l’enfer sans cieux:foyer sans flamme

des ombres connaissables(et qui rattrapent sur l’heure
chacun des riens que tout fantôme sans âme proclame
substance;et toute apparition sans coeur,bonheur)

les amants seuls vêtent la lumière. Vérité pleine

que matière ne recèle;que cerveau ne révèle
(plus que toute mort vivante et que toute vie
mourante) et qui jamais n’a été ni ne sera dite

seulement se chante—et les amants en sont le chant.

Ici(juste ici)est la liberté:toujours ici nul
après d’hiver ne vaut l’à présent printemps;
un jour d’avril transcende une année de novembre

(telle est l’éternité sans jusqu’à
où finir qu’à jamais j’ai deux fois vécu en un sourire)

je porte en moi ton coeur(le gardant tout au fond
de mon cœur)je ne suis jamais sans(aussi loin que
j’aille tu vas,ma chérie;et tout ce que font mes
mains est fait par toi,mon amour)

je ne crains
nul destin(car tu es mon,ma douce)ne désire nul
univers(car vraie tu es le mien,ma belle) et c’est
toi ce qu’une lune a toujours voulu dire c’est toi
ce que toujours chantera un soleil

tel est le grand secret dont pas un ne se doute
(racine de la racine et bouton de la fleur et ciel
du ciel d’un arbre appelé vie;qui pousse plus haut
que l’âme n’espère ou que l’esprit ne voile) et la
merveille qui fait tourner rond les étoiles

je porte en moi ton coeur(tout au fond de mon coeur)

(Edward Estlin Cummings)

 

Recueil: 95 poèmes
Traduction: Jacques Demarcq
Editions: Points

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LE TEMPS (Claude Roy)

Posted by arbrealettres sur 23 juin 2020



Illustration: Gilbert Garcin
    
LE TEMPS

Bête comme un moteur, bête comme un alexandrin,
le temps piétine et bouge et marche tout le temps.
Il ne peut pas rester en place, et son chemin
déroule son tricot de vers à soie bavant.

Le temps n’a pas le temps de perdre ses minutes,
ni de trouver jolies les choses ni les gens.
Il a toujours à faire, et s’il trébuche et bute
il repart tout de suite et rattrape le temps.

Mon échelle à monter aux grand’places d’aurore,
ma douce, ma songeuse, et mon seul passe-temps,
dans le chaud mélangé de notre double corps
nous n’entendons plus les gros sabots du temps.

Il n’est pourtant pas loin, bête comme un ruisseau,
il fait bouger le sang et le tic-tac du coeur,
les onze ou douze pieds de mes vers pas très beaux,
bête comme une rime qu’on saurait par coeur.

(Claude Roy)

 

Recueil: Claude Roy un poète
Traduction:
Editions: Gallimard Jeunesse

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Saturée de saveurs (Thomas Vinau)

Posted by arbrealettres sur 24 septembre 2019




    
Saturée de saveurs

Souvent j’ai l’impression
d’être un sachet de thé
dans l’eau tiède du monde
mais parfois me rattrape
la sensation violente
d’être une goutte d’eau
saturée de saveurs
dans une boîte de thé

(Thomas Vinau)

 

Recueil: Juste après la pluie
Traduction:
Editions: Alma

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Cet autre qui est moi (Claude Pujade-Renaud)

Posted by arbrealettres sur 15 décembre 2018



Illustration: René Magritte
    
Cet autre
qui est moi
s’est détaché
légèrement

Il marche
à quelques pas
là-devant

Si loin déjà
je ne saurai
le rattraper

Il lui arrive
aimablement
de se retourner

Je ne nous reconnais pas

(Claude Pujade-Renaud)

 

Recueil: Instants incertitudes
Traduction:
Editions: Le Cherche Midi

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Le bonheur est dans le pré (Paul Fort)

Posted by arbrealettres sur 9 juillet 2018



Le bonheur est dans le pré. Cours-y vite, cours-y vite.
Le bonheur est dans le pré. Cours-y vite. Il va filer.

Si tu veux le rattraper, cours-y vite, cours-y vite.
Si tu veux le rattraper, cours-y vite. Il va filer.

Dans l’ache et le serpolet, cours-y vite, cours-y vite.
Dans l’ache et le serpolet, cours-y vite. Il va filer.

Sur les cornes du bélier, cours-y vite, cours-y vite.
Sur les cornes du bélier, cours-y vite. Il va filer.

Sur le flot du sourcelet, cours-y vite, cours-y vite.
Sur le flot du sourcelet, cours-y vite. Il va filer.

De pommier en cerisier, cours-y vite, cours-y vite.
De pommier en cerisier, cours-y vite. Il va filer.

Saute par-dessus la haie, cours-y vite, cours-y vite.
Saute par-dessus la haie, cours-y vite. Il a filé !

(Paul Fort)


Illustration

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