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Poésie

Posts Tagged ‘se demander’

La colline que nous gravissons (Amanda Gorman)

Posted by arbrealettres sur 5 mars 2024




    
La colline que nous gravissons

[…]

Quand vient le jour, nous nous demandons :
Où trouver la lumière
Dans cette ombre qui sans fin s’étire ?
Le poids de nos pertes, une mer à franchir.

[…]

Quand vient le jour, nous sortons de l’ombre,
Ardents et vaillants.
L’aube nouvelle s’épanouit à mesure que nous la délivrons,
Car il y a toujours de la lumière,
Pourvu que nous ayons le courage de la voir paraître,
Pourvu que nous ayons le courage de l’être.

***
The hill we climb

[…]

When day comes, we ask ourselves:
Where can we find light
In this never-ending shade?
The loss we carry, a sea we must wade.

[…]

When day comes, we step out of the shade,
Aflame and unafraid.
The new dawn blooms as we free it,
For there is always light,
If only we’re brave enough to see it,
If only we’re brave enough to be it.

(Amanda Gorman)

Recueil: La colline que nous gravissons
Traduction: Lous and the Yakuza
Editions: Fayard

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LE TEMPS (Paul de Roux)

Posted by arbrealettres sur 24 septembre 2023




    
LE TEMPS

Parfois, s’arrêtant, ne bougeant plus,
seul dans un bureau, dans un immeuble vide
il se demande s’il n’est pas près de surprendre quelque chose
comme un bruit de tuyauterie du Temps
un grincement de vieille machinerie brinquebalante;
la bousculant, où tomberait-on ?

(Paul de Roux)

Recueil: Entrevoir suivi de Le front contre la vitre et de La halte obscure
Editions: Gallimard

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Après moi celui qui viendra (Cécile Sauvage)

Posted by arbrealettres sur 25 août 2023



Cécile Sauvage 
    
Après moi celui qui viendra
Sur la route grise et poudreuse
Verra l’empreinte de mon pas
Dont l’argile un instant se creuse,
Mais ne se demandera pas
Quelle peine appuya ce pas
Sur la route silencieuse.

(Cécile Sauvage)

Recueil: Oeuvres complètes
Editions: La Table Ronde

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Je me demande (Jacques Roubaud)

Posted by arbrealettres sur 24 juillet 2023


Magritte - The Great War

quand je pense
quand je pense
quand je pense à toi

je me demande
je me demande
si tu penses à moi

et si tu penses
si tu penses
si tu penses à moi

est-ce que tu te demandes
est-ce que tu te demandes
te demandes

si je pense à toi ?

(Jacques Roubaud)

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Je reviens d’un pays… (Bernard Dimey)

Posted by arbrealettres sur 3 juillet 2023



Illustration
    
Je reviens d’un pays…

Je reviens d’un pays plus désert que ma tête
Où les gens que j’ai vus ne me connaissaient pas.
J’étais sale, oscillant, velu comme une bête.
Des enfants me suivaient qui riaient sur mes pas,
Moi je n’entendais rien… Le soleil ni la pluie
Ne me concernaient plus… Je dormais tout debout,
Les pommiers, les iris étaient couleur de suie,
J’avançais sans espoir d’en jamais voir le bout.

Je ne connaissais rien de ces mornes contrées.
Dans ma nuit j’entendais sonner l’heure au clocher,
Des airs de limonaire, de kermesses passées,
Et je ne savais plus de quel côté pencher.
C’est affreux d’avancer sans savoir qu’on recule,
De laisser des lambeaux de soi-même partout,
De n’être en plein soleil qu’un point noir minuscule
Qui bientôt ne sera sans doute rien du tout.

Je sais que l’on m’avait retiré des organes
Mais je ne savais pas très bien lesquels… et c’est curieux
De voir en trois secondes un bouquet qui se fane,
Une rose du jour s’effeuiller sous vos yeux.
C’est une étrange affaire… alors on se demande
Où sont les vérités dans ces effondrements.
À quel Dieu présenter sa déroute en offrande ?
On dit «mourir d’amour », il faut savoir comment.

L’enfer est un pays sans fenêtre ni porte
Où la femme que j’aime est peinte en trompe-l’oeil.
Je sais bien, malgré tout, qu’il faudrait que j’en sorte.
Même si j’y parviens, qui m’attend sur le seuil ?
Je ne remonterai jamais sur ces manèges,
Mes beaux chevaux de bois ne seraient plus pareils.
Je voudrais devenir un bonhomme de neige
Et fondre doucement, en silence, au soleil…

(Bernard Dimey)

Recueil: Le milieu de la nuit
Editions: Christian Pirot

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Il a une voiture depuis peu (Georges Perros)

Posted by arbrealettres sur 10 Mai 2023




    
Il a une voiture depuis peu.
Il est en vacances.
Tous les matins
Il vient faire le ménage
De sa voiture.
Il rentre d’abord dedans
Sort le bras gauche
Met la main sur le toit
Et tapote avec trois doigts
En sifflotant
Il est content.
Puis il sort.

Il la regarde
En fait le tour
La caresse
Il l’aime.
Il lui flanquerait une petite panne
Avec plaisir,
Rien que pour pouvoir lui traficoter
Le ventre
Et se servir des outils tout neufs
Dans le bel étui.
On se demande où est sa femme
Pendant ce temps-là.

(Georges Perros)

Recueil: Anthologie de la poésie française du XXè siècle
Editions: Gallimard

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Pourtant j’ai souvent la sensation (Edvard Munch)

Posted by arbrealettres sur 31 mars 2023



Illustration: Edvard Munch
    
Pourtant j’ai souvent
la sensation que je dois
éprouver cette angoisse —
elle m’est nécessaire
— et que je ne pourrais pas
vivre sans — Souvent
je ressens aussi que la maladie
a été nécessaire — Dans
les périodes sans angoisse
et sans maladie je me suis
senti comme un bateau
voguant par vent violent —
mais sans gouvernail
— et me suis demandé vers où?
où vais-je échouer ?

(Edvard Munch)

Recueil: Mots de Munch
Traduction: Hélène Hervieu
Editions: de la réunion des grands musées nationaux – Grand Palais

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Mon nez vieillit (Richard Brautigan)

Posted by arbrealettres sur 1 janvier 2023



    
Mon nez vieillit

Ouaip.
Septembre, long regard paresseux
dans le miroir,
mais dis donc c’est vrai :

j’ai 31 ans
et mon nez
vieillit.

Ça commence à
un pouce
sous l’arête
et retombe gériatriquement
d’un pouce environ
avant de faire
halte.

Par chance, le reste
du nez est comparativement
jeune.

Je me demande si les filles
voudront de moi avec mon
vieux nez.

je les entends d’ici
les garces sans coeur !

« Il est adorable
mais son nez
est vieux. »

***

My Nose Is Growing Old

Yup.
A long lazy September look
in the mirror
says it’s true:

I’m 31
and my nose is growing
old.

It starts about
an inch
below the bridge
and strolls geriatrically
down
for another inch or so:
stopping.

Fortunately, the rest
of the nose is comparatively
young.

I wonder if girls
will want me with an
old nose.

I can hear them now
the heartless bitches!

« He’s cute
but his nose
is old ».

(Richard Brautigan)

 

Recueil: C’est tout ce que j’ai à déclarer Oeuvres poétiques complètes
Traduction: Thierry Beauchamp, Frédéric Lasaygues et Nicolas Richard
Editions: Le Castor Astral

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(Le vieil homme et le chaton Claude Roy)

Posted by arbrealettres sur 25 août 2022



Illustration: Frédéric Rébéna
    
Le vieil homme et le chaton

Les volets sont ouverts sur le soleil de mai
Dans le lit le vieil homme se demande s’il vit
encore Il a du mal à faire entrer un peu d’air
dans ses poumons Il s’y prend doucement
pour respirer très lentement
avec une légère douleur
quand un filet d’air se glisse dans les bronches
Au pied du lit où le vieil homme attend la mort
un enfant chat joue avec la pantoufle du vieux
C’est un chaton tout noir le pelage tout doux
Le vieil homme ferme les yeux Le soleil l’éblouit
L’enfant chat regarde le soleil les yeux dans les yeux
Il est content de tout d’être noir et fourrure
Il saute comme une puce attaque la pantoufle
en combat singulier Il en sera vainqueur
Le vieil homme lui est sûr qu’il va perdre
Il ouvre les yeux Il regarde le chat
Le chat regarde l’homme et miaule doucement
Il ne sait pas très bien ce qu’il voudrait dire
mais il sent que le vieux a très bien tout compris

et la mort un instant s’arrête de mourir

(Claude Roy)

 

Recueil: Poèmes de Claude Roy
Traduction:
Editions : Bayard Jeunesse

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Les quatre-heures (Charles-Ferdinand Ramuz)

Posted by arbrealettres sur 3 mars 2022




Illustration: Daniel Ridgway
    
Les quatre-heures

A quatre heures, sous un arbre, on boit le café.

Une petite fille bien sage
l’a apporté dans un panier
avec le pain et le fromage;
il n’est ni trop froid ni trop chaud
il est tout juste comme il faut.

Les hommes et les femmes sont assis en rond,
chacun sa tasse à la main; ils parlent
du temps qu’il fait, de la moisson
qui va venir, et des ouvrages
qui changent selon les saisons,
mais sont toujours aussi pressants,
si bien qu’on n’a jamais le temps…

Le temps de quoi?… on se demande.

Un oiseau bouge dans les branches, les
sauterelles craquent dans le foin…
Oui, le temps de quoi?… Et on se regarde.

Mais, dès qu’on a vidé sa tasse, dès
qu’on a mangé à sa faim: «Est-ce
qu’on y va?… » Vous voyez bien: on
n’a jamais le temps de rien.

(Charles-Ferdinand Ramuz)

Recueil: Le Petit Village
Traduction:
Editions: Héros-Limite

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