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Poésie

Posts Tagged ‘se risquer’

Dialogue entre moi et moi (Kiki Dimoula)

Posted by arbrealettres sur 21 février 2024




    
Dialogue entre moi et moi

Je t’ai dit:
– J’ai fléchi
Et tu as dit:
– Ne t’en fais pas.
Déçois-toi tranquillement.
Accepte sereinement
la pendule arrêtée.
Désespère-toi raisonnablement
de ce qu’elle soit pourtant remontée
de ce que ton temps à toi fonctionne ainsi.
Et si soudain
l’un des aiguilles vient à bouger,
ne te risque pas à te réjouir.
Ce mouvement ne sera pas du temps.
Mais de certains esprits le faux témoignage.
Descends sérieusement,
détrône-toi sobrement
passant par tes mille fenêtres.
Pour un peut-être tu les as ouvertes.
Et puis oublie-toi joyeusement.
Ce que tu avais à dire,
sur l’automne, les chants du cygne,
les souvenirs, canaux des amours,
les heures qui s’entretuent,
la fiabilité des statues,
ce que tu avais à dire
sur ceux qui peu à peu fléchissent,
tu l’as dit.

(Kiki Dimoula)

Recueil: Le Peu du monde suivi de Je te salue Jamais
Traduction: du grec par Michel Volkovitch
Editions: Gallimard

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On est encore pour un temps (Philippe Jaccottet)

Posted by arbrealettres sur 20 avril 2023




    
On est encore pour un temps dans le cocon de la lumière.

Quand il se défera (lentement ou d’un seul coup),
aura-t-on pu au moins former les ailes
du paon de nuit, couvertes d’yeux,
pour se risquer dans ce noir et dans ce froid?

(Philippe Jaccottet)

Recueil: On ne vit pas longtemps comme les oiseaux
Editions: Gallimard

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IL SUFFIT (Jean-Marie Sourgens)

Posted by arbrealettres sur 11 avril 2023



Illustration: Malel
    
IL SUFFIT

Qu’un visage inconnu s’entrouvre dans la rue
Qu’un regard inconnu se jette dans mes yeux
Qu’une bouche inconnue s’aiguise d’un sourire
qu’une voix inconnue se vête d’amitié
qu’une main inconnue serre ma main très fort
qu’une soleil inconnu darde sur moi ses dents
qu’une une vague inconnue se risque sur mes plages
qu’une chair inconnue me prenne dans ses rêts

j’oublie ma solitude et ses portes murées
j’oublie que mon destin n’a pas d’identité
je ne suis qu’un bourgeon sous la langue des sèves
gonflé d’azur et futur de sa fleur
qu’un cocon déchiré par un battement d’ailes

Les cloisons de mon corps s’abattent en chantant
mon coeur fait le plongeon de la mort à la vie.

(Jean-Marie Sourgens)

Recueil: Le livre d’or de la poésie française contemporaine
Editions: Marabout

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Les yeux des morts (Jany Cotteron)

Posted by arbrealettres sur 13 mars 2023




    
Les yeux des morts

Les yeux des morts ne s’éteignent jamais

Ils furent de chair et de sang
de colère et d’amour
Ils sont maintenant de cendres et de poussière

Dans les yeux des morts une lumière
éclaire nos versants sombres
l’espoir émietté des égarés du temps

Contre nos parts manquantes
nos pensées d’ombre
nos lèvres brûlées de mots retenus
ils sont nos doubles lumineux

Ils tracent des sentiers dans nos labyrinthes
y allument des feux

pour que nos vies se risquent
hors des frontières de la peur

(Jany Cotteron)

Recueil: Frontières Petit atlas poétique
Editions: Bruno Doucey

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Toute poésie est suspension (Gérard Bocholer)

Posted by arbrealettres sur 6 octobre 2021




Illustration: ArbreaPhotos
    
Toute poésie
est suspension
(Henri Brémond)

Au-dessus de l’abîme de l’indicible, le poème va s’avancer,
se risquer au-dessus du vide.
S’il parle vrai,
ses lecteurs seront eux aussi suspendus durant un instant,
sur un seuil d’éternité.

Instant arraché à la durée, gagné sur l’inéluctable usure,
la perte, la destruction définitive.

(Gérard Bocholer)

 

Recueil: Le poème Exercice spirituel
Traduction:
Editions: Ad Solem

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UNE LONGUEUR D’AVANCE (André Welter)

Posted by arbrealettres sur 9 septembre 2021



Illustration
    
UNE LONGUEUR D’AVANCE
à Gérard Chaliand

La poésie se joue du temps.
Elle parle et sait de très loin.
Dans l’univers d’avant-naître.
Dans l’instant d’outre-venue.
Dans le réel plus vaste.

Elle est lueur de mise en abîme.
Feu souverain hors des flammes.
Trace qui préfigure.
Elle est nuit très pure.
Aube fraîche.
Grand midi.

Rythme et visée
de toute vie qui se risque.
La poésie est sursaut d’adolescence à jamais.
Désir sans frein.

Vitesse.
Vertige.
Frénésie de départ.

Comme un galop dans le sang.
Comme un soleil à la bouche.
Et l’infini qui se donne en partage…

[…]

(André Welter)

 

Recueil: La vie en dansant – Au cabaret de l’éphémère – Avec un peu plus de ciel
Traduction:
Editions: Gallimard

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L’ONDÉE… (Alain Fournier)

Posted by arbrealettres sur 30 novembre 2020



Illustration
    
L’ONDÉE…

« Une touffe de fleurs où trembleraient des larmes. »
(SAMAIN).

L’ondée a fait rentrer les enfants en déroute,
La nuit vient lente et fraîche au silence des routes,
Et mon cœur au jardin s’épanche goutte à goutte

Si discret, maintenant, et si pur… qu’à l’aimer
On pourrait se risquer – Oh ! Belle qui viendrez,
Vous ouvrirez la grille un soir mouillé de mai.

Timidement, avec des doigts qui se méfient,
Et qui tremblent… un peu, vous ouvrirez, ravie
D’amour et de fraîcheur et de frayeur… un peu.

Les lilas aux barreaux sont encore lourds de pluie…
Qui sait si les lilas, inclinés, lourds d’aveux,
Vont pas pleurer sur vos cheveux !…

Vous irez, doucement, tout le long des bordures,
Chercher des fleurs pour vous les mettre à la ceinture
Mes pensées frissonnantes pour en faire un bouquet

Gardez-vous bien, surtout, de passer aux sentiers
Où les herbes, ce soir, ont d’étranges allures,
Où les herbes sont folles et meurent de rêver !…
Si vous alliez mouiller vos petits pieds !…

Les rondes folles se sont tues,
Les herbes folles vont dormir.
L’allée embaume à en mourir…
Tu peux venir, ma bienvenue !

Tout le soir, sagement, tu descendras l’allée
Tiède d’amour, de pétales et de rosée.

Tu viendras t’accouder au ruisseau de mon cœur
Y délier ta cueillette, y délier fleur à fleur
La candeur des jasmins et l’orgueil des pensées.

Et tout le soir, dans l’ombre humide et parfumée,
Débordant de printemps, de pluie et de bonheur,
Les larges eaux de paix, les eaux fleurdelisées
Rouleront vers la Nuit des branches et des fleurs…

(Alain Fournier)

 

Recueil: Miracles
Traduction:
Editions:

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FILLES DE NEW YORK (Avrom Reisen)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2019



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FILLES DE NEW YORK

Les filles dans les rues
Ondulent et se plient.
Chacune est violon
Leurs gestes – mélodie.
Dans la beauté du soir
Où que ton pas se risque,
Tu vois les violons
Tu n’entends que musique.
Ô violons aimés
Dans la ville si vaste,
Dès lors où que tu sois
Tu es dans un orchestre.

(Avrom Reisen)

 

Recueil: Anthologie de la poésie yiddish Le miroir d’un peuple
Traduction:
Editions: Gallimard

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Par tous les moyens (Rabindranath Tagore)

Posted by arbrealettres sur 22 avril 2019




    
Par tous les moyens, ils essaient de me garder à l’abri,
ceux qui m’aiment dans ce monde.
Mais il ne va pas ainsi avec ton amour qui est plus grand que le leur,
et tu me laisses libre.

De crainte que je ne les oublie, ils ne se risquent jamais à me laisser seul.
Mais jour après jour passe, et toi tu ne te montres pas.

Bien que je ne te nomme pas dans mes prières,
bien que je ne te retienne pas dans mon coeur,
ton amour pour moi attend encore mon amour.

(Rabindranath Tagore)

 

Recueil: L’offrande lyrique
Traduction: André Gide
Editions: Gallimard

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ROYAUME DES OMBRES (Hans Magnus Enzensberger)

Posted by arbrealettres sur 3 avril 2018




    
ROYAUME DES OMBRES

I
il y a une place ici je la vois
une place libre
ici à l’ombre

II
cette ombre
n’est pas à vendre

III
peut-être la mer aussi
projette-t-elle une ombre
peut-être aussi le temps

IV
les guerres des ombres
sont jeux
aucune ombre à une autre
ne fait de l’ombre

V
ombre
est dur à tuer

VI
pour un court instant
je me risque hors de mon ombre
pour un court instant

VII
qui veut voir le jour
tel qu’il est
doit s’enfoncer
dans l’ombre

VIII
ombre
plus claire que le soleil
fraîche ombre de la liberté

IX
mon ombre à moi disparaît
complètement dans l’ombre

X
à l’ombre
il y a toujours une place libre.

(Hans Magnus Enzensberger)

 

Recueil: Mausolée
Traduction: Maurice Regnaut et Roger Pillaudin
Editions: Gallimard

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